Une bouffée de tendre et un besoin de lumière, voilà comment on pourrait définir la musique de Chien Noir. Le bordelais a récemment dévoilé son premier EP Histoires Vraies et on a eu le plaisir de longuement discuté avec lui. L’occasion de parler de doutes, de méditations et du besoin de trouver sa place dans le monde.
La Face B: Salut Jean, comment ça va ?
Chien Noir : ça va plutôt pas mal, là j’étais en train d’écrire donc je suis assez content parce que j’arrive à écrire en ce moment c’est très cool, voilà.
LFB : J’ai fait un peu de recherches pour préparer l’interview. J’ai entendu parler de châteaux hantés, de pirates, de marcher dans la nuit endormie, du coup je me demandais si tu pouvais me dire qui tu étais avec tes propres mots.
Chien Noir : J’ai le sentiment de ne pas trop savoir qui je suis, j’ai l’impression que je passe mon temps à chercher. C’est ma quête, savoir qui je suis. J’y réponds avec mes chansons. On a tous une histoire en effet.
J’ai grandi dans une maison que je crois hantée (rires). Je ne sais pas… je suis aussi somnambule et je fais des trucs assez délirants la nuit et si ça se trouve j’ai rêvé, tout n’est qu’un rêve et tout ça, mes chansons, c’est l’histoire de ce rêve, de ne pas trop savoir si ce qu’on vit est vrai.
LFB : J’aimerais revenir sur ton nom. On te pose beaucoup de questions sur choix de nom. Ce qu’il y a de marrant, c’est que l’image qui m’est venue en entendant chien noir, j’ai pensé au Sinistros dans Harry Potter.
Chien Noir : Euh attends c’est qui ?
LFB : C’est une espèce de grand chien noir qui est sensé amener la mort alors qu’en fait c’est le personnage qui protège Harry dans tout le livre (le prisonnier d’Azkaban ndlr). Est-ce que ça t’a amusé de jouer sur l’ambivalence que provoque ce nom-là ? C’est-à-dire qu’il y a une idée assez brutale derrière le nom alors qu’en fait ta musique c’est de la douceur.
Chien noir : Oui tout à fait, je suis hyper content que tu me dises ça parce que c’est exactement ce que j’essaye de formuler. Les choses ne sont pas forcément ce qu’on croit et par exemple par rapport au nom chien noir, un chien c’est plein de choses. C’est le gardien, le toutou fidèle, le chien errant, pleins plein de chose existent dans l’image du chien. C’est le chien agressif aussi, qui fout la trouille.
Et c’est vrai que pour moi il y a cette image. Ça vient de l’île au trésor de Stevenson mais il y a d’autres références. Je dis cette référence parce que je l’aime bien et c’est une littérature que j’apprécie mais tu vois par exemple Churchill parlait de son chien noir et c’était sa dépression.
LFB : Il y a le gardien des enfers aussi… Au final, il y a une importance assez forte du symbolisme dans ton projet. Que ce soit à travers le nom, à travers ta casquette qui ne te quitte jamais et qui devient presque un élément dans ta musique. Il y a l’importance des couleurs dans les vidéos aussi que j’ai remarqué tu vois. Dans chaque vidéo, il y a une importance très nette qui est placée dans les couleurs qui peuvent ramener à certaines émotions. Je demandais si c’était quelque chose que tu avais pensé dès le départ ou si c’était venu après, sur le temps long.
Chien Noir : Je travaille purement instinctivement, c’est-à-dire que j’ai l’impression de dérouler une bobine au fur et à mesure. Je ne suis pas quelqu’un qui anticipe, en général je me rends compte que ce que j’ai fait à une forme.
Là je suis en train d’écrire mon prochain EP, je les ai réunis dans un dossier sur mon ordinateur, les 3, 4 chansons que j’ai pour l’instant et à nouveau il y a un truc qui est en train de se dessiner. C’est de l’instinct. J’ai toujours beaucoup admiré les gens qui ont des idées hyper claires.
J’ai commencé mes études au conservatoire en écriture de composition électro-acoustique. C’est une musique « savante » et c’est pour ça que j’ai arrêté, ça se la racontait un peu mais là le plus important, c’est l’idée de base. C’est avoir une idée tu vois ? Je ne suis tellement pas comme ça.
Dans ces musiques-là, l’émotion n’est pas le but recherché. Moi, je suis purement dans l’émotion, parfois j’écris des trucs et je me rends compte bien plus tard de ce que je voulais dire.
LFB : C’est marrant ça rejoint un peu la question que je voulais te poser après. Je me demandais si pour toi, si la définition te convenait de dire que tu fais une musique d’esquisse ? Tu crées quelque chose qui est probablement très clair pour toi mais de manière poétique et assez abstraite pour que les gens puissent exprimer leur propre ressenti à travers ta musique et la rattacher à leur histoire.
Chien Noir : J’aimerais que ce soit le cas oui, parce que moi je ne suis pas un modèle, je suis comme tout le monde. Si ma musique peut aider les gens… Par exemple Histoire vraie, j’étais complètement largué parce qu’il se passait pleins de choses dans ma vie… Si les gens peuvent trouver un sens, un écho, dans leur propre vie, tant mieux. Moi j’ai juste l’impression d’écrire pour survivre tu vois ? Je ne sais faire que ça. C’est pour donner du sens aussi à ma vie et créer ma propre histoire.
LFB : Est-ce que tu es surpris parfois de l’interprétation que les gens peuvent faire de ta propre musique ? Des choses auxquelles tu n’aurais pas pensé toi-même ?
Chien Noir : Bien sûr. En fait des fois il y a des sujets qui sont très clairs dans ma tête pour certaines chansons. Par exemple Histoire vraie c’est l’histoire de ma famille, l’histoire que j’ai avec certains membres de ma famille. Et c’est quelque chose que je ne peux pas dire.
En fait, je le dis avec une forme de pudeur même si ce n’est pas du tout pudique de chanter ça. C’est formulé avec un peu de retenue et je suis super surpris des fois de lire certaines interprétations parce que ce n’était pas du tout ce que je mettais dedans.
LFB: Sur ce dernier titre quand tu l’écoutes à l’heure actuelle avec tout ce qui se passe, ça peut être pris avec la façon dont tu le dis mais tu peux aussi voir un espèce d’image du besoin de construire des choses alors que tout est sur arrêt. C’est une porte ouverte à la libre interprétation.
Chien Noir : C’est à dire que d’une certaine manière je me refuse à être trop concret. Quand j’écris de cette manière, je trouve que ça fait faux. Comme si essayer de voir par le biais d’images augmentait ma réalité ou fait de ma réalité quelque chose d’encore plus réel. Après ça ne m’empêche pas d’aimer les artistes qui écrivent de manière concrète, j’aime beaucoup ça et ça me fait du bien. Je ne sais pas pourquoi je n’arrive pas à faire autrement. J’ai ce besoin de réalité augmentée.
LFB : Quand on lit tes influences, elles sont surtout anglo-saxonnes et je me demandais si ça ne venait pas de là aussi, une musique avec une ligne mélodique très claire mais qui au niveau des intentions et des images que tu mets dans les paroles soient un peu plus floues.
Chien Noir : C’est vrai que j’écoute très peu de chanson française. Il y a des gens qui m’ont marqué, je pense à Bertrand Belin par exemple. Lui on ne sait pas trop ce qu’il dit.
LFB : Oui c’est de la poésie plus que de la chanson au final…
Chien Noir : Carrément. Avant je lisais assez peu les textes en anglais maintenant j’essaye de le faire et je me rends compte que ça va dans mon sens. Je suis très fan de Aldous Harding et là c’est assez vaporeux ses messages. En fait le truc c’est que des fois les auteurs, des gens que tu vas lire et tu ne sais pas trop où ils veulent en venir et puis tout d’un coup ils lâchent la phrase et cette phrase donne son sens aux vingt pages que tu viens de lire. Je trouve que c’est une belle façon de faire, c’est très fort. Mais je n’ai pas la prétention de réussir à faire ça.
LFB : J’ai vu que tu vais eu des projets avant Chien Noir et que tu écrivais en anglais, quel impact a eu ce passage en français ?
Chien Noir : Comment dire… Quand j’écris en français, il y a des fois je sais que je sors un truc, il y a des moments où je suis en train de me soigner. A ce moment-là j’ai très envie de pleurer. Je me dis putain la vie quoi… la vie c’est vraiment difficile. En anglais je n’avais pas cette sensation là
LFB : Tu as vraiment la sensation de dire ta « vérité » ?
Chien Noir : Carrément. Je ne sais pas si c’est une question de vérité mais en fait c’est ma voix, c’est ma langue. Ma grand-mère était anglaise, j’ai été élevé par ma grand-mère, on parlait surtout en français. Ouais, c’est ma langue et ça change tout, la façon d’appréhender les choses, de les dire. L’anglais c’est juste que ce n’est pas ma langue.
LFB : J’ai noté trois lignes importantes pour moi dans tes chansons. La première chose qui me semble évidente, c’est qu’il y a quelque chose déjà de très onirique dans ta musique dans le sens où j’ai l’impression que ce que tu fais c’est un voyage constant entre le rêve et la réalité. Je me demandais comment tu rattachais le réel dans ce que tu traites.
Chien Noir : En fait, le réel n’a rien de clair, le réel n’a rien d’évident. Par exemple, des fois il y a des histoires de fantômes dans mes chansons, des trucs comme ça et on peut se dire « oui bah le mec y croit ».
Mais au fond ces fantômes c’est un prétexte pour dire qu’il y a des trucs qu’on se traîne parce que tes parents l’avaient et qu’ils te l’ont transmis, des traits de caractère et des attitudes. D’une certaine manière, ce sont des fantômes. Je vois toutes les images, elles sont concrètes, c’est concret de parler de ces fantômes.
Je n’ai pas vu de fantômes à proprement parler mais j’ai vu des trucs bouger tout seul et d’une manière assez flippante. Quand j’étais petit, ma sœur qui rentrait de boite me retrouvait dans le couloir en train de marcher. J’ai une chanson qui s’appelle qu’est ce que tu fais dans le noir et c’est un peu tout ça tu vois. Quand tu prends lumière bleue, c’est l’histoire d’amour d’une nuit avec quelqu’un, il n’est pas dit que c’est une histoire d’amour, c’est que des bouts de corps, des ombres, des lumières.
LFB : Tu parlais des fantômes de manière abstraite et pas concrète. Est-ce que tu penses qu’on peut vivre avec ces fantômes là justement et est-ce que ta musique t’aide à les apprivoiser ?
Chien Noir : Oui, ma musique me fait prendre conscience de ça. Je pense qu’on peut très bien réussir à vivre avec tout ce qu’on est, tout ce que nous a mis dans la tête mais le plus difficile c’est de savoir qui on est nous. Le but ce n’est pas de vivre avec ses fantômes, le but est de découvrir qui on est.
Je suis très méditation, je suis quelqu’un qui essaye de beaucoup méditer, notamment la méditation transcendantale. Il y a un lien direct entre la méditation avec la profondeur. Mes chansons m’aident à essayer d’appartenir un peu plus au monde. Le but c’est que toi tu trouves ce que tu veux pour savoir qui tu es.
LFB : Ce que tu dis me ramène à l’autre ligne directrice de ta musique. Même si c’est en sous texte, il y a quelque chose en rapport à l’enfance et à la naïveté qui est très présent dans ce que tu fais. I y a une recherche d’une forme de pureté, comment toi tu analyses cette idée du rapport à l’enfance en temps qu’expérience formatrice ?
Chien Noir : Il y a cette forme de pureté et puis tout d’un coup ça part en couille. J’ai l’impression que ce que je cherche c’est ce qui a fait ce que je suis devenu.
J’ai reçu des leçons d’enfants, de gamins, qui en quelques mots te font une leçon sur la vie quoi. Il y a un langage de vérité dans l’enfance. Histoire vraie le clip on l’a fait dans une école et ce n’est pas pour rien, le lieu est magnifique et ça a beaucoup contribué le fait que ce soit dans une école. C’est difficile de s’exprimer sur ces questions-là et ça va chercher loin.
C’est clairement mon rapport à l’enfance qui est compliqué. La naïveté qu’on peut voir dans mes textes, c’est ma manière d’être bienveillant envers l’enfant que j’étais, envers l’enfant que je suis aujourd’hui.
LFB : Je comprends…l’idée de rechercher quelque chose dans ces émotions-là quelle que soit l’époque dans laquelle on vit.
Chien Noir : Clairement, il y a un lien avec cette époque qui est d’une violence. Je suis atterré par la violence de notre époque. Je n’en reviens pas du monde dans lequel on vit. Cette naïveté c’est aussi une façon de me protéger de ça. Je me mets en boule et je ne veux plus entendre parler de tout ça. Tu vas cinq minutes sur Facebook, tu as envie de gerber quoi. Tu hallucines quoi.
Le problème c’est que c’est que les gens, ils font comme ils peuvent. Il y a une série sur netflix qui s’appelle Midnight Gospel et que je te conseille vraiment parce que c’est fou.
Les gens font vraiment comme ils peuvent et je trouve que le monde dans lequel on vit à besoin d’amour et de bienveillance.
LFB : Justement, dans le vocabulaire et l’imagerie de ta musique, il est beaucoup question du noir, de la nuit mais je me demandais si ton objectif à toi et à ce que tu veux apporter aux gens, ce n’est pas l’envie d’accepter la lumière et de la laisse rentrer ? De tracer un chemin dans le chaos ?
Chien Noir : Bien sûr, tout à fait ! C’est hyper beau de dire ça.
LFB : Tu parles de méditation mais c’est exactement ça. Pour moi, ce que tu fais en musique c’est ça. Mais même pour toi, j’ai l’impression que tu ramènes de la lumière, de l’accepter. On voit les failles dans ta musique.
Chien Noir : Il y a une phrase Leonard Cohen qui dit ça, « il faut une fêlure pour que la lumière passe. » J’ai ce besoin de me dire que ça va aller, que l’on a un avenir ensemble, que moi j’ai un avenir avec moi. Tu l’as très bien dit, faire rentrer la lumière c’est bien oui !
LFB : Pour finir là-dessus puisque l’on parlait de symbolique tout à l’heure, est-ce qu’il n’y a pas quelque chose du destin d’être signé chez Naïve avec un projet comme Chien Noir ?
Chien Noir : On va dire que c’est ça, c’est le destin, même si je ne sais pas si je crois au destin. J’ai toujours fait de la musique, je n’en ai jamais vraiment vécu et je n’ai jamais vraiment vécu quoi que soit, je n’ai jamais réussi à garder un job.
Je commence à gagner ma vie depuis quelques années et j’ai tellement la sensation que l’on a tous un truc possible, on peut vraiment envisager les choses et il faut en prendre conscience. Donc ouais signé chez Naïve c’est très cool… mais tu vois je n’ai aucune idée de ce que ma vie sera dans deux ans. J’espère que ça va continuer dans cette lancée-là. Je me sens pousser des ailes, j’ai l’impression de trouver une petite place … J’ai toujours vécu comme ça, et je m’en fous, je suis très naïf et c’est très bien.
LFB : Je voudrais parler de ta relation avec Marc, de Cocoon qui avait dû des mots très sympa sur toi quand on avait fait un article ensemble. Je me demandais ce que cette relation-là elle t’apportait ?
Chien Noir : Il y a une liste infinie de chose que ça m’apporte. Marc et moi, on a une relation extrêmement proche, on s’écrit tous les jours pour raconter des conneries, pour partager des idées que l’on pourrait faire…
Marc il m’a apporté un truc. Avant de le rencontrer, j’écrivais très très instinctivement et j’étais très indé, dans le style. Je n’avais aucune idée de ce que c’était de réaliser une chanson. Aujourd’hui, j’ai compris certaines choses grâce à lui, par rapport à ça. Je me suis amélioré grâce à lui sur comment fabriquer une mélodie, comment faire quelque chose qui se tient du début jusqu’à la fin.
Il est hyper exigeant Marc, ce n’est pas qu’il est dur mais il a une conception des choses. Grâce à lui, je me suis formé une conception des choses aussi. Et ça, ça n’a pas de prix. Marc sera la personne qui m’a aidé à me réaliser. Par exemple, il m’a fait confiance.
Il faut se mettre à sa place. C’est-à-dire que le mec, il ne me connaissait pas, il a écouté une chanson de moi et il a dit « tiens, on va t’aider. » On a bossé, bossé, bossé pendant deux ans, sur son album, sur ses chansons, sur mes chansons et je n’ai jamais autant appris de ma vie. Lui et moi on est très complémentaires, je suis quelqu’un qui a besoin de comprendre comment les choses fonctionnent. Je suis un geek, j’ai fait mes études au conservatoire de Bordeaux où j’ai mon diplôme de guitare. Je me rassure dans la technique. Je me dis bon si j’interprète cette guitare-là, ça va être cool. Marc il n’en a rien à branler de ça et il a un truc hyper instinctif là-dessus.
La technique d’une certaine manière ça te libère à un certain moment, c’est très contraignant la technique mais il y a un moment où tu l’intègres et là, ça devient autre chose. Il y a une extension du langage. Je me souviens, le super-exemple c’est une chanson qui est sur son album Wood Fire et qui s’appelle Ember. J’avais trouvé une guitare horriblement difficile à jouer mais qui était vraiment cool et on a fait une prise, c’était un peu foutraque mais en fait c’était bien. Il y a plein d’exemples comme ça, quand on écrivait il y a une chanson qui s’appelle I Got You dans son album. Je me pointe chez lui le matin, il me dit « putain j’ai ce début-là, je ne sais pas quoi faire avec » Je me suis mis au piano, j’ai inversé deux-trois accords et en fait « c’est ça le refrain mec » Il y a un truc très très souple entre nous, c’est très fluide.
LFB : Il y a quelque chose de fraternel en fait ?
Chien Noir : C’est hyper fraternel. J’ai rarement eu une relation comme ça avec quelqu’un.
LFB : Là, tu « redoubles » le Chantier des Francos dû à l’année passée et tu fais partie de la sélection du FAIR. Cette reconnaissance-là et ces opportunités professionnelles comment est-ce que les vis et qu’est-ce que ça t’apporte ?
Chien Noir : C’est une bonne question car par exemple lorsque ma manageuse m’a dit « Jean, t’es dans le FAIR, tu as été pris » je n’ai rien compris, je me suis mis à trembler. Par-ce qu’en fait le FAIR c’est un peu mythique, il y a un truc huge et j’ai un peu réalisé que j’ai ma place. Il y a une place pour moi en fait. Il y a des gens que ça intéresse et c’est un truc dont je doute tout le temps et toujour. Trois jours après, j’en doutais à nouveau.
Pareil pour le Chantier des Francos, quand ils m’ont pris. Achaque fois quand tu intègres ces équipes-là, tu as l’impression de rentrer dans quelque chose. Tu as l’impression de faire partie d’une famille. Parce que que ce sont des gens toujours très gentils, qui ont l’habitude des artistes, des chelous, des freaks un peu.
Ils savent à quoi s’attendre. Pour l’instant ça m’apporte surtout ça. Ça m’apporte des signaux. J’ai eu le signal du FAIR, le signal du Chantier. Est-ce qu’il ne serait pas temps que j’arrête de me prendre la tête et que je me suis dise que je suis légitime ? Et puis en fait, ça ne marche pas.
J’ai toujours plein de doutes et alors heureusement après, on a sorti Histoires Vraies et il y a eu un accueil formidable, vraiment incroyable ! Deezer, Spotify ils m’ont mis sur des belles playlists, je n’en reviens pas ! C’est ça qui me fait le plus avancer, le retour des gens. Après, au Chantier et au FAIR là ce qui est bien c’est que je vais pouvoir travailler et je travaille déjà mes interactions avec un public potentiel et qui n’existe pas pour le moment.
Tout ce dont on parle depuis tout à l’heure, c’est quelque chose que je voudrais retransmettre dans mes lives. Je pense que tu peux être fragile sur scène et être fort en même temps et ça c’est un équilibre. Il suffit d’un rien pour tous foutre en l’air. C’est notamment là-dessus que je vais pouvoir travailler avec eux.
LFB : J’ai l’impression que sur le Chantier des Francos, il y a quelque chose de vraiment fort qui s’est créé auprès des artistes, l’année dernière. Que ce soit Bandit Bandit, Ian Caulfield, Martin Luminet… J’ai l’impression qu’il y a beaucoup d’amour et de bienveillance qui se sont créées entre vous alors que vous venez tous d’horizons différents et sur une année normale, ça n’aurait peut-être pas été le cas ?
Chien Noir : Peut-être, en effet. Il faut voir les gars et les filles aussi. Je pense à Clara Ysé, c’est quelqu’un d’incroyable. Martin c’est quelqu’un de génial. Tu as Terrier. C’est que des gens super cool quoi . Il y a toujours cet effet colonie de vacances un peu qui est assez drôle. Moi j’ai toujours été complètement handicapé en colonies de vacances et c’est toujours le cas mais il y a de la bienveillance. Tout le monde s’en fout, tout le monde nous comprend. Par exemple, les Bandit Bandit c’est des gens géniaux ! Tu les as déjà interviewé, tu as déjà parlé avec eux.
LFB : Oui, ce sont des copains. Je pense quemes gens quand ils ressentent ta sensibilité, ils viennent vers toi naturellement en fait et tu passes cette barrière handicapante.
Chien Noir : Pour le coup, c’est ce qu’il s’est passé avec Bandit Bandit, par exemple. Pour l’histoire, c’était cet été au Chantier, pendant Y’a des Francos dans l’Air, j’ai vu Hugo et Maeva chanter en acoustique. Trois semaines avant j’avais écrit une chanson, pour moi, et en fait je me suis dit qu’elle n’était pas pour moi mais pour eux. Je leur ai envoyé, ils n’y croyaient pas trop. On est quand même dans des mondes différents. Puis ils m’ont répondu par mail en disant « mais Jean, c’est trop bien, on veut trop l’apprendre » On s’est revus ensuite, on était ensuite en session au Chantier et c’était très affectueux, c’est des gens hyper chaleureux. Dans ce Chantier-là, il y a ça, ce truc très fraternel en fait !
LFB : Qu’est-ce que l’on peut te souhaiter pour l’avenir ? Pour toi ou pour ce que tu as envie de souhaiter aux autres ?
Chien Noir : J’ai envie de plein de choses en fait. J’ai envie d’aller voir les copains jouer, moi aussi j’ai envie de pouvoir jouer. J’ai envie de pouvoir formuler. Je rêve de pouvoir reprendre les gens dans mes bras, les gens que j’aime bien sûr, même si c’est déjà un peu le cas.
Il faut que ça s’arrête, il faut que l’on trouve un moyen d’avancer parce que ça ne peut pas durer et je pense que ça abîme tout le monde. Je veux que l’on trouve un équilibre. Je souhaite que les choses avancent en bien. Je veux pouvoir sortir mon premier EP puis je second (interview réalisée avant la sortie d’histoires vraies ndlr). Si je peux déjà avoir fait ça, c’est déjà super.
LFB : Est-ce que tu as des coups de cœur récents à partager avec nous, des choses qui t’ont marqué toi ?
Chien Noir : Carrément,il y a plein de trucs. La saison trois de Twin Peaks, énorme choc !
Lynch c’est quelqu’un qui me parle énormément. Il y a un peu un lien par rapport à tout ce qu’on disait. On doit se répondre nous-même, aux questions que l’on pose. Lui, il le dit lui-même, il ne veut pas donner de réponses. Musicalement, il y a Frank Ocean que je découvre un peu et notamment l’album Blonde. Je connaissais, j’avais écouté l’album Channel Orange et Toro Y Moi, que j’ai beaucoup écouté ces derniers temps.Le dernier album de Caribou aussi mais alors il y a des chansons à tomber ! La première qui s’appelle Sister
En lecture, là je suis en train de lire Haruki Murakami, j’adore ! C’est trop bien écrit. Dernier truc que je suis en train de lire aussi, j’aime beaucoup les mangas, tu dois connaître Urasawa..
LFB : 20th Century Boys c’est mon œuvre littéraire préférée.
Chien Noir : C’est celui que je suis en train de lire là.
Chien Noir : J’ai découvert Urasawa avec Pluto et je me suis pris une énorme claque ! Il y a une scène qui m’avait marqué. Tu as le robot qui se fait tuer mais c’est un robot-policer qui fait la circulation et Gesich qui va voir la femme du robot, qui est un robot de femme de ménage et cette scène, quand il lui dit que son mari est mort, elle est à chialer.
Urasawa je trouve que c’est le seul à faire ça mais il a cette capacité à te faire tourner les pages. Tu vas les avaler, les tourner et tourner.
Lui et le patron, Taniguchi je l’ai poncé. C’est hyper beau. Le Gourmet Solitaire c’est incroyable.