La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre voici la deuxième partie de notre 188ème sélection.
Antoine Assayas – En Silence
Parfois, le chant en français n’est pas une évidence, il peut venir suite à une mutation, un saut dans le vide, l’inconnu et l’impudeur parfois.
Cette évolution, Antoine Assayas la réussit parfaitement avec En Silence, son tout premier titre en français. Un morceau qui allie une poésie bienvenue à une certaine libération, comme une élévation libératrice qui lui permet d’accéder à un étant presque transcendantal.
Cette évolution, il la met aussi parfaitement en musique, le morceau évoluant de manière fluide tout au long de ces 5 minutes, passant d’un piano-voix à des nappes électroniques pour s’achever dans une danse presque chamanique où des chœurs éthérés rejoignent la voix d’Antoine.
Pour accompagner cette mue, Antoine Assayas fait une nouvelle fois confiance à Valentin Duciel et à sa passion pour les masques étranges.
Un visage étrange et sans oreilles qui évolue tout au long du clip, accompagnant des saynètes étranges et vivantes, où l’on peut croiser des alter-egos en slip blanc , un artiste qui vivotte et qui réfléchit à ce qu’il fait et une danse heureuse autour d’un feu de nuit alors que toutes les facettes sont réunies sur le masque.
Du bel ouvrage en attendant la sortie de son nouvel EP, prévu pour décembre.
Alex Nicol – Working On My Tan
Quelques mois à peine après Been A Long Year Vol. 1, Alex Nicol nous revient avec un nouveau single annonçant Been A Long Year Vol. 2 : Working On My Tan.
Si la première partie était plutôt sombre, cette seconde annonce un retour vers quelque chose de plus lumineux. Working On My Tan a quelque chose d’apaisant, que ce soit dans la façon de chanter de Nicol ou dans les arrangements qui pousse sa folk teintée de country vers des territoires qui réchauffent le cœur.
Le morceau nous parle d’ailleurs de ce point de bascule, du fait de pouvoir retrouver la vie et le cours de son existence à n’importe quel moment. La vie avance de manière perpétuelle, les saisons changent mais il est toujours possible de laisser le froid derrière soi pour profiter du soleil.
C’est d’ailleurs ce que fait le héros du clip qui accompagne le morceau. Une sorte de vieux cowboy solitaire qui profite de l’existence et de tout ce qu’elle peut apporter. Entre le golf, le tennis et la natation, on le voit profiter de tous les instants, retrouver à certains moments une nouvelle jeunesse.
Pour la suite, Alex Nicol nous donne rendez vous le 1er décembre.
Aghiad – Anima
Lorsque l’on recherche la définition d’« anima » on trouve : « la représentation de l’âme, voire l’archétype du féminin » un concept psychanalytique fondé par le psychiatre Carl Gustav Jung. En somme, l’anima peut représenter la moitié de son âme, son autre. Une idée que reprend Aghiad au travers du titre Anima. Cette balade romantique est une ode au sentiment amoureux. Celui qui ne dépasse pas, nous transcende et nous transforme. Un « je t’aime comme un animal » lâché, rythme le morceau.
Les percussions sont très présentes dans Anima, bien que des mélodies à la basse donnent corps et réconfort au titre. On reconnaît les mélismes électriques joués au oud, qui font entre autres l’identité musicale du groupe. Alors, on se retrouve dans un ailleurs, coincé entre la rêverie et la Méditerranée. A l’instar de précédente reprise, le clip d’Anima se présente comme un vlog assez intimiste.
On suit ainsi le chanteur Aghiad en Syrie, plus précisément à Lattaquié. Des images qui renforcent la douceur et la nostalgie d’Anima. Le titre compose Liman, le premier EP du groupe, qui sortira en fin d’année.
Elliott Armen – Turbulence
Les turbulences ne sont parfois pas là où l’on croit. Comme des ombres invisibles, elles naviguent autour de nous, plus ou moins présentent selon nos émotions, selon ce que l’on fait pour les appeler à nous.
C’est un peu ce que nous raconte Elliott Armen dans son nouveau titre, Turbulence. Ici, il est question de deuil, de ce que l’on perd et de ce que l’ont fait pour raviver les petites traces qu’ils ont gravé en nous.
Dans les vapeurs d’alcool, dans cet élément réconfortant où le réel se brouillent, ils viennent le rejoindre. Mais à cette mélancolie réconfortante qui rapproche le vivant des morts à travers la peine, se mêle une part de honte, celle d’être vue dans cet état de vulnérabilité totale.
Turbulence nous entraine, d’abord en douceur puis dans le chaos, dans une danse sans fin ou la nuit ne s’éteint jamais vraiment.
Pour accompagner le morceau, Bastien Colin nous entraine à nouveau en promenade dans les émotions et les paysages, toujours au plus près d’Elliott dans ce voyage qui semble ne jamais trouver de fin, si ce n’est dans les larmes.
Hanaa Ouassim – KAMANJA ICE
On peut dire qu’on est submergé de belles sorties en ce moment, mais on espère que celle-ci ne passera pas sous vos radars. Jusqu’à présent, nous connaissions Hanaa Ouassim principalement grâce à ses DJ sets et ses remix de chansons de Vickie Cherie et de Maud Geffray (entre autres) , mais c’est bien avec son propre morceau qu’on la retrouve cette semaine. Il s’agit de son premier véritable titre solo et single issu de son projet La Vie de Star, qui sortira le 2 février chez Pan European Recording. KAMANJA ICE possède une aura tout à fait spéciale, laissant entrevoir, sans le moindre doute, une suite très prometteuse pour l’artiste aux multiples talents.
Hanaa Ouassim nous berce avec des paroles en Darija, un dialecte marocain, entremêlées de quelques mots en français. Il n’est pas nécessaire de maîtriser la langue pour se laisser transporter par cette musique mélancolique, à la fois traditionnelle et dans l’air du temps. Il s’agit d’un titre authentique, empreint de fragilité, dont la mélodie refuse de nous quitter. Le visuel qui l’accompagne est simple, un écran scindé en deux, une compilation de vidéos trouvées sur Internet mises en forme par Jamie Harley : des scènes de la nature, des extraits de séries, des vidéos humoristiques, des instants de vie très différents, aléatoires, qui s’accordent pourtant parfaitement. On en retient que tout défile sans qu’on ne puisse y faire quelque chose, tout est à la fois éphémère et permanent.
Charlotte Cardin – Feel Good
La popstar québécoise fait durer l’été un peu plus avec son tout dernier vidéoclip pour Feel Good, un titre accrocheur et langoureux tant dans les paroles qu’en images. Et Charlotte Cardin nous emmène avec elle à Paris aux petites heures de la nuit, quand vient le temps de rentrer chez soi en taxi après une soirée enivrante, à coup de rues illuminées qui défilent et de flashbacks d’une connexion amoureuse brûlante de passion. «You make me feel good Ta main sur ma taille Ensemble dans le taxi C’est vraiment super sexy»: voilà qui résume parfaitement le tout! Impossible enfin de ne pas sourire devant la référence à cette fameuse scène embuée de Titanic…
The Broken Stout – Lonely
C’est la semaine pour The Broken Stout. Après la sortie de leur tout premier EP, Too Many Roads, le groupe belge sort, dans la foulée, le clip de Lonely. Également une nouveauté pour eux puisqu’il s’agit de leur tout premier clip !
Cette auto-production prend vie dans le magnifique conservatoire de la ville de Ciney dont ils sont originaires. Un lieu important pour eux, dont l’aspect rural colle parfaitement avec le groupe. Le clip se concentre sur une danse contemporaine, interprétée par la talentueuse Lorie Collard. On peut apercevoir les Broken performer au fond de la pièce, laissant place à la danseuse. Une image poétique, qui correspond parfaitement avec l’ambiance de Lonely.
Avec un tout premier clip et un tout premier EP, il s’agissait sûrement d’un vendredi bien chargé pour le groupe d’amis cinacien. Après avoir fait danser toute la Wallonie avec des reprises, les Broken Stout vont pouvoir le faire avec leurs propres créations.
Merryn Jeann – NUN AT THE AIRPORT
Qui ne s’est jamais surpris à rêvasser, au beau milieu d’un aéroport ? Le lieu des au revoir et des retrouvailles. Saisir cette espace si particulier, sa dimension onirique. Merryn Jeann s’en empare avec dans son dernier clip NUN AT THE AIRPORT. Dans une esthétique un peu à l’ancienne, filmé avec une caméra portée, le clip se construit en deux temps.
On suit d’abord deux mystérieux personnages, la nonne et son ami, au beau milieu de cet aéroport. L’heure est au départ. Leurs danses, troublées, apportent du rythme. On ressent ces deux émotions contraires, à la fois la tristesse de quitter l’autre et ce sentiment spécial et excitant d’un rêve d’ailleurs et d’inconnu. L’atterrissage; la suite devient plus expérimentale. Les images d’une nature apaisante se superposent puis s’enchaînent. Avec sa voix envoûtante, Merryn Jeann nous surprend, c’est le temps de la mémoire et du rêve, des images réelles ou fantasmées.
Samuel Covel – La Mélopée Du Chat Tremblant
Nous voilà plongés dans le dernier clip du musicien français Samuel Covel. La mélopée du chat tremblant dites-vous ? Intriguant. Le suspens ne dure pas bien longtemps, et on est vite embarqué dès les premières notes.
Une mélopée ? Peut être pas, car paradoxalement le son n’est pas vraiment monotone ni mélancolique, mais plutôt très rock et entraînant ! Presque à huis clos, le clip nous emmène dans les coulisses d’un étrange studio de répétition, quelque peu inquiétant et désertique. On aperçoit pourtant les instruments. La mélodie est rythmée par la danse d’une jeune femme, tout en légèreté. Il y a quelque chose de puissamment vivant dans son mouvement, et elle parvient à prendre possession de l’espace. Tout comme le batteur en fin de morceau, ils jouent avec ce vide et colorent ces images en noir et blanc.
Dominique Dalcan & Meryem Aboulouafa – J’irai Partout
Parfois, la musique électronique est aux antipodes des clichés qu’on a d’elle, froide et tapageuse. Elle peut être presque viscérale, intimiste, à la fois douce et lumineuse. Dominique Dalcan joue avec subtilité sur ce registre, en se laissant porter par sa sensibilité qui est belle et qui lui est propre. Entremêlant images passées, instants présents et aspirations pour le futur, J’irai partout se drape d’une joyeuse mélancolie empreinte d’espoir et d’optimisme. Se souvenir pour reconstruire. Et alors – insufflé par la voix de Meryem Aboulouafa, la composition de Dominique Dalcan et le violon d’Amal Guermazi – c’est un vent d’humanité et de liberté qui se lève et nous emporte.
Après Loin de ma terre et Mon cœur est solitaire, J’irai partout est le troisième extrait de son prochain album Last Night A Woman Saved My Life à paraître en novembre prochain.
FORM – Blackout
Attention, attendez-vous à être secoués ! Blackout, agit comme un voile blanc sur nos pensées où l’angoisse prend le dessus et nous mène – au travers d’un univers surréaliste – dans un état de semi-conscience. Notre rythme cardiaque se synchronise sur le rythme des percussions dans une montée graduelle et hypnotique. Les teintes se confondent, le noir et blanc – passif- alterne avec les couleurs -actives- aussi saturées que les riffs de guitare qui jalonnent le morceau. Même l’accalmie du milieu du morceau n’est qu’un court moment de respiration avant de repartir happé par une nouvelle envolée asymptotique sans avoir eu le temps de reprendre son souffle. Blackout relate un moment d’absence où les souvenirs se dissipent comme s’ils n’avaient jamais existé. Un moment de confusion qui nous fait craindre de perdre ce sur quoi nous nous sommes construits.
FORM sera présent à la Boule Noire le 29 novembre pour présenter leur premier album. Pour vous, ce sera peut-être l’occasion de vous forger de nouveaux souvenirs ?
Emilie Simon – Karma
Pour Karma, Emilie Simon a enclenché le mode gothique pour nous conter l’histoire horrifantasmagorique du retour à la vie de Lily Mercier. Tenue noire, gouttes de sang, armes tranchantes, elle se pare de tous les atours indispensables à cette culture pop lignée Famille Adams ou Dark Shadows. De quoi nous faire frissonner et nous étonner. Et être étonnés, même si dans ce contexte vampiristique c’est un peu dangereux, nous on adore, car « On récolte ce que l’on sème [s’aime] ».
Sans prétention, mais bigrement efficace, Karma va sans doute rythmer votre prochaine soirée d’Halloween. Après (ou pendant), vous aurez tout le temps de découvrir son mini-concept album transmédia Phoenix, tout sanguinolent, à paraître le 27 octobre. Brrr… Vous voilà prévenus !
Jain – Night Heights
Conquise par le retour de Jain en avril dernier avec son album Fool, La Face B s’enthousiasme de chaque événement la concernant.
Aujourd’hui on salue donc l’arrivée du nouveau clip de la chanson Night Height, l’une des plus marquante du disque. Cette dernière semble porter sur l’attirance aussi soudaine qu’obsédante, d’une personne envers une autre, lors d’une soirée parisienne, sous une pluie battante. À coeur battant.
Comme nous l’avions connu, le style de la Jain de Zanaka ou de Souldier a encore évolué, pour prendre une forme un peu plus « hippie », en témoigne la pochette d’album et son esprit « flower power ». On renvoie au placard la combi ou la robe unies pour la jupe et les santiags dépareillés, histoire de s’accorder avec la tenue de son double – ombre d’elle même ou objet de son désir ? – qui la suit durant tout le clip. En outre il n’est pas rare de voir, au fil de l’histoire, sa silhouette se décomposer, comme si, entre deux parties de bowling et deux chorégraphies délicates, Jain était sans cesse tiraillée par une voix entêtante ou cette présence étrangère et lancinante, porteuse d’une vérité qu’elle peine à voir des deux yeux : l’impossible amour auquel elle se confronte.
« Face à mon désir, tu m’as prise au dépourvu
La rosée de la nuit tombe sur toi alors que la lune se lève
Peut-être que je rêve, peut-être que je suis folle
Mais je pense que je vois ce que toi et moi ne pouvons pas être »
Après traduction, ces vers relèvent de la poésie.
Safia Nolin – ET SI DE
Après son EP SEUM sorti en 2021 dans lequel elle nous offrait quatre chansons en version plugged & unplungged, Safia Nolin revient avec ET SI, DE/main l’oiseau. ET SI, DE est illustré par un clip digne de ceux que tu regardais sur Dailymotion en 2005.
Safia chante « Et si demain je me laissais mourir / Qui viendras écouter mes soupirs / […]Tout me ramène à ça », un iPhone braquée sur elle, passant d’une émotion à une autre devant un écran de projection, le tout pensé comme un film VHS. Safia Nolin nous replonge dans nos plus belles années « emo » pour le plus grand plaisir de nos yeux et nos oreilles.