Le trio de musique électronique FORM composé d’Hausmane, Adrien et Aksel vient de dévoiler dévoilé Amal, un EP en hommage au Liban et à son peuple. C’est justement Hausmane Franco-Libanais qui a initié ce travail, en réaction à son impuissance face à la situation du pays et le sort de ses proches présents sur place, c’est tout naturellement que le groupe a mis en commun sa force créatrice pour nous proposer Amal, un condensé de tristesse, de révolte mais surtout d’espoir.
Amal c’est un projet qui réunit plusieurs artistes autour d’un seul même ensemble, la force d’un art qui rassemble et panse les plaies, un art qui dénonce, relate d’une réalité dure mais bien existante, un art qui encourage et rend hommage.
La première sensation du projet, c’est la pochette de l’EP qui nous la procure, réalisée par Ivan Debs, illustrateur et graphiste dont le travail a résonné en plein coeur de la révolution libanaise, comme avec ce phoenix (ci-dessous) se dressant face à la corruption et porté par les points rageurs et déterminés d’une foule qui clame sa liberté.
C’est donc tout naturellement que la collaboration entre FORM et Ivan Debs s’est créée, l’artiste dévoile ainsi une pochette pleine de sens, un homme qui marche sur les cendres d’un pays en feu, en proie au chaos et à la destruction, l’explosion dans le port de Beyrouth n’est en fait que la résultante d’années d’un pouvoir qui aura creusé une frontière immense avec son peuple.
L’image est forte, mais le personnage que l’on visualise est entouré d’une percée dans les flammes et la fumée, une lumière vive qui contraste avec la noirceur des débris qui jonchent le sol, c’est l’espoir, symbole fort et conforté par un vent de liberté, une petite brise qui laisse flotter l’écharpe de notre protagoniste.
Le premier morceau, The switch, est un concept qui est le fruit de la rencontre entre Hausmane et Sofiane Saidi, l’artiste algérien à la voix grave et hypnotisante.
Leurs discussions sur ce que représente la liberté ont amené cette image d’éteindre et allumer un interrupteur dans les consciences tant que le liberté n’est pas acquise, c’est cet interrupteur que le peuple éteint pour lutter et clamer ses droits.
« Till I turn it on », en effet ce n’est que lorsque les choses auront changé que chacun pourra rallumer cet interrupteur qui guide les choix d’une vie normale.
Ce qui s’apparente à un renoncement temporaire à son propre confort et à sa trajectoire de vie est en fait une étape pleine de courage pour construire un avenir et un confort collectif, une base solide de droits pour un peuple qui trouvera dans ce socle le pouvoir nécessaire pour que chacun à son tour puisse reprendre son élan personnel, guidé par une force collective magnifique.
La musique extrêmement rythmée habille par des sonorités si mélodieuses propres au moyen-Orient un propos fort et émancipateur.
Beirut est un morceau qui rend hommages aux victimes de l’explosion dans le port de la ville, on y entend des samples de vidéos et audios provenant de proches d’Hausmane qui témoignent de l’horreur sur place.
Le morceau qui nous happe par son intensité et son poids émotionnel est très marqué par la conversation entre Hausmane et une de ses proche, on ressent beaucoup de détermination dans sa voix et cette phrase qui clôt le morceau « we’re searching for justice » voilà l’état d’esprit du peuple libanais qui abandonné et manipulé par son gouvernement ne recherche qu’une chose, encore et toujours, la liberté.
Amal est aussi l’occasion pour FORM de collaborer avec Yasmina Hilal photographe et amie d’Hausmane qui a documenté l’après de l’explosion du port de Beyrouth, en mettant en avant des hommes, des femmes et une jeunesse, tous brisés par la violence de cette catastrophe et dont leurs corps portent les stigmates. Ce sont les cicatrices indélébiles d’un peuple laissé pour compte.
Malgré le dureté de ces images, la photographe arrive à nous montrer l’infinie beauté de ces visages et de ces corps, des humains traumatisés certes mais profondément vivants, toujours.
Yasmina Hilal a également réalisé la vidéo qui accompagne le morceau Came out here et qui déverse un flot d’émotions incroyable, cette voix chaleureuse mais emplie de gravité nous illustre ce qu’est l’amour d’une terre, les fredonnements de fin du morceau donnent une présence physique à cet amour si entier que les libanais portent à leur pays.
Plus qu’un simple fredonnement, c’est le murmure d’un peuple, qui se battra coûte que coûte pour rendre au Liban ce doux sentiment de liberté.
L’EP de FORM se termine avec le morceau Thawra, révolution en libanais, ce titre prend aux tripes par sa force, les chants de protestation résonnent, les percussions suivent une cadence infernale, les basses sont graves, presque assourdissantes, c’est une montée en puissance qui avance tel un cortège de manifestants et qui scande, comme un seul homme la voix du peuple.
C’est un morceau gorgé de détermination, de colère et de revendication, il est le relai du courage dont font preuve les révolutionnaires qui se battent chaque jour pour obtenir la paix, car la paix reste un combat.
Amal se fait le relai d’un pays en proie aux tragédies mais qui vit et vivra toujours au travers de son peuple.
Un peuple qui fait preuve d’une formidable entraide, par sa jeunesse porteuse de sens et désireuse de changer les choses.
FORM et le halo de création qui les a entouré autour de ce projet nous donnent une manière poignante de visualiser, d’entendre et surtout de comprendre ce que vivent les Libanais et par dessus tout ressentir ce qui les anime.