La musique, parfois c’est comme les blagues. Plus c’est court, mieux c’est. Voici notre sélection, très féminine et éclectique, d’EP : les trois premiers disques, respectifs, de Jo Vague, Melina et Margaux Heller.
Jo Vague – Vague

La nuit venue, les traits de Julie Roué, pointure féminine de la musique de film deviennent flous. Il faut les voir se transformer dans un mouvement ondulatoire. Julie se transforme en Jo Vague. La musicienne cristallise cette nouvelle identité dans un premier EP intitulé Vague. Elle y surfe sur ses émotions, ses sensations, en explorant des genres multiples.
Le disque court s’ouvre avec Jane. Un morceau pop électro avec des élans rock. La musique, travaillée, hypnotise l’auditeur par son minimalisme presque incantatoire. Car il est en question de possession. Jo vague traduit l’état de limerence : l’amour qu’on s’image, qu’on fantasme jusqu’à s’y noyer. Mais c’est en super-héroïne en lycra que l’artiste se relève, avec Superflex. Elle a percé le secret qui la rend surhumaine, chuchote-t-elle. Dont le clip s’inspire des films Barbie de Greta Gerwig et The Substance de Coralie Fargeat.
La cinéphile poursuit ses péripéties en dépeignant un Paris vide. Par la saison estivale, voire les Jeux olympiques de l’année dernière, on suppose. Mais c’est dans le Berlin des années 1980 qu’on semble plonger. Par ses airs minimalistes, Halftrack rappelle les morceaux de Kraftwerk.
Avant de conclure son EP, Jo Vague partage Nous ne ferons pas d’enfant. Cette confession lâchée détonne par ce qu’elle dégage. Le morceau conserve ses motifs répétitifs, devenant la patte de l’artiste. Mais le ton se fait moins dansant. De toute façon, la musicienne l’affirme : les pistes de danse, c’est fini. Mais c’est avec le titre hyperdansant et coécrit avec Paul Sabin, également compositeur de films, No disco, que Jo Vague le déclame. Celle qui a collaboré pour des comédies de Noé Debré, Émilie Noblet, en passant par Erwan Le Duc, n’a plus à démontrer sa passion pour l’humour absurde.
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Melina – Melina

C’est avec son nom que Melina se présente au monde avec son premier disque court en solo (Melina). La chanteuse et joueuse d’oud s’était déjà fait remarquer en collaborant avec des formations notamment le groupe de fusion méditerrannée Ko Shi Moon. Car Melina Vlachos rend honneur à ses origines lorsqu’elle crée. Elle grandit dans une famille de mélomane grecque qui lui enseigne des chansons traditionnelles. L’artiste en héritage une manière de chanter propre à ce pays hellénique.
C’est d’ailleurs avec une composition typiquement grecque que Melina fait l’ouverture de son EP. Valsamo, ou Amanes s’inscrit dans la tradition des « Aman » des complaintes qui se chantent sur les rives de la Méditerranée. Le chant y a ainsi une place centrale. Seul un son électronique presque atmosphérique se fait entendre pour faire la transition avec le second morceau, plus dansant. Mila Mou Normal (Katse Kala) puise ses influences dans Mesa Stin Poli Vriskomai, un chant traditionnel de Smyrne. Melina reprend des airs entraînants et dansants pour parler d’amour. Sans filtre, cette chanson demande à un amant de parler « normalement », de s’éloigner des beaux discours et d’être sincère.
La chanteuse évoque dans ce titre, une danse : le tsifteteli. Comme une invitation à danser sur Kano Traka. Dont la production dansante se situe entre les genres populaires entre le laïko et le skidaliko, du musicien Doğan Poyraz. C’est avec un titre plus vaporeux et doux que Melina nous dit Au Revoir.
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Margaux Heller – Le Bruit des Mots

Retenez bien le nom de Margaux Heller. Passée par The Voice, meneuse de revue au Paradis Latin, et attendue sur la reprise de la comédie musicale Le Roi Soleil, la chanteuse pourrait bien se faire connaître de tous. Elle sortait Le Bruit des Mots, son premier EP en début d’année. Des mots qui figent, enferment, blessent et essentialisent autant qu’ils permettent de s’affirmer. Margaux Heller donne de l’importance dans son écriture à la cause des femmes.
Sous des airs de Marilyn, l’artiste souligne les mots qu’elle fredonne ou qu’elle chante. Un morceau audacieux pour débuter le disque court. Car celle qui est aussi actrice raconte et joue de cette double identité. En explorant de multiples univers musicaux, sans vraiment se perdre, elle met en lumière ses doutes surpassés par son désir d’être sur scène. Mais c’est surtout dans le domaine des relations, que l’on doute le plus. Margaux Heller va à contre au courant. Elle chante avec confiance La Non chanson d’amour. Un morceau qui nous fait du charme par ses airs groove et souls directement tout droit sortis des années 1970.
Le ton redescend, avec le titre confession Mon Idéal. Avec ce titre entêtant, presque fédérateur, la chanteuse raconte le sentiment universel de vouloir atteindre une certaine forme de perfection inaccessible, autant professionnellement qu’amoureusement. À force, on s’épuise et c’est ce que chante Margaux Heller avec A nos amours lasses. Viens ensuite, Ça tourne en moi, un titre plus avant-gardiste sur le sound design et le propos.
Vous prendrez bien un peu de Margaux Heller ? Cette phrase tant répétée par l’artiste annonce Tu veux ma viande, le single de cet EP. Le propos de ce morceau se résume à dénoncer le fait de réduire les femmes à un simple corps, un objet de consommation. L’artiste se joue de cela dans le clip qui l’accompagne. L’EP se conclut par cette injonction : Donne moi du verbe. Elle poursuit l’importance des mots, surtout lorsqu’il s’agit d’évoquer des choses osées ou tabou comme la sexualité.
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