Les clips de la semaine #194 – Partie 2

La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre voici la première partie de notre 194ème sélection.

Sleater-Kinney – Say It Like You Mean It

Corin Tucker et Carrie Brownstein n’ont rien perdu en quasiment 30 ans de scène. Rien, pas la moindre once d’énergie, de créativité, de charisme ou de détermination. Le duo de Sleater-Kinney est l’une des dernières formations encore en activité à l’origine de ce que l’on a appelé les riot grrrl au débuts des années 90 aux états unis. L’emblématique Carrie nous fait toujours autant vibrer que sa guitare et la puissance vocale de Corin ne nous épargnera jamais.

 Après Hell, voici un sublime deuxième titre qui nous prépare à un 11 ème album Little Rope attendu pour janvier 2024. Les années de Dig me Out sont certes un peu loin mais la patte est toujours là. Le son est léché, cette montée dans l’émotion est délectable jusqu’à la fin avec sa montée en puissance. Pour ce clip, devant la caméra se débat l’actrice J-Smith Cameron, que certains auront vu récemment dans la série Succession alias Gerri. Un clip qui, tout comme le précédent, est entièrement filmé en noir et blanc et où tout se passe dans l’expression intense d’un regard.

Sheldon – Focus (feat. 3010)

Après un premier featuring avec BEN plgSheldon est de retour en duo, cette fois-ci accompagné de son complice 3010 sur le titre Focus. Sur un sample de piano jazz d’Epektase, les deux rappeurs affirment leur technique d’écriture intime, nostalgique mais déterminée : « Focus comme avant l’match« . Leurs flows se confondent, montrant une nouvelle fois la polyvalence de Sheldon, figure de la 75e Session. Le clip de Le Manoir est une démonstration visuelle réalisée en 3D à la kinect, ajoutant une dimension futuriste au propos. On peut retrouver Sheldon en tournée en Suisse et France, avec un passage à l’EMB Sannois le 16 décembre prochain ! 

Manon David Club – Manteau De Nuit

Alors que son premier EP – Wonder Jazz – va sortir tout prochainement (le 1er décembre) sur l’incontournable label Midnight Special Records, Manon David Club nous fait endosser son Manteau de Nuit le temps d’une chanson. Ancienne bassiste et chanteuse du Groupe Obscur, si Manon David ne s’exprime plus en obscurien, elle garde de son ancien groupe son voile mystérieux qui colle parfaitement au thème abordé dans la chanson. Celui de la nuit et de ce que l’on y enfouit. Et lorsque l’oiseau de nuit s’emmitonne dans son Manteau de Nuit, les émotions tapies dans l’ombre de l’âme peuvent alors se révéler à la lumière des sentiments.

Parée d’atours aux motifs venant en ligne directe des années 70 – dessins géométriques et palettes de couleurs aux tons vifs et saturés – Manon David nous magnétise dans une vidéo aussi captivante que déroutante. Un seul plan séquence aux images filmées à rebours et à la synchronisation labiale presque parfaite. Étonnant, comme l’est sa chanson qui telle une aurore boréale amène la lumière là où l’on aurait pu rester dans l’obscurité.

Johnny Jane – Attitude

Avec son atmosphère imprégnée des vapeurs d’un électro-rock bourdonnant, Attitude gagne suffisamment en altitude pour nous plonger – tout entier – dans sa mélodie imparable et ses paroles limpides. En fait, chez Johnny Jane, il suffit de peu de choses pour que la magie opère. Comme dans son stupéfiant KleenexAttitude joue avec nos souvenirs, notre imaginaire. Cela fait que l’on ne peut qu’y adhérer. Une Attitude, une nonchalance qui devient étrangement le catalyseur d’une énergie constructive qui force à avancer. Le clip, façon tranches de vie, réalisé et filmé au légendaire Studio Motorbass par Elouan Boulestreau donne vie – avec entrain – à ces impressions contradictoires.

Après son premier EP, Désordes, sorti au printemps dernier qui le conduit jusqu’à la Cigale (c’est début décembre mais c’est déjà complet !), on espère un premier album pour l’accompagner sur le chemin qui le mènera à l’Olympia. Ce sera dans un an, le 10 octobre 2024. Prenez date.

Pierre III – Nonsense

On retrouve dans Nonsense cette électro-pop bouillonnante la même énergie que celle déployée par Pierre Leroux (aka Pierre III) et son compère Victor le Masme dans leur projet commun Housse de Racket. Extrait de son premier album – Discotheque – paru le mois dernier, Nonsense se goûte comme une friandise légèrement acidulée. Ça fait des frisottis dans nos oreilles. C’est sucré, fruité, un peu piquant, et bigrement addictif. Une ligne de basse forte et omniprésente, des paroles scandées en chœur, un synthé qui frémit de tous ses transistors et surtout un rythme qui force à taper du pied comme sur un morceau de Tom Tom Club.

Pour illustrer le morceau, Pierre III a fait appel à l’incontournable et très talentueux duo Zeugl, qui nous entraîne dans un voyage au fond de la force créatrice du musicien. Un univers en noir et blanc fascinant et hypnotisant. « À l’évidence c’est le nonsense ». Un titre et une vidéo à regarder les yeux exorbités et à écouter les oreilles décollées !

Cassia ft. Kawala – Circular Motion

Anti coup de blues, le groupe anglais Cassia a récemment sorti un nouveau single intitulé Circular Motion. Il a été composé en feat. avec Kawala, un duo anglais originaire de Londres. Les deux groupes s’accordent à merveille. Il y a quelque chose de solaire dans ce morceau. La recette est simple, de l’indie-pop et du feel good à volonté, un rythme entraînant et des paroles optimistes. Voilà de quoi nous donner le sourire.

La trame du clip s’appuie sur cette réunion joyeuse des deux groupes de musiciens. Dans une esthétique un peu vintage et colorée, on est plongé dans cette histoire, à la fois drôle et légère. Leur cohabitation, d’abord complexe, s’ouvre vers une belle histoire d’amitié. Des potes qui jouent de la musique ensemble, simplement. On a aimé les petits indices disséminés dans les recoins de cet appartement, comme le titre d’un livre « Tap into the power of the universe to live your best life ».

La Bibliothèque de la Bergerie – En attendant l’année dernière

La Bibliothèque de la Bergerie ? Vous n’en avez encore jamais entendu parler ? Alors vous voilà au bon endroit. Ce projet, au nom des plus intrigants, a été lancé il y a peu par le producteur Emmanuel Mario alias Astrobal. Avec ses compères, Nina SavaryJulien Gasc et Vincent Guyot, c’est, reclus dans une « bergerie » dans le sud de la France, qu’ils ont pu donner vie au projet.

Un autre, l’ailleurs peut être, le temps plus long, essayer autre chose, expérimenter; 11 titres. Extrait de leur dernier album, on a découvert avec délice le clip de En attendant l’année dernière. Une fois de plus, quel drôle de nom ! C’est presque nous donner la possibilité d’accéder à ce temps qui n’existe pas encore, une invitation, une main tendue vers l’imaginaire.

Nous voilà au cinéma, non ce n’est pas un film d’horreur ! Enfin je ne crois pas. Les images, singulières et énigmatiques, mettent en valeur le projet. On suit la trace de deux silhouettes, vêtues de noir et couronnées d’un couvre-chef blanc, en pleine nature. Leur pas, posés sur le rythme lent, le son de la batterie et la voix envoûtante de Nina Savary, nous mènent sur la route d’un homme. Son visage est découvert et ses yeux fermés. Qui est-il ? Ces deux silhouettes ne seraient qu’un rêve ? Le feu ardent, le vol des oiseaux, le passage de la couleur au noir et blanc, il y a dans ce morceau, une empreinte notoire et sensible de l’ordre de la magie et de l’apparition.

Akira & le Sabbat – KLNX

« Maman-Papa pas d’accord mais Maman Papa pas heureux » Iels s’appellent Akira & le Sabbat, on les attendait et on ne le savait pas.

Avec KLNX, ce collectif de 6 membres qui avancent poings et coudes serrés dans la vingtaine nous emporte dans un tourbillon de queerness. Leur premier titre musicalement riche mêle des sons lourds, rap dans la diction, l’electro comme lame de fond et riffs rock virtuoses en agréments. Du plaisir abordé sans tabous, provoquant parce que la morale s’égratigne facile, voilà un hymne à faire taper du pied le plus catho des pères de famille.  « J’t’embrasserai avec la langue devant la manif’ pour tous » : ça tombe bien, il est convié. Mention spéciale à Pierre Simon à la réal’, qui régale et rappelle les heures douces et noctambules dans les sous-sols des clubs alternatifs.

ORAGE – Quoi qu’il arrive

Orage nous emmène en coulisse. Avec Quoi qu’il arrive, le temps d’un clip signé Pierre Inglebert, on part en tournée avec les garçons. Les passages, montés avec simplicité et sans esthétisme extrême, captent la beauté des moments rares. Le suc qui unit ensemble petites mains de l’ombre et musiciens dans la lumière, faire du beau, ensemble. Et que la voix mélodieuse d’Alexandre Inglebert porte encore le message de l’avant du van aux planches des salles de concerts – combles, pour leur plus grand plaisir… et le nôtre.

Laurie Darmon – Célibataire

Qui a dit qu’être célibataire voulait dire être morose ? Laurie Darmon nous fait voire la vie en rose avec son dernier morceau. Ici, « célibataire » rime avec « libre comme l’air ». Le titre Célibataire a des airs de rumba. Il donne envie de se déhancher au même titre que Laisse-moi t’aimer, morceau phare de la chanteuse. Le texte se compose de paroles, comme des confidences entre amis. Commérages d’ordre sentimental qui s’entrecroise. Une manière de narrer qui fait toute l’identité artistique de Laurie Darmon. Pour rajouter à se côté intimiste et personnel, la chanteuse réalise le clip avec Myriam Kermia.  Un clip qui reprend cette idée d’échange amical en prenant place dans un bar. L’artiste fête la sortie de son dernier album d’ici une dizaine de jours, en concert à La Cigale.

Since Charles – Première fois

Au service de cette Première fois magistrale de Since Charles, dont c’est loin d’être le coup d’essai, l’image illustre le titre à la perfection. S’ouvrant sur un clin d’œil à l’affiche de Requiem for a dream, Benjamin Puddu se distance rapidement des early 2000 pour signer un clip actuel, mêlant l’esthétique IA à la distorsion sensorielle. Au diapason de ce son lourd et syncopé, ultra-contemporain dans les influences, faussement lisse. Un beat obsédant emporte tout ; le ressac des paroles qui chantent l’élan au masculin disent la douceur et la violence de l’amour réinventé. Il faudra être au rendez-vous des scènes à venir.

Warhaus – Popcorn

Un an après la sortie de son dernier album, Warhaus célèbre son anniversaire en proposant un nouveau titre : Popcorn. Toujours dans l’esprit dandy/groovy/sensuel qui lui colle à la peau comme la sueur d’une danse rapprochée, il nous présente cette semaine en nous livrant sa recette des petites pépites de maïs sucrées, celles qui accompagnent toutes les grandes histoires… La métaphore utilisée ici par Maarten Devoldere est pourtant beaucoup moins douce, plus proche de l’explosion d’une relation qu’autre chose. Au passage, on retrouve Sylvie Kreusch aux côtés du crooner Belge, que l’on avait déjà entendue sur les premiers albums de Warhaus. Bel hommage, et surtout très belle complicité entre les deux voix et les deux protagonistes. Ne reste plus pour vous qu’à suivre la recette et à vous installer devant cette très belle mise à l’image.

Thérèse – Toujours Trop

Après avoir sorti No Rules et Anthropocentric il y a quelques mois et rempli La Boule Noire à Paris entre temps, Thérèse est cette semaine de retour avec une nouvelle bombe nommée Toujours Trop. Sur une prod électrifiante et poignante qui semble tout droit sortie des meilleurs clubs des meilleures villes, elle remet les pendules à l’heure concernant les standards de beauté inatteignables et les injonctions faites aux corps des femmes. Le tout est emballé avec brio dans un clip incandescent réalisé par Choblan dans lequel des femmes badass de 24 à 64 ans se succèdent et brillent peu importe leur âge. Magnifiquement maximaliste, Toujours Trop ne s’excuse plus d’être là et prône la célébration de soi, de vieillir et d’être libre dans son corps et dans sa tête. 

Swing – NO FUTURE

Cela fait maintenant 2 semaines que Swing tease parfaitement son futur projet. Après
l’envoûtant Maladresse, il sort cette fois-ci No Future, accompagné de son clip. Le Belge
continue de nous faire voyager dans son univers entre rap et chant.
Toujours aux manettes de la réalisation, le talentueux Lenny Grosjean nous emmène
dans une vidéo séparée en deux parties. La première se veut plutôt dansante et
entraînante. On y perçoit un Swing heureux et fêtard à travers des images esthétiques.
Mais la deuxième partie est plus sombre. Dans une imagerie en noir et blanc, le rappeur
pose son texte sur une instru beaucoup plus calme et acoustique.
Ce clip représente parfaitement le style que développe Swing depuis quelque temps à
présent, cette dualité entre rap et chant. Avec deux morceaux très forts, l’artiste continue
de parsemer les graines de son futur album, Au revoir Siméon, prévu pour le 1er décembre.

Stéfi Celma – Baltimore

Stéfi Celma nous fait voyager jusqu’à Baltimore, là où « les amoureux s’aiment encore ». La chanson Baltimore a portant des airs d’Amérique du Sud. On pourrait reconnaitre la mélancolie d’un sodade brésilien. Une guitare compose une grande partie de l’instrumentalisation. On ressent dans les paroles ce sentiment mêlé d’amour et de regret. Stéfi Celma chante : « J’ai du courage, j’ai du ciment mais plus de briques / Évidemment, que je suis nostalgique. » La chanson évoque un départ sentimental à l’apparence d’un exil vers un autre pays. Ion Makaveli et Adrian Fernandez réalisent le clip du morceau. Les deux réalisateurs illustrent cette fuite vers un ailleurs. On observe la mise en scène de l’envol de la chanteuse.