Structures ne recherche pas le temps perdu

Le temps est quelque chose qu’on ne rattrape jamais vraiment. Pourtant, il est sans doute ce dont on a le plus besoin et une des denrées les plus importantes dans nos courtes existences. Structures a perdu du temps sans doute, mais les amiénois ont surtout vécu des épreuves qui les ont fait grandir et murir. La preuve avec ce diptyque « Expectations/Nothing Ever Lasts », deux morceaux en un, entre l’attente et la rébellion, la fin d’une période et la vision d’un futur qui s’annonce bouillant.

Crédit : David Tabary

On ne rattrape jamais vraiment le temps perdu. On peut combler les trous, on peut les boucher, mais ce qui est gâché l’est à tout jamais. On regarde en arrière et on constate, on grandit et on avance et il nous reste deux solutions : l’accepter, et évoluer, ou continuer de vivre dans les regrets d’un passé et des espérances qu’il laissait envisager.

Structures l’a bien compris, et revient avec un ton plus grave, plus menaçant, mais toujours plus enragé. Ressoudé autour de Pierre et Marvin, ces deux nouveaux titres semblent nous prendre à témoin et nous prévenir : il n’est plus question ici de répondre aux attentes de chacun, même les leurs, de suivre dans les règles préétablies ou se fondre dans la masse.

Les épreuves et la vie les ont amenés là où ils sont aujourd’hui, et c’est avec ces armes qu’ils ont décidé de se battre. Expectations / Nothing Ever Last est une note d’intention assez claire, un titre scindé en deux qui sent la rage de vivre, la violence et l’envie de s’en sortir. S’élever au dessus de ses angoisses pour les transformer en une force vitale.

Loin de Sorry I Know Is Late ou de Robbery, la poésie de Pierre ne se cache plus dans des provocations ou dans l’image surannée d’un rockeur un brin toxique qu’on a voulu lui coller à tort. Derrière ces oripeaux néfastes, le garçon s’offre la renaissance d’un phœnix avec ces nouveaux morceaux. L’idée ici n’est plus de jouer, mais bien de foutre ses tripes sur la table.

Cela se ressent autant dans les mots que dans l’interprétation. Tout provient du ventre et du cœur, des zones d’émotions primaires. On sent ici la douleur et la misère qui font naitre une sorte de vérité forte, un truc qui brûle les doigts et la langue, un crachat acide qui nous emporte avec lui, qui détruit les peurs grâce à la musique.

À ce pendant du mot, il faut saluer l’autre grand point fort de Structures : les ambiances. Dans ces 7 minutes, le groupe nous entraîne dans ce qu’ils font de mieux : une tempête aussi brutale qu’inattendue, portée par tout le talent musical de Marv. Car ici, la musique colle encore plus aux mots et aux humeurs qu’ils délivrent. Ainsi, Excpectations se vit comme une comptine macabre, une ritournelle presque enfantine dans laquelle les ombres deviennent de plus en plus menaçantes, des monstres cachés dans les fourrés faisant briller leurs dents sur ces notes de synthés lancinantes et cette batterie martiale et entêtante. On pénètre dans cette chanson un peu perdu, un peu craintif, et c’est là que Nothing Ever Lasts intervient.

Quand la tension devient presque irrespirable et intenable, c’est la violence qui prend le pas. Les mots ne changent pas, mais tout ce qui les entoure, oui. Ils prennent un tour nouveau, plus rageur, plus humain aussi, alors que la guitare et la basse, signature ultime de Structures, font leur entrée. Un « réveil en fanfare » qui nous fait quitter le rêve pour nous confronter à la réalité. Cette envie de vivre plus que tout, de retrouver le cours de son existence, en laissant le passé derrière soi.

Le futur s’annonce brillant, on en est sûrs et certains. Et quatre ans après un premier EP qui continue encore de nous secouer, on se remet à espérer l’arrivée tant attendue du premier album de Structures.

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