The Human Fear factor de Franz Ferdinand

Parmi les innombrables groupes indie de l’après 2000, Franz Ferdinand est l’un de ceux qui aura marqué à jamais sa génération. Mieux encore, le groupe a su se bonifier avec le temps tout en gardant la fougue de ses premiers essais. Avec The Human Fear, le groupe écossais replonge avec une certaine nostalgie pour nous fournir un album plaisant et tonifiant.

Seulement six albums en vingt-deux ans. La bande à Alex Kapranos n’est pas la plus productive parmi ses contemporains. En revanche, ils ont gardé la fraîcheur et cette endurance qui leur permet de sortir un nouvel album aussi rythmé que leur premier.  Audrey Tait (en provenance du groupe hip-hop Hector Bizerk) qui remplace Paul Thompson à la batterie, leur apporte également une certaine forme de cure de jouvence. Franz Ferdinand est donc un groupe qui avance à son rythme grâce à sa renommée. Il ne cherche pas à suivre les tendances qui peuvent les dénaturer. C’est à la fois une force mais également une faiblesse de cet album.

Leur premier single Audacious définissait déjà cet aspect. Ce titre est rempli d’optimisme avec un parfum de victoire sur le refrain qui rappelle les airs pop des sixties. Les coups de trompettes et les notes oldies du synthé sont des clins d’oeils assumés à Magical Mystery Tour. Face à la peur – qui sera le thème dominant de l’album – de voir son monde s’écrouler, Alex prêche pour l’action en embrassant la vie. Le groupe restaure les bonnes vibes de Rights Toughts, Right Words, Right Action sorti dix ans auparavant. Cela tombe bien, on retrouve Mark Ralph à la production sur ces deux albums. Cependant, la sagesse prend le pas sur la folie. On peine à trouver le climax de Audacious qui nous laisse juste enjoué durant trois minutes.

Le schéma se répète et en devient frustrant sur d’autres titres, pourtant fort sympathiques. Built It Up voué à être interprété sur la tournée, se veut funky tout en parlant de la peur de surmonter les différences. Bar Lonely, rythmé par les notes de piano, se penche sur la crainte de sortir de sa zone de confort avec le temps qui passe. Ces deux morceaux entrainants bénéficient d’un songwriting de qualité avec des histoires familières qui nous interpellent. Paradoxalement, l’énergie est trop légère pour bousculer nos émotions. On appréciera davantage de les réentendre en live qu’en studio. 

On tient là le paradoxe de The Human Fear : comment parler autant de nos anxiétés sans jamais chercher à nous faire frissonner davantage ? Il y a comme une forme de résilience à combattre cette trouille à travers ces onze titres. Franz Ferdinand prône plutôt la raison et le plaisir à défaut de nous transcender. Le temps de l’esprit punk est révolu pour les Écossais. Finalement, la folie les accompagne juste sur les morceaux électro-rock : on vient danser avec nos angoisses tout en finesse. On cède honteusement avec plaisir à l’électroclash Hooked malgré des paroles faiblardes « I thought I knew what love was and then I met you« . En tout cas, c’est enregistré et gardé précieusement pour notre playlist d’Halloween 2025. Il est inutile de gâcher son plaisir d’entendre l’influence de Fat Dog sur ce morceau.

Plus consensuel, Everydaydreamer semble être un B-Side oublié de Tonight qu’il était important de remettre au goût du jour. Tout oreille attentive aura entendu dans les chœurs la voix exquise de Clara Luciani. La piste suivante, The Doctors, a des sonorités plus actuelles grâce à ses riffs de guitares plus dark. C’est à ce moment-là, aussi, qu’Alex semble se lâcher davantage sur un refrain. On ne peut pas passer à côté non plus du tube de l’album  Night & Day. Le piano rythme l’ensemble sur allure urgente et dégringolante. Le groupe résume tout ce qu’il sait faire pour nous entraîner dans leur pas de danse dans un titre destiné à être un hymne de stade. 

Mais Franz Ferdinand nous surprend davantage par son final post-punk moderne et tranchant.  The Birds est un contre-pied, un poil sombre ainsi que moqueur et ironique sur son passé. Le groupe ne s’est jamais senti aussi libéré de ce qu’il a pu délivrer dans toute sa carrière et continue son envol : « No, the birds don’t care what the birds have done« . Si on navigue entre le chaud et le tiède tout au long de l’album, un sentiment ressort tout de même : la joie. Le groupe a gardé cette force à fournir des rythmes et des chants fédérateurs. Et pour ce fait, The Human Fear est un album agréable et divertissant qu’on recommande à écouter. 

Coup de coeur : Everydaydreamer, Hooked, Night & Day, The Birds

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