Après son superbe Nord apparu en 2017, Laura Cahen récidive dans l’excellence. La chanteuse a effectivement chamboulé notre année 2021 avec Une Fille, un album d’une immense poésie et d’une beauté rare, sorore et ardente. On l’attendait avec impatience et on a enfin réussi à mettre des mots dessus pour vous le présenter aujourd’hui ici-même.
Pour l’amour d’une fille
Véritable ode à toutes les filles de sa vie (en cet album réunies), Laura Cahen propose 12 titres d’une grande douceur et d’une encore plus grande force. Imaginés en collaboration avec Dan Levy, les morceaux baignent dans la modernité tout en gardant la guitare en guise de colonne vertébrale. On plonge volontiers dans leurs ondes electro-folk léchées pour y découvrir un monde infusé d’images et d’influences cinématographiques (La leçon de piano, Les heures sombres, La jetée, The Voices…) dans lequel la musicienne tient le premier rôle. On la retrouve au centre d’un disque très intime où elle ne se cache pas : sans jamais s’excuser, elle affirme son identité, elle célèbre sa féminité, elle brandit sa sexualité.
Dans un monde où il fait rarement bon vivre pour les femmes et surtout celles qui s’aiment entre elles, Laura Cahen amène quelque chose de précieux au paysage actuel. En effet, que ce soit dans ses thématiques ou dans son entourage (qu’elle présente avec beaucoup d’élégance dans sa série #unefillevueparunefille sur son compte Instagram), elle met fièrement les femmes au premier plan de son art et propose un renouveau certain de la scène musicale actuelle.
On ira devant la mer pour inventer le vent / Le ventre à l’air
J’ai toujours cette bague / Je me souviens la jeter
Être une fille
Bien qu’on y trouve de belles fulgurances niveau production, on remarque également des titres plus organiques au sein d‘Une Fille. On pense évidemment au magnifique et bouleversant Coquelicot, teinté de nostalgie et raconté par le sublime bouquet que forment les voix de Laura Cahen et Yael Naim ensemble. Cette merveille de lyrisme trouve parfaitement sa place au cœur d’un album où la poésie est reine et règne : la plume de l’autrice manie les mots avec aisance et nous mène avec volupté de part et d’autre de l’œuvre.
D’une intelligence fabuleuse, l’album nous transmet des émotions pourtant bien personnelles à la musicienne. Si la vulnérabilité est propre à chacun•e, il y a toujours au fond d’elle un côté plus ou moins universel que certaines âmes parviennent à nous renvoyer en pleine figure (et on les remercie pour ça). Ici, la chanteuse se raconte profondément via ce tableau musical vers lequel on aime s’approcher pour bien saisir les détails. Aérien, brûlant, nostalgique, fier, sensible et au moins une bonne douzaine d’autres choses, ce nouveau projet profondément sincère et féministe a mille visages cachés derrière le bel écrin qu’est cette pochette pleine de tendresse où figurent Laura Cahen et Charlotte Wensierski enlaçées.
Comment respirer au fond de l’eau
Dis, quand refleurirons les coquelicots?
On rira souvent de pair pour oublier demain
Les mains en l’air
Te toucher, te toucher dans le noir
Je m’y suis noyée, c’est trop tard
Une fille dans le vent
L’album, dévoilé en plein milieu d’une période particulièrement atypique pour le monde du spectacle (vous connaissez la chanson), a tout de même pu vivre en dehors du format disque à travers de nombreux clips et live sessions (réalisé•e•s par Kahina Le Querrec, Zacharie Ellia, Edie Blanchard…) et même au cinéma puisque La complainte du soleil figure dans la bande originale du splendide J’ai perdu mon corps de Jérémy Clapin. Nous espérons évidemment qu’il vivra encore longtemps et nous nous réjouissons d’avance de découvrir cette beauté comme il se doit en vrai-de-vrai concert. Laura Cahen se produira notamment le 23 novembre 2021 à La Maroquinerie à Paris.
Le Soleil est moins fort
Depuis que tu dors, il sommeille
On peut rougir le feu / Qu’est-ce que ça peut vous faire
Si je préfère dans ma vie une fille?