Revoilà un groupe rescapé de la fière époque du rock indé des années 2010 : The Horrors sont de retour avec leur sixième album studio, Night Life, sorti le 21 mars dernier. Que pouvons-nous encore attendre de ce groupe ? Après tant d’années de pratique, que nous ont réservé The Horrors pour cet opus ? Réponse dans les prochaines lignes…

Un début ancré dans un post-punk expérimental…
Leur histoire débute au milieu des années 2000 au beau milieu de la campagne londonienne. Adolescents, ils organisent de nombreuses soirées underground et finissent par se faire repérer, c’est ainsi qu’ils parviennent à mettre au monde un premier essai, Strange House, en 2007. A l’époque, leur look emo punk colle à la mode du moment. Mais le style musical de The Horrors, oscillant entre le garage et le post punk, se démarque et interpelle, notamment avec le tube de l’album, Sheena is a Parasite.
Quelques temps plus tard sort leur deuxième album, Primary Colours. Les Anglais se tournent vers un rock plus expérimental et progressif, avec des compositions allant crescendo dans le psychédélisme. Le morceau phare de cet album, Sea Within a Sea, est un savoureux mélange d’influences shoegaze, krautrock et post-punk. Un titre également plus électronique, nous offrant de belles nappes de synthé accrocheuses et envoûtantes.

… vers un virage new wave qui divise
Leur troisième effort, Skying, est jusqu’à présent leur projet qui aura eu le plus de succès auprès du grand public. Seulement, auprès des auditeurs de la première heure, ce revirement vers des morceaux plus contemplatifs et aux sonorités ambient fait débat. Certains diront que les Horrors se sont assagis, d’autres qu’ils se sont perdus à force d’expérimentations. On aime ou on n’aime pas, quoiqu’il en soit, l’album aura permis d’ouvrir les portes à un auditoire plus large et se place dans l’ère des années 2010.
Luminous sort quant à lui en 2014 et un changement majeur apparaît dans leurs titres : Faris Badwan troque sa voix caverneuse et lugubre pour une voix plus perchée. Une voix qui colle, certes, aux mélodies plus pop de l’album, mais qui marque aussi une rupture claire avec les débuts du groupe.
The Horrors iront toujours plus loin pour leur cinquième effort, V. Penchant cette fois-ci vers l’électro psyché, cet album nous fournit un son plus sombre et saturé (Ghost). Des morceaux longs et hypnotisants parcourent tout l’album, mais V surprend par des sons plus dansants par moment (Press Enter To Exit). Un album mieux réussi que le précédent, mais qui surprend toujours et laisse douter sur la direction que le groupe souhaite prendre, entretenant le mystère.
Un désir de retour aux sources
Premier album de leur carrière à ne pas inclure les 5 membres originels, Night Life a été majoritairement façonné par Faris Badwan et Rhys Webb (bassiste). Lors du processus de création de l’album, ils sont rejoints par la claviériste/synthétiseuse Amelia Kidd et le batteur Jordan Cook. Les deux musiciens ont apporté des précieuses idées de compositions et de production, faisant d’eux des membres à part entière du groupe à l’issue de ce projet.
Ce dernier débute par le céleste Ariel. La voix envoûtante de Faris nous emporte dès les premières secondes, accompagnée de vagues de synthés et une ambiance cold wave presque dansante absolument magnifique. Un texte poétique accompagne cette ambiance hypnotique. Le ton est donné pour Night Life : un démarrage réussi, des frissons garantis.
La suite ne va pas nous laisser en reste, et le groupe semble avoir retrouvé la flamme qui l’habitait à ses débuts, replongeant dans une ambiance darkwave et rock brut qui ont conquis le public il y a une quinzaine d’années. La troupe des horreurs a su tout de même apprendre de ses dernières expérimentations et a trouvé le parfait dosage entre rock progressif, noise, électro et ambient.
Avant de poursuivre la lecture, prenez le temps d’admirer le clip d’Ariel et de vous plonger dans l’ambiance captivante de l’album…
La première partie de l’album nous déverse de rock très dark (Silent Sister), presque garage et industriel (Trial by Fire). On retrouve la voix sombre et lugubre de Faris qui a tant manqué ces dernières années sur l’excellent The Silence That Remains. A l’écoute de ces trois premiers titres, The Horrors étonnent par un retour à un rock gothique plein de rage. L’union entre des guitares saturées et des synthétiseurs planants est totalement réussie. Ces années d’expérimentation semblent avoir payé afin que The Horrors nous dévoile leur identité musicale aboutie.
Un équilibre électro-rock parfait
The Feeling Is Gone semble faire doucement une transition vers la seconde partie de l’album. On retrouve ici un morceau ambient, comblé par des percussions régulières qui vont nous bercer tout au long du titre. La voix du chanteur fait toute la mélodie, appuyée par de douces nappes de synthés : hypnotisant.
Cette seconde moitié de parcours se montre plus douce mais également plus électro-pop. Lotus Eater, le titre le plus long de l’album avec ses 7 minutes 13 de cold wave électro, nous invite à savourer l’instant présent face au temps qui passe plus vite de jour en jour. On passe d’une atmosphère ambiant électro à un rythme frôlant la bass music (en plus dark, tout de même). Une énième démonstration du savoir-faire de The Horrors en termes de mélange de genres.
Le voyage continue avec le titre More Than Life et sa vibe shoegaze / pop électro délicieuse. Le chant toujours caverneux vient d’ailleurs contrebalancer cette ambiance légère. Le rythme retombe sur l’avant dernier titre et When The Rhythm Breaks porte très bien son nom. Des vagues de synthés tout en reverb enveloppent l’auditeur, en faisant un son presque méditatif. L’occasion de faire une pause après tant d’émotions sur Night Life.
Pour clôturer l’album, LA Runaway revient à un pop-rock plus classique et des mélodies entraînantes. Le morceau clôture joliment un magnifique album.
Pari réussi pour le quatuor anglais
Après plusieurs années à se chercher, le groupe a visiblement trouvé sa voie et nous avons bien fait de leur faire confiance. Leur musicalité est unique dans l’univers du rock moderne. Un savant mélange de rock garage/progressif et d’électro pop hypnotique, voici la recette finale de The Horrors. Ainsi, Night Life se tourne vers notre part d’ombre et nous pousse à suivre les disgressions nocturnes de notre esprit.
Les Anglais auront probablement su regagner les cœurs de leurs fans des premiers jours avec ce nouvel opus. L’ensemble est très bien produit et donne envie d’appuyer sur replay. Les Horrors ont ainsi montré leur résilience et ont fait preuve d’une implication totale pour délivrer leur sixième œuvre.
Pour les plus curieux d’entre vous, vous pourrez découvrir une série de vidéos pour l’ensemble des titres sur youtube. Ces visualisers nous plongent encore davantage dans l’univers sombre et captivant de The Horrors…
Crédits photo : Sarah Piantadosi