L’été dernier, on découvrait avec stupéfaction Chalk. Le trio d’Irlande du Nord nous mettait une branlée monumentale en ouverture de Beauregard avec sous le bras un EP nommé Conditions paru deux mois auparavant. Nous sommes en mars et Chalk est entrain de se faire une place bien à lui dans une scène rock toujours à la recherche de nouveaux héros à adouber. Autant dire qu’avec Conditions II, les garçons de Belfast vont mettre tout le monde d’accord.
On va commencer par un petit coup de gueule : on en a un peu marre du terme post-punk. En effet, au cours des dernières années, le genre est devenu une sorte de poubelle dans laquelle, on s’amusait à ranger à peu près tout et n’importe quoi du moment qu’il y avait la trace d’une guitare et d’un peu de colère.
Chalk n’a pas fait exception à la règle et le groupe s’est rapidement vu coller cette étiquette pas forcément fausse mais beaucoup trop facile et réductrice.
En effet, le groupe de Belfast n’est pas du genre à vivre sous une étiquette et son premier EP Conditions le prouvait parfaitement. Bébé groupe né pendant le covid, Chalk montrait son appétence pour un son violent, une tension permanente et un chant qui alternait entre désenchantement et rage avec des morceaux comme Static ou Velodrome. Pourtant, surprise, leur premier EP se terminait par Conditions, un morceau plus dansant, plus joyeux qui portait la musique du trio vers une transe dansante que n’aurait pas renié le Underworld de la belle époque.
Un morceau comme une ouverture, une volonté de faire le pont entre noirceur et lumière, entre différentes transes, celles des guitares autant que celles de musiques électroniques.
Et puis Chalk a pris la route avec ses cinq morceaux, pour découvrir la scène, un lieu de liberté et d’expérimentation. Jamais vraiment attendu, le groupe a mis tout le monde chaos là ou il est passé et ce n’est pas ceux qui ont eu la chance de les découvrir à Beauregard ou aux Transmusicales en France qui vous diront le contraire.
Il fallait donc battre le fer tant qu’il était chaud et revenir plus grand, plus fort mais surtout nourri de cette expérience tout en s’ouvrant aux autres pour faire évoluer leur musique.
Cela passe par une signature chez le très bon label indé Nice Swan Records (maison des excellents Sports Team et Pip Blom) et un travail collectif avec le producteur Chris Ryan. Le tout donne l’arrivée de Conditions II, suite à la fois logique et différente de leur premier EP.
Et en effet, dès l’ouverture, Chalk nous attrape par le col pour nous plaquer au sol. Un hurlement en forme de loupe, un travail sur les sonorités de guitare absolument dingue et une voix bien plus assurée, The Gate est un monument de tension de moins de 3 minutes qui nous assomme. Une brutale entrée en matière qui permet aussi d’apprécier les talents d’écriture du trio. Car ironiquement, si il est question de pont dans le titre, le groupe nous entraine dans une opposition permanente, furieuse et intense, comme si l’on pénétrait un esprit en colère et déchirer entre ses émotions.
l’amour, celui qui marque et laisse des traces, il en sera aussi question dans Claw. Que ce soit musicalement ou dans ses paroles, Chalk s’amuse à former des boucles, des répétions soniques et vocales qui rendent fou. Le grand talent du morceau est de créer une sorte de transe totale, imparable et hyper communicative. Le morceau bouscule aussi les attentes, poussant vers quelque chose de beaucoup plus techno et entêtant que ce qui avait pu nous être proposé auparavant.
Kevlar offre une nouvelle facette du groupe avec un morceau bien plus lent et pensant. Un format minimaliste qui laisse toute la place pour la voix de Ross Cullen, prouvant que le bonhomme a beaucoup à offrir. Sans forcer, le morceau nous laisse dans les tourments d’une plongée mentale dont on ne ressort pas indifférent.
À l’image de Conditions à la fin du premier EP, Conditions II se termine sur une note bien plus lumineuse et dansante avec Bliss sur lequel ils ont l’intelligence d’inviter Fears qui apporte une texture vocale différente et bienvenue. Là encore, on est surpris par le traitement des guitares autant que par les nappes électroniques qui se mêlent à la perfection, bien aidée par une batterie métronomique qui nous fait remuer avec bonheur. Bliss semble être une sorte d’happy ending aux tourments des trois précédents morceaux et c’est tant mieux.
« And I can be anything that you want« nous raconte Chalk dans Bliss. Avec Conditions II, le groupe de Belfast nous le prouve parfaitement et nous offre un second EP revigorant qu’on a clairement hâte de voir vivre en live. Cela tombe bien, le groupe a annoncé une tournée française pour la fin du mois d’avril. On y sera et on ne peut que vous inviter à venir découvrir ce groupe que vous allez forcément aimer.