On revient sur la sortie du projet de Lucien Chatin alias Hannah Miette, qui donne son nom à son premier album. Un écrin contenant dix morceaux, harmonieux, savoureux et surprenants. Décollage imminent.
C’est au cœur d’une sorte de bulle d’introspection, que l’on s’immisce, le regard mais surtout les oreilles, en éveil. Lucien Chatin est un compositeur et musicien français originaire de Lyon. Si vous le connaissiez en tant que batteur présent sur différents projets, Hannah Miette annonce un album solo et autoproduit. Néanmoins on pourra y reconnaître diverses voix posées sur ses compositions, celles d’artistes et d’amis avec lesquels il a déjà travaillé.
Hannah Miette est un projet teinté par l’expérimentation, s’appuyant sur des sonorités pop, folk et électro. Le premier morceau 1, des plus mystérieux, se compose de divers sons, à nous de tendre l’oreille. Une porte qui s’ouvre, des bruits de pas, quelques murmures quasi inaudibles, il y a assurément quelque chose qui se prépare. Comme dans les backstages du projet, où sommes-nous, peut être invités dans les studios ? Recording 79, le dernier morceau de l’album, quant à lui, assez différent et instrumental, apaise nos cœurs et referme le rideau. On perçoit une foule, le vent de l’extérieur. Pas d’inquiétude on ne vous a rien spoilé. On tente simplement de saisir les contours de cet album. Une fois le tableau esquissé, que se produit-il au milieu ?
1 ouvre le chemin à deux premiers morceaux, Quiet Bundle et Let me know, bien que différents on retrouve quelques ingrédients similaires. Sur Quiet Bundle, on découvre la douce voix de Blumi qui contraste parfois avec la prod, se dessinant dans des nuances de gris. C’est un titre assez lent et aérien, qui nous donne matière à imaginer, nous projeter dans son univers. Quelque chose se brouille par moments, grouille sous la terre.
Let me know s’appuie sur une mélodie entêtante, une marche qui s’installe peu à peu. C’est la voix de Rozi Plain qui se greffe au morceau. Le fait d’intégrer la pâte de différents artistes à ses compositions, offre la possibilité à Hannah Miette de jouer avec ces voix diverses et de nous surprendre d’un titre à l’autre. Il y a du relief, des éléments qui viennent parsemer ou « perturber » la mélodie comme sur Quiet Bundle, avant un retour au calme, au connu.
Hannah Miette intègre également le son de la nature. L’étreinte, apaisé, est porté par le bruit de la mer en fond sonore. Cette évocation de la nature apporte une autre couleur à l’album, de nouvelles images, celles de lointains paysages, une ouverture. L’étreinte donne le ton à L’écume. Le bruit de la mer, alors plus effacé, se poursuit pourtant au cœur de ce morceau, l’introduit. C’est ce qu’il en reste, et se dépose sur le sable. Il y a quelque chose de doux et de délicat dans la proposition de Hannah Miette, on perçoit les reflets du soleil qui dansent sur l’eau. On ferme les yeux, pour s’accrocher à des mots. « Entends-tu les voix ? », Margaux Delatour nous prend à partie. Difficile de savoir si elle tente de nous extirper de nos rêves, ou bien si elle nous y appelle.
Ce titre, qui dure un peu plus de 6mn, offre l’espace (et le temps) à Hannah Miette d’expérimenter des choses, de laisser le titre grandir, se métamorphoser puis s’éteindre. L’écume est paré de sonorités rock en fin de morceau. Le rythme s’accélère, et les voix se superposent.
Étant une adepte des morceaux en boucle, si il y en a une que nous pourrions choisir sur cet album ce serait Between the Nows, en featuring avec Kate Stables (du groupe This Is The Kit). En toute subjectivité, c’est une de mes préférées. Ce son lent, joue avec l’attente, la bouscule habilement. L’écume ayant instauré cette incertitude. Le rythme peut, si Hannah Miette le décide, être bousculé, et les images brouillées. Reprendre notre souffle. Il y a quelque chose qui monte doucement sur le « getting better ». Between the Nows que nous pourrions séparer en deux parties, nous laisse nous perdre, errer dans le brouillard, puis nous tend doucement la main. Lumineux et tendre, on a envie de se blottir dans ce morceau. Il est la lumière du phare au loin.
Seulement instrumental, le titre Beautiful Game conserve pour nous l’essence de Between the Nows. Comme un écho qui arriverait un peu plus tard dans l’album. Délicat et tout aussi surprenant, les notes au piano favorisent l’introspection.
De l’anglais au français, en passant par divers featurings, Hannah Miette s’applique ainsi également à parfaire certaines compositions sans voix. Souvenirs d’une Possibilité s’apparente à une sorte d’interlude, contrastant avec les précédents morceaux. C’est un titre court. Nous sommes alors propulsés dans un garage, ou du moins dans un espace fermé, au sous-sol ! On découvre de grands et d’étranges engins mécaniques dans la pénombre.
On apprécie également le titre, très évocateur et poétique. Le souvenir de quelque chose qui n’a pas existé, ou si, évidemment, mais sous une autre forme, dans un autre temps, celle d’un possible, immatériel … Qui repart comme il est venu, sans prévenir.
Enfin, et une fois être sortis du sombre garage, Hannah Miette invite Frànçois Atlas sur Revoir la Mer. C’est un doux retour à la lumière. « Hello I’m your phone, I’m ringing, what you want me to do? », nous répète une voix presque robotisée. Pas de réponse. Une base électro se mêle à une partie instrumentale mélodieuse. Revoir la Mer c’est aussi une invitation à se déconnecter, apprécier la nature et laisser le téléphone sonner.
Hannah Miette par Hannah Miette, qu’a-t-on vu ? Beaucoup d’images assurément, celles d’une nature apaisante qui devient un refuge, et des images plus abstraites. La musique crée de nouveaux espaces sensoriels. C’est une évolution dans une bulle depuis laquelle on peut contempler le paysage, et où chacun d’entre nous peut y trouver sa place. On s’approprie ces images et on peut, aisément, y poser des souvenirs. On a aimé la liberté dans la composition, le relief varié parfois au sein d’un même titre, apporté par des changements de rythmes et les différentes voix. Hannah Miette est un album harmonieux, poétique, ainsi qu’un premier projet solo prometteur. Pour une appréciation optimale de l’album, on vous conseille de vous installer confortablement, rien ne presse, afin de saisir toutes les nuances du projet.
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