Les clips de la semaine #202 – Partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la seconde partie de notre 202ème sélection.

Yard Act – We Make Hits

Dernier extrait, probablement, avant la sortie de leur deuxième album Where’s My Utopia ? qui sortira le 1er mars prochain. We Make Hits retrace l’origine de la bande à travailler ensemble sur la réalisation de leur morceau. D’après James Smith, le titre est une ôde à la joie et à l’amitié malgré sa surface bête et ironique.

On retrouve James Slater à la réalisation du clip qui se permet d’étendre l’univers cinématographique des précédents clips qui avait commencé par le morceau de 8 minutes The Trench Coat Musueum. On y voit un duo de malfrat en surpoids qui reçoivent un avis d’expulsion de leur logis.

Motivés par le groove de Yard Act,  ils mènent une recherche d’emploi et finissent tueurs à gages à la Holy Global Company. Un scénario loufoque qui correspond parfaitement à la vision disruptive de la bande.

Musicalement, la recette reste similaire à Dream Job qui lorgne sur le dance-rock avec une ambiance qui se veut toujours aussi cool. 

okis Ft Casus Belli – Jeune Gamin

Lyon est indéniablement une des villes les plus importantes de France. Pourtant, il lui aura fallu son petit temps pour que sa scène rap prenne son envol. En attendant, des artistes ont pu tenter de briser le plafond de verre tout en devenant des membres à part entière d’un patrimoine rap qui ne demandait qu’à exister. Parmi eux, Casus Belli a pour faire résonner la voix des Gones et il n’est, par conséquent, pas étonnant de le voir sur le premier album d’okis, l’un des plus fervents défenseurs de la ville dans la scène rap actuelle. Comme un passage de témoin, les deux hommes ont fait l’étalage de leur technique sur Jeune Gamin qui a été mis en scène par Boris Mouraret dans un clip sorti cette semaine. 

En prenant l’image de la boxe, ils viennent appuyer le côté sportif que peut comporter le rap mais c’est surtout l’occasion de mettre en scène une relation coach/boxeur entre deux générations de rappeurs. La boucle est bouclée.

MGMT – Nothing to declare

La semaine dernière on parlait du grand retour de LESCOP, cette semaine c’est le grand retour des américains MGMT. Six ans après Little Dark Age, le groupe revient avec Loss of Life qui sortira le 23 février prochain. Après Bubblegum Dog et Mother Nature, il nous sort un troisième clip : Nothing to declare.

Dans ce nouveau clip réalisé par Joey Frank – qui a déjà partagé son savoir-faire avec les américains pour Me and Michael – , on part à la rencontre d’Inga Perty, une jeune femme manchote. Le clip n’a rien de voyeuriste ou d’attendrissant, dans l’esprit d’un film indépendant bien français, il suit la jeune femme dans un voyage qui l’emmènera jusqu’à Paris.

Ses déambulations très touristiques l’amènent à faire face au Louvre où elle rencontrera symboliquement… la Vénus de Milo ! Une rencontre forte qui s’attache à montrer que seule la détermination compte si l’on veut réaliser ses rêves.

IDLES – GIFT HORSES

Le groupe anglais qui remplira bientôt le Zénith parisien confirme de jour en jour sa posture de groupe phare de l’ère post-punk.

Le clip de GIFT HORSES est totalement déjanté avec toutes les scènes montrant les perversions des gens dans un supermarché. Les images défilent sans que tout ait de sens, on est juste surpris par les différents instants improbables et grotesques comme lorsqu’on défile devant toutes ces âneries sur Tik Tok. On retrouve les riffs dynamiques et percutants du morceau.

$CO Ft AAMO & MOE DAMOUR – De l’autre côté

NGC1976, c’est une nouvelle preuve que la Suisse possède un vivier de rappeurs plus intéressants les uns que les autres. Après les XTRMBOYZ (Slimka, Makala,…) ils ont eux aussi compris qu’ensemble on peut aller plus loin. Au sein de son écosystème, on retrouve le producteur $CO qui est aux manettes de De l’autre côté épaulé par deux autres membres du collectif : AAMO et MOE DAMOUR. Un trio qui fonctionne à merveille, en ressort une belle alchimie qui sert au morceau. 

Pour marquer le coup, ils ont fait appel à Metanoia, réalisateur à l’esthétique marquée qui met ici le flow tranchant des artistes au service d’une ambiance horrifique s’y prêtant à merveille.  

Rythmé par la frénésie de la production, le visuel sombre subit un montage ultra-rythmé qui plonge progressivement dans une violente folie. Ce qui ne perturbe pas les rappeurs qui font preuve d’un sang froid ne perdant pas l’incisive qui fait la singularité de leur rap.

Voyou – Le Bal (ft. Vanessa Paradis)

Pour continuer de se réchauffer en ce début d’année particulièrement frais, on sait sur qui on peut compter. Voyou nous avait déjà enchanté en 2023 avec Les Royaumes Minuscules, et il continue sa mue vers une Pop plus douce, presque une Pop plaid en fait. Le genre qu’on écoute au petit matin pour lancer sa journée en dansant devant une baie vitrée pendant que le pain grille et que le café passe.

Dans Le Bal, on le découvre qui forme un duo magique avec Vanessa Paradis dont la voix s’accommode parfaitement avec celle du jeune chanteur. C’est au final assez rare de proposer des valses dans les musiques actuelles, mais la proposition fonctionne étonnamment bien ici, le côté ternaire donne ici un groove imparable au thème entonné à la clarinette, tout en laissant l’impression de ne même pas le chercher.

Une facilité insolente qui colle bien aux productions de l’ancien Lillois, tout comme la mise à l’image qui isole les personnages quasiment tout le clip (on ne vous spoile pas la fin quand même), mais qui permet là aussi l’exploit de rendre cool le Multicam qui était devenu has-been et plutôt utilisé dans les pastiches de vidéos des années 80, mais ici ça marche. Bref, encore une réussite pour Voyou, accompagné brillamment cette fois par Vanessa Paradis.

ELOI – Call Me

Véritable ode to queerness, ELOI a fait appel à Alexis Langlois pour donner une nouvelle vie à Call Me dans une version rallongée.

On est projeté en plein cœur d’un ring de catch, où ELOI et sa partenaire, Anaïs la FAIR LADY, ne se font clairement pas de cadeau et mêlent avec habileté violence et douceur, dans une atmosphère intense, bien loin des stéréotypes de masculinité toxique.

Avec des effets visuels renversants, des pancartes inspirées de la BD et des touches kitsch assumées qui contribuent à perfectionner l’esthétique, Drag Couenne (Drag Race Belgique) est notre « ring girl » pour cette battle haute en couleur, dont l’amour sort évidemment triomphant.

Dear March – The Undone

Dear March sent l’hiver, le feu de cheminée et les tisanes par milliers. Le projet est centré autour de trois musiciens : Arthur, Tanel et Romain (jouant aussi dans Gwendoline et Robock). Depuis six ans, ils composent ensemble, à la recherche du son parfait. En tâtonnant, puis en épurant. Passant de Talk Talk à Eliott Smith. D’une prod super léchée à des morceaux imaginés simplement en guitare voix.
Cette année, ils seront accompagnés sur scène par Benoît et Jean-Philippe, respectivement aux synthés et à la basse. Le premier single est sorti ce 19 janvier sur le label nantais La Fleur au Fusil et se nomme The Undone.

Un seul plan fixe, en noir et blanc. Tourné par le groupe à la pellicule, le clip dévoile ce qui semble être un étudiant. Au sein d’une bibliothèque, entouré de personnes qui l’indiffère, il parait lire un ouvrage. Et parfois, son regard se perd dans le vide. Impossible de ne pas songer à nos années universitaires, celles empreintes de livres empruntés, de notes de bas de page et de tous ces litres de café ingurgités. Souvent déconcentrés, presque ennuyés nous laissions ainsi nos pensées divaguer.

Ici, le grain de la pellicule, léger, révèle une musique folk, empreinte de douceur et d’optimisme. On souhaiterait s’y loger pour l’éternité.

Ils seront en concert le 26 janvier à Angers, le 31 janvier à Tours et le 24 février à Nantes.

chien noir – Julia

Chien noir aborde le souvenir avec son nouveau morceau Julia. Avec ce titre au passé, l’ancien nommé aux Victoires de la musique évoque une rencontre que l’on devine adolescente et amoureuse. Julia incarne la nostalgie qui s’entremêle à un sentiment de joie ou de douceur. La musique au piano rappelle à une forme de divagation poétique dans les souvenirs.

Alors que le rythme entraînant évoque plutôt des moments joyeux. Les réalisateurs du clip, James Maciver et Laetitia Desnous, ont fait le choix de coller au début des paroles : « A la fête foraine. On s’est retrouvés. Tiré à la carabine. J’étais posté à côté (…) Elle était belle, on était fiers. » 

Kim Gordon – Bye Bye

Envie de tout plaquer ? Faites vos valises, on se barre. Dentifrice, pyjama, shampoing de voyage, vibromasseur… Sur des sons de drone le nouveau titre de Kim Gordon énumère les multiples objets à emmener. 

Le clip réalisé par Clara Balzari met en scène Coco Gordon-Moore (fille de Kim Gordon et de Thurston Moore, Sonic Youth) qui fugue et fait un raid dans un convenience store – dont l’employé est joué par Meg Duffy (Hand Habits) – avant que sa mère ne vienne la récupérer. 

La musicienne américaine n’est jamais vraiment là où on l’attend, sa musique expérimentale et intelligente. Elle vient d’annoncer son second album solo, The Collective, qui sortira sur Matador le 8 mars. On a hâte de le découvrir. 

Merryn Jeann – SUBCONSCIOUS LOVE CONNECTIONS

Grande bouffée d’air frais, l’artiste australienne Merryn Jeann nous emporte cette semaine avec son dernier single SUBCONSCIOUS LOVE CONNECTIONS. À l’ère du numérique et des relations à distance, on demeure, d’une certaine manière, liés les uns aux autres. À travers son clip, et sur un titre aussi doux que puissant, Merryn Jeann se joue de la distance et du temps, pour créer un nouvel espace de rencontres, à part. 

Si nous étions habitués à des clips aussi curieux qu’originaux, avec une vraie portée artistique, nous ne sommes encore une fois pas déçus ! La jeune musicienne se met en scène et articule des images du quotidien. Un regard dans le rétroviseur, son image sur la caméra d’un supermarché, on retrouve cette esthétique un peu rétro qui caractérise parfois son univers. Les images se superposent et se construisent à la manière d’un puzzle. Bip bip, un message s’affiche, “Although there is a distance” … On est projeté dans cette histoire, les infos se multiplient et la distance entre les personnages se rétrécit. 

SUBCONSCIOUS LOVE CONNECTIONS est une danse joyeuse dans un supermarché. De quoi déjouer ou bien se satisfaire de la banalité d’un quotidien. Sa voix, à la fin du morceau, nous ramène au réel. Il y a une forme de magie simple et évidente dans le travail de Merryn Jeann qui nous séduit, et qu’on ne peut que vous recommander ! 

Jäde – Tranquille 

C’est sous une toute nouvelle esthétique, magnifiée par ROSO à la réalisation et Ffi0oul à la direction artistique, que Jäde a fait son retour avec le single Tranquille. Malgré les apparences coquettes et innocentes à souhait, détrompez-vous : Jäde est là pour en découdre. Toujours fidèle à son honnêteté tranchante, la chanteuse clame haut et fort sa volonté d’être laissée tranquille, épuisée face aux normes innombrables et insensées imposées aux femmes.

Un ras-le-bol général en somme, face aux questions incessantes (et surtout intrusives) qui lui sont imposées quotidiennement concernant sa vie personnelle ou sa carrière.Un sublime visuel, couplé à sa voix d’une douceur presque réconfortante, le tout porté par un message fort de sens ; il ne nous en fallait pas plus pour être conquis. Tranquille est le premier extrait de son prochain projet, Les Malheurs de Jäde, qu’il nous tarde de découvrir.