Clips de la semaine #196 – Partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la seconde partie de notre 196ème sélection.

Charly Marty – Pensées Piscines

Charly Marty c’est vraiment le gus – oui oui gus et y a rien de méchant là-dedans – qui le plus sérieusement du monde ne se prend pas trop au sérieux. Et c’est si savoureux. Il le fait avec tellement d’assurance et d’aisance qu’il est impossible de ne pas décrocher un sourire.

Après Jennifer, il sort Pensées Piscines single éponyme de son tout premier EP à venir en janvier prochain avec un clip on ne peut plus à son image complètement décalée mais bien ancrée dans son temps.

La vidéo s’ouvre sur le garçon sur les marches d’une piscine à l’abandon, un téléphone à fil lui tient compagnie où il échange avec sa maman et sa chérie à qui il promet d’acheter du pain. Jambon, verre de lait, masque géant, crâne, kayak et pâte / dentifrice ponctueront le clip. Pas de rapport direct avec la chanson vous nous direz. Mais c’est ça Charly Marty : tout un décorum pour des textes complètement absurdes qui résonnent malgré tout en nous. Parce qu’elles racontent des banalités avec beaucoup de légèreté, l’insignifiant devient significatif sans jamais être profondément naïf.

Charly Marty, un vrai remède à la morosité ambiante.

Valence – Onze 

Valence rapplique à deux reprises cette semaine avec la sortie de Onze et de À l’étang des roseaux, deux morceaux qui figureront sur son deuxième album intitulé La nuit s’achève et prévu pour le 2 février 2024 chez Chivi Chivi.

Puisqu’il fallait choisir de quel titre vous parler, on s’est aujourd’hui penché.e.s sur Onze : dans un clip réalisé par Gerardo Alcaine, on retrouve l’auteur-compositeur-interprète québécois seul face une télévision confuse et cryptée-cryptique.

Dans ce salon silencieux, Valence chante l’attente d’un signe de l’autre et sublime la langueur parfois amère de l’incertitude dans une merveilleuse chanson qui a de la douceur plein les poches (et de superbes traits de pedal-steel). 

La Fève – Loyal

Après le succès de la mixtape ERRR, le phénomène La Fève s’est fait plus rare. Il a signé cette semaine son retour avec le clip de Loyal réalisé par son fidèle acolyte, Walone. Ce dernier annonce d’entrée un futur projet déjà prêt mais dont la date est encore inconnue. Pas grave, en attendant on patiente et on regarde dans le rétroviseur de ces deux dernières années pour comprendre ce qui a pu se passer dans la vie du jeune rappeur. Entre le studio, les concerts et un train de vie qui évolue, on est au plus prêt de son quotidien. Lui qui ne voulait que baiser le game (sic) semble être sur la bonne route. Sur une trap mélancolique, fruit de l’alchimie entre les producteurs Tarik Azzouz, Kosei et Louis Marguier, il évoque avec nostalgie et satisfaction l’élévation de son mode de vie et ce, grâce à la musique. 

Une ascension qu’il ne manque pas de partager avec ses frères, ceux qui sont là depuis le début et continue de faire avancer le navire. Ce dernier se remplit de nouvelles têtes, et pas des moindres. Parmi elles, Zaytoven, ponte de la trap Outre-Atlantique, Hamza ou encore Tiakola dont les mélodies transpercent la fin du morceau. 

Les influences semblent avoir traversé l’Atlantique, ce qui est prouvé par des scènes directement filmées lors d’un voyage aux States et par la drill de Chicago, qui comme un screamer jouissif arrive à la fin du morceau, annonçant une suite bien moins mélancolique et bien plus chargé en égo-trip. De toute façon, la polyvalence de La Fève n’est plus à démontrer. 

Le clip et l’interprétation qui l’accompagne donne un apéritif déjà très costaud de ce projet à venir qui, au vu de ce qu’il a laissé entrevoir risque d’asseoir définitivement son auteur à la table des grands de ce rap jeu. 

Simili Gum – NRJ

Toujours dans un univers édulcoré à la croisée des genres, Simili Gum fait son retour avec un morceau entraînant et addictif au possible.

Plans renversants vaporeux bourrés d’effets, de ralentis et de déformations au rythme des néons de fêtes foraines, cette virée nocturne aux Tuileries révèle la signature inimitable de Lilian Hardouineau, qui réalise une fois de plus un visuel époustouflant pour Simili Gum.

Il maîtrise son style à la perfection témoignant d’une belle évolution, proposant un morceau court mais percutant, auquel on serait bien tenté de lui attribuer la qualité de potentiel hit. L’avenir nous le dira, mais en tout cas, pour nous, il en a toute la puissance. 

ELOI – Volcan

Près d’un mois après la sortie de Dernier Orage, ELOI accompagne le titre qui ouvre en grande pompe son tout premier album d’un visuel à la hauteur du morceau. Ce n’est pas pour rien que Volcan nous est présenté en premier dans cet opus, il nous introduit la couleur du projet, avec son intensité et sa mélancolie qu’on retrouvera tout du long.

En collaboration avec CHORIBABY, son acolyte qui l’accompagne à la guitare sur scène et qui l’invite ici à courir sans jamais s’arrêter en espagnol, Eloi nous offre un morceau empreint d’espoir. L’histoire d’une personne qui s’est égarée mais a réussi à émerger après la tempête, prête à s’affranchir du passé.

Nous avons pu discuter avec elle au sujet de son nouveau projet et de son rapport à l’adolescence, et c’est disponible juste ici !

Johnnie Carwash – I’m A Mess

Après un premier album remarqué, Teenage Ends, le trio lyonnais Johnnie Carwash est de retour avec un extrait clippé du prochain opus : I’m A Mess.

Scènes de fête et introspection champêtre, les artistes nous rappellent qu’ils sont avant tout, de grands enfants. Ce nouveau morceau, « hymne pour les inadaptés » selon eux, célèbre la fête, l’insouciance et les jolies erreurs. Deux minutes et quarante-cinq secondes de danses endiablées et de refrains punchy qui nous replongent dans nos années adolescentes.

La vidéo, réalisée par Sabrina Duval et Kévin Lafort (Fontanarosa) met en valeur de sublimes masques-maisons créés par Stéphanie Argentier.

Ils fêteront la sortie de leur second album le 16 mai à la Boule Noire (Paris) et c’est évidemment à ne pas rater.

Skopitone Sisko – Dive

Alors que leur premier album est sorti en début d’année, les bretons de Skopitone Sisko continuent de le faire vivre et de le mettre à l’image. Aujourd’hui, c’est Dive qui y passe !

Comme le titre l’indique, on part pour une virée dans les profondeurs dont les atours rappellent une épopée digne de Jules Verne. La direction artistique s’inscrit dans la lignée des précédentes productions de la formation, avec une animation dans laquelle viennent s’insérer les membres du groupe dont les sonorités viennent parfois évoquer le bruit des bouteilles d’oxygène et autres dispositifs nécessaires à la survie des humains dans l’eau.

En tout cas ici, pas de risque de mal des profondeurs mais au contraire, la garantie de découvrir un univers relevant du fantastique tout en balançant la tête au rythme d’un basse-batterie intraitable et presque sombre pendant les couplets.

Degermann – Comme un géant

Comme un géant, le dernier clip de Degermann, nous fait découvrir la talentueuse Flora Mathieu à la réal’, assistée à la direction du mouvement par Alex Blondeau.

La dérive poétique et mélancolique du chanteur prend corps dans un ballet en duo, minimaliste et contemporain. Donnant aux mots l’élan du geste pour les porter, cette chorégraphie saccadée nous rappelle combien la musique s’incarne et nous habite – autant que les sentiments partagés dont il est question.

Cœur-joie – L’Île du diable

Coeur-Joie, dont les membres ont déjà fait leurs armes dans de nombreuses autres formations (Nathan Roche (band), Structures…) et qui nous avait ravis avec ses premiers titres, revient avec un single-signature. Pour ce son appuyé et rectiligne, on retrouve les inflexions psyché et les envolées dreamy qui nous ravissent depuis leurs débuts, au diapason de l’univers visuel signé Isabel Stub.

Les cinq musiciens nous entraînent sur L’Île du diable, archipel mystérieux où on nous révèle que le commandant Cousteau aurait rencontré « une chose absolument terrifiante, la plus incroyable de sa vie et qu’il n’aurait jamais voulu révéler à personne »…

Grimés façon monstres en pâte à modeler, ils tapotent synthés et batterie avec flegme et sans trop en dire pour évoquer les faces cachées de l’existence, sues un jour, mais dont on doute à mesure que notre perception d’alors s’altère… Un clip comme un rêve éveillé, et une promesse tenue.

Bonnie ‘Prince’ Billy – Keeping Secrets Will Destroy You

Bonnie Prince Billy sort cette semaine Keeping Secrets Will Destroy You, le morceau titre de son dernier album sorti cet été… qui pourtant n’y figure pas. Un morceau “bonus” donc, aussi poignant que majestueux à la lenteur méditative et aux sublimes arrangements. Si tout l’album a été enregistré à Louiseville, Kentucky avec des musiciens locaux, ce dernier morceau a incité le musicien à voyager pour travailler avec entre autres Shahzad Ismaily, Emmett Kelly, Jim Keltner et Blake Mills.

La vidéo qui accompagne le morceau, réalisée par Adam Laity, montre des paysages grandioses qui à l’image du morceau invite à la contemplation et à la réflexion.

Avec ce titre Will Oldham clos le cycle de Keeping Secrets Will Destroy You, et pour célébrer l’événement a même créé un bière du même nom (disponible en ligne).

Charlie Motto – Bébé 

A travers un morceau efficace, dansant et disco-pop, Charlie Moto évoque l’amour et ses dérives, nuances. La chanteuse évoque un clip qui semble se déchirer. Reproche et violence sont évoquées, ce qui créer de la contradiction. Le rythme du morceau est entrainant, combatif.

Les frappes de percussions électroniques renvoient aux paroles : « Bébé, Je n’aime pas quand tu gueules / Je n’aime pas tes battles /Je ferais mieux d’être seule. » Bien que l’instrumentalisation soit très marquée, la jolie voix de Charlie Moto reste mise en avant.

De la dualité des paroles et de la musique, le studio ruptures réalise un clip en noir et blanc. La chanteuse de Bébé est à l’initiative de ce choix artistique.

Theodora feat. Aghiad – YAR

Entre la sortie d’un premier EP et une release début décembre, Aghiad nous dévoile Yar. Un titre qui prend la forme d’un duo avec l’envoutante Theodora. Le titre du morceau YAR  pourrait se traduire du turc par « sa moitié » ou « la falaise ».Aghiad chante en langue turque l’amour perdu, éloigné. En conteur, il raconte l’histoire d’un couple au bord d’une falaise. L’un des deux amants s’envole en se transformant en oiseau.

Ainsi en l’air et suspendu, l’oiseau ne sait pas s’il tombe ou s’il s’élève. Une allégorie de l’amour qui détruit autant qu’il épanouit. Tandis que Theodora évoque l’attente dans un couple : « Attend-moi car moi je t’attendrai ». Si ces paroles laissent à imaginer une chanson triste, ce n’est pas le cas. YAR  touche par sa sensibilité et par son aspect dansant, électrique, éclectique. Une ambiance que recrée le duo Pamp3000 et Contextual Mumbling, réalisant le clip. 

Melheads – Night Gym

Le groupe belge continue sur sa lancée cosmique avant leur prochain album Decent Sex prévu pour le 09 février prochain via Mayway Records. Leur nouveau single Night Gym ne déroge pas à la règle et propose une expérience physique, une énergie punk absorbante menant tout droit vers le carambolage. Une live session devant deux voitures scotchées au mur, percutées de plein fouets, à l’image de leur musique.

Un groupe d’une singularité forte portée par la voix de Sietse Willems, entre Gun Club et IDLES ! Si le groupe nous donne ici un aperçu de ce à quoi s’attendre en live, il ne faudra pas manquer leur passage au Supersonic le 24 Février prochain dans le cadre de leur tournée européenne !

Chalk – The Gate

Découverts sur scène à Beauregard, les garçons de Chalk nous avaient marqué par un show sec et intense qui nous avait logiquement poussé vers leur sublime premier EP.

Alors qu’ils s’apprêtent à frapper un nouveau grand coup en France avec leur passage aux transmusicales, les irlandais viennent se rappeler à nos bons souvenirs et dévoilent cette semaine The Gate, un shot addictif de moins de 3 minutes qui mélangent avec bonheur la rage du punk et les explorations électroniques qui viennent perturber votre coeur.

Le grand talent de Chalk, c’est de réussir à nous faire ressentir physiquement les propos de leur morceau, on est ainsi envahi par une certaine terreur, une pression sourde et invisible qui nous entoure et nous agresse.

Comme précédemment, le trio associe à leur musique une vidéo bluffante réalisée par Benedict Goddard. Une course folle et intense en forêt, des nuits perturbées et une imagerie métaphorique qui devient de plus en plus obsédante à mesure qu’on la regarde.

Une nouvelle fois Chalk frappe fort et nous fait du bien en pointant du doigt le mal qui nous entoure. On en demande encore s’il vous plait.

The Smile – Wall Of Eyes

Après un premier album et une tournée des plus incroyables, The Smile revient avec Wall Of Eyes, le premier extrait de l’album du même nom qui verra le jour début 2024. 

Comme d’habitude, ce titre ne nous déçoit pas. Sous des airs de musique folk acoustique, la musique se déploie tout au long de la chanson, passant d’une ballade bossa-nova à une atmosphère sombre où les voix, les claviers et guitares finissent par se confondre et dissoner. 

Le clip est signé Paul Thomas Anderson (Licorce Pizza, Magnolia) qui avait déjà travaillé avec Radiohead pour celui de Daydreaming. On suit Thom Yorke en noir et blanc, se fondre dans un monde à la fois si simple et si anxiogène, traqué par ces yeux, comme s’il vivait entre dans 1984 (Orwell) ou L’ange exterminateur (Luis Buñuel)

Le clip et la musique sont de vrais chef-d’oeuvre, et on est pas mal sûrs que ce prochain album le sera aussi !