Pour la sortie de son troisième album, La course folle, Tim Dup nous a accordé une interview pleine de soleil importé tout droit de Toscane !
La Face B : Où as-tu puisé l’inspiration et la détermination de mener à bien ce projet d’album, aussi solaire soit-il, dans une période qui a eu tendance à nous emmener du côté sombre de nos pensées ?
Tim Dup : Cette inspiration est venue de plusieurs temps et de plusieurs endroits. Étonnamment, une partie de cette inspiration est venue lors de la phase du premier confinement dans laquelle j’ai été plongé et dont j’ai subi cette immobilité qui nous était imposée. J’ai sorti mon deuxième disque en janvier et j’avais pour objectif de partir en tournée, de faire vivre cet album sur scène. Mais il y a eu comme un changement de planning !
Alors une fois confiné, je me suis mis à écrire, dans un environnement paisible.
Par exemple, Osaka représente un peu cette idée que l’univers est une aventure. J’ai écrit cette chanson dans une phase de béatitude, en retrouvant le silence et le temps pour l’écriture.
J’ai eu la chance d’être confiné dans un vignoble avec une bande de copains, c’est cette ivresse et cette gourmandise que j’ai pu vivre avec eux qui se retrouve beaucoup sur le disque. J’ai vécu cette situation comme un petit prince finalement, j’ai été très chanceux.
Du coup j’ai continué à écrire des chansons, les unes après les autres et quand j’en ai eu 7, puis 8… Je me suis dit “ Allez, faisons un disque !”
Cet album n’était pas du tout prévu puisque j’avais comme projet de faire une tournée de deux ans et de me poser un peu ensuite. Pour être honnête, je voulais faire une pause et me construire un peu autrement en partant en voyage, en rencontrant des gens et en faisant d’autres jobs.
Le temps humain et cette dernière année particulièrement nous montrent que l’on n’est pas toujours acteur de ce temps. Donc les plans changent sans cesse ! D’où l’arrivée surprise de ce troisième album.
J’ai vécu le premier confinement de manière sereine et paisible. J’avais du temps, du silence et l’occasion de prendre un certain recul sur les choses. Ça me changeait vraiment de ce quotidien où l’on doit toujours courir et où l’on a peu le temps de prendre la mesure de ce que sont les choses. La plupart des chansons sont nées en parallèle de ces temps-là.
Sur l’album, je parle beaucoup de l’Italie, de cette mélancolie des souvenirs et de la gourmandise à l’italienne qui représente un certain hédonisme. C’est un disque qui parle de plaisir, et du plaisir que l’on ressent à faire plaisir. Je pensais souvent à cette phrase de Camus dans Noces à Tipasa : “Hors du soleil, des baisers et des parfums sauvages, tout nous paraît futile.”
J’avais aussi en tête une certaine cinématographie, une idée de passer de la musique à l’image. Car le visuel nous emmène dans des endroits et nous apporte des sensations différentes.
Je pense à Aurélie qui a une voix très cinétique, une voix qui t’emmène dans des endroits assez “nouvelle vague”.
J’étais aussi trop content de m’associer à Anaïs (Demoustier ndlr) qui n’est pas chanteuse et qui amène tellement d’autres choses à l’album. C’est une sorte de poésie visuelle.
LFB : Faisons un petit tour d’horizon des thèmes que tu abordes dans ce nouvel album, je pensais résumer La course folle en un mot : amour. Qu’en dis-tu ?
Tim Dup : Eh bien j’en pense que c’est juste ! Je ne pense pas que c’est le mot que j’aurais mis sur ce disque de moi-même par contre. Instinctivement, j’aurais mis des mots plus superficiels, en gardant cette idée de légèreté. Mais c’est vrai que l’on pense au bel amour, à un amour fonctionnel qui est souvent léger car on se pose peu de questions sur sa force. Quand c’est puissant, c’est léger et quand c’est léger, c’est puissant.
J’aurais peut-être dit “soleil”, mais ça n’aurait pas été vrai car le disque a aussi sa part d’ombre.
LFB : En parlant des thèmes, j’aimerais que l’on parle du titre Les cinquantièmes hurlants. C’est un sujet très spécifique, peux-tu nous expliquer ce que sont les cinquantièmes hurlants et nous dire d’où te viennent ces connaissances ?
Tim Dup : En termes de connaissances, je dirais que je ne m’y connais pas plus que ça en lignes de méridiens, de géographie et d’hémisphères… Les quarantièmes rugissants et les cinquantièmes hurlants sont des zones géographiques folles et violentes. C’est une zone en mer peu explorée du fait de ces événements.
Cet espace de violence et cette idée de bout du monde m’ont donné comme une idée. C’est de ça qu’est née cette chanson d’amour, ce texte dans lequel je t’emmène jusqu’au bout du monde et où même la violence la plus extrême et l’environnement climatique le plus hostile seront toujours mieux que notre petite vie mince cachés dans nos mégapoles.
Il y a un petit côté fin du monde. Tout s’écroule autour de nous mais je t’emmène dans un endroit qui s’écroule naturellement.
LFB : Quatre des titres sur l’album portent des noms dans des langues étrangères. Est-ce un désir de découvrir ou de faire découvrir de nouvelles cultures à ton public ? Et toi-même ?
Tim Dup : A la fois, c’est un peu pour moi parce que je rêvais à ces horizons-là. Je rêvais de l’Italie et des plaisirs de la dolce vita !
Mais évidemment, tu as envie d’emmener les autres dans ces endroits.
Pour l’Italie, ça m’est venu comme une image avant d’être un concept ou une idée générale. Je ne voulais pas faire un disque italien, juste trouver la bonne façon d’imager cette légèreté, le soleil et tout l’amour autour.
Globalement, j’aime beaucoup les chansons qui planent sur un lieu. Je trouve que ça te transporte plus facilement.
Osaka est le titre qui clôture l’album. Je voulais y parler de la poésie du voyage et de la paix. Le point d’orgue de cette chanson c’est cet hymne à la béatitude et son côté aussi léger que profond, un peu comme une vieille personne qui raconterait à son petit enfant ce qu’est la vie.
LFB : Et d’où te viennent ces inspirations sur des pays bien définis ? S’agit-il de pays que tu as déjà visités ?
Tim Dup : Oui exactement ! L’Italie, c’est toute une mélancolie qui vient de souvenirs d’enfance, car je suis beaucoup parti en vacances en Italie et en Corse, où mes grand-parents avaient une maison. Je connaissais donc cette proximité latine entre les deux lieux et tout l’art de vivre qu’est la sieste !
J’ai aussi beaucoup voyagé avec des copains, et seul, en Toscane et à Milan notamment. Je trouve que l’Italie est un pays très imagé, où l’esthétique de Fellini est très présente, comme dans l’album !
Pour Osaka, mes idées viennent d’un road trip que j’ai pu faire il y a deux ans. Je suis parti pendant un mois et je suis tombé fou amoureux du Japon.
LFB : Dans ce nouvel album, tu collabores avec trois femmes. Tu accordes désormais tes mélodies et tes textes avec des voix. Pourquoi les leurs spécifiquement ?
Tim Dup : Écoute, je dirais que c’était une question de naturel, d’évidence et de rencontres. Rien n’était calculé, ce sont des duos qui se sont formés très naturellement.
J’ai écrit le texte et la mélodie d’Osaka pendant le premier confinement. J’ai pensé à une super amie à moi, Saâne, qui commence dans la musique. Du coup, je lui ai envoyé la mélodie principale du refrain. Refrain qui a d’ailleurs été traduit en japonais par une copine de copine !
Avec Aurélie Saada, c’était un vrai hasard ! J’avais plein d’idées pour les chœurs de Montecalvario. Je lui ai proposé la chanson, elle lui a plu et on s’est retrouvés en studio pour l’enregistrer ! Avant ça, on ne se connaissait qu’un peu mais du coup, c’est une jolie histoire.
L’histoire du duo avec Anaïs est tout aussi singulière. Après mon duo avec Synapson à l’automne dernier, je me suis déconnecté des réseaux sociaux. Quand je me suis reconnecté quelques mois après, j’ai vu que j’avais un message d’Anaïs Demoustier sur Instagram. Sauf que quand je lui ai répondu, c’est elle qui faisait une pause dans les réseaux ! On a beaucoup discuté et elle a fini par me confier qu’elle faisait un peu de chanson. J’ai composé L’avventura en janvier, terminé le disque en mars et j’ai pensé à Anaïs pour ce duo. Je lui ai envoyé tout cela et on s’est retrouvés un soir autour d’un piano avec une bière pour mettre nos voix en musique, c’était la naissance d’un trop beau duo !
J’avais tellement envie de faire de la musique à plusieurs après tous ces mois de vie à distance ! C’est aussi pour ça que j’ai voulu faire un disque autour de cette thématique.
LFB : La course folle est ton troisième album. Quelles évolutions as-tu pu observer entre tes deux premiers opus et celui-ci ?
Tim Dup : Je dirais que La course folle est fondamentalement différent de mes deux premiers albums, même s’il en est aussi la prolongation.
Mes disques sont très liés et j’aime cette idée de produire quelque chose de très articulé. La course folle est en fait la réponse à Qu’en restera-t-il ?.
Les thématiques sont différentes aussi ! Le nouveau disque parle plutôt du lâcher prise. Mon travail n’en est pas moins sérieux et je reste très exigeant, mais j’ai aussi appris à lâcher prise avec ma voix. J’ai un peu mis de côté l’aspect hip hop de ma musique pour tendre vers des refrains qui se chantent et dont les notes sont plus haut perchées.
Ce nouveau disque est singulier car j’y trouve une certaine forme de paix, de lumière et de soleil.
La musique, c’est énormément de travail. On sous-estime souvent les données comme la résilience et le travail au long terme que les textes nécessitent. J’ai cette sensation qu’à chaque nouveau lancement, on recommence tout depuis le début. C’est un métier d’artisan, rien n’est jamais acquis.
En tous cas, c’est incroyable de ressentir la sensation de s’être fait plaisir tout en travaillant !
Le travail plus sérieux et rigoureux que j’ai produit pour mes deux premiers disques a finalement mené à cette ambiance un peu plus “soleil et apéro” !
LFB : Pourquoi avoir choisi de dévoiler Juste pour te plaire, comme prologue de l’album ?
Tim Dup : C’est quand même le morceau le plus pop du disque ! Et d’ailleurs, le plus pop que je n’ai jamais fait. J’ai voulu contraster d’emblée, montrer tout de suite autre chose et me défaire d’une étiquette d’auteur-compositeur assez sérieux et cérébral que l’on me collait.
Avec ce morceau, je trouve que l’on retient autre chose : une atmosphère, un format et un refrain propres à ce nouvel album.
C’était étonnant de réaliser que Juste pour te plaire est mon premier morceau pop alors que c’est le genre musical d’où je viens ! La pop m’a construit et je me suis dit “Mais tu es un chanteur, il faut t’assumer !”
Je voulais montrer que je ne fais pas que des textes à propos des tenants et des aboutissants de je ne sais trop quoi. Cette chanson, c’est toute une forme de spontanéité et un challenge très cool en a découlé ! J’ai demandé aux gens de m’envoyer leurs meilleures chorés et moments de folie sur le morceau, alors que l’on était encore en confinement. Là aussi c’était tout un contraste !
LFB : Quelles sont tes prochaines actualités niveau scène ?
Tim Dup : La tournée reprend en septembre. Je ferai la Cigale à Paris le 4 novembre et je passerai aussi par le Grand Mix à Tourcoing le 16 décembre !