Format court #62 : Péniche, Chester Remington, SOS Citizen

Chez La Face B, on adore les EPs. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EPs sortis récemment. Aujourd’hui, dans notre nouvel épisode de format court, on vous parle des EPs de Péniche, Chester Remington et SOS Citizen.

Péniche – Deuxième Étoile

Lors d’un été covidien où le Supersonic avait encore l’audace de programmer des concerts, nous découvrions le trio angevin d’adoption, Péniche. C’était le 28 août 2021. Ce fut tout de suite une révélation. De celle qui donne envie de taper du pied et de se retrouver tous ensemble sous une pluie diluvienne, un soir où la chaleur étouffe et écrase.

Péniche propose un post-punk terrassant, sans demi-mesure et purement instrumental, qui flirte souvent avec le math-rock. Formation née en 2018 avec la sortie de leur EP ATLAS (2020), le groupe a pris le large et revient aujourd’hui, le 4 mars, avec Deuxième étoile, leur second EP.

C’est pas des arêtes, c’est des muscles annonce d’emblée la couleur: le trio frappe fort. Les riffs sont lourds, une mélodie se dessine et se déploie pour ne plus sortir de notre tête. Le clip met en avant un concours de mangeurs et mangeuses de poisson pané dans une ambiance fête de village ahurissante. Un court morceau qui appelle instantanément Requin-Mako. L’urgence manifeste. Tout va vite, très vite, trop vite. Péniche nous emporte dans les vagues déferlantes. Nous n’en sortirons pas avant d’avoir la tête lessivée, le corps essoré et les yeux embués.

Soudain, Vendée Globe surgit. Lancinante. Traînante. Entre accalmie et poussée d’adrénaline. Et puis l’explosion. Et puis l’euphorie. Avant de rejoindre le port pour Deuxième étoile de mer, qui frôle le post-rock, où guitare et basse confluent pour un crawl synchronisé.

Finalement, L’eau ça mouille nous dépose sur le rivage, nerveusement, rapidement. Un titre dont on ne se défera pas pour un EP qui brille par sa vitalité, sa générosité et son aisance.

Deuxième étoile de mer, pour sauter dans le grand bain sans brassard, pour plonger dans l’eau salée les yeux grands ouverts et enfin, se laisser flotter à la dérive.

Chester Remington – Doldrums

Chester Remington, groupe tout droit venu de Reims distille un rock qui vous plaque au sol, souligné par un chant haut perché, une joie de vivre débordante et des clips déjantés. Entre surf garage et distorsion psychique, le quintet navigue avec aisance. 

Doldrums, leur second EP est paru le 18 février sur le label Le Cèpe Records. Ils fêtaient leur release party au Point Éphémère à Paris il y a quelques jours. Confirmation: Chester Remington possède une aisance scénique difficilement critiquable. Odilon au chant plane à 100 mille, flanqué de ses deux acolytes, Renaud et Thomas. Paul, lui, descend dans la fosse pour un solo de guitare fiévreux qui se finit par des accords au sol. Olivier, derrière sa batterie, tient le cap. Et il en faut de l’énergie pour contenir tous ces énergumènes !

C’est en grande fanfare que My very first time ouvre l’EP. Un titre efficace, un brin teenage qui donne envie de sauter partout. Mené par un son brut et des chœurs entêtants, le refrain s’égrène sans jamais se départir de son aplomb. Le clip à l’ambiance VHS est signé ClubK7 et autant vous le dire tout de suite… On nage en plein délire. Odilon se transforme en dealeur de musique -la sienne -, tendant son casque audio aux musiciens, se faisant tour à tour enquiquiner par une mouette en ciré jaune. La vidéo est entrecoupée d’extraits de live, de la mouette au Döner Kebab ou encore en train de jouer du piano. Si vous ne l’aviez pas encore saisi, ce petit oiseau est bien la mascotte de Chester Remington, qui ne se prend absolument pas au sérieux.

Car sur leur lancée surgit If He Answers, où les questions philosophiques et métaphysiques prennent ici tout leur sens. Une fois encore, le clip est totalement azimuté, pour le plaisir des yeux et des oreilles.

Out There et ses riffs de guitare donne envie de pousser les meubles du salon et danser pieds nus en chantant à tue tête. Chester Remington manie les chœurs comme jamais, avec des mélodies de voix psychédéliques venues directement des années 60. La fuzz, lourde, rappelle Oh Sees, une des multiples influences du groupe.

Lorsque survient Jimmy, c’est le moment de souffler un peu et reprendre ses esprits car voilà la chanson d’amour de Chester Remington. Une histoire qui se termine et Jimmy qui se languit. Un titre qui embrasse les deux parties.  « Yeah, It’s like flying in the air No, it’s not like you feeling down No, it’s not like you feel so bad Yeah, It’s like you burn in fire ». Des reverb’, une voix lancinante pour un slow tourmenté. 

Don’t Say Shit respire le grunge des années 90. Un morceau nerveux  qui nous précipite déjà vers la fin avec Beach. Le récit d’un garçon prévenant ses parents qu’il va faire du surf.  Et promis, il ne rentrera pas tard. Il semblerait que l’océan soit agité à en juger par la frénésie qui se dégage ce morceau. Odilon s’apprête de sa voix de crooneur tandis que les guitares prennent le large, dans une suite d’accords qui nous évoque le film Pulp Fiction. Ça groove dans tous les sens.  Distorsions, chœurs angéliques. Et les mouettes sont de la partie. Un écho tenace, tandis que la guitare se tend et s’étale. C’est le moment de tout lâcher. 

Doldrums, finalement, c’est l’EP pour partir en cavale, pour rouler à cent à l’heure, griller les feux rouges, rire à en pleurer, et recommencer. Chester Remington insuffle de la vie dans un paysage sonore parfois morose. Ne les ratez pas en concert.

SOS Citizen – An Extended Play

EP SOS Citizen An Extended Play

Le confinement ne revêt pas que des mauvais aspects puisqu’il a vu naître SOS Citizen. Louise Bou et Alan Borg se sont rencontrés en école d’architecture. S’ils avaient ce projet en tête depuis déjà quelques mois, c’est bel et bien une fois enfermés chez eux qu’ils commencent à créer leurs morceaux. Ils en diffusent donc deux fin 2020, crées sous GarageBand. Puis, ils sont rapidement rejoints par Bruno Souchu (La Billy) à la batterie et tout récemment par un saxophoniste, Alexis Andreani.

Ils étaient en concert il y a quelques jours au Supersonic pour nous présenter leur premier EP, An Extended Play, paru aujourd’hui et également sur le label Le Cèpe Records. Enregistré au Studio Claudio aux côtés d’Alexis (Biche) et Margaux (En Attendant Ana), ce sont cinq titres parfaits pour affronter la fin de l’hiver et se parer d’habits de lumière.

Louise, femme gracile vêtue d’une robe de velours et de Docs Martens nous séduit instantanément par la douceur et la fragilité de sa voix. A ses côtés, Alan et sa chemise affriolante nous emporte vers des accords jazz tandis que Bruno et sa moustache décapante nous donne le tempo. Enfin, Alexis se distingue par l’usage modéré mais ô combien nécessaire du saxophone, usant d’une discrétion touchante.

Inspirée d’une mission spatiale qui a réellement existé, Rosetta narre l’histoire d’amour impossible entre une comète et une sonde, mis en valeur par un clip réalisé par Hugo. Une ballade cosmique, agrémentée de la voix suave de Louise et de synthétiseurs sortis tout droit de l’espace.

Écrit et composé par celle-ci, le titre Juliette débute comme une douce comptine avant de s’emballer, entre guitares rythmiques aux accents anglais et synthés délurés. La voix claire se détache pour une danse envoûtante sur fond de psychédélisme. Dans le clip, Louise nous parle de Juliette, face caméra, entre le bord de mer et un parc luxuriant. Une histoire qui résonne en chacun et chacune de nous, sur l’importance de laisser filer les relations néfastes pour se consacrer à soi-même.

Late At Night s’attache à décrire la vie nocturne, ce moment divin où les carapaces se cassent et les âmes se dévoilent. Sans fioriture.

SOS Citizen se plait à parler d’amour, de l’impossibilité d’une histoire à l’autre. Did You Get est l’une d’entre elles, de celles où les espoirs et les efforts sont vains quand l’être aimé a décidé de quitter le navire. Un titre solaire et émouvant, pour les petits cœurs fragiles que nous sommes. Dès les premiers accords, la guitare se révèle et revêt des couleurs psychés, qui habillent le morceau d’une chaleur attendue. Les percussions donnent le ton. 

Enfin, All Hope We Had, couronne l’EP An Extended Play. Louise, accompagnée de chœurs cristallins et d’une guitare, entonne quelques phrases qui finissent par s’éteindre délicatement. Un morceau court et poignant, pour un groupe qui n’a pas fini de faire parler de lui.

SOS Citizen pour sortir de chez soi sans parapluie, le sourire en bandoulière et le cœur léger.