Canblaster : « Les Chemical Brothers sont des légendes »

De passage à Rock en Seine, le jeune talentueux musicien Canblaster s’est joint à nous pour parler de son dernier album Libérosis, de ses références et d’un peu de technique électronique. Et comme c’est un artiste qui a fait ses classes au lycée Albert Châtelet et au conservatoire de Douai, on y est particulièrement attaché. Au programme de cette interview : Dice Live, Chemical Brothers, Neon Genesis et rollercoaster.

La Face B : Je suis ravi de faire ta connaissance. Je voulais savoir quel était ton état d’esprit avant d’aborder cette édition de Rock en Seine.

Canblaster : Moi, c’est un festival que j’aime bien. J’y étais hier, j’ai vu Massive Attack, c’était trop bien. J’avais vu Chemical Brothers et Overmono l’année dernière, qui sont deux groupes qui m’ont beaucoup inspiré pour le disque que je suis en train de tourner en ce moment. J’avais joué il y a longtemps, je suis très content d’être de retour ici. Et j’étais aussi voir mon pote Myd qui jouait hier soir.

La Face B : Ce soir, tu joues en même temps que LCD Soundsystem, une grosse tête d’affiche. N’est-ce pas un peu frustrant ?

Canblaster : Oui, ça fait partie du jeu.

La Face B : Tu étais membre du club Cheval. Est-ce que vous avez pensé à vous revoir et à mener de nouvelles collaborations ?

Canblaster : On se croise de temps en temps. Par exemple, j’ai une une émission Dice Live sur ma chaîne Twitch Canblaster Live. J’ai invité Sam Tiba et Myd. Il y a eu Panthéros aussi.. Tu dis que tu as une émission sur Twitch ? On tire aux dés sur des conditions sur la musique qu’on joue. On la réalise une fois par mois qu’on fait.

La Face B : Tu as dévoilé cette année ton album Libérosis. Pourquoi l’avoir sorti en trois parties ?

Canblaster : Parce qu’on avait une histoire qui était un peu longue à raconter. Et au final, quand on a décidé de faire les clips, c’est tombé fil parfait. Chaque clip racontait la portion du disque, ou la partie qu’il était censé raconter. On l’a coupé en trois, et il y a eu chaque clip qui illustre une partie de ce qui se passe dans le disque.

La Face B : Et tu as mis combien de temps pour faire cet album ?

Canblaster : Le dernier projet que j’ai fait, c’était en 2017. Donc ça faisait cinq ans à peu près. Et je dirais vraiment trois ans concentrés entre le moment où j’ai trouvé le truc et le moment où ça est sorti.

La Face B : Tu as travaillé avec le mixeur et producteur des Chemical Brothers, Steve Dub. Tu avais déclaré qu’il t’avait apporté une ligne d’éditrice et même un travail beaucoup plus efficace. Qu’est-ce qui t’a apporté concrètement en plus dans ton travail ?

Canblaster : Les Chemical Brothers sont des légendes. C’est le fait de me dire que cet album allait être dans ses rails un peu breakbeat, un peu anglais. D’abord, on fait la musique et après on cherche le mixeur. Et quand on a réfléchi à un mixeur et que son nom est venu dans la liste, j’étais en mode, c’est évident, il faut que ce soit lui. Steve Dub m’a apporté surtout une conscience et ça se voit en live. En gros, lui a pris les pistes que je lui ai envoyées, il les a mixées et ces pistes-là, on les utilise dans le live. Et lui, il a une science, comme tu peux le deviner, de le breakbeat et la basse, de créer une masse qui te prend au corps et c’est ça qu’on cherchait. Une science qu’ont les anglais beaucoup plus que les français. Le fait de pouvoir réutiliser ces mix à lui et de les adapter en live, c’est super. Et sinon, d’autres choses plus philosophiques sur la manière de mixer, mais ça, je ne vais pas rentrer dans le détail.

La Face B : Tu as plusieurs références culturelles à travers ta musique, même sur le travail des clips au passage. Il y a la dystopie, les mangas japonais, etc… Quelles sont tes références en particulier ?

Canblaster : Il y en a que j’aime plus que d’autres, mais dans les années 2000, il y avait un courant dans les mangas qui parlait pas mal d’existentialisme. Je pense à Neon Genesis, une ressource d’influence, ou à Lain par exemple. Et même plus récemment, Nier Automata dans les jeux vidéo qui a un peu cette question-là, qui le questionne par rapport au prisme du robot.

La Face B : Donc tu as aussi quelques influences par rapport aux jeux vidéo ?

Canblaster : Les jeux vidéo, c’est des grosses influences pour moi, j’étais un gros gamer quand j’étais jeune. Il y a eu donc Nier Automata que je t’ai cité, Final Fantasy aussi, plus trivial, mais aussi Sonic, j’étais un gros fan ! J’aime bien le rapport à la vitesse. Avant de faire de la musique de club, j’ai fait de la musique pour des jeux d’arcade.

La Face B : Et on te retrouve dans des jeux vidéo en particulier ?

Canblaster : Il y a encore une ou deux bornes, à la Tête dans les Nuages à Paris où il y a des musgams. Tu mets une pièce et sur les bornes d’arcade, tu as le tapis au sol et tu dois appuyer sur des touches en rythme. Du coup la musique est au centre du jeu vidéo, c’est ça qui m’intéresse.

La Face B : Comme tout artiste électro, tu es fan rollercoaster dans ton jeu, c’est-à-dire, de faire grimper l’excitation et de créer un moment d’attente pour accéder à un son ultrasonique. Comment fais-tu pour qu’on soit pris de vitesse par ta musique alors ?

Canblaster : Déjà les montées, c’est hyper important. Je pense que c’est le propre de l’électro. C’est un truc de faire monter la sauce et de tout donner un moment. Comme le rollercoaster, ça monte, ça monte, et au moment où tu as le drop, tu roules sur les rails. De manière générale, la dynamique c’est très important. Le fait qu’il y ait des plages plus planantes. Et la vitesse que je peux prendre avec les drums ou avec des arpèges. Je suis très fan d’arpèges, j’ai de grands projets à l’arpège. Ça peut être des Vangelis ou des Tangerine Dreams, des synths man légendaires. On a développé d’ailleurs notre propre plugin d’arpèges d’ailleurs avec une boîte qui s’appelle BLEASS et qui vienne du Nord comme moi. . Donc j’essaie de contrôler vraiment cet aspect technique avec aussi des synths modulaires pour avoir des textures un peu particulières.

La Face B : Est-ce que tu as travaillé aussi sur une scénographie particulière pour les lives ?

Canblaster : Oui, on a bossé avec l’atelier Craft, c’est les gars qui font la scénographie de la Station à Paris. L’idée, c’était comment mettre en scène mon studio que je ramène sur scène avec plusieurs synthétiques. Ils ont trouvé une très belle réponse. Il y a aussi tout un jeu de lumière. Chaque information, chaque note importante est envoyée par information électrique à mon ingé-lumière. Le but, c’était d’avoir un choix un peu synesthésique, audiovisuel dans un sens. Le son et la lumière, c’est très important, ça fonctionne ensemble. C’est avec ça qu’on joue aussi sur cette impression de vitesse. Des fois, les lumières sont planantes et des fois, elles se créent régulièrement.

La Face B : Ton année se passe bien car tu as déjà fait la première partie de The Blaze à Bercy.

Canblaster : C’est vrai, c’est vrai. On a fait une tournée en Europe, c’était un peu dingue. On a fait Bercy il y a deux mois, Le London Royal Albert Hall aussi. Que des salles énormes. On a fait Vienne, le Théâtre Antique aussi. C’était une expérience quand même de jouer devant plus de dix mille personnes.

La Face B : Comment se résume ta prestation en live pour ceux qui ne t’ont jamais vu ?

Canblaster : Moi, je suis entouré par une espèce de tri-force, comme je dis. J’ai trois synthés. Devant, j’ai un synthé qui gère plus l’expression, avec lequel je joue les notes. À ma droite, j’ai mon système modulaire. À ma gauche, j’ai mon OM6 et mon ordinateur, qui sont un peu le cerveau.

La Face B : C’est technique quand même, c’est de la gymnastique !

Canblaster : Il y a un petit peu le cerveau, les mains et le cœur.

La Face B : À quel moment tu apprécies le plus d’être sur scène ?

Canblaster : Quand je manipule, j’ai des passages où je joue sur deux synthés en même temps. Je trouve que ça procure une bonne émotion.

©Crédit photos : Cédric Obertin