Londres est une ville cosmopolite, au sein de laquelle tous types de cultures se mélangent. Au-delà du caractère social que cela confère à l’art qui y nait, cela lui permet également de s’élever et d’évoluer. La capitale britannique, étant depuis quelques années le centre névralgique du Jazz, a vu cette même caractéristique nourrir l’inspiration de nombreux artistes. C’est le cas de Femi Koleoso, l’homme derrière les fûts de Gorillaz, entre autres. Ce dernier fut un jour pris de l’envie de matérialiser cette idée de multiculturalisme à travers ses influences musicales. C’est ainsi qu’il créa, en 2012, le groupe Ezra Collective. Ce qui est aujourd’hui un quintet a sorti le 4 novembre dernier son nouvel album, intitulé Where I’m Meant To Be.
La chose qu’il faut indéniablement mettre en avant à propos de ce disque, c’est son caractère transitionnel. En effet, le groupe londonien, avec ce nouveau projet, entre dans une toute nouvelle ère. Après n’avoir cessé de tourner à travers le monde entier suite à leur premier album, You Can’t Steal My Joy, le quintet s’est vu stoppé par une pandémie bloquant toute possibilité d’officier sur scène. Pendant cette période, les membres d’Ezra Collective sont entrés en fusion, pour donner une nouvelle forme au projet, plus mature, qui définira les travaux futurs. C’est après cela que le travail de composition de ce second album prend forme.
Après dix-huit mois de processus créatif intense, le travail des cinq musiciens londoniens a finalement abouti sur Where I’m Meant To Be, composé de quatorze titres. À travers cet album, Joe-Armon Jones (claviers), James Mollison (saxophone), Ife Ogunjobi (trompette) ainsi que les frères TJ et Femi Koleoso (basse et batterie) avaient une idée bien précise en tête. Selon les propres dires du leader du quintet, ce nouveau disque constitue une ode à la vie. De plus, ce dernier endosse également le rôle de confirmer le style du groupe dans son approche intrinsèque de la musique. Après avoir passé des années à improviser, que ce soit en jam ou sur scène, les britanniques se connaissent par cœur. C’est en cela que l’on sent un véritable sentiment de plénitude et de connexion régnant entre les artistes.
Ezra Collective affiche une complicité musicale rare, naturelle, et surtout, impressionnante. Il est d’autant plus considérable de constater le véritable de tour de force stylistique entrepris par les britanniques. À travers leurs travaux, ces derniers mélangent un important nombre de genres et d’influences différentes, donnant naissance à une patte et un son unique. Avec une base de Jazz, les cinq londoniens incorporent des musiques tirant leurs origines des communautés et de la culture africaine, mais aussi de l’épistèmê de Londres. Dû à ce mélange, on retrouve des griffes propres à l’Afro-beat, mais également au Grime, mouvement regroupant des traces de Drum & Bass, de Dance Music et de Hip-Hop.
Where I’m Meant To Be se lit dès lors comme une sorte d’illustration du multiculturalisme historique ambiant dans la capitale anglaise. Cela se lit notamment sur des morceaux comme Life Goes On, en collaboration avec Sampa the Great, ou encore Siesta, avec Emeli Sandé. L’influence latente de l’Afro-beat se fait énormément ressentir, avec notamment un travail conséquent concernant les percussions. Cependant, on retrouve également des morceaux de Jazz plus classiques dans leur approche, à l’instar des pistes Smile ou Love in Outer Space, avec Nao au chant.
Cette diversité mélodique se marie à un interprétation brillante, faisant de chaque morceau un outil de swing et de danse tout bonnement imparable. La musique proposée est entraînante, et se veut comme des pièces à interpréter et à partager en live. Même si la majorité de l’album est instrumental, on peut y retrouver des guests, venus poser quelques paroles derrière le micro. C’est en cela que des artistes tels que Sampa the Great, Kojey Radical, Emeli Sandé ou encore Nao font leur apparition durant le long du projet. On note également la présence de deux interludes, qui sont en vérité des extraits de conversations, placés à la fin, pour aider à aérer une fin d’album pouvant paraître lourde. Ces derniers sont Words by Steve et Words by TJ.
À travers les quelques mots énoncés dans Where I’m Meant To Be, plusieurs thèmes inhérents à la philosophie du quintet sont mis en avant. Ces derniers abordent particulièrement la question de l’humilité, ou encore du chemin aboutissant à la trouvaille de qui nous sommes réellement, ainsi que de notre place. Pour citer Femi, ce nouvel album nous incite à prendre notre temps, à ne pas nécessairement chercher à répondre à un certain le besoin de précipitation. C’est avec ce discours qu’Ezra Collective échafaude une célébration à l’attention de la vie. Les londoniens dressent une ode au parcours que cette dernière nous impose et aux expériences qu’elle nous procure.
À travers un second disque éblouissant, Ezra Collective affirme un style déjà affiné lors des nombreuses tournées à leur nom et de leurs jam sessions. En entreprenant un mélange raffiné entre Jazz, Afro-beat et Grime – englobant déjà un certain nombre d’influences diverses et variées -, les cinq Londoniens entraînent leur public dans une musique dansante. Where I’m Meant To Be se veut être marqué par le swing, l’envie et le plaisir de jouer, de profiter de ce que l’on a et du chemin que l’on doit parcourir. À travers ce projet, Femi Koleoso et ses quatre comparses parviennent à montrer le bonheur ressenti lorsque l’on se trouve, en érigeant une bande-son de ce sentiment. Une merveilleuse mise en musique, exécutée et écrite avec brio, qui ravira les esgourdes des auditeurs les plus curieux et ouverts d’esprit.