L’album Parallèle de Romain Müller

Après avoir plongé dans son premier EP, comme dans un Bain de Minuit, Romain Müller nous plonge dans un autre monde avec son premier album Parallèle. Un titre comme une ligne directrice de l’album et de l’univers musical de l’artiste : décalé, paradoxal et mélodique.


L’album se conclut sur l’énigmatique Lfvdll. Un titre qui sonne comme un bug dans la matrice, alors qu’au contraire le morceau montre que l’artiste soigne son style. Les sonorités interstellaires de Lfvdll, nous font voyager à travers une navette spatiale, de laquelle on entendrait des messages radios et le bruit de boutons scintillants. C’est comme si l’on venait d’atterrir d’un voyage au fond d’une contrée parallèle. Le vol semble avoir été doux, presque mélancolique, lorsqu’on saisit la teinte feutrée de certains morceaux.

Pour le voir, il suffit d’observer la pochette réalisée par Romain Gamba. L’artiste messin pose avec un chien en toute décontraction. L’allure est chic, Romain Müller porte avec élégance la moustache et le costume. Pourtant, à ses pieds, il y a une paire de claquette-chaussette. Le décalage donne le sourire aux lèvres car la musicien semble sortir d’une autre planète ou encore d’une conférence Zoom. C’est d’ailleurs dans ce monde parallèle qu’est le confinement, que l’album est né.

On pense alors à des morceaux comme Immobile évoquant un monde figé, pris dans la torpeur. Alors que le début du morceau est lent, planant, invoquant des répétitions d’objets et d’événements “immobile(s)” et “déjà loin”, le rythme se fait rapidement plus entraînant. La mélodie devenant beaucoup plus dansante, aux frontières de la musique club. Tout semble être sens dessous dessus. Dans ce petit chaos, on se retrouve face à ses fragilités, Sans armure. Balade aux airs d’Etienne Daho, ce titre est vibrant de sentiments grâce à ses sons de synthétiseur et ses trémolos, ainsi que ces paroles toute en sincérité : “Je crois que c’est perdu (…) une fois de plus (…) lequel de nous deux, ouvrira le feu ?”

Pour poursuivre cette réflexion sur l’ intime, on retrouve une facette plus douce de l’amour avec Un parapluie pour deux. Véritable métaphore de la tendresse et du partage dans un couple malgré les tempêtes et les orages : “On fait l’amour de temps en temps, par mauvais temps, des jours pluvieux, toujours un parapluie pour deux.” Toujours dans ce rapport à soi, Romain Müller dessine une cartographie musicale reprenant ses origines messines avec Metz plage.

Si l’œuvre du musicien pourrait sembler mélancolique, elle est en réalité construite de contradictions, de dualités, qui viennent se compléter. A peu à l’instar de cette fête triste décrite dans le morceau Réverbère.

Romain Müller parvient à faire une musique autant planante qu’entraînante et dansante. On pourrait prendre l’exemple de deux titres : En attendant et Jardin à la française. Le premier semble être en écho au morceau Immobile. Le motif est répétitif, incessant, comme le sujet qu’il aborde : « (le) confinement ». Un mot maintes et maintes fois entendu qui vient structurer la rythmique du morceau. Nous faisant presque regretter les instants de joie, de folie douce de cet enfermement vécu. Nos petits appartements remplacés par des discothèques imaginaires. Le second a quant à lui, des airs de Flavien Berger, dessinant lui aussi des paysages fictifs et oniriques. Un Jardin à la française rappelant ceux de Versailles. D’autant plus, qu’il y a quelque chose de baroque dans le titre, renvoyant également à l’univers de Rémi Saint Jacques de Bellecroix, artiste du label Coco Machine, fondé par Romain Müller.

Le musicien parvient à faire une musique dansante, proche de la disco. On pense alors avec Pas de deux, on imagine le diable évoqué dans les paroles danser à nos côtés, sous une boule à facette. Le « pas de trop, le pas de deux » devenant un pas de danse un peu kitsch qui fait merveilleusement l’affaire. Il y a toujours cet aspect décalé dans d’autres morceaux comme La Flemme : morceau dansant en hommage au journée passée à ne rien faire.

Certains titres de l’artiste nous surprennent. Romain Müller parvient à allié la musique électronique avec des sonorités semblant venir d’autres continents. On songe alors au morceau Au bord, nous plongeant sur des rivages d’Orient par ses chœurs aériens en arrière-plan, ses cordes frottées ou encore ces percussions à foison. Un départ affirmé avec la chanson Soleil levant, gardant tout comme Au bord, des sonorités tant électroniques qu’organiques.

Pour écouter Parallèle, le dernier album de Romain Müller, c’est juste ici :