Theo Lawrence et sa Sauce Piquante des années 60

Theo Lawrence s’est désormais lancé dans une carrière solo mais toujours tout aussi rétro. Initialement connu grâce à son groupe Theo Lawrence & the Hearts, le jeune franco-canadien avait alors sorti un premier album intitulé Homemade Lemonade, teinté d’influences blues, soul et rock. Dans cet album solo, Sauce Piquante, Theo Lawrence revient plus rétro que jamais et nous emmène tout droit au cœur d’une ambiance du Texas des années 60 avec un album country audacieux.

Si l’on en croit cette couverture d’album, affalé nonchalamment sur sa chaise et à gratter sa guitare sèche, Theo Lawrence semble paisible et se ficher d’aller à contre courant en proposant une musique tout droit sortie des vinyles poussiéreux de nos grands-parents. Pourtant, à l’heure de la productivité et de la rentabilité coûte que coûte, Theo Lawrence s’abroge complètement des règles et n’en fait qu’à sa tête. Ainsi, il nous offre Sauce Piquante, une pépite country de douze morceaux.  

L’album du franco-canadien apparaît comme un mélange subtile de plusieurs styles avec toujours cette country-folk prédominante à chaque morceau. On pourrait presque diviser Sauce Piquante en deux personnalités. L’une plutôt blues et rock avec des titres dignes des bandes-sons lancées au hasard sur un jukebox au fond d’un diner américain au carrelage noir et blanc et aux banquettes et tables colorées. C’est en tout cas l’ambiance dans laquelle nous plongent The Worst In Me, premier titre de cet album, ou encore Adelita. Si l’on entend bien les vieilles influences afro-américaines comme celle de Robert Johnson, on se surprend à retrouver un titre en français perdu au milieu de ce voyage en plein cœur du Texas, Petit Cœur, qui ne sont pas sans nous rappeler des Eddy Mitchell voire même Johnny Hallyday.

Le revers de la Sauce Piquante, c’est ce deuxième temps de dégustation où l’on croit s’en sortir indemne mais où le côté pimenté nous frappe finalement les papilles et nous pique le nez en nous faisant monter les larmes aux yeux. Ici, la sensation est la même lorsque le côté mélancolique de l’album frappe. On est pris aux tripes et l’émotion nous gagne à l’écoute des titres où seule la country-folk règne. Une recette efficace que Theo Lawrence a sans doute emprunté à Bob Dylan ou encore Jackson C. Frank, à savoir : une guitare acoustique et quelques notes délicates qui courent le long des doigts de l’artiste, le tout survolé par des paroles à la nostalgie déchirante. Judy Doesn’t Live There Anymore ou le dernier morceau de l’album, They Don’t Like Me (Where I’m From) nous font l’effet d’un coup de poing dans le ventre. Frappé par la mélancolie, on se sent comme Holden Caulfield, héros de L’attrape-cœurs de J.D. Salinger, où la solitude et le mal-être semblent être nos seuls compagnons de route.

Sauce Piquante nous offre ainsi un bon dans les années 60, avec un album que l’on s’imagine écouter sur une rocking-chair avec le crépitement du bois dans un feu de cheminée mélangés à ceux du vinyle qui tournerait sur notre platine. Une immersion au sein du passé, au temps où la musique faisait ce qu’elle a de meilleur. Theo Lawrence réussit ce qu’on pourrait qualifier d’impossible en nous faisant complètement oublier le présent. Il saura pourtant nous ramener à la bonne époque grâce à son passage sur scène à La Maroquinerie le 28 janvier prochain.