Homme discret de la pop française, collaborateur entre autre de Melody’s Echo Chamber, François & The Atlas Mountains et beaucoup d’autres, Jaune avait pris la lumière en 2016 avec un premier effort intitulé Procession. Trois ans plus tard, le voilà qui revient réchauffer notre hiver avec l’EP La Promesse. Un titre qui relève autant du mystère que de la note d’intention. Un titre prophétique ? Réponse ici bas.
Si son nom ne date pas d’hier, en ce début d’année 2019, on a un peu envie de plaindre Jaune. L’actualité étant ce qu’elle est, une recherche internet concernant sa musique le noiera malheureusement dans un flot de nouvelles aussi redondantes que peu intéressantes pour les amateurs de musique. Un peu injuste, surtout quand on écoute La Promesse, son nouvel EP.
La musique de Jaune est une ballade à elle seule, entre les genres, les formats et les intentions. C’est un labyrinthe dans lequel on se perd avec plaisir tant elle nous berce et nous cajole. A l’heure où l’hiver bat son plein et que le froid nous assaille, les cinq titres qui forment La Promesse restent un remède idéal au spleen qui nous envahit par moments. Alors oui, la musique de Jaune est gorgée de mélancolie, elle est sombre parfois mais est-ce un problème ? Pas vraiment. Elle est cette ambivalence qui réchauffe le cœur, qui transforme les sujets lourds en évasion poétique et en douceur sucrée qui se diffusent dans le corps pour lui donner l’allant de combattre ce qui le ralentit.
Oui, la musique de Jaune c’est un peu tout ça en fait. Un voyage, une douceur, une ambition aussi, celle de mélanger les envolées électroniques qu’offrent les machines d’aujourd’hui au côté organique de la batterie (son instrument de prédilection), aux cordes et aux vents. Le mélange est évident, il prend corps et nous emporte dans une pop music élégante et aventureuse.
Si le projet est solitaire, l’aventure, elle, s’est faite en équipe. Que ce soit avec son ingénieur du son Guillaume Jaoul, son cousin Bumby qui partage la scène avec lui, Nicolas Worms pour les arrangements des cordes et vents ou ses amis Judah Warsky et François Atlas à qui il a demandé d’écrire le refrain de Juillet sans dire à l’un et à l’autre qu’ils étaient impliqués, donnant au titre une joyeuse image de cadavre exquis : Jaune s’entoure d’une famille de musiciens fidèle et impliquée qui pousse encore plus loin le curseur de son ambition.
Car si le corps est beau, foisonnant et luxuriant, le fond est aussi à l’avenant. Une écriture délicate et habitée insuffle une autre saveur à cette musique, un supplément d’âme qui vient achever cette sensation de chair de poule qui nous envahit à son écoute. Car s’il s’inspire de ses voyages avec Buenos Aires, s’il offre une dose de légèreté avec Juillet ou s’il créée un tube évident avec La Lueur, c’est définitivement quand il mêle l’intime à sa poésie que Jaune nous emporte. Ainsi, avec pudeur et tendresse, il place ses mots sur des sujets lourds et personnels : que ce soit la perte d’un ami sur Les Eléments ou son regard pertinent et beau sur la maladie d’Alzheimer qui frappe son père avec En Sommeil, il nous frappe avec cette manière bien à lui de poser des mots sur des maux, d’offrir une musicalité et un onirisme à des sujets plombants tout en gardant une certaine légèreté pop et sans forcer, sans tirer sur les violons, aller chercher les larmes chez l’auditeur.
La Promesse était belle et elle est tenue. Avec ces cinq titres, Jaune prouve qu’il est de ces artistes à suivre, avec lesquels on aime se perdre et voyager, de ceux qui font du bien, tout simplement.