La carrière de Viva Belgrado a toujours semblé tenir sur un fil. De sensation du screamo européen à ses débuts il y a une dizaine d’années, on a cru plusieurs fois que le groupe allait s’éteindre au gré des changements de line-ups, crise sanitaire et autres aléas. Finalement le succès a fini par arriver, passant par un radoucissement de la musique des Espagnols jusqu’à ce nouvel album Cancionero de los Cielos. Un témoignage puissant d’une formation ayant passé toute sa carrière à se réinventer.

On s’en rend compte dès le début de l’écoute, cet album sera doux. A l’image de la transition amorcée sur Bellavista vers moins d’agressivité, le groupe a décidé de plonger vers un hybride entre post-rock, emo et quelques discrets éléments électroniques. Ces derniers sont particulièrement réussis et permettent de faire passer la version « douce » de Viva Belgrado dans une autre dimension. La preuve avec le crescendo de Vernissage qui ouvre le disque ou la sublime Elena Observando la Osa Mayor dont la douce mélodie reste en tête à l’infini.
Evidemment pour ceux qui suivent le groupe depuis le début, on est bien loin de la furie à fleur de peau de Flores, Carne mais Viva Belgrado n’a pas abandonné totalement cette facette. Orientez-vous directement vers Saturno Devorando a Su Hijo si vous êtes nostalgiques de cette époque.
De manière générale, ce nouveau disque est très varié et explore de nombreux styles : shoegaze sur la géniale Perfect Blue, indie-rock (Un Tragaluz) et post-rock. Le tout a quelques moments faibles mais au global la versatilité des andalous est plus impressionnante que jamais.
Hérité de la tradition du screamo européen, le choix de chanter dans sa langue a toujours forgé l’identité de Viva Belgrado. Que l’on comprenne ou pas l’espagnol, les paroles scandées avec urgence ou douceur par Cándido Gálvez ajoutent une singularité et un degré d’émotion qui élèvent la musique.
S’il a délaissé les cris déchirants, le chant fait lui aussi sa mue avec une grande variété de timbre. Si notre niveau en espagnol a trop baissé pour saisir les subtilités des textes, on peut être sûr qu’ils suivent le crédo du groupe : « poétique, politique et un peu spirituel ».
A l’aise dans tous les styles, Cancionero de los Cielos est une nouvelle excellente pièce dans la discographie quasi sans-faute de Viva Belgrado. A une époque où la scène underground peine à survivre dans le milieu punk/rock/emo au sens large, on remercie particulièrement ces groupes qui en ont connu l’âge d’or de continuer à nous offrir des pépites comme celle-là pour entretenir la flamme. Et qui sait, peut-être qu’elle leur offrira enfin un succès commercial amplement mérité.
Pour tous les curieux et les fans, les Espagnols feront trois dates en France à Toulouse (06.04), Marseille (07.04) et au Supersonic de Paris (gratuit ! le 19.04).