Deux ans après L’ombre et la nuit, leur première collaboration avec le label Icy Cold Records, le duo grenoblois post-punk Varsovie est de retour. Le cinquième opus s’appelle Pression à froid, il compte 9 titres. Puissance et noirceur fidèles au rendez-vous.
La scène post-punk française – pas qu’elle nous direz-vous – se divise en deux : ceux qui chantent en anglais en héritage de leurs aînés et ceux qui préfèrent user de la langue de Molière. Varsovie fait partie de la deuxième école. Arnault Destal reste fidèle au verbe francophone et fait usage d’une langue aux images fortes, profondément poétiques et signe des textes riches en références politico-culturelles. Pour cet album, deux figures d’exception : il utilisera un titre en tchèque (Pochodec cislo jedna) et un en anglais (The Ghost of Kyiv).
L’album s’ouvre sur le premier single sorti en mai dernier Perspective Nevski qui annonçait déjà la dominante noirceur qu’on leur connait. Un peu plus haut on parlait de références, ici on commence avec une littéraire : Gogol. Plus politique, le deuxième morceau Pochodec cislo jedna est un hommage au martyr Jan Palach qui résonne en écho avec l’actualité russo-ukrainienne. Ces deux morceaux introductifs se sont chacun offerts un clip – on vous en avait parlé ici et là -. Le premier concentré sur le groupe, le deuxième sur un seul homme au pas hypnotique. Synesthésie qui prend la suite est un morceau très puissant, nerveux. Grégory Cathérina livre toujours avec une grande efficacité les mots de son comparse Arnault Destal. Ils ne sont pas toujours chantés, parfois juste habités et c’est cette voix-là qui les incarnera. Difficile d’en imaginer une autre.
Avec Artefacts on ressent bien les inspirations cold voire goth, Bauhaus jamais très loin. Là où Sous les radars et Une force dehors sont plus punk dans leur rythmique. Pression à froid qui donne son nom à l’album est dans une autre dynamique, plus ouverte, plus accessible. Le morceau fleuve (6’32) The Ghost of Kyiv clôt l’album en beauté avec une grande partie instrumentale. Elle laisse une grande place à l’imagination. Compte tenu de son titre, on se laisse porter par des images de la capitale ukrainienne défigurée, des visages et des corps. Et cette voix comme au téléphone qui sortirait d’un répondeur.
Pression à froid est un opus qui confirme toujours plus l’identité de Varsovie : l’encre d’une poésie résolument noire. Les textes d’Arnault Destal sont toujours plus poussés et les ambiances maîtrisées. On adore la profondeur dans laquelle ils nous entraînent. Pour pouvoir se revendiquer du post-punk, il faut en avoir compris l’essence, l’origine : le punk. En cela Varsovie est très bon, il joue avec les cendres encore fumantes du genre pour en faire un post-punk très puissant, riche.
Pour la couverture de l’album, le duo délaisse les figures féminines pour un énigmatique félin blanc immortalisé par le faiseur d’images grec Sotiris Lamprou.
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