Les clips de la semaine #103 – Partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face a vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la seconde partie de la sélection numéro cent trois des clips de la semaine.

Ed Mount — It Might Be Something

Autant être honnête dès le départ : Ed Mount, on l’aime beaucoup. Genre vraiment beaucoup. On guette souvent ses sorties avec un intérêt certains, comme souvent chez FVTVR d’ailleurs, car on sait que quand ce garçon plutôt discret pointe le bout de son nez, c’est pour nous mettre une petite tarte.

Et, comme une évidence absolue, c’est une nouvelle fois le cas avec It Might Be Something. Si le morceau démarre comme une petite habitude avec ses petites notes synthétiques, Thibaut Chevallier, de son nom au civil, a la grande et bonne idée de nous surprendre pour nous entrainer dans un univers organique, harmonique et hyper ambitieux.

On se laisse complètement happer par ce morceau hors du temps, au groove incandescent, dans lequel il nous chante l’amour, celui qui né, qui parfois meurt mais pour mieux repartir de plus belle. C’est doux, c’est tendre, c’est le genre de morceau qu’on a envie d’écouter au coin du feu ou sous la couette et qu’on a la sensation de connaitre depuis toujours tout en le redécouvrant à chaque écoute. C’est musicalement brillant mais présenter d’une manière pop, et avec une telle envie de partage que le morceau devient immédiatement accessible et charmant.

Pour accompagner le morceau, il a opté avec Mathieu Teissier pour une imagerie naturaliste, à base de travelling, offrant une image souvent fixe et presque photographique. La vidéo prolonge le côté romantique et presque naïf du morceau. Ici le timide Ed Mount fait écouter son morceau à une amie et cherche à tuer le temps, contrant comme il le peut la crainte et l’attente de la réaction face à ctte première écoute. Un vrai petit moment de poésie qu’on aimerait vivre plus souvent.

Murman Tsuladze – They closed the roads (ჩაკეტეს გზები)

Il y quelques semaine, le trio le plus farfelu et réjouissant de la pop moderne dévoilait son nouveau titre They closed the roads.
Si Murman Tsuladze nous offrait un nouveau voyage musical comme il sait si bien le faire, le morceau se voulait moins foutraque, plus produit et évident et surtout bien plus politique. Loin de l’élude poétique qu’ils avaient utilisé jusqu’ici, ce nouveau morceau est bien plus direct dans sa manière d’amorcer son sujet.

Avec un titre pareil, cela semblait évident mais Murman Tsuladze dénonce avec force, les clichés , la violence et la bêtise que subit le peuple géorgien, mais voit aussi plus loin tant le morceau se veut universel, à une époque où la politiquer française, et mondiale, semble plus apte à pointer du doigt et à dénoncer plutôt qu’à chercher des solutions concrètes, que ce soit dans l’accueil ou dans la non-stigmatisation des migrants.

Pour accompagner le morceau, Murman Tsuladze nous offre un clip en noir et blanc en forme de road trip où toutes les portes sont ouvertes. On y croise des autruches, des paysages sublimes, des fêtes foraines et des lunettes de soleil merveilleuses. Nos vendeurs de tapis volants nous entrainent sur la route avec eux dans ce clip superbe à la réalisation soignée, entre plans de drone et caméra toujours en mouvement.

Le prochain EP de Murman Tsuladze est attendu pour janvier 2022 et on a très, très, hâte.

Adrien Legrand – Souffleur de Feu

Plus les semaines passent et plus l’attente autour du Bel-Vu d’Adrien Legrand se fait grande. Tel un robin des bois musical, le garçon distille depuis quelques temps des singles qui touchent avec aisance la cible au centre de nos coeurs.

C’est une nouvelle fois le cas avec ce souffleur de feu. On se laisse bercer par sa douce langueur, cette basse discrète et ce saxophone chaleureux qui succède à des synthétiseur ouateux.

Avec ce nouveau morceau, le caennais continue de développer une poésie mystérieuse, presque floue, dont lui seul a les codes de décryptages. Le morceau se transforme en lettre ouverte, presque ésotérique où l’on pourrait voir dans ce pouvoir, celui de charmer, de faire vivre des histoires et rendre les mots vivants.

Pour l’accompagner , Adrien Legrand a laissé carte blanche à Léo Gack. Le réalisateur, caennais lui aussi, nous offre un vrai petit court métrange en 16 mm, onirique et hors du temps dans lequel on observe un jeun garçon fasciné par un feu qui brûle devant lui. On observe alors cet étrange rituel, ce feu qui finit par disparaitre comme si il avait été absorbé par ce jeune homme au regard perçant.

Yard Act – Land of the Blind

Bienvenu au royaume des aveugles ! Dans ce deuxième extrait de leur futur album The Overload qui sortira le 7 janvier 2022, le groupe de Leeds nous présente un clip totalement décalé. Dans une scène filmée en noir et blanc, on y voit un magicien prendre en otage par hypnose tous les clients d’un café de Clitheroe (près de Burnley en Angleterre). Il exécute et foire tour après tour ses interventions. La salle étant totalement acquise à sa cause, ce vil charlatan vient à commettre l’impensable dans les dernières secondes. C’est de la régalade ! Tout est décalé.

En plus de cette satire, le groove musical suit parfaitement la trame de la vidéo avec une chorégraphie simple et amusante. Land of the Blind décrit ainsi notre faiblesse mentale à lutter contre les personnes ayant une forte confiance en eux. Simple, ironique et dansant. Yard Act continue de confirmer tout son attente suite à son premier EP Dark Days.

Marek Zerba – Feu Vert

Pour bien envelopper son nouveau single Halloween, Marek Zerba a décidé d’accompagner cette sortie par la mise en image du premier titre Feu Vert !. “This Film Should Be Played Loud “, tel est le leurre des premières seconds pour faire péter les watts avant de lancer les images. S’ensuit des extraits du film d’horreur-horrifique d’Abel Ferrara Driller Killer, sorti 1979. Le choix de cette production n’est pas anodin puisque le pitch colle parfaitement à l’ambiance musicale mystérieux et angoissant de Feu Vert !.

On y suit un peinte en perdition, joué par le réalisateur lui-même. N’arrivant pas à finir son chef d’œuvre, il est pris d’hallucinations la nuit qui l’amène à tuer des sans-abris la nuit à l’aide d’une perceuse électrique. En parallèle, dans son morceau, Marek Zerba sème aussi le doute dans nos pensées nocturnes qui nous amène aux « portes de Lucifer ». Nous laisserait-il un message caché sur sa seconde nature ?

Stereoclip – Inner City Angels

Stereoclip a sorti vendredi le clip de son nouveau morceau, Inner City Angels. Les sonorités électroniques du belge accompagnent la fuite d’un patient d’un hôpital. Courant dans la rue en blouse, celui-ci est recueilli par deux de ses amis et partent tous les trois en virée en Normandie. Ce morceau, avec son rythme assez calme et chill house accompagne comme il le faut ce voyage entre copain. On suit les protagonistes au milieu des champs et en boite de nuit (c’est d’ailleurs l’occasion pour l’artiste de se montrer).La fin du clip dévoile un beau message : l’amitié peut sauver des vies. Le patient du début souhaite mettre fin à ses jours mais est sauvé in extremis par ses deux compagnons. Le tout, avec le décor magnifique des falaises normandes.

Bleu Nuit – Mensonges

Le groupe montréalais Bleu nuit confirme avec leur nouveau single leur orientation dark. Avec un post punk très eighties, « Mensonges » révèle tout leur nihilisme dans une étrange mise en abîme d’un sommeil paradoxal.

Le clip s’ouvre avec un employé de bureau figé devant un écran d’ordinateur qui prend vie. Ils s’emporte sur son clavier. Des formes insensées commencent à danser alors qu’un oeil tremblant (le célèbre mouvement de l’oeil pendant le sommeil profond ou REM) en surimpression.  Est-il en train de revivre en songe   son quotidien répétitif ?

L’ordinateur prend le contrôle . Alors qu’à l’extérieur les couleurs sont monotones, les formes colorées et  psychédéliques sortent prenent l’intégralité du clip. Nous rentrons dans ce qui est progressivement un cauchemar déjanté. Les mouvements s’accélerent. Une impression de tournis nous enveloppe même. La réalité n’existe plus. « mensonges » serait-il une critique sur les promesses de notre société dite moderne et ultra-connectée?

Le groupe apparait rapidement en fin de clip. Un sursaut ? Un moment furtif d’éveil ?

Toujours devant son écran, l’employé, l’air hagard, ecrit un texte aux allures de prise de conscience poétisée. Son visage, impassible, se reflète sur l’écran. Le réalisateur nous laisse lire les vers qui s’écrivent au fir et à mesure: « Dans ce cauchemar noir… ». La musique devient hypnothique.

Gus Englehorn – The Gate

Gus Englehorn nous emmène une fois de plus dans un univers surréaliste et décalé avec un nouveau clip, le cinquième réalisé avec sa copine, plasticienne et musicienne Estée Preda.

The Gate commence comme un conte macabre, habillé par une guitare qui s’amuse avec des intervalles délicieusement dissonants. La batterie arrive ensuite en nous faisant soudainement basculer aux portes du Garage anglais. Gus déclame son trip avec des airs faussement innocents : une rencontre imprévue avec la Mort, une maison mystérieuse qui brûle et une projection de lui-même s’observant du haut de la fosse dans laquelle il s’est réveillé. Les décors « faits maison » nous plongent dans une forêt inquiétante, des vers en stop-motion nous amènent dans la terre, dans le royaume des morts. Les tons sont à dominante de bleus, on peut cependant noter l’omniprésence et l’importance de la lumière, qui vient souvent former un cercle autour de son visage, augmentant encore un peu le côté surréel du clip et évoquant l’union du terrestre et du divin.

En effet, les artistes jouent avec les parallèles, arrivés à la moitié du clip, on s’envole vers des cieux à l’allure presque mythologique, avec toujours des décors Do It Yourself assumés. On passe du bleu nocturne au jaune diurne, presque solaire mais qui tend un peu sur le glauque, l’ambiance change radicalement, nos québécois pastichent maintenant la Brit-Pop, gammes majeures et texte joyeusement niais, ils nous servent de jolies et rayonnantes harmonies vocales.

Gus semble avoir réussi sa quête, une touche mélancolique évolue jusqu’à sombrer à nouveau, doucement, dans l’inquiétant et le pesant. On peut se demander si au final, on n’assiste pas ici à un face à face intérieur, dans les moments sombres de l’existence, s’éveiller au fond du trou, s’y observer, voir son soi prendre feu puis tenter d’éclaircir ses pensées pour retrouver la paix intérieur, cette quête éternelle de l’apaisement ?

La Bronze – L’habitude de mourir

C’est avec douceur que la chanteuse La Bronze évoque la mort et la renaissance sentimentale avec le titre L’Habitude de mourir. Après s’être fait connaître par l’envoûtante reprise arabophone de Formidable de Stromae, l’artiste canadienne nous offre une balade. Un titre doux, porté par des sons électroniques et de la rondeur d’un clavier, évoquant quelques airs de Chopin. Une douceur mettant en avant l’aspect romantique et les sentiments déployés du morceau. Il est évoqué la fin du monde, ou plutôt la fin d’un monde, d’une histoire. Comme une nécessité d’apprendre et de s’habituer à mourir pour renaître, aller de l’avant et laisser é

clore de nouvelles choses. Toute cette atmosphère tant vaporeuse que sentimentale est mise en exergue dans un clip réalisé par Adrian Villagomez. Les couleurs sont pastels, les scènes poétiques semblant sortir d’un conte mais illustrant pourtant la violence, la mort et la rupture.  

Entrée Libre – Aller Simple

Le duo Entrée Libre nous offre un Aller Simple sans retour vers une musique aux accents psychédéliques des années 1980, 1990, autant proche de l’univers musicale de Fishbach que du groupe La Femme, voire Lescop. Les sonorités sont entraînantes, groovies. Cette idée de voyage est reprise dans le clip réalisé par le duo accompagné de Leïla Macaire. On y aperçoit des vidéos de vacances à l’aéroport, à la mer, près des palmiers et même sous l’eau, comme des souvenirs. De quoi nous faire partir loin de la grisaille de la métropole, des tracas et du froid qui s’installe peu à peu.

UssaR – Bidon Vie

Parfois, il y a des lieux qui appellent une chanson, comme une évidence. Alors que ses étendues viennent de se dévoiler en vinyle, UssaR a eu la bonne idée d’enregistrer, avec Jules Lahana, une session live et épurée de son Bidon Vie dans un supermarché.

Un lieu de profusion, de consommation à l’excès, de désirs parfois refoulés. Un lieu central pour les héros de son morceau. En bon observateur de notre monde moderne, UssaR croque ces abimés de la vie, ceux qui s’en prennent plein la gueule, qui se perdent et qui se noient. Chaque couplet est une pastille, un être que l’existence n’a pas épargné et qui se cherche des échappés, des ailleurs mais au final ne fait que sombrer dans des choses qui lui font plus de mal que de bien.

Le bidon est il à moitié vide ou à moitié plein ? On ne le sait pas vraiment. Mais à voir UssaR déambuler tel un fantôme rouge sang dans ces allées vides, on image bien toutes ces vies cabossées se retrouver dans ces lieux qui grouillent de vie mais sentent bien souvent la mort, celles de ceux qui ont abandonné leurs rêves pour un quotidien tracé qui ne leur apporte rien.

Nous, on préfère voir en ce Bidon Vie une porte ouverte vers l’ailleurs, nous rappelant de manière assez forte qu’on est souvent piégés, mêmes sans le réaliser vraiment.

Marilyne Léonard – Honey

Parfois, quand le cœur se brise, on cherche un moyen de combler le vide, de ressentir des choses alors que plus rien ne semble pouvoir réparer la machine émotionnelle de notre vie.

Dans son nouveau clip,réalisé par Justine Prince, c’est à travers le feu que Marilyne Léonard cherche à retrouver le fil de ses sensations. Une passion pyromane qu’elle vit loin de toutes conventions et surtout loin des autres. On la suit dans ses pérégrinations nocturnes, vampire amoureuse qui évite plus que tout le jour et le soleil.

Honey , son nouveau morceau raconte tout ça. La fin d’une histoire, un monde qui disparait, une relation qui se termine. Entre le chant et le spoken, Marilyne Léonard couche ses mots et ses maux, raconte sa tristesse sensible sur une production moderne et chaleureuse qui se joue des genres, alternant entre la pop et le hip-hop pour nous faire danser les larmes aux yeux.

Honey est le second extrait du premier album de Marilyne Léonard, prévu pour 2022 chez Audiogram.

Livaï – Une autre nuit Part.3

En septembre, le jeune Livaï dévoilait son projet Une belle mort. Pour accompagner cette sortie il s’est lancé dans un court-métrage divisé en plusieurs épisodes correspondant à certains titres du projets. Après avoir déjà dévoilé Un Equilibre et Les Vautours, il a sorti cette semaine le troisième épisode : Une autre nuit. Pour se faire il a fait confiance au réalisateur Owen Kasparian.

Comme le titre du morceau le laisse présager, le clip regorge d’une ambiance majoritairement nocturne. Pourtant, il prends place en journée quand l’artiste rentre dans sa voiture. A partir de ce moment, il roule laissant filer les heures et emmenant ses spectateurs avec lui dans sa ride nocturne où l’alcool se mélange aux moments de vies.

https://www.youtube.com/watch?v=A7wtWmKUbm4