La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face a vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre, la première partie de la sélection numéro cent trois des clips de la semaine.
Kids Return – Orange Mountains
Ils se sont rencontrés à l’âge tendre de 13 ans, Ils ont depuis rêvés ensemble, grandis ensemble, et composent maintenant ensemble. Un binôme lié comme deux frères, portés par l’innocence de l’enfance et la nostalgie douce-amère tel le film du réalisateur Takeshi Kitano dont ils empruntent le nom. Kids Return nous offre aujourd’hui un moment de grâce dans leurs montagnes des Pyrénées, là où le morceau Orange Mountains fut composé. Il est ouvert par des clavecins ultra mélodiques qui ne sont pas sans rappelés ceux de Michel Berger, puis porté par des harmonies masculines et féminines. Quête de l’amour de deux amis, entre coeur brisé et soutien infaillible. Un voyage initiatique qui se conclura par une fuite en avant. Filmé à la pellicule et éclairé à la bougie, il se dégage une ambiance de rêverie rétro qui sied à merveille aux visages hors du temps du duo. Une mélodie charmante poussée avec grâce par une instrumentale céleste. Kids Return est définitivement au sommet de sa Montagne.
Benjamin Cotto – Marilou
Benjamin Cotto, le deuxième protagoniste du duo Lilly Wood and The Prick laisse de côté les synthés dansant pour se réinventer en crooner. Il nous fait aujourd’hui la surprise de sortir un premier EP en solitaire : Bleu. Des chansons dans lesquelles se mêlent toutes les nuances de sentiments, portées par le ton grave de Benjamin. Deuxième single sorti, Marilou est le petit bijou de tendresse et de poésie que nous offre l’EP. S’ouvrant sur des chœurs planant, Benjamin pose son timbre sensuel avant de s’abandonner à des envolées rêveuses. Les harmonies se mêlent aux synthés célestes pour un morceau tout en intensité. Un crescendo qui voltige avec grâce pour représenter cet élan d’amour. Alternant première personne du singulier et du pluriel, on se perd dans les protagonistes auxquels sont dédiés la chanson… Marie, Lou ou Marilou, le mystère restera entier. Histoire de nous faire fondre encore un peu plus, le clip est illustré par les vidéos vintage d’une sortie en mer, et plus particulièrement d’une petite fille rayonnante. Entre nostalgie amère, tendresse absolue, et rêve hors du temps, le morceau est un pur moment de grâce.
Kyo – Quand je serai jeune (Chap. III)
Les incontournables KYO ont cette semaine dévoilé Quand je serai jeune, un titre accompagné d’un clip à reculons réalisé par Akim Laouar qui se place directement dans la continuité de ceux de Margaux, Omar, Marlow et Mon époque. Dans ce troisième chapitre bercé par une magnifique ballade en duo où se mêlent nostalgie et regrets, on découvre le destin tragique des protagonistes : pour tout comprendre, il faudra se tourner vers le commencement et apprécier cette mini-série de clips en suivant l’ordre établi par les épisodes précédents. Margaux, Omar et Marlow forment effectivement un trio fictif et complexe autour duquel La part des lions, prochain et 6ème album du groupe, se construit. Disponible le 26 novembre, ce nouveau disque s’annonce comme un projet d’une grande richesse, tant par son univers et ce qu’il raconte que par sa musicalité qui est un vrai retour aux sources rock des débuts de KYO.
Deleter – Mystique (illuminé) feat. Tenebleu
Il y a parfois des morceaux qui agissent sur nous comme un sortilège, qui se diffusent lentement en nous et qui nous piègent un peu dans leur univers parfois étrange, souvent différent.
Mystique de Deleter, issu de son premier EP prévu pour janvier 2022, est de cette classe là. Un rituel, quelque chose d’assez différent des codes du rap actuels pour nous entrainer dans un univers solide et inquiétant. Presque le morceau idéal pour célébrer cette journée d’Halloween en fait.
Le garçon, et son camarade Tenebleu, joue de ces codes, un flow solide, une production qui rappellera par moment le côté le plus sombre et hip hop de Stupeflip, un peu d’humour et l’envie de balancer quelque chose d’à la fois personnel et ouvert aux autres. Mystique est une belle carte de visite.
Et si l’ambition est présente, elle l’est tout autant, voir plus, avec le clip de Emmanuel Ollivier. Il prolonge les ambiances de sorcellerie entre-aperçue dans le son et nous entraine dans un lieu étrange pour une sorte de rituel qui tourne mal, convoquant fantômes et rappeurs dérangés dans une danse macabre et sombre. Le genre de rendu qui ne laissera personne indifférent et qui nous plait beaucoup, nous donnant clairement envie de découvrir la suite de cet éternel deleterant.
Roseboy666 Ft Babysolo33 – Ta Shawty
Producteur croisant sonorités électroniques et hip-hop, Roseboy666 va bientôt livrer un échantillon de ce sur quoi il a travaillé ses derniers mois à travers un projet qui regroupe plusieurs artistes émergents. A l’instar de Babysolo33 présente sur Ta Shawty, extrait dévoilé cette semaine et accompagné d’un visuel signé Été Meurtrier.
L’alchimie entre l’instrumentale hypnotique et la voix envoûtante de la jeune artiste, fait que la magie opère assez vite. Toujours accompagnée de sa voix juvénile, elle raconte ses problèmes d’adultes, comme cette relation digitale développée dans ce clip. Dégageant une certaine mélancolie, elle s’inscrit parfaitement dans l’esthétique proposé par le producteur.
« J’voulais être ta shawty, je voulais me poser dans tes bras Ca devait être easy mais j’ai plus le temps de penser à tout ça«
Le tout est bien appuyé par un visuel tout aussi hypnotique mettant en scène Babysolo33 dans un décor jouant sur les couleurs chaudes pour évoquer l’amour mais également sur le côté digital, représentant à merveille les propos et l’atmosphère du titre.
Bandit Voyage – Moyen âge
Et hop, le deuxième EP de Bandit Voyage – Amour sur le Disque Volume 2 – vient de paraître, édité par le génial et incontournable label Entreprise. Aussi, pour accompagner sa sortie, quoi de mieux que de retrouver un de leurs morceaux les plus emblématiques.
Une intro à la drum machine, version Roland CompuRythm CR-78, qui nous replonge dans les sons de la fin des années 70 – souvenez vous du tempo d’In the Air Tonight de Phil Collins. Une mélodie à la guitare addictive qui circonvolutionne à souhait. Une basse qui donne corps à la ligne musicale. Et surtout la voix d’Anissa, ensorcelante dans ses modulations – entre Lene Lovitch et Brigitte Fontaine – qui se construit sur des oppositions entre graves et aigües. Etonnamment, il existe un côté ethnique et musique traditionnelle dans la façon de jouer avec des répétitions de paroles presque incantatoires.
Un son vintage pour des super(op)positions entre moyen-âge et moderne-âge pour illustrer que malgré les avancées considérables et fondamentalement positives, nous tombons, par facilité, dans leurs travers.
Dans la vidéo, mise en œuvre par Valerian 7000, vous ne trouverez ni de scénario complexe, ni de storyboard léché. Le duo formé par Anissa et Robin en constitue le centre et l’aimant. Tout s’orchestre, ensuite, autour du travail des images, magnifiquement surexposées et glittérisées, et du rythme impulsé par un montage incisif et intense.
Moderniste ou primitif, Moyen Âge exhale une énergie qui nous envahit imperceptiblement. C’est l’effet Bandit Voyage. À consommer sans aucune modération.
La Belle Vie – Mauvaises Habitudes
La Belle Vie nous revient avec une nouvelle douceur musicale et dansante. Mauvaises Habitudes se pare d’une mélodie électro-pop dans laquelle la voix de Julie, avec son grain que nous adorons, s’infuse allégrement entre les notes. Le refrain efficace et le rythme entraînant font presque oublier le côté sombre des paroles. « Un temps se passe -Et tout se perd – Et tout s’efface ». Nostalgie ou détachement, la vidéo joue sur les effets d’ombres et de lumière. Dans la nuit, Julie et Simon-Gaspar se meuvent et dansent simplement éclairés. Tout ce qui n’est pas dans la lueur du faisceau disparaît dans l’obscurité de la nuit, de l’oubli. Mais l’ombre n’existe que par la présence de lumière. Alors soyons, encore au moins pour une nuit, comme ces papillons de nuit qui virevoltent auprès des candélabres.
Sean – Diamant
L’aventure entre le beatmaker Roodie et le rappeur Sean semble inépuisable. Ils ont de nouveau collaboré ensemble sur le dernier morceau du parisien, Diamant qui a également été clippé par SwimTheDog. Les notes de piano camouflées par une instrumentale sombre apportent une touche mélancolique bien sentie qui permet au jeune rappeur de lui-même se complaire dans cet état d’esprit y ajoutant quelques touches d’égo-trip remplis d’attitudes et envoyés avec aisance. Celui qui se dit à moitié loup prouve à nouveau que c’est dans la nuit qu’il opère le mieux, donnant donc vie à un visuel teinté par la noirceur nocturne.
Metronomy – It’s good to be back
Pour signifier et célébrer son retour le groupe Metronomy présente le premier single d’un album à venir : It’s good to be back.
En attendant donc Small World – prévu pour février 2022 – la joyeuse bande nous sert une partition colorée et funky à souhait, portée par des claviers limpides créant un tout supra entêtant. Ici la musique se transpose dans différents tableaux traversés un à un par Joseph Mount et occupés par chaque membre du groupe. Une boucle interminable, dans laquelle iels reviennent encore et encore, avec un brin d’ironie, jusqu’à l’épuisement, qui se ressent à l’image et dans la musique. Filmé par le duo Dreamjob, ce nouveau clip nous donne à voir une esthétique impeccable immédiatement liée aux nouveaux artworks du groupe. Un retour en beauté près de deux ans après Metronomy Forever.
Lazuli – Pica
Après avoir collaboré sur la mixtape de JMK$ et 8Ruki, le producteur Brodinski semble trouver de plus en plus d’artistes avec qui collaborer en France pour le moment puisque c’est au côté de Lazuli qu’il se retrouve dans Pica. L’artiste a pu mélanger son amour des ambiances latines à l’univers oppressant du producteur dans un titre qui envoie de l’énergie à l’image de son clip réalisé par Amax.mp4. Après une introduction orchestrale posant le lieu du tournage : une soirée où le rhum coule à flot, la musique s’emballe et avec elle la foule présente et prête à lâcher ses meilleurs pas de danses une fois les hostilités lancées par l’artiste elle-même imprégnant la pièce de son charisme. Les tons rouges utilisés collent à merveille aux sonorités chaudes et ultra rythmées de la production. L’alchimie est donc au rendez-vous sur tous les plans.
Shygirl – Cleo
Un écran qui grésille, des images en technicolor qui défilent, le visage de Shygirl, puis un zoom progressif sur l’artiste au premier plan et de dos. Pour le clip de Cleo, elle s’offre un décor de mille et une lumières, eau, reflets, cristaux, plumes et strass. Sa musique électro-pop – soutenue par des cordes accentuées – transperce l’écran de façon assumée, tout comme elle, évoluant sous nos yeux en muse superbe. « Call me Cleo ». Une muse captivante aux visages multiples, et au charisme indéniable, magnifiquement présentée par le travail de Trinity Ellis.
ANNA – Loud Love
Dernier single avant la sortie du quatrième album – GUILT – pour Anna ! Pour amorcer cette dernière étape le groupe nous présente le titre Loud Love, porté par un clip une nouvelle fois sous le signe du homemade et du DIY. Caméra à la main, fixant un miroir sale, tout en chantant, Martin Vidy introduit les couleurs pop et lo-fi de sa musique. L’image et la musique jouent en symbiose sur une forme d’hypersaturation efficace et bien amenée. La caméra se penche nonchalamment en gros plan sur les instruments, les visages, et ces éléments plus ou moins flous qui viennent ponctuer ici et là l’image.