Le rap se décline aux Nuits Botanique

Pour sa trentième édition, les Nuits Botanique ne lache pas l’affaire et continue d’être LE festival le plus éclectique de Bruxelles. Sur ce mois de concert, on a pu assister à trois soirées qui nous l’ont bien prouvé. D’eugene à Lesram en passant par Bu$hi, retour sur ces trois plateaux qui déclinent le rap et laissent parler la ferveur du public.

Bu$hi au Nuits Botanique
@mao.atth

28.04 – eugene, nelick & Zed Yun Pavarotti ouvrent l’Orangerie

La première soirée se déroulant à l’intérieur de l’enceinte du Botanique voit trois univers se succéder pour mieux se compléter, offrant au public une soirée qui ravira toutes les oreilles. Des images oniriques d’eugene jusqu’à l’ambiance rock de Zed Yun Pavarotti en passant par les couleurs pop portées par la musique de nelick on vous emmène dans cette soirée qui aura tenu toutes ses promesses.

Il est toujours plaisant de profiter de l’extérieur des Botanique surtout à cette période de l’année. Pourtant, c’est au sein de la salle de l’Orangerie que les concerts se tiendront pour nous ce soir. Alors, on s’empresse de rentrer pour ne pas rater l’ouverture du plateau faite par un jeune artiste local : eugene. Après avoir écumé les scènes de sa capitale, il est venu livrer un condensé des meilleurs titres de son projet Paradise Kiss, mais aussi quelques exclusivités d’un futur projet qu’il a confié préparé. Autre surprise, il n’est pas venu seul ! Si comme à son habitue, il était accompagné d’ego8 en dj et backeur, il a aussi ramené Chad de la Cour pour interpréter leur collaboration nicotine issue du récent et dernier projet du français : syn+. Une performance complète qui prendra fin de mille feux avec un remix tektonik de son morceau T’aimes bien quand c toxic ?.
N’en déplaise aux plus conservateurs, en 2023 les genres se diluent et au vu de la réaction du public, on a aucun doute à se faire sur la pérennité de cette formule.

De son côté, nelick va suivre cette idée et réussir à mélanger différentes sonorités pour amadouer le public bruxellois. Si du côté d’eugene ça tire plus vers les sonorités électroniques voir rock, nelick c’est plus la chaleur de la pop et les flows bruts du rap. Un style qu’il a peaufiné au fil des années et des scènes, ce qui se ressent lors de sa prestation au Botanique.
Il est accompagné par ses marchands de good vibes : Koffi Bae au clavier et Goozoo derrière les platines. À l’image de leur scénographie, ils créent instantanément un univers coloré et léger pour laisser l’artiste se présenter au public belge. A l’aise avec ce dernier, il noue facilement le contact à coup de blagues et storytelling. Une parenthèse aux gouts de bonbons acidulés (ou de Doritos & guacamole pour ceux qui préfèrent le salé) qui met en jambe avant de se laisser porter par le dernier concert de la soirée.

Pour clôturer cette soirée, c’est par l’énergie rock émanant d’Encore, le dernier album de Zed Yun Pavarotti que l’on va se laisser porter. Un style de musique qu’il peaufine depuis quelques années et qui se laissait déjà sentir avec Beauseigne. S’il n’avait pas pu tourner avec ce dernier, il compte bien profiter d’Encore pour venir à la rencontre de son public. Cet opus balise largement sa performance même s’il n’hésite tout de même pas à revenir sommairement vers Beauseigne (avec Merveille ou le tube Lalaland, par exemple) et même French Cash en donnant une deuxième vie à son titre phare : Papillon sur laquelle les éléments numériques s’effacent au profit des instruments présents sur scène venant donner du corps à une interprétation pleine de charisme.
En axant son nouvel opus sur la fête, cette sensation amoureuse vis-à-vis de tout, le chanteur stéphanois ne s’est pas trompé. Il lui permet de s’assumer pleinement musicalement tout en pouvant communiquer avec ses musiciens et son public. A en croire l’énergie émanant du Botanique ce jeudi, sa mission a été remplie : public et artiste ont quitté la salle avec un sacré sourire sur les lèvres.

29.04 – thaHomey, 8ruki, J9ueve & Bu$hi font trembler le chapiteau

L’année passée, La Fève avait déjà fait trembler le sol éphémère du Chapiteau. Une soirée qui aura démontré l’énergie débordante et l’engagement à toute épreuve du public belge envers les nouvelles stars du rap francophone. Plus décidé que jamais à le ramener à nouveau sur le plat pays, le Botanique lui a carrément dédié une soirée en cette fin avril. Au programme : thaHomey, 8ruki, J9ueve et Bu$hi, des 808 qui vrombissent et des sapes de designers. Un savoureux mélange qu’on vous décrypte de suite.

Les portes du parc des Botanique à peine ouvertes, que déjà une foule de jeunes fans se pressent devant les grilles, encore fermées allant vers le chapiteau. Majoritairement affublés de merch à l’effigie d’un des quatre artistes se présentant sur scène, ils ne cachent pas leurs engagements pour leurs artistes préférés et se montrent déterminés à le prouver ce soir.

La lineup se montrent assez cohérente, ce qui permet à thaHomey d’ouvrir la scène devant un public déjà bien garni et surtout directement réceptif à sa proposition. Porté par cette énergie, il enchaine exclusivités et morceaux de sa discographie sans prendre le temps de s’arrêter.
Un premier show sportif qui a mis le public en condition pour la suite de la soirée.

Dans cette énergie toujours plus débordante, 8Ruki garde le cap en faisant un parfait mélange des différents titres de sa discographie avec, en supplément une énergie de rockstar qui lui permet de ne pas perdre le public. Ce dernier sera également gratifié de quelques exclusivités auxquelles il sera réceptif. 8Ruki a fait le job et on en est déjà à la moitié de la soirée.

Pour reposer un peu ces jambes fatiguées à force de sauter continuellement dans les pogos, le set de J9ueve est le bienvenu. Dans un esprit plus mélodieux que ces prédécesseurs, il captive tout au temps la foule. Les cordes vocales vibrent et les flashs de téléphones éclairent le Chapiteau, syndrome d’une génération Z qui a peur de voir s’envoler ses souvenirs…

Une fois ce repos terminé, il est temps de se préparer pour affronter le dernier concert de la soirée : Bu$hi. Réputé pour avoir une vraie prestance scénique, il ne faillit pas ce soir ! Dopé aux influences américaines, il enchaine ses morceaux avec l’arrogance qui ne le quitte jamais. Le public ne semble pas avoir faibli en intensité malgré les trois concerts précédents et l’artiste le ressent. Il donne continuellement de plus en plus de sa personne quitte à y laisser une partie de sa voix.

La soirée s’achève laissant le Chapiteau respirer après avoir vu ses planches vibrer au saut des pogos et mouvement de foule. On en retire la satisfaction des rappeurs conquis par leur fanbase belge plus qu’investie à leurs causes.
De notre côté, le constat est simple : il nous est toujours plaisant de voir autant de gens se bouger pour des artistes aux propositions alternatives qui sont en train de façonner le rap francophone de demain.

4.05 – Eesah Yasuke, NeS, Lesram et BB Jacques maitrisent le chapiteau

On est début mai et c’est (déjà) la fin des Nuits Botanique pour nous. Heureusement, il nous reste encore une soirée bien remplie sous la chaleur du chapiteau pour faire des adieux en bonne et due forme au festival. Ces derniers se feront accompagnés par un rap faisant le pont entre son ancrage traditionnel et les différentes évolutions plus modernes qu’il a pu prendre. Essah Yasuke, NeS, Lesram et BB Jacques auront animé cette dernière soirée qu’on vous raconte de suite !

L’ouverture d’Eesah Yasuke fait mouche ! Pleine de dynamisme, la rappeuse sait y faire avec son public. Accompagnée sur scène d’un danseur de breakdance, elle laisse parler sa technique tout en gardant le contact avec le public qu’elle ramène progressivement à sa cause. Une performance complète comme on aimerait en voir plus souvent.

Ce qui est plaisant avec le chapiteau, c’est qu’on n’a pas besoin d’en sortir pour prendre l’air ! Alors on reste et on attend NeS, jeune rappeur à la cote grimpante. Sa combinaison de textes travaillés et de rimes acerbes sur des productions aux accents tantôt boombap tantôt électroniques ravi le jeune public. Une formule qu’il exporte parfaitement sur scène, vivant sa musique avec sincérité, ce qui n’a pas manqué de plaire à la foule particulièrement réceptive.

Elle le sera tout autant dès l’entrée de Lesram. Discret mais toujours efficace, il bénéficie d’un public engagé qui n’a aucun mal à reprendre ses textes techniques. Le concert prend vite des allures de karaoké géant, prenant le rappeur par le sentiment qui n’en perd tout de même pas son sérieux. En somme, c’est une nouvelle démonstration de rap qu’il a livré ce vendredi soir sur la scène des Nuits Botanique.

Avant de clôturer, il faut souligner l’organisation de cet événement : aucun retard ou soucis techniques n’aura été à déplorer lors de nos passages. Elle le prouve encore une dernière fois en installant très rapidement la scénographie de BB Jacques. Logo, siège et d’autres éléments reprenant la direction artistique affirmée de l’artiste occupent la scène. Dans cet environnement, le rappeur fait son job accompagné par l’énergie qui le caractérise.

La conclusion de ces trois jours de concert passé à Bruxelles, c’est qu’on ne se lasse toujours pas du Botanique, de ces divers espaces de concert et de sa programmation qui comble tous les amateurs de musique. Ce que nous aura démontré ces trois soirs qui, tout en restant dans une ambiance rap auront su nous montrer les différents mouvements que ce style de musique offre à l’heure actuelle.

A l’année prochaine ?