La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, la deuxième partie de notre 233ème sélection.
Lou-Adriane Cassidy – Dis-moi dis-moi dis-moi
C’est avec un titre résolument pop que Lou-Adriane Cassidy revient dans nos oreilles (quoiqu’elle ne les avait jamais vraiment quittés), abandonnant les sons plus rock et grunge de l’album précédent, mais une chose est sûre, c’est toujours aussi bon !
Si la chanson Dis-moi dis-moi dis-moi évoque l’abandon de son père, elle résonnera certainement avec n’importe quelle âme qui en a vécu un, de n’importe qui, de n’importe quoi. D’abord l’incompréhension, la colère, puis la sensation de liberté qui se confond à un désir de vengeance qui finit par devenir une de nos plus grandes forces. Comme le dirait Leonard Cohen, « c’est par la faille que jaillit la lumière ».
Le clip est signé par un certain Charles-Antoine Olivier / CAO qui avait déjà réalisé des clips pour Karkwa, Émile Bilodeau et Alex Burger (et qui est par ailleurs l’excellent batteur et percussionniste du groupe Blesse). On y voit un côté Xavier Dolan, peut-être seraient-ce les cheveux rouges qui nous rappellent ceux de Suzanne Clément dans Laurence Anyways, la colorimétrie à celle de Tom à la ferme, ou bien le format 4:3 à Mommy ? En tout cas, nul doute que cette oeuvre est unique en son genre et que les plans n’ont rien à envier au envier à qui que ce soit. Certainement l’un des clips et l’une des chansons les plus percutantes de son époque.
Lou-Adriane Cassidy sortira son album JOURNAL D’UN LOUP-GAROU le 24 janvier prochain, et ce premier extrait ne peut que nous donner envie d’écouter les 13 autres chansons à venir. Pour cet album, pas de tournée, deux spectacles à Montréal et Québec en février et ensuite, c’est terminé. Habitant·es du Québec, allez-y pour nous, vous le ne regretterez pas !
GOGOJUICE – Sasha’s Song
Avec Sasha’s Song, GOGOJUICE dévoile son troisième single de l’année : une invitation à l’évasion et à la découverte à travers un morceau à la fois joyeux et vibrant, empreint d’un esprit de road trip.
En s’éloignant légèrement des sensations véhiculées par leurs précédents titres, Knock, Knock, Knock et Frantic, le groupe explore ici des thèmes de maladresse, évoquant des blessures infligées sans intention à des êtres chers. Néanmoins, malgré ce thème peu coloré, cette chanson prend forme dans une nouvelle dimension que le groupe ne nous avait pas encore offerte, s’aventurant cette fois-ci dans une énergie à la fois solaire et punk.
Ce titre accrocheur résonne comme un cri de ralliement, incitant à chercher un espace, qu’il soit public ou privé, où l’on peut se libérer sur des riffs exaltants, créant une atmosphère festive qui évoque les moments les plus précieux et simples de la vie avec nos proches.
Cette dichotomie des messages véhiculés démontre la maîtrise du groupe, ainsi que sa capacité, à transformer nos démons en une expression plus légère et vibrante pour nos tympans.
Le clip, réalisé par Nelson Vard, se présente comme un collage dynamique de souvenirs, capturant l’essence même de la vie de GOGOJUICE. À l’instar du morceau, les images transmettent un message doux et pur, affirmant que chaque instant partagé est un trésor inestimable.
KAYTRANADA – Witchy (feat. Childish Gambino)
Des duos comme ça, qui nous offrent un instant des plus sucrés, nous en voulons plus. Extrait du dernier LP de KAYTRANADA intitulé TIMELESS, le titre Witchy bénéficie d’une mise en image assez inattendue, mais accueillie avec grand plaisir. C’est toujours une joie de voir Childish Gambino à l’écran, d’autant plus depuis que ce dernier a annoncé récemment sa retraite musicale avec la sortie de son dernier album, Bando Stone & the New World. Enfin, ici, le temps n’est pas à la mélancolie, bien au contraire.
Admirer ces deux artistes travailler en studio, c’est assister à la matérialisation d’un message qui va au-delà de la simple musique. C’est une véritable incantation moderne, une sorte de vaudou musical où l’attirance et la connexion deviennent presque spirituelles. Le morceau explore des territoires où l’émotion et la musique fusionnent pour créer un envoûtement total. L’alchimie entre les deux musiciens est palpable ; leur collaboration ne se contente pas d’être une juxtaposition de styles, elle crée une nouvelle énergie.
Avec ce clip signé Bethany Vargas, l’inspiration et le message véhiculés prennent littéralement vie. Le groove électronique, allié à cette voix envoûtante et fluide, évoque une ambiance à la fois mystique et sensuelle. Cette chanson nous transporte dans un univers où les émotions flottent comme des esprits, invisibles mais puissants. Chaque note, chaque mot, résonne avec une intensité presque surnaturelle.
Nous avons tout de même une pensée pour Childish Gambino, qui a annoncé ce vendredi sur son compte X l’annulation du reste de sa tournée en Amérique du Nord, ainsi que celle au Royaume-Uni et en Europe, en raison de problèmes de santé apparemment sérieux.
Faye Webster – After the First Kiss
Après avoir posé les bases d’un renouveau de sa musique la laissant prendre ses distances avec les envolées r’n’b qui l’habitait pour plonger dans la douceur de la folk, Faye Webster a fait de sa guitare une véritable compagnonne. C’est, par conséquent, logiquement qu’on l’a retrouve comme un élément central du clip d’After the First Kiss réalisé par Kyle NG.
Pour ce premier single depuis la sortie de son album Underdressed at the Symphony, la chanteuse se retrouve sur un champ de bataille où les humains côtoient des bêtes fantastiques tels que des centaures. Un côté décalé qui colle à merveille à la personnalité de l’interprète. Mais la guerre n’est pas la principale préoccupation de Faye Webster qui se veut plus pacifiste que ses collègues, préférant déambuler avec sa guitare au milieu des corps tombant sous les coups d’haches et d’épées.
Finalement, elle se retrouvera né à né avec une créature humanoïde et alors que leurs armes se lèvent, quelque chose se passe dans leur regard et ils finissent par s’embrasser. Une belle leçon de pacifisme médiéval qui se clôture avec un bêtisier du tournage. Peace, laugh and love.
HELLOLOLA – CHETA O NO ?
En 2006, Nelly Furtado était un incontournable, une réelle popstar qui a fait de son album Loose un événement marquant du début des années 2000. Presqu’une vingtaine d’années plus tard, elle continue de vivre et se voit ressuscité par une tendance Y2K qui lui rend parfaitement hommage.
Un phénomène mondial qui n’aura pas échappé à HELLOLOLA, rappeuse argentine qui n’était encore qu’une jeune adolescente quand la canadienne était au plus haut de sa carrière. Ce qui ne l’empêche pas de sampler Say It Right sur son dernier single CHETA O NO ? pour se replonger dans sa chambre d’ado aux couleurs roses bonbons et aux nombreux posters.
Bien accompagnée par ses copines, elles se prélassent mais laissent tomber les feuilles de magazines pour celles pouvant accueillir de la drogue douce transformant aux rythmes des basses saccadées cette chambre d’enfant en dancefloor. Si HELLOLOLA a définitivement grandi, il est certain qu’elle n’a pas perdu la malice enfantine qui l’habitait jadis.
Christian Lee Hutson – Paradise pop.10
Une paire de chaussures accrochée à un fil à étendre le linge, comme un départ à venir. Puis un titre en orange fluo, et le bruit pictural d’une VHS. On pourrait être dans une série B… Enfin, pendant au moins dix secondes. Les séquences vidéos qui suivent, moins un clip qu’un court métrage qui incorporerait des séquences du dernier album de Christian Lee Hutson, ont de quoi intriguer et émouvoir.
Dans un salon sous éclairé, une foule de personnages attendent que la vie vienne – jongleuses sans public, violonistes d’intérieur, cameramen domestiques -. Au milieu de la pièce, le singer songwriter expose son élégance vestimentaire et musicale, entre des scènes parfois évocatrices de Lynch ou Jodorowsky, tant y est manifeste un plaisir de l’image quasi surréaliste.
L’album de Christian Lee Hutson (voir chronique) est une merveille d’écriture. Ici, le court métrage réalisé par Meg Ha en donne une illustration déconcertante, pleine d’humour noir, de fantaisie et d’allusions que l’on ne saurait trop recommander de regarder. Soyez curieux, foncez.
Baptiste W. Hamon – Oh que j’aime la musique country
Le singer-songwriter français Baptiste W. Hamon aime la musique country et le crie haut et fort dans son tout dernier titre, Oh que j’aime la musique country, extrait de son album Country attendu pour le 8 novembre prochain.
Lorsque nous l’avions rencontre il y a 2 ans, le chanteur nous avait raconté avoir été d’abord influencé par des songwriters texans comme Townes Van Zandt, auxquels ils rend hommage dans cette chanson, qui sous ses apparences parodiques se veut avant tout un éloge bienveillant à un genre de musique trop peu connu de notre côté de l’Atlantique.
Dans le clip réalisé par Norma, Hamon s’amuse avec les clichés du genre, se montrant d’abord assis dans son salon entouré des portraits de tous ses idoles, puis apparaissant sur un écran de television en noir et blanc, en tenue des chanteurs traditionnels des années 50. Le clip se conclut par un plan sur le portrait de Dolly Parton, icône du genre, que comme Baptiste, nous ne pouvons que vous recommander d’écouter.
Baptiste W. Hamon sera en concert à la Boule Noire le 17 décembre prochain.
Gwizdek – Chacun de nous se perd parfois
Gwizdek continue de dévoiler pièce après pièce l’arrivée de son prochain album, seed, prévu pour le 8 novembre.
Les voilà de retour cette semaine avec Chacun de nous se perd parfois. Il y a quelque chose d’étrangement décalé et fascinant dans le morceau, entre la complainte de Daniel Gwizdek et le rythme de batterie qui luttent chacun pour prend le poul du tempo.
Une manière d’exprimer ce sentiment particulier que l’on a tous vécu, cette absence de parallélisme entre notre existence et ce que l’on peut ressentir à un moment précis. On se laisse alors emporter, espérant trouver dans l’échappée quelque chose sur lequel se raccrocher et se protéger.
À travers son écriture directe et sans faux semblants, Gwizdek exprime cette étrange mélancolie et ce besoin d’y voir une sorte de voie vers la lumière, un chemin de compréhension de soi même et des autres.
Le clip de Vadim Bernard joue sur cette idée d’égarement, suivant le chanteur dans une série de tableaux où il se retrouve seul, un brin perdu.
Une manière de le suite dans une certaine contemplation, de l’observer dans une recherche constante d’apaisement avec une bascule se faisant à travers une porte vers l’inconnu, incarné par la nuit qui tombe et dans laquelle Gwizdek semble trouver une sorte de réconfort.
Un bien beau morceau qui, on en est sûr, prendra plus d’ampleur sur scène. Pour ça, on vous donne rendez vous le 16 novembre prochain sur la scène de La Boule Noire.
Izae – Embrasser ce garçon
Izae reprend les codes esthétiques des années 1920 avec son morceau Embrasser ce garçon. Le clip est réalisé par Clara De Lluvia, qui lui donne des tonalités noires et blanches. Une atmosphère sombre, mystérieuse, rappelant les polards américains de l’époque… jusque dans la typographie utilisée pour les crédits. Avec Embrasser ce garçon l’artiste Izae se joue des genres et des sexualités avec des paroles engagés. Car Izae parle de violences homophobes et d’injure « pédé » dans cette chanson autant pop que politique. L’artiste sera en concert à la Boule noire en novembre prochain.
Warhaus – No Surprise
Quelques minutes de pause dans un quotidien bien rempli. Le feu passe au rouge. La portière s’ouvre, on découvre Maarten Devoldere à bord d’un grand camion. Cet auteur et compositeur belge, au projet intitulé Warhaus, nous présente son dernier single No Surprise.
Le camion ne roulera pas aujourd’hui. Dans un intérieur épuré et décalé, drôle de garage, l’artiste s’élance sur une mélodie douce et lente. Si on reste un peu sur l’attente, le clip à la tournure très cinématographique met pourtant bien en valeur No Surprise, un son pop et agréable. Dans un nuage de fumée, une élégance se dessine. La musique et les images, sont à la fois intéressantes et apaisantes. Bien construit et soigné, le dernier visuel est porté par un beau cadrage et la lumière du dehors.
No Surprise est un avant-goût d’un album à venir, Karaoke Moon, qui sortira en novembre. On a hâte de suivre ce nouveau projet signé Warhaus, pour la danse et la douceur que nous offrent cet artiste.
Twin Blade – No more tears to cry
Si vous ne le connaissez pas encore, Twin Blade est un duo franco-belge, aux sons pop et underground. No more tears to cry est leur dernier projet. Une exploration musicale à la fois mystérieuse et inquiétante au cœur de laquelle on plonge sans plus attendre.
No more tears to cry s’esquisse entre le jour et la nuit. On suit les deux jeunes femmes qui composent le groupe, vêtues de blanc, dans une forêt, au beau milieu d’un cimetière puis sur les galets, en bord de mer. La prod est assez brute, rythmée et énergique, et contraste avec leurs voix envoûtantes. Les plans s’enchaînent. L’esthétique forte aux couleurs désaturées, est teintée par ces flashs de lumières qui cadencent le clip. On est emporté dans une quête de liberté aux élans nostalgiques, l’envie d’aller vers l’avant et à la fois d’être retenu par un passé trop présent.
Ce nouveau single nous permet de découvrir l’univers sensible et mystérieux dans lequel évolue Twin Blade. L’expérimentation poétique est au rendez-vous, et nous donne envie d’en savoir plus.