Vincent delerm, vingt ans d’une histoire avec et sans paroles

On le sait, et c’est aussi pour ça qu’on l’aime, Vincent Delerm n’a jamais rien fait comme tout le monde. Musique, cinéma, photographie … l’artiste se dévoile toujours avec l’envie de surprendre et de charmer son auditoire. C’est une nouvelle fois le cas avec Comme Une Histoire / Sans Paroles, un double projet qui célèbre ses 20 ans de carrière, entre le documentaire sonore et l’album de piano solo.

Comme une histoire …

L’histoire d’une vie se trace, non pas en ligne droite, mais en morceaux éclatés de souvenirs. Des instants vaporeux, des souvenirs plus ou moins clairs, qui nous échappent plus souvent qu’on ne le remarque. Sauf si l’on s’appelle Vincent Delerm. Depuis toujours, Vincent a ce rapport aux souvenirs, le besoin de les garder, de figer un peu des petits moments de vie, qu’il enregistre, qu’il catalogue, qu’il garde précieusement, comme des petites gemmes qu’il ausculterait de temps en temps.

Une sorte de journalisme de lui-même, pour se rappeler la chance d’être là, et tous ces moments, ces instants, où les héros sont devenus des amis, où la vie a mis les choses dans le sens qu’on avait souhaité, sans jamais vraiment imaginer que cela devienne réel.

Un rapport à la nostalgie heureuse, au temps qui passe en douceur. Une obsession qui a fatalement nourri ses 20 ans de carrière et qui aujourd’hui prend corps et trouve tout son éclat dans la nouvelle aventure du musicien : Comme une histoire, documentaire sonore d’une vie où la musique et l’art ont gagné leur place de quotidien heureux.

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74 minutes, la capacité maximale d’un CD. Plutôt que d’offrir une bête compilation de ses plus grands succès, Vincent Delerm a donc ressorti notes, ordinateurs, CD gravés et disques durs pour nous offrir ce voyage dans sa vie. Un voyage intime où l’on pleure, où l’on rit et où l’on vit la musique, spectateur intime et privilégié.

Tout commence avec la voix de Fanny Ardant, forcément. L’héroïne de son premier succès, fantasme photographique devenu personnage d’un de ses spectacles. On y retrouvera aussi d’autres amis, Peter Von Poehl et Jeanne Cherral, les passeurs que sont Souchon et Dominique A, avec qui il partage des morceaux, et l’iconique Jean Rochefort, forcément, et son rire qui nous manque tant.

On explore cette existence, on s’attarde ici et là, on revient en arrière pour mieux repartir en avant. L’expérience est ludique car elle est fluide, ponctuée de morceaux inédits, petits trésors gardés dans l’idée, qu’un jour ou l’autre, ils trouveraient leur place dans une aventure de Vincent Delerm. Impossible de résister à la douceur amicale d’Avec Jeanne, de ne pas pleurer sur Fin 2015/Le Silence, ou de ne pas laisser nos petits cœurs de fan boy se réjouir sur cette rencontre improbable, et ô combien réussie, avec Adam Green sur le formidable Un jour Parfait.

Et puis, vient ce tourbillon de vie qui ponctue l’histoire : C’est Quoi Une Vie ? C’est une fête française étrange, avec des bougies qui se rallument, des histoires qui se cognent et des cœurs qui battent. Une vie, c’est la douceur que Vincent Delerm nous apporte, avec flegme, humour et tendresse. C’est tout ça, et bien plus au fond.

Crédit : Clara de Latour

Sans paroles

Mais une vie, c’est aussi l’amour. Une relation spéciale à des choses, des objets qui nous accompagnent dans l’existence. La musique de Vincent Delerm est reconnaissable par sa voix, mais aussi par son piano. Son partenaire de toujours, sur albums comme sur scène.

Avec ce second appendice, c’est une autre histoire que l’artiste nous raconte. Celle d’une musique qui se réinvente une fois les paroles disparues, quand il ne reste que la moelle des morceaux et la force émotionnelle de la composition.

Jouée en demi-teinte, comme une caresse, ce second volume de l’histoire crée une intimité, une bulle hors du temps qui nous autorise à vivre en même temps que se tisse l’écoute.

Là encore, la relation entre l’auditeur et l’artiste est forte, presque brûlante. On écoute et on observe la musique, on la laisse nous ramener avec elle des souvenirs, des instants, mais cette fois-ci, de nos vies à nous. Car la musique de Vincent Delerm, en 20 ans, est devenue une ritournelle habituelle de nos existences, une bande originale qui prend ici un sens complètement différent.

Dans une espèce de climat proche du coucher de soleil, Vincent Delerm nous charme une nouvelle fois, prolonge une histoire qu’on n’a pas envie de voir se terminer.

Au fond, c’est tout ça une vie, une histoire avec ou sans paroles, qui ne demande qu’à nous surprendre, nous prendre par la main pour nous emmener là où on n’aurait jamais imaginé aller. Et tant qu’à faire, autant vivre cette aventure avec la musique de Vincent Delerm.

Retrouvez notre interview de Vincent Delerm par ici