B.F.F ; Best Friends Forever. Dans ce format, on interroge le rapport amical et l’influence qu’il peut avoir sur la musique des artistes. Pour ce cinquième entretien, on a eu le plaisir de discuter musique et amitié avec Tomasi et Trente.
Tomasi : J’ai une petite idée de la première question (rires)
La Face B : Comment ça va ? Il a l’habitude.
Trente : C’est toi la star mon chéri.
Tomasi : Non, non, là c’est une interview Trente et Tomasi.
Trente : Ah bon ? Ah bah ça va super. Non, ça va très bien. On est au Biches Festival.
Tomasi : Waouh, waouh, waouh, waouh. Non, moi ça va super. On a pu faire des balances alors qu’on ne devait pas en avoir. On est trop contents d’être là. Malheureusement il pleut pour l’instant. Mais on espère que ça se dégage pendant le concert. Et je suis content de faire une interview avec Hugo.
Trente : Depuis le temps.
Tomasi : Depuis le temps qu’on roule ensemble…
LFB : Vous avez commencé plus ou moins la musique ensemble, vous avez des carrières qui existent en parallèle…
Tomasi : Alors moi, j’ai eu 5-6 ans de carrière avant de rencontrer Hugo (rires).
Trente : C’est vrai.
LFB : Non mais Du whisky dans la boîte à gants, tout le monde l’a oublié.
Tomasi : Exactement. N’hésite pas à mettre un lien en bas de l’article. Tu verras bien que ça pète.
Trente : Un jour on supprime cette chanson de YouTube.
Tomasi : Mais non, j’assume.
LFB : Non mais plus sérieusement, ça fait quoi de vivre dans un milieu qui n’est pas toujours facile avec son meilleur pote à côté de soi ?
Trente : Est-ce que le milieu a fait du mal à notre amitié ?
Tomasi : Non, à notre amitié non. En fait, ça a été d’abord parce qu’on n’avait pas le choix. Globalement on a grandi ensemble, on a été au lycée ensemble. On a commencé à faire un groupe qui s’appelait Clairvoyant. On a sorti un morceau ? Deux morceaux ?
Trente : On a sorti deux morceaux.
Tomasi : Trois morceaux. Encore, Cadence et Tomasi.
Trente : Exactement. Donc une longue carrière.
Tomasi : Et en fait c’est toujours agréable de faire ça entre copains parce qu’on se connait par cœur. Si on s’est supporté 15 ans, c’est qu’il y a une petite raison ? Ça va faire 15 ans…
Trente : En gros, ça ne fait pas partie de notre histoire à tous les deux. Ce qu’il y a autour, c’est pas trop important.
Tomasi : En vrai, on a pu apprendre ensemble le milieu de la musique, comment ça marchait, et se partager un peu de tips.
Trente : Par des portes super saines en plus.
LFB : C’est que vous avez la chance d’avoir quelqu’un qui peut vous dire quand vous faites de la merde…
Tomasi : Ça, c’est sûr.
Trente : Ça, c’est fréquent.
Tomasi : Ce qui est bien, c’est qu’on a pris la grosse tête en même temps. On ne s’en rend pas compte. (rires)
LFB : Puisque c’est une interview BFF, ça veut dire quoi BFF pour vous ?
Tomasi : Best friends forever, comme pour tout le monde. (rires)
LFB : Non, mais tu vois ce que je veux dire.
Tomasi : En vrai, on est presque plus que des meilleurs potes, on est un peu des frères. Ca fait 15 ans qu’on se connaît, qu’on fait de la musique. On a presque un rapport familial. On passe beaucoup de temps ensemble dans le professionnel. Et puis, on se voit. C’est comme la famille en fait.
Trente : Il y a un truc de télépathie bizarre avec Greg. Parce qu’en soi, on ne se voit pas tout le temps dans la vie. Mais il fait partie de ces gens, si je ne le vois pas pendant deux semaines, rien ne change. La question ne se pose même pas de est-ce qu’on va se revoir à un moment. C’est écrit que c’est pour toujours.
Tomasi : On peut ne pas se voir pendant six mois, même si ça n’est jamais arrivé. Et reprendre les choses là où on les a laissées.
LFB : Et justement, quelle influence a l’autre sur vos projets respectifs ?
Trente : C’est une bonne question. Greg m’a encouragé direct quand j’ai commencé. Il composait des chansons bien avant. On se soutient beaucoup. On écoute beaucoup la musique des uns des autres quand elle est en cours d’écriture. Et surtout, on est très honnête l’un envers l’autre. C’est-à-dire qu’on ne se caresse pas dans le sens du poil à chaque fois. On se dit vraiment si c’est moins bien. Il est franc du collier, ce garçon.
Tomasi : Ce qui est marrant, c’est qu’on n’a pas forcément la même sensibilité. Et ça, ça apporte quelque chose d’assez cool. Ça donne un regard vraiment extérieur, même si on se connaît par cœur. On sait quand dire ça, ce n’était pas pour moi, mais c’est chouette et ça te ressemble. C’est sincère. Je pense qu’il y a un vrai truc de sincérité dans le travail qu’on a ensemble. En vrai, Hugo a commencé par FAUVE en faisant de la vidéo dedans et c’était un projet hyper sain avec un truc très familial.
Trente : C’est pour ça que je parlais de porte-scène.
Tomasi : En vrai, ça nous a donné un modèle d’essayer de dire toujours un peu la vérité. De se tirer vers le haut. Et que par nos chansons et par tout ça, on puisse raconter des choses qui soient intéressantes et qui nous ressemblent. Il ne faut pas mentir.
LFB : Est-ce que vous avez un souvenir de la première fois que vous avez entendu le projet de l’autre ?
Tomasi : Je pense que c’est plus toi. C’est quoi ta première chanson ?
Trente : Dans Clairvoyant, il y avait des chansons mais genre des premières chansons de nos projets. En soi, les premières chansons de Greg, j’ai entendu les classiques dont on parlait. Mais les chansons qu’il a écrites dans Clairvoyant aussi. Mais en tant que Tomasi c’est quoi la première chanson de Tomasi ? Vraiment.
Tomasi : Je pense que c’est Petit frère de haine. En vrai, la première chanson de Tomasi c’est un peu Tomasi de Clairvoyant. C’était un peu ça. C’était un peu le truc où d’un coup, je me mettais à parler à être un peu plus dans un truc… Rap. C’est ouf que genre… Moi, je lui en veux d’un truc, c’est qu’il ne m’ait jamais dit que je ne faisais pas du rap.
Trente : C’est vrai ?
Tomasi : Non, c’est pas vrai. C’est juste pour la formule. (rires)
Trente : Tu kickais à un moment.
Tomasi : J’ai kické les couplets des autres.
Trente : Franchement, les souvenirs que j’ai, c’est au sein de notre groupe. Moi, j’ai ramené des chansons, j’étais le batteur. Moi aussi, je vais écrire un truc.
Tomasi : Il y a un truc où je pense que depuis ce moment-là, je sais que c’est toujours ma première oreille et je pense que ça ne bouge pas, ce truc-là. On répond grave à côté des questions…
LFB : Quelle expérience vous avez en tant qu’auditeur de l’autre quand il est sur scène par exemple ?
Trente : Moi, j’ai vu beaucoup de concerts de Greg. C’est assez récent qu’on joue ensemble. Mais pareil, quand les concerts où Greg jouait tout seul, je lui faisais des retours honnêtes. Souvent, mon rôle, c’était de lui dire mais non, ce n’était pas nul. C’est encore le cas maintenant. Mais là, moi, je suis spectateur du concert à la batterie aussi. Moi, je le regarde beaucoup. J’ai l’impression de voir le concert à chaque fois. Notre rôle, c’est pareil. C’est d’être super honnête, mais surtout très bienveillant. Moi, Greg, il est là vraiment à tous mes concerts. C’est très rare qu’il ne soit pas là.
Tomasi : Le problème, c’est que je ne peux pas me décupler.
Trente : Par exemple, si je n’ai pas un câlin de Greg avant de monter sur scène, ça me fait bizarre. C’est important.
Tomasi : À tel point que c’est mon batteur maintenant. Je suis sûr qu’il est là.
Trente : Il y a une vraie bienveillance et surtout une vraie honnêteté. C’est assez fréquent qu’on se dise que ce n’était pas ton meilleur ou même des retours. Moi, par exemple, une fois, Greg s’est foutu de ma gueule parce que je chuchote les noms de mes chansons avant de les jouer. Ce qui est trop bizarre. Je ne m’en étais pas rendu compte.
Tomasi : Il fait ça après les talks. (murmure) « Voilà. Du lundi au dimanche. »
Trente : Catastrophe. C’est vrai qu’il m’a fait m’en rendre compte. Bienveillance, c’est le mot d’ordre.
Tomasi : J’ai beaucoup d’admiration pour Hugo. J’en ai toujours eu. C’est un petit Wonder Kid touche-à-tout depuis que je le connais. Ça fait 15 ans. Il fait des clips pour des artistes incroyables. Les clips sont incroyables aussi. Un peu moins, mais quand même. (rires)
En vrai, j’ai toujours ce truc sur scène. Je trouve que c’est un super musicien. Même si on a tous les deux nos trucs de débrouille et de triche un peu. On est inventifs avec ce qu’on a parce qu’on ne sera pas les meilleurs musiciens. Mais sur scène, tu as ta batterie, tu as ton truc. Il y a une chose où je suis toujours très admiratif de ce que ça renvoie, du truc un peu one-man-band que je trouve très stylé. Pour moi, c’est plutôt micro au poing et d’y aller avec ma bite et mon couteau. (rires)
Trente : On a nos trucs, chacun de notre côté. Greg fait tout un tas de trucs que je suis incapable de faire et vice-versa. Ça donne des envies. Là, on a des envies, par exemple, au sein de Tomasi sur scène, tu m’en parlais l’autre fois, de rajouter des parties instrumentales, par exemple. Et moi, ce que je fais beaucoup sur scène, je commence à avoir envie de lâcher mes machines et de plus tenir le micro et de me balader. C’est un truc que Greg ramène.
LFB : Là, à l’instant T, c’est quoi votre morceau préféré de l’autre ? Et pourquoi ?
Trente : Ils ne sont pas sortis.
Tomasi : Moi, c’est Carnets.
Trente : Ça a toujours été Carnets.
Tomasi : Je trouve que c’est la plus belle prod d’Hugo. Elle me fait un truc à chaque fois qu’elle se lance. Le texte me touche beaucoup parce que c’est grave Hugo. Il y a quelque chose d’assez personnel dans cette chanson que j’ai la chance de connaître dans l’intime. Et je ne sais pas, il y a un truc avec cette chanson qui m’a toujours foudroyé.
Trente : Moi, pas sorti. Parce que là, il y en a qui ne sont pas sortis.
Tomasi : Dis celles qui sont sorties.
Trente : C’est Comme un ado. Ça a toujours été Comme un ado.
Tomasi : Évidemment son morceau préféré, c’est un morceau où il chante dessus.
Trente : Avant même que je ne chante dessus, je l’aimais. J’ai connu toutes les versions de Comme un ado, y compris celle avec un sample illégal dedans. Je l’aime tout autant avec le couplet de Fils Cara. Je trouve que c’est un des plus beaux textes. Moi, j’aime les chansons de Greg où il y a des aveux de faiblesse.
Tomasi : C’est un peu toutes mes chansons…
Trente : Non, parce qu’il y a différents trucs. Quand Greg est fébrile, c’est le mot. Je trouve ça toujours super touchant. Il est arrivé plus d’une fois qu’il m’envoie une chanson et que ça me foute les larmes à sang.
Tomasi : Et dans celles qui ne sont pas sorties, alors ?
Trente : Droit dans le mur, Midi.
Tomasi : Ah, je vais la jouer ce soir.
Trente : Magnifique.
LFB : Est-ce qu’il y a quelque chose que vous aimeriez piquer à l’autre ?
Trente : Tes chaussures. Moi, ça va.
Tomasi : Moi, je pense que c’est son obstination.Tu peux te mettre dans un projet et ne penser qu’à ça et être hyper focus et faire de la musique pendant un milliard d’années. En vrai, dans Phalanges, je dis que j’aimerais être comme Hugo, faire des prods dans le métro. Il y a un truc de travail qui a un vrai amusement et qui ne s’arrête jamais. Des fois, ça me fait moins marrer de faire ça.
Trente : Si, moi, j’ai. C’est vrai qu’il y a une curiosité que Greg a que j’ai perdue un peu, mais ce n’est pas grave. Même la curiosité des gens ou un truc de constamment accueillir des nouvelles personnes dans sa vie. Moi, j’ai refermé mon cercle depuis longtemps parce que j’ai un peu peur des gens. Et cette curiosité-là, elle l’emmène loin depuis toujours.
LFB : Est-ce que vous auriez une qualité et un défaut de l’autre à révéler ?
Trente : On a plein des deux côtés.
Tomasi : Je pense que c’est bordélique. Je ne connais personne comme Hugo d’aussi bordélique. Quand il arrive chez moi, si s’est rangé, il peut passer trois minutes pour récupérer un truc. Je retrouve des trucs qui sont posés chez moi à d’autres endroits. Je ne sais même pas comment il fait. Il ne sait même pas comment il fait. Il ne se voit pas faire ça.
Trente : J’oublie tout. Je m’éparpille. Je mets les trucs dans tous les sens. Putain, un défaut… J’ai un défaut de Greg qui peut m’agacer des fois. C’est trop pour les autres. Pas assez pour lui.
Tomasi : J’ai l’air con.
LFB : Est-ce que c’est vraiment un défaut ?
Trente : Non, c’est super chiant. C’est super chiant parce que des fois, il s’oublie. On a envie de lui mettre des claques. Non, des grosses claques. Et une qualité ?
Tomasi : C’est un peu ce que j’ai répondu avant. C’est ce qu’on a dit avant.
Trente : L’obstination et la curiosité.
LFB : Pour finir, est-ce que vous avez un secret à révéler sur l’autre ? À part le Nurofen.
Tomasi : Je réfléchis. Qu’on peut dire. C’est ça le problème.
Trente : Il ne s’appelle pas Greg.
Tomasi : Je m’appelle Grégoire.
Trente : Exactement.
Tomasi : Je ne m’appelle pas Tomasi. C’est pas mon prénom. Je ne m’appelle pas Tomasi. Hugo ne s’appelle pas Trente. Oui, c’est ça. On peut trouver. On se connait depuis assez longtemps. Est-ce que ça marche si on partage un secret pour nous deux ?
LFB : Oui, vas-y.
Tomasi : Quand on avait un groupe de musique qui s’appelait Clairvoyant. Je ne sais pas si on l’a déjà dit. Clairvoyant. On est parti dans une maison pour faire une résidence. On avait entre 16 et 19 ans. On avait tous un an d’écart. On était un peu des petits adolescents cons. On était persuadés d’être bien élevés et plutôt propres. On a passé la semaine avec le mec de la maison qu’on louait. C’était Airbnb.
Trente : Ah putain !
Tomasi : Pour nous, tout s’était super bien passé. On était hyper contents. Vraiment hyper cool. On avait passé une super semaine. On avait fait un barbecue avec le gars. Il était bizarre. Il avait une cape et une épée cachées dans un placard. Quand on est rentrés, Hugo nous a appelé, on a reçu le commentaire d’Airbnb. Le commentaire commençait par « De vrais porcs »
Trente : « De vrais porcs tout simplement. »
Tomasi : Il finissait par dire « ne le laissez jamais venir chez vous ».
Trente : Il y a une liste. Apparemment, on avait mis du café sur les murs.
Tomasi : On s’en souvient.
Trente : Il nous rend visite le deuxième jour pour voir si tout se passe bien. Greg, en lui disant bonjour, renverse l’intégralité de son café sur un mur en pierre. Pas sur le sol.
Tomasi : Il nous a dit que ce n’est pas grave. Il l’a bien mis dans le commentaire. La femme de ménage a mis 4 heures à enlever la crasse du sol.
Trente : Soi-disant. Ça n’existe pas la crasse. On s’est roulés dedans. Voilà. Tu peux écrire « des vrais porcs tout simplement ». Depuis, on est propres.
LFB : Depuis, vous avez appris à faire le ménage.
Tomasi : On a eu des appartements et on s’est arrêté depuis le psychopate.
Crédit Photos : Céline Non