La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face a vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre, la première partie de la sélection numéro 104 des clips de la semaine.
Teenage Bed x San Carol – Busy Talking
Il y a des associations qu’on n’imaginait pas et qui quand elles arrivent dans nos oreilles sonnent autant comme une évidence que comme un morceau qui risque de laisser une petite cicatrice dans nos esprits.
Voir Teenage Bed et San Carol s’associer ne nous a pas vraiment surpris dans le fond, mais nous a clairement fait un grand plaisir. Le genre qui nous met grand sourire sur le visage et des larmes aux coins des yeux.
Parce qu’on les connait ces deux là, derrière la relative douceur de Busy Talking se cache des noirceurs, des blessures, qui explosent dans nos oreilles et nos esprits pour venir s’attacher à nos petits cœurs cassés en manques de mélancolie.
Faussement simple, la rencontre entre ces deux petits princes du DIY français répond à toutes les promesses que l’on attendait : un morceau beau, tendre, où les deux voix se mélangent à la perfection pour jouer avec nos émotions et nous bouleverser une nouvelle fois. Surtout, le morceau est pour nous l’occasion de retrouver la voix de San Carol, beaucoup trop discret depuis la sortie de son exceptionnel Houdini en 2018.
Pour accompagner le titre, Léa MKL nous offre une vidéo faite main. Une animation mi-étrange, mi-douce dans laquelle on suit un personnage solitaire en promenade avec lui même. Le tout offre une image faussement réconfortante et colorée, à l’image du morceau, derrière laquelle se cache une sorte de tristesse profonde qui nous impacte encore plus, de part la naïveté et la douceur qui s’écoulent de la vidéo et du morceau.
Bob Passion – La Clef
Au début du printemps, on avait découvert Bob Passion. Un faux loser attachant qui nous racontait des histoires de cœur et de soleil. Alors que l’automne et le froid font leur retour dans nos vies, ce bon Bob a décidé de s’offrir un retour en grande pompe, celui qui ramène la chaleur dans nos existences.
Ce nouveau morceau sonne parfois comme une berceuse, une petite comptine que l’on se raconte et qui nous berce jusqu’à la porte des rêves. La clef est un voyage pop, une histoire remplie de tendresse et d’éléments qui nous cajolent avant d’exploser dans un feu d’artifices de guitare et de synthétiseur, l’artiste ayant la bonne idée de multiplier les intentons et les couleurs.
Pour ce qui est du clip, Thomas Bringuier et Maxime Forgues poursuivent l’univers onirique dévoilé dans Couvre-Toi. On plonge ainsi dans un monde chaleureux, un brin étrange et décalé dans lequel Bob Passion évolue. Les pieds dans le sable, il se promène dans ses pensées et ses souvenirs, cherchant ici et là, la bonne porte et la bonne clef pour retrouver des moments qui n’existent pas ou plus.
On ne sait pas si il y arrivera, en attendant Bob Passion a très certainement trouvé la clef qui ouvre nos cœurs.
IDLES – Car Crash
Les punks contestataires d’Idles n’ont pas dit leur dernier mot. Le 12 novembre prochain, ils reviennent avec Crawler, un album qui promet d’être plus expérimental que jamais. Après le très surprenant Beachland Ballroom, un crescendo de puissance dramatique, ils nous jettent à la figure l’ultra violent Car Crash.
Une intro à faire frissonner. Quelques notes de guitares grinçantes, volontairement agressives sur lesquelles se pose une batterie pesante. Sur des guitares ultra distordues, Joe Talbot envoie sa rythmique iconique mais enveloppe sa voix de filtres saturés. Une tension palpable se forme, allégée en aucune manières par les images qui accompagnent le titre.
Des vidéos tirées de films rétro mettant en scène des crashs de voitures se succèdent de façon épileptique. A la première personne, on se retrouve projeté dans des scènes à la violence terrible. Idles va plus loin et plus fort, pour un album qui s’annonce d’une gravité sans précédents.
shame – This Side of the Sun
Les plus chanceux ont déjà pu l’entendre en exclusivité lors du Arte Concert Festival ce jeudi 4 novembre, lors d’un show tout simplement monumental. Cette fois-ci, The Side of the Sun débarque en vidéo. On comprend dès les premiers instants le second degré qui va en découler. Filmé en caméra (très) amateur, on y voit le leader vocal Charlie Steen fumer encore une clope sur son vélo d’appartement installé dans son jardin, sous la pluie. Normal. Ça, c’est punk. Ils ont en plus attendu un jour de pluie pour faire cette vidéo. Certes, ce n’est pas compliqué, ils sont anglais. Mais du coup, ce n’est pas un clip mais un visualizer. En effet. This Side of the Sun s’apparente au final à une simple parabole qui marque la volonté du groupe de tout déchirer en live avec son idylle, son public.
Beechwood – Front Page News
La sensation new yorkaise du moment prépare âprement la sortie son premier album le 22 janvier 2022 en dévoilant un premier extrait nommé Font Page News, après avoir fait le buzz dans les squats et petits clubs de leur ville natale. Le clip y présente en toute simplicité leur élégance glam, un poil bad boy et concerné par leur jeu. La mélodie du morceau est toute simplement planante et sublime tandis que la voix de Gordon Lawrence, très rauque, flirte avec celle de Ellery James Roberts de la formation WU LYF. De manière très sobre, le quatuor Beechwood nous donne rendez-vous le 22 janvier prochain pour la sortie Sleep Without Dreaming. On vous l’a déjà déjà dit, non ? Bref, save the date !
Bernard Lavilliers, Terrenoire – Je tiens d’elle
Bernard Lavilliers nous livre cette semaine un nouvel extrait de son prochain album, en collaboration avec le groupe Terrenoire.
Avec Je tiens d’elle, le trio nous parle de Saint-Étienne, ville qui les a vu grandir mais dont il a fallu s’éloigner pour réussir à s’épanouir.
Le clip affiche les visages en gros plan des trois compères ainsi que des souvenirs mélangés de leurs enfances. Une vidéo simple, émouvante et brut à l’image du texte.
Dans ce nouveau titre, Lavilliers prouve encore une fois qu’il fait bon de mélanger les générations. Les voix et la prose de ces trois hommes se lient parfaitement. Et quand on connaît l’attachement de Terrenoire à leur ville, au point d’en donner le nom d’un quartier de celle-ci à leur groupe, la naissance de Je tiens d’elle apparaît comme une évidence.
Ôde à Saint-Etienne mais pas que. Le trio décrit parfaitement le sentiment d’urgence à s’exiler au-delà de son quotidien, « Il faudra que je parte pour devenir quelqu’un » comme il dit. Un texte fort qui peut faire écho chez beaucoup sans pour autant venir de là-bas.
Sous un soleil énorme, prochain album de Bernard Lavilliers, sera disponible dès le 12 novembre et ce premier titre est idéal pour nous faire patienter.
Radiohead – Follow Me Around
Cette semaine, Radiohead nous a offert un bond dans le passé en sortant le clip de Follow Me Around, deuxième inédit de la réédition KID A MNESIA parue ce vendredi 5 Novembre.
Il s’agit de l’un des derniers vestiges de l’ère pré-Kid A qui a marqué un tournant radical dans le style de Radiohead. Le morceau, déjà connu des ultra-fans du groupe, n’était jamais officiellement
sorti sur un album studio, mais date des toutes premières années du groupe. Laissé de côté lors des sessions de Kid A et Amnesiac puisque ne collant plus à leur nouvelle esthétique, un version studio existe enfin !
Bond dans le passé, car ce guitare-voix dénudé nous rappelle les trois premiers albums du groupe anglais, dans les notes, la construction et aussi cette manière de chanter propre à Thom Yorke. Le clip, réalisé par Us, nous renvoie également quelques années en arrière, en reprenant une esthétique visuelle que le groupe a cessé d’utiliser depuis quelques albums maintenant : images qualité VHS, du grain et une saturation des teintes qui n’est pas sans nous rappeler les magnifiques clips de Knives Out ou Weird Fishes.
On retrouve comme toujours la magie noire de Radiohead, un clip onirique dans lequel un homme (joué par Guy Pearce) est poursuivi par une caméra aux allures de POV fantôme. Outre la prouesse technique de ce plan-séquence digne de Birdman, il y a cette poésie mystérieuse, enchanteresse qui
laisse place à un grand nombre d’interprétations car, comme souvent, l’histoire est dénuée de contexte. Malgré ça, on se sent pris aux tripes par cette course poursuite qui devient presque une chorégraphie entre le sensible physique et l’impalpable.
alt-J – Get Better
Préparez les mouchoirs car alt-J a décidé de nous retourner le cœur. Le trio anglais, qui a depuis bien longtemps dépassé les frontières de l’indie-pop pour devenir une référence de la musique moderne est de retour cette semaine avec Get Better.
Et ce nouveau morceau risque bien de rabattre les cartes tant il marque un vrai changement dans l’approche du groupe, que ce soit au niveau de la musique ou des paroles. En effet avec Get Better, le trio nous offre un moment d’émotion, comme ils en ont l’habitude, mais bien différent des habitudes. Presque uniquement en guitare-voix, et donc centré sur la voix de Joe Newman, le morceau est un exemple d’écriture et de vérité.
Certes fictionnelle, l’histoire raconte des choses qu’on a tous déjà vécu : l’amour, la morte, la pete et la reconstruction. L’histoire se joue en deux temps : une lettre ouverte à un être aimé et malade avant de se transformer dans quelque chose de plus introspectif après un basculement funeste où le morceau se recentre sur l’évolution du personnage et sa lente remontée vers la lumière.
Tout cela prend un sens encore plus bouleversant accompagné du clip animé de Stefanie Grunwald qui nous entraine dans des moments de vie et détresse sous la forme d’images pixelisées comme celles d’anciens jeux vidéos, nous rappelant que parfois, seul le temps peut panser les blessures.
The Dream , le nouvel album de alt-J est prévu pour février 2022.
Di-Meh – Monnayer
Di-Meh a visiblement encore beaucoup de feu à cracher. Après la sortie de son album Mektoub en mai, il livre un nouveau single avec Monnayer qui bénéficie également d’un clip réalisé O.U.T Studio et le rappeur lui-même. Sur l’instrumentale boom-bap d’un JeanJass qui n’a pas perdu la main, le suisse se livre tout en faisant une démonstration de sa plume toujours aussi affutée.
« j’suis pas c’rebeu qui va finir sur la touche, encore un gros seize qui va finir par accouchement »
Pour accompagner le tout, il a fait le choix de combiner plusieurs moments de vie : concerts, ride en skate ou repas au snack du coin avec des moments où il rappe face caméra dégageant comme à son habitude une attitude maîtrisée.
Johnnie Carwash – Teenage Ends
Après leur EP sorti en 2020, Mom is a punk, le trio pop-punk lyonnais revient avec le single Teenage Ends accompagné de son clip. La formation batterie, basse, guitare, voix donne une énergie folle à tout ceux qui les écoute.
Sur Teenage Ends, l’ambiance est à la fête, mais également un hommage touchant aux mamans. En effet, les mamans des trois artistes se sont prêtées au jeu de rockeuses en incarnant chacune, le rôle de son enfant. Et on peut le dire haut et fort : They rock !
Teenage Ends c’est une ode à l’âme d’enfant qui reste gravé dans un petit bout de notre tête sans jamais s’en échapper même quand on pense l’avoir perdu. Johnnie Carwash entouré de leurs amis.es l’ont bien compris et nous montre qu’organiser un concert joué par leur mamans dans une piscine remplie de ballons colorés, eh bien ce n’est pas si dénué de sens, bien au contraire c’est fun !
Bops – R.A.V.A.C.H.O.L.
Le trio breton BOPS, tout droit venu de Rennes, ont sorti le clip de leur nouveau single R.A.V.A.C.H.O.L. Un morceau rock ambiance 70s, en l’honneur du militant anarchiste du 19e siècle, François Koënigstein. Il fait suite à leur EP 156, sorti en 2015.
Quant au clip, il est décalé, carrément burlesque avec des visuels et un synopsis recherchés. Une esthétique entre film d’époque, film d’action et comédie, le clip raconte l’histoire d’une attaque ratée faite par le militant anarchiste sur des bourgeois lors d’une fête dans un parc.Les paroles et le clip sont bien engagés et invitent à la révolte contre une société bien rangée.
Alors, il n’y a plus qu’une chose à faire, mettons un peu de désordre en dansant sur le nouveau single R.A.V.A.C.H.O.L. !
Ella Clayton – Day After
Il est 4h du matin, Nell a la gueule de bois et vient de vampiriser son amant infidèle. Ainsi débute le clip de Day After, le dernier single de la jeune chanteuse-compositrice britannique Ella Clayton, dont les textes brillants et la voix soul chaude et envoûtante pourront difficilement laisser indifférent.
Pour l’occasion, Ella a fait appel à l’actrice et réalisatrice Nell Barlow, qui incarne une jeune femme vampire en quête d’aventures amoureuses, que l’on retrouve donc au milieu de la nuit, dans la salle de bain de son amant dont elle vient de sucer le sang après avoir découvert sa tromperie. Triste et perdue, la jeune femme s’en va ensuite errer dans les rues de Londres, avant de finalement rentrer chez elle et ajouter la brosse à dent de sa dernière victime à une collection déjà bien remplie. Pendant tout ce temps, Ella – que l’on devine représenter la conscience de la jeune femme – se tient aux côtés de Nell, l’accompagnant dans ses pulsions mortifères entre rêve et réalité.
Par le prisme du fantastique et de l’absurde, Ella Claytonréussitavec ce clip à mettre en image de façon décalée et intrigante l’expérience de la souffrance amoureuse poussée à un point de non retour, telle qu’elle la décrit avec poésie dans son morceau.
Day After est le quatrième single d’Ella Clayton, après Only Bodies, Murmurations et Always, à écouter sans moderation en attendant la sortie de son album prochainement.
POLO & PAN – Requiem
Après le très futuriste Tunnel, Polo & Pan nous ramène dans une réalité tangible avec le clip Requiem. Ce dernier est pensé et réalisé comme un court métrage. On y trouve par exemple Thibault de Montalembert, comédien, acteur, metteur-en-scène et doubleur. Mais aussi toute une équipe technique, crédité avant la fin du plan séquence, en allant du directeur de la photographie au gaffeur.
Avec ce clip Laurent Ripoll, le réalisateur, arrive à nous prendre à revers. On ne se sait plus si on est face à une musique embellie par des images ou des images accompagnées par une musique. Cette disposition forme un combo parfait avec notre duo qui vient combiner et mélanger la classique à l’électro pour venir nous titiller dans des zones où on ne s’y attend pas.
Cette messe des morts est à la fois grave et sentencieuse : alcool et cigarettes dès les premières secondes du film, on prend le temps de s’arrêter sur l’orgue, un dernier tour de la pièce pour les adieux et c’est l’heure de la mort. Mais le requiem est également léger et simpliste : on s’appelle par les prénoms, on ne fait pas de manière, on remercie le personnel et c’est l’heure de la mort.
Cette version bis du morceau présent dans l’album Cyclorama nous apporte étonnamment un petit peu de bonne humeur et Polo & Pan sont bien incapables de faire autrement de toute façon!