Beth Orton : « J’ai l’impression d’avoir passé ma vie à dormir et que je viens de me réveiller »

Une force mystérieuse émane de Weather Alive. Le dernier album de Beth Orton est comme hanté, habité par des fantômes du passé, par des sentiments longtemps non-exprimés, par des éléments sortis de l’inconscient… l’album est une exploration introspective d’où semble émaner des secrets que l’on tente de saisir à chaque écoute. Nous avons pu poser quelques questions à la musicienne anglaise alors qu’elle rentrait d’une grande tournée. Nous avons parlé de flux de conscience, de Proust et du processus mystérieux du temps qui passe… 

Beth Orton
Crédit photos : Eliot Lee Hazel

ENGLISH VERSION BELOW

Beth Orton : Salut ! Comment ça va ?

La Face B : Bonjour ! Je vais bien. Comment ça va ?

BO : Oui, bien. Merci.

LFB : Weather Alive est sorti il y a quelques mois maintenant. Es-tu satisfaite de l’accueil qu’il a reçu jusqu’à présent ?

BO : Oui, très heureuse de la façon dont il a été reçu.

LFB : Et tu reviens d’une grande tournée et cela faisait un moment que tu n’avais pas joué en live…

BO : Amérique, Royaume-Uni… et Europe. Et oui, ça a été une année mouvementée. C’est fou. Je sais. De nulle part !

LFB : J’ai lu que tu avais longtemps souffert d’une maladie mal diagnostiquée, et que lorsqu’elle a finalement été correctement traitée, une partie de cette maladie ne pouvait être guérie qu’en faisant de la musique, en jouant du piano en particulier. La réalisation de cet album a-t-elle été un processus de guérison pour toi ?

BO : Enfin… oui, les médicaments (“drugs” en anglais) aident (rires). Les médicaments peut-être plus que la musique. Je n’aurais pas été capable de faire la musique sans les médicaments. Mais enfin c’était très thérapeutique. Oui, je pense que cela l’a été. Je ne voulais pas nécessairement que ça le soit. Ce n’est pas comme si j’avais fait un détour pour l’utiliser comme une sorte de thérapie, mais au fil des années, ça l’a été. Ça m’a beaucoup aidé. Oui.

LFB : Et le piano sur lequel tu joues est un instrument délabré…

BO : Enfin, c’est un très beau piano. Il est juste très vieux. Pas si délabré que ça. Il ne tombe pas en morceaux. Mais oui, il n’est pas immaculé. Mais quel instrument est immaculé si vous y jouez ? Il ne va pas être immaculé très longtemps. Mais il est vieux, oui. C’est un vieux que j’ai trouvé à l’arrière d’une boutique à Camden. Un atelier de réparation à Camden Passage. C’était juste un vieux type, mais pour moi très beau. Il avait ce son très chaud et profond, on entend les échos de beaucoup de notes en le touchant à peine. C’est un piano très sensible.

LFB : Est-ce que c’est celui qui a été utilisé sur l’album ? Ou est-ce seulement celui que tu as utilisé pour composer ?

BO : Oui, uh huh.

LFB : Il y a une sérénité dans l’album, presque un contentment et une forme de mélancolie. Dans quel esprit tu étais quand tu as composé l’album ?

BO : Il y a définitivement de la mélancolie. J’étais confrontée à beaucoup de chagrin quand j’ai écrit l’album. Je pense que pendant de nombreuses années j’ai mis beaucoup de choses en attente parce que je voulais vivre et aller de l’avant, et ne pas vraiment exister dans le passé.

Je voulais avoir, je ne sais pas, même si les chansons que j’ai écrites dans le passé ont été très émouvantes aussi, c’était un moment où je devais faire face à ce que j’avais réussi à fuir je suppose. J’ai donc été confrontée à moi-même et à ma vie. Et pendant que j’écrivais les chansons, je revivais le passé, d’une certaine manière. Lorsque j’écrivais les morceaux, je trouvais que j’étais capable de retenir le passé dedans et en même temps le laisser partir. Donc, oui.

LFB : L’album est une exploration sublime et sensorielle, qui me donne l’impression d’être, si ce n’est hanté, presque fantomatique, comme habité. Et j’ai l’impression qu’il y a un nouveau niveau de mystique avec cet album. Est-ce que tu es d’accord ?

BO: Oui, je suis tout à fait d’accord. Oui, je pense que j’ai mis beaucoup de temps à grandir. Pas grandir, ça sonne comme une sorte de punition, mais devenir qui je suis.

Quand j’avais 33 ans, j’avais l’impression d’être vieille. Et puis maintenant… c’est très intéressant parce que je n’ai pas vraiment de schéma pour l’âge.

J’ai perdu ma famille quand j’étais jeune donc je n’ai pas de personnes vraiment âgées autours de moi. J’ai des amis et j’en ai beaucoup, mais je n’avais pas cette compréhension du « devenir qui nous sommes », et combien c’est plus satisfaisant en tant qu’artiste et en tant que personne de vraiment s’installer dans mes os et de s’installer dans qui je suis, et dans le travail que je fais. Je pense que c’est un processus mystérieux. Et je trouve que le temps est un processus mystérieux.

J’ai aussi toujours l’impression que je n’ai pas beaucoup de temps. J’ai donc vécu avec cette sorte d’insistance à faire. Puis je pense que la pandémie a été le moment où j’ai dû m’abandonner à ce qui était, et c’est aussi à ce moment-là que les chansons sont devenues leur propre temps (“weather”) et leur propre… Je ne sais pas. Elles se sont imposées aussi, peut-être.

LFB : Le titre Weather Alive est expansif et a une aura vaste et changeante. Peux-tu nous parler un peu de ce titre et de la chanson qui a donné son titre à l’album ?

BO : C’est définitivement… Je pense que pour moi, d’une certaine manière – mais je l’ai déjà dit – le confinement et tout cela était moins isolant que la vie que je menais. Et j’ai commencé à écrire cette chanson bien, bien, bien avant. Toutes ces chansons ont été écrites avant le confinement. Mais elles ont été terminées pendant, elles ont été peaufinées.

Et Weather Alive parle d’un sentiment personnel d’isolement dû à une mauvaise santé, à la façon dont cela m’a affectée mentalement. Et une sorte de perte de confiance et oui, juste une décomposition de manière vraiment importante. Je pense qu’à certains moments de ma vie, il y a eu de nombreuses périodes où j’ai eu l’impression d’être à l’intérieur et que le monde se passait à l’extérieur et je peux le voir. Et c’était dévastateur pour moi de vouloir atteindre la nature, autant que je voulais atteindre ma nature intérieure. Je veux atteindre l’extérieur, c’est donc comme une sorte de bataille.

Ce qui est amusant, c’est que pendant cet enfermement et la période d’écriture, je me suis soudainement sentie plus… J’ai déménagé dans ce quartier de Londres où je suis près de la lande (heath). Je pouvais y aller et je me suis retrouvée capable de m’immerger dans la nature peut-être – bizarrement, paradoxalement – plus en ville. J’étais capable de trouver cette immersion que je cherchais. Je m’asseyais vraiment dans la nature, je marchais tous les jours et j’écrivais beaucoup dans ma tête. On pense, on pense, on pense, et à un moment donné, la musique a pris le dessus et s’est impliquée aussi.

Et puis, je suppose qu’une fois le disque terminé, c’est devenu une chanson sur l’époque dans laquelle nous vivons. Je pense que l’un des aspects extraordinaires de la pandémie a été de voir le monde se dérouler en temps réel. On ne pouvait pas échapper à la réalité du changement climatique, du racisme, des structures politiques qui s’effondraient. Et je pense que, rétrospectivement et simultanément, la chanson parle de ce climat dans lequel nous vivons et que nous sommes de moins en moins capables d’atteindre, parce qu’il devient de plus en plus sauvage et prend une vie propre. Ce sont quelques pensées sur cette chanson…

LFB : Le titre a-t-il un lien quelconque avec Andrew Weatherall? (musicien/producteur/dj anglais décédé récemment et avec qui Beth Orton a travaillé par le passé).

BO : C’est vraiment bizarre ! Tu sais quoi ? C’est tellement bizarre, putain ! C’est comme si… c’est si drôle ! J’ai cet ami qui s’appelle Magic Al. Il s’appelle Alex et il n’a pas remarqué la magie. Je n’ai pas fait le lien avec « Weather Al », je ne l’ai pas vu ! Mais je pense qu’il y a quelque chose de si beau là-dedans. Mais oui, ce que j’ai fini par comprendre, ce qui m’intéresse vraiment, c’est la partie de mon inconscient, mon subconscient, je ne sais jamais vraiment lequel est lequel, ou lequel joue quel rôle. Je commence tout juste à m’y intéresser.

Je pense qu’une partie de l’intérêt de Proust et de le relire encore et encore, d’écouter ces belles histoires, est de comprendre que l’inconscient travail vraiment tout le temps. Donc il y a une partie de mon cerveau, je le jure, qui a dû faire cette connection, mais pas mon cerveau conscient, non. Mais non, j’adore. Honnêtement, j’étais comme, « Oh mon Dieu ». Je n’ai réalisé que récemment. C’est drôle, non ?

LFB : Y a-t-il une chanson de l’album qui te tient particulièrement à cœur et dont tu aimerais parler ?

BO : Toutes les chansons me tiennent à cœur. Je pense que je me suis rendue compte que Friday Night est une sorte de chanson d’amour à Proust. C’est une sorte d’amant qui me rend visite la nuit et chante dans le vide avec moi. Il y a une chose vraiment intéressante : mon cerveau conscient a changé quelques unes des paroles. Et je sais que j’ai l’air un peu folle là et j’ai presque envie d’étudier ça ! Je suis tellement fascinée par ça, par mon inconscient…

Quand j’écris des chansons, j’écris librement, je ne lis pas la musique ou je n’essaie pas de faire quoi que ce soit. Friday Night est sortie comme elle est sortie. Et il y a certaines paroles que j’ai changées. Et quand j’y suis revenue et que je les ai lues, je me suis dit : « Oh mon Dieu ! J’ai changé des paroles que j’aurais dû laisser ! » – seulement quelques-unes – parce qu’elles faisaient directement référence à ce genre de…

Parce que j’écoutais Proust en livre audio, et j’entrais et sortais de ma conscience… Et j’ai réalisé que j’avais toujours l’impression de ne pas être assez attentive, de ne pas écouter assez. Mais j’y suis revenue et je le lis et écoute à nouveau depuis l’enregistrement, et je me rends compte de tout ce qui est entré inconsciemment. C’est très intéressant.

Ce que j’aime dans les chansons c’est qu’elles ne s’arrêtent jamais d’évoluer. Je peux dire : « Oh, c’est à propos de ça », mais j’aime quand les années ou même les mois – en ce moment cela fait des mois – mais au fur et à mesure que le temps passe, je me dis : « Oh, je vois. Je vois ce sur quoi j’écrivais ».

Et c’est difficile d’y accéder la plupart du temps. Sauf quand je suis là et que je joue ou que je suis inspirée par le travail de quelqu’un d’autre. Et donc je peux émuler ce que j’ai fait. Bref, je pense que pour moi, c’est un peu comme si Friday Night et Weather Alive étaient le cœur mystérieux et le cerveau du disque. Et puis Unwritten est la colonne vertébrale…

LFB : C’était un peu ma prochaine question aussi. Tes paroles sont très poétiques et ressemblent presque à un flux de conscience. Je me demandais comment tu écrivais les paroles ?

BO : Oui, elles commencent toutes par un flux de conscience. Comme je l’ai dit, il y a une sorte de fil conducteur, c’est un courant de conscience. Et puis j’arrive et je me dis : « Ok, maintenant je vais arranger ça. » Et je dois faire très attention à la façon dont je l’arrange. Je dois prendre du recul, c’est ce que je suis en train d’apprendre. Prendre du recul par rapport à la musique, par rapport aux chansons. Prendre du recul et laisser le processus suivre son cours.

J’y reviens ensuite avec une sorte de… Même après je prends des notes, j’écris tout le temps, j’écris des mots, j’écris des pensées, j’écris… je prends des notes. Je suis une preneuse de notes, et je l’ai toujours été. Je peux me dire: « Oh, ça va avec ça » et puis je vais peut-être ajouter quelque chose de plus concret et bricoler, comme un puzzle, pour assembler quelque chose.

Mais encore une fois, l’esprit conscient veut que tout soit étanche, concret, réglé et fait et ceci et cela. Et il y a cette autre partie qui a besoin de fluidité. Donc quand j’écris maintenant j’essaie de permettre cette fluidité et de lâcher le contrôle d’une certaine manière, pour ne pas essayer d’être celle qui a les réponses, mais d’avoir confiance dans le fait que les réponses soient là. Je me suis lancée dans la musique avec tellement de questions dans ma vie personnelle, et puis oui, certaines d’entre elles ont eu des réponses.

LFB : Et tu as auto-produit cet album pour la première fois. Comment as-tu trouvé l’expérience ?

BO : J’ai adoré. J’ai adoré l’expérience. Ces esprits étaient évidemment… le groupe est incroyable, tous les musiciens, ce n’était pas exactement comme un groupe, mais c’était comme trois jours avec Tom Skinner et Tom Herbert et ainsi de suite. Magnifique.

Puis c’est tellement drôle parce que je suis tellement – j’essaie de trouver une bonne façon de le dire – soit peu sûre de moi, soit trop sensible aux autres. J’ai pu emmener tout ça chez moi, m’asseoir seule avec et découvrir ce que j’aimais dans tout ça. Je pouvais tout mettre à plat. Et penser : “En fait non !”.

Par exemple Friday Night, j’ai soudainement augmenté le rythme de 210 BPM parce que j’étais dans la pièce avec des gens et j’étais en train de jouer et j’étais toute excitée. Et puis quand j’étais seule, et que j’ai joué ça, j’étais comme : « Qu’est-ce qui s’est passé ? ». Je ne sais pas ce qui s’est passé parce que je ne suis pas à l’affut des BPM, ça n’a jamais été mon truc. J’ai toujours suivi le courant.

Et donc je suis retournée au piano naturellement, et j’étais comme, « Oh, putain, c’était comme ça. » Donc je l’ai refait et puis je me suis dit : « OK, j’ai besoin de tout ralentir à 98 ». Et j’ai envoyé ça à un ingénieur. Il m’a dit : « Ça va être merdique ». Et moi : « Tu peux le faire pour moi ? Je m’en fous ».

J’ai dû mettre la batterie en loop, prendre un peu de batterie et en mettre une autre en loop pour que ça sonne naturel. Et puis ce qui était la basse était devenu une sorte de, je ne sais pas, comme – on l’entend dès le début – c’est comme un drone. Et c’était magnifique.

Puis je l’ai envoyé à Shahzad Ismaily. Et j’ai demandé : « Peux-tu ajouter une basse ? » et puis j’ai rejoué mon piano, évidemment. Et puis j’ai dit : « Oui », puis je l’ai envoyé à nouveau à différents musiciens pour qu’ils jouent sur ce morceau, pour qu’ils jouent sur la chanson comme la chanson a été écrite, et non pas comme la chanson a été poussée dans le studio.

Une autre chanson comme Fractals s’est retrouvée dans ce rythme fou et cette ligne de basse que je n’aurais jamais imaginée. Dans mon studio, avant d’y entrer avec d’autres musiciens, je jouais avec le MIDI et je créais mes propres boucles de batterie avec des combo box, des boîtes à rythmes et n’importe quoi d’autre, comme frapper des objets sur des tables. Il n’était donc pas anormal de faire des choses comme ça. Mais en même temps, c’était très excitant d’être réel, et le mien était un peu taré.

Donc oui, et ensuite, par exemple, j’étais au milieu de ce processus, et pour Noël, je suis allée acheter des disques pour mon mari. Don Cherry’s Brown Rice et Alice ColtranePharoah Sanders… Et ils m’ont dit « Si tu aimes ça, tu devrais écouter ça » et ils m’ont tendu ce disque d’Alabaster DeplumeTo Cy and Lee. Et j’étais comme : « Oh mon Dieu ! » et c’est devenu mon disque de Noël et de toute cette année-là.

Je lui ai écrit personnellement parce que je connaissais Johnny (Lynch) de Pictish Trail, qui dirige son label (Lost Map Records), et je lui ai demandé : « Penses-tu que tu pourrais me mettre en contact avec ce type ? J’aimerais vraiment qu’il joue sur mon disque ». Je ne savais pas qu’il avait des relations, je ne voyais pas sa connection avec le monde du jazz londonien qui est assez petit. Mais pour mon cerveau, à ce moment-là, c’était très séparé. Je ne le voyais pas comme faisant partie d’un club…

Mais quoi qu’il en soit, je lui ai tendu la main et il m’a dit : « Super, oui ! Envoie-moi quelques morceaux. » Je lui ai envoyé quelques morceaux, j’ai eu une petite discussion avec lui. Il était charmant et ça a marché. Et des choses comme ça.

C’était au moment où tu me posais la question sur la production. Je suppose que j’ai toujours fait ça de toute façon, même quand je ne produis pas mon album. Dr. John était dans le studio quand j’ai fait Central Reservation et il est venu et a mis du piano. J’ai toujours fait ça.

Mais il y avait quelque chose de très satisfaisant à être capable d’être la personne qui l’insère dans la piste et qui s’assoit et écoute. Produire a été une expérience très créative, disons-le comme ça.

LFB : Et ma dernière question : Y a-t-il quelque chose que tu as découvert récemment ou que tu aimes en ce moment et que tu aimerais partager ?

BO : Il y a tellement de choses et pourtant, mon Dieu, que puis-je dire ? J’ai l’impression qu’en ce moment, je revisite tout à nouveau.

Une des choses qui a été si belle dans la réaction à ce disque, c’est que les gens ont noté qu’il leur rappelle Van Morrison ou Talk Talk, ou John Martyn, ou toutes ces influences que j’ai eues au fil des ans. Et les gens disent maintenant : « Oh, ça nous rappelle un peu ceci ou cela ». C’est presque comme si j’avais passé – je sais que ça peut paraître dramatique – mais j’ai l’impression d’avoir passé ma vie à dormir. Et j’ai l’impression que je viens de me réveiller. Comme si ce genre de processus m’avait réveillée. Je me suis réveillée pendant que je faisais le disque.

C’est un autre type de sommeil maintenant, comme je le disais, c’est comme tomber dans l’inconscient. C’est comme tomber dans la confiance. Et c’est en quelque sorte pour moi, une nouvelle façon de ressentir. Mais l’une des choses que j’ai faites récemment, c’est de retourner à Proust, à Tim BuckleyJohn Martyn et Joni Mitchell… comme si j’absorbais tout ce que j’ai aimé dans la musique des autres, et que je l’entendais d’une nouvelle manière.

Donc je ne sais pas, en nouvelle musique… j’ai aimé la chanson de l’album d’Angel Olsen (Big Time ndr) avec ce putain de battement de batterie, c’est tellement bon !

J’adore le nouveau disque de Tom Skinner (Voices of Bishara ndlr), et j’adore le disque de Tom Herbert (Eight Songs, w/ Greg Sanders et George Bird ndlr). Tout le monde est en feu, c’est une période très excitante !

Donc pour les gens que j’aime et avec qui j’ai vraiment envie de faire de la musique, je suis comme : « Wow ! ». Tout le monde fait tellement de belles choses en ce moment. Donc oui, je suis consciente de ça, je suppose.

LFB : Merci beaucoup !

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ENGLISH VERSION (V.O.)

Mysterious forces emanate from Weather Alive. Beth Orton’s latest album is like haunted, inhabited by ghosts, feelings which remained unexpressed for a long time, and elements risen from the unconscious… the album is an introspective exploration from which secrets seem to emanate and that we try to grasp every time we listen to the record.
We wanted to know more about this spellbinding album and asked questions to the English musician. We talked about stream of consciousness, Marcel Proust and the mysterious process of time…

Beth Orton: Hi! How are you?

LFB: Hello! I’m good. How are you?

BO: Yeah, good. Thank you.

LFB: Weather Alive has been out for a few months. Are you happy with the reception it has had so far?

BO: Yes, very happy with the reception it’s had.

LFB: You’ve just came back from touring and it had been a while you hadn’t played live…

BO: America, UK… Europe. And yeah, it’s been a hectic year. It’s crazy. I know. Out of nowhere!

LFB: So I’ve read that you’ve had been misdiagnosed for an illness for a long time that when it was finally properly treated some parts of it could still only be healed by music making and playing piano particularly. And I was wondering if making the album was kind of a healing process?

BO: I mean… yeah, the drugs help (laughs). Drugs maybe more than the music. I wouldn’t have been able to make the music without the drugs. But I mean, you know, it was very healing. Yeah, I guess it was. I didn’t mean it to be it. It wasn’t like I went out of my way to kind of use it as some kind of therapy but over the course of the years it did. It did help a lot. Yeah.

LFB: And the piano you’ve been playing on is a rundown instrument…

BO: I mean, it’s a really beautiful piano. It’s just very old. Not that rundown. It’s not like falling to pieces. But yeah, it’s not pristine. But what instrument is pristine if you play it? It’s not going to be pristine for long. But it is old. Yeah. It was an old one that I found in the back of a repair shop in Camden. It was just like an old guy, but to me very beautiful. And it had this very warm resonant sound you could hear the echoes of many other notes through just the most simple touch. It’s a very sensitive piano.

LFB: Was it the one used on the album? Or is it just the one you use to compose?

BO: Yes.

LFB: There’s a serenity about the album, almost a contentment and a melancholy and I was wondering what spirit where you were in when you composed the album?

BO: There is definitely melancholy. I was definitely working through a lot of sorrow when I wrote the record. And I think for many years, I put a lot on hold because I wanted to live and move forward and not really exist in the past. 

And I wanted to have, even though the songs that I’ve written in the past have been very emotional too, this was a time of reckoning with what I had managed to run away from I suppose. So I was really confronted with myself and my life. And during the time of writing the songs I was sort of reliving the past possibly in some ways. And as I wrote the songs, I would find that I was able to hold the past in the songs and at the same time, let it go. So, yeah.

LFB: The album is a sublime and sensory exploration, which to me feels like, if not haunted, it feels really ghostly almost, like inhabited. And it feels like there’s a new level of mystique with this album. Would you agree?

BO: Yeah, I definitely would agree. I think that I’ve taken a really long time to grow up. Not grow up – that sort of seems kind of punishing – but to grow into who I am. Like, I felt when I was 33 that I was old. And then now… it’s very interesting because I don’t really have a blueprint for age. 

I lost my family when I was young. So, you know, I don’t have old people, I have friends – and I have many different – but I didn’t have this understanding of becoming who we are, and how much more fulfilling that is actually as an artist and as a person to really settle into my bones and to settle into who I am, and into the work that I make. I think that that is a mysterious process. And I think time is a mysterious process. 

I always feel like I don’t have much time. So I have lived with this kind of insistence on doing. Then I think the final surrender was the pandemic and I had to finally really truly give in to what is. That’s also when the songs became their own kind of weather and their own. They came into their own too maybe.

LFB: The title Weather Alive is expansive and has a wide and ever changing mood to it. Can you tell us a bit about this title and the song that gave the album its title?

BO: I think, for me, in a way – but I’ve said this before – the lockdown and all of that was less isolating than the life I’d been living. And I started writing that song way, way, way before. All these songs were written before the lockdown but were finished during the lockdown. They were kind of finessed. 

And Weather Alive was about a personal sense of isolation due to ill health, due to how that affected me mentally. And a kind of loss of confidence, and yeah, just to kind of break down in a really important way. I think at some points in my life, there’s been many periods where I feel I’m inside and the world is happening outside and I can see it and it’s devastatingly moving to me to want to reach nature, as much as I want to possibly reach my inner nature. And I want to reach outside, so it’s like this kind of battle. 

I moved to this area of London where I’m near the heath. And so I could go and I found myself being able to immerse myself in nature possibly more, oddly, paradoxically, being in a city. I was able to find that immersion that I was looking for. Like really sit with nature and I would walk every day and write in my head a lot. You think and think and think and at a certain point the music kind of came and took over and got involved as well. 

And then I suppose once the record was finished, it became a song about the time that we’re living in. I think one of the extraordinary things about being in the pandemic was watching the world happen in real time. Like we couldn’t escape the reality of climate change, racism, the political kind of structures were falling apart. And I think in a retrospective way and in a simultaneous way, the song became about this weather that we live within that we are getting less and less able to reach because it’s getting wilder and wilder and it’s taking on a life of its own.

LFB: Does the title has any connection to Andrew Weatherall at all (English musician/producer/dj who died recently and whom Beth Orton worked with in the past ndr) ?

BO: That’s so weird! Do you know what? That’s so f***ing weird! It’s like it’s so funny as I have this friend called Magic Al. His name is Alex and he never even connected the magical. I didn’t connect Weather Al, I didn’t! But I think there’s something so beautiful in that. But yeah, what I have come to understand is what really interests me is the part of my unconscious, my subconscious, I’m never quite sure which is which, or which plays which part – I’m just starting to get involved in that. 

And I think part of the thing of reading Proust and read it over and over again, listening to those beautiful stories, is this understanding that the unconscious is doing so much work all the time. So there’s some part of my brain, I swear to God, that made that connexion, but not my conscious brain, no. But no, I love that. I honestly I was like, “oh my God”. It only came to me recently. Isn’t that funny?

LFB: Is there a song on the album that is particularly close to your heart that you’d like to talk about?

BO: I mean, all the songs are close to my heart. I think I’ve come to realise that Friday Night is a sort of love song to Proust. It’s like this lover that visits me at night and sings into the void with me you know. There’s a really interesting thing with it too in that my conscious brain changed a couple of the lyrics of that song. I know I might sound a bit nuts right now and I almost want to study this. I’m so fascinated by it, my unconscious…

When I write songs, I write freeform, I don’t read music or try for a thing. So Friday Night just came out as it did. And then when I went back and read the words I’d written, I was like, “oh my God! I changed lyrics that I should have left!” – only a couple – because they directly referenced this kind of very… 

Because I would listen to Proust on audio book, and I would come in and out of consciousness… And so I realised I always felt like I wasn’t taking enough in I wasn’t listening enough. But now I’ve come back and I’m reading and listening again since the record, and I’m realising how much went in unconsciously, subconsciously. It’s so interesting. 

What I love about songs is they never stop evolving. I can say “Oh, it’s about this”, but you know, I love as the years or even months – at the moment it’s been months – but as it passes, I’m like, “Oh, I see. I see what I was writing about”. 

And it’s hard to access most of the time. Other than when I’m there and playing or inspired by someone else’s work. And then I can mirror what I’ve done. So anyway, I think for me, it’s Friday Night and Weather Alive got a kind of mysterious heart and brain of the record in a way. And then Unwritten is the spine.

LFB: It was a bit my next question as well. Your lyrics are very poetic and they almost look like a stream of consciousness. I was wondering how you went about writing the lyrics?

BO: Yeah, they all start with a stream of consciousness. There’s this kind of thread that runs through and it’s a stream of consciousness. And then I come in and I’m like, “Okay, now I’m gonna arrange that.” And I have to be so careful how I arrange it. 

I have to stand back is what I’m learning. Get out of the way of the music out of the way of the songs and stand back and let the process take its kind of course. I then come to it with a kind of more… Even then, you know, I make notes I write all the time I write words, I write thoughts, I write… I make notes. I’m a note taker, and I always have been. So then I can put on like “Oh, that ties in with this” and then I’ll maybe pull in something more concrete and fiddle around like a jigsaw puzzle, putting something together. 

But again, you know, the conscious mind wants to make everything watertight, concrete, set and done and this and that. And there’s this other part that needs fluidity. So when I write now, I try to allow for that fluidity, and to hand control in a way to not try and be the one with the answers, but to trust that the answers are there. I came into this music with so many questions in my life in my personal life and then yeah, some of them have been answered.

LFB: And you’ve self-produced this album for the first time. How did you find the experience?

BO: I loved it. I loved the experience. These minds were obviously… the band’s amazing and you know, all the musicians. It wasn’t exactly like a band but it was like three days with Tom Skinner and Tom Herbert and so on and so forth. Beautiful.

But then, it’s so funny because I’m so – trying to think of a nice way of putting it – either insecure, or oversensitive to other people. That to have the chance to take this all home and sit on my own with it and just figure out what I liked of what there is.  Like, just lay it all out and think “Actually no!” 

For example, Friday night suddenly had got sped up 210 BPM because I was in the room with people and I was performing and got all excited. And then when I was on my own, and I played this, it was like, “what’s happened?”. I don’t know what’s happened, you know, because I’m not looking out for BPM it’s never been my thing. Really. I’ve always just like, gone with the flow. 

And so I went back to the piano anyway, just naturally, I was like, “Oh, fuck, that’s what it was like.” So I could go and then I was like, “Okay, I need to slow everything down to 98”. I sent that to an engineer because I was just like, I don’t know how to do that. And he was like “It’s gonna sound shit”. And I was like “Could you just do it for me? I don’t care”.

I had to like loop the drums, take a little bit of drums and then loop another bit of drums to make that sound natural. And then what was the bass had become this kind of, I don’t know, like, you hear it from the beginning, it’s like a drone, you know? And that was beautiful. 

Then I sent that to Shahzad Ismaily. And I was like “Can you now add bass?” and then I replayed my piano obviously. And then I said “Yeah”, then I sent it out again to different musicians to play to that track, to then play to the song, you know, how the song was written, not how the song got kind of nudged in the studio. 

For good or bad because another song like Fractals got nudged into this crazy beat and baseline that I just would never have expected. Having said that, I did have a bizarre… like in my studio before I went in with other musicians, I was playing with like MIDI and making my own drum loops with combo boxes and drum machines and fucking anything, like hitting things on tables. So it wasn’t unnatural that they should do something like that. But at the same time, it was very exciting to like be real and like, mine was kind of a little bit mental. 

Then, for example, I was in the midst of this process, and for Christmas I went in to buy some records for my husband: Don Cherry Brown Rice and you know, Alice ColtranePharoah Sanders… And the shop assistants were like « If you like that, you should hear this ». They handed me that Alabaster Deplume record To Cy and Lee. And I was just like “Oh my God!” and it became my record of the Christmas period and that whole year.

I wrote to him personally because I knew Johnny (Lynch) from Pictish Trail, who runs his label (Lost Map Records), and I was like “Do you think you could put me in touch with this guy? I’d really love him to play on my record”. I didn’t know that he was connected. I didn’t see any connection with the London jazz world, it’s all quite small.

But to my brain at that point, it was very separate. I didn’t see him being part of a kind of club… But anyways, I reached out, completely open and he was just like “Great, yeah! Send me a couple of tracks.” I sent him a couple of tracks, had a little chat with him. He was lovely. And it worked out, you know, and stuff like that. 

It was like, in the midst of you asking about production, I guess. And I guess I’ve always done that anyway, even when I’m not producing my record. I’m always excited by something and bringing people in. Dr. John was in the studio when I made Central Reservation and he came by and put some piano down, you know, I’ve always done that. 

But there was something very satisfying about being able to be the person who plops it into the track and sits back and listens. Producing was a very creative experience. Put it like that. 

LFB: And my last question: Is there something that you’ve discovered recently or something that you’re into at the moment that you would like to share?

BO: There’s so much and yet, gosh, what can I tell you? I feel like at the moment, I’m revisiting everything again. 

One of the things that’s been so lovely about this response to this record is that people have noted that it reminds them of Van Morrison or or Talk Talk, or John Martyn, or all these influences that I have had over the years. And people are now saying “Oh, it reminds us a bit of this, that, and the other. It’s almost like I feel like I’ve spent – I know this sounds maybe dramatic – but I feel like I’ve spent my life a little bit asleep. And I feel like I’ve just woken up. Like this kind of process has been awakening. I’ve been waking up while I was making the record.

It’s a different kind of sleep now, like I say, it’s like falling into the unconscious. It’s like falling into trust. And it’s kind of for me, it’s just a really new way of feeling. But one of the things I have been doing recently is going back to Proust, going back to Tim Buckley, John Martyn and Joni Mitchell… like just soaking up all that I have loved in other people’s music, and hearing it in a new way. 

There’s been bits and bobs like I’ve loved the song from the Angel Olsen record (Big Time ndr) because of that fucking drumbeat, it’s soo good!! And I love Tom Skinner‘s new record (Voices of Bishara ndr), and I love Tom Herbert‘s record (Eight Songs, w/ Greg Sanders and George Bird ndr). Everyone’s just on fire, you know, it’s a really exciting time! So for the people I love and that I really care about making music with I’m like “Wow!” Everyone’s making so much beautiful work right now. So yeah, that I’m aware of that, I guess.

LFB: Thank you so much!

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