James Loup : Trouver la juste mesure

Dans le rap, les dédicaces aux mères sont légion. On les remercie pour leurs sacrifices, leur force mentale et physique d’acier, on leur doit tout. James Loup ne fait pas dans la demi-mesure : il promet 50 % de ses revenus à sa mère. Un geste fort, symbole, au-delà du matériel, d’une vie portée et aimée jusqu’au bout par l’amour maternel. Un projet aussi addictif que frustrant, tant son agilité donne envie d’y rester encore un moment.

50% de désinvolture

Comme souvent, un bon projet démarre par un constat, que l’artiste tord ensuite à coups de névroses. Dans l’intro 27 PIGES, James Loup plante sa proposition musicale avec témérité : « J’ai 27 piges, zéro pression sociale, parce qu’en vrai je les baise. » Écriture au compas et chant millimétré : il trouve l’équilibre parfait entre des prods suffocantes et des effets vocaux inspirés du cloud rap.

Le meilleur exemple et le point d’orgue de ce projet reste TQT PAS J’SUIS DANS LE UBER, un storytelling réussi qui s’inscrit directement dans la lignée des récits épatants du rap français. Le clip, visuellement marquant, accompagne ce titre avec brio. Au départ flou et amoché, plus le propos s’intensifie, plus le dézoom révèle la gravité de la scène.
Il y explore les ravages de l’alcool, entre instabilité émotionnelle, violence morale et coups physiques. Ici, la violence bête et méchante n’est pas sans rappeler les histoires sombres que Laylow et Wit interprètent dans …DE BÂTARD.

L’artiste met les pieds dans le plat et la proposition musicale est satisfaisante. C’est là que nous vient le point de bascule, J’VOULAIS ÊTRE GRAND. En plus de mettre la barre très haute avec son clip au mérite nostalgique et troublant, il permet un nouveau souffle, même si la production et ses dires n’en restent pas moins brutaux.

Démanteler la formule

C’est également le projet d’un artiste arrivé sous les projecteurs brutalement qui doit tirer sur la pelote de laine pour tout reconstruire. La saison 3 de Nouvelle École, bien qu’elle soit la plus pertinente des trois, a fait connaître James Loup, et tous les autres participants, sous une forme étiquetable. On sent dans ce projet qu’il veut s’en détacher et partir là où bon lui semble. Et lorsqu’on sait à quel point ces émissions, et les opportunités qu’elles offrent, peuvent forcer les artistes à rester dans la case du commercial, James Loup fait marche arrière. Une démarche à saluer. Il a bénéficié du tremplin, à son tour de prouver.

L’approche instrumentale dans l’EP est pluridisciplinaire, même si la forte patte électronique (que ce soit par des touches d’ambient ou d’électro-trap) dans ses productions, avec des basses 808 étouffantes, ressort davantage.

Un récit intrusif

Le point principal dans tous ses récits reste l’écriture personnelle, parfois même intrusive. L’outro IMAGINE donne à voir un James Loup démangé par ses pulsions, qui retrouve la raison une ligne sur deux :
« Le flic dit pas bonjour, il remplit son rapport en tapant sur les touches, il s’en bat grave les couilles
J’imagine prendre sa tête, lui faire écrire des trucs avec sur son clavier
Mais j’reste poli parce qu’il est armé. »

Son écriture est crue, et on sent qu’il fonctionne comme une bombe à retardement, en relâchant tout non pas par besoin, mais par urgence.

Cet EP surprend, car il trouve sa force dans sa longueur, qui donne envie de récidiver et de l’écouter à nouveau. Sorti entre deux concerts, Paris le 12 juin et Lyon le 14, le projet est d’emblée défendu sur scène, célébré comme il se doit, sans oublier sa ville natale. 50% POUR MAMAN, mais réussi à 100%.

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