La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Sans plus attendre, voici la seconde partie de la 285ème partie des clips de la semaine.

Yael Naim – La fille pas cool
Il y a moins d’un mois, Yael Naim nous envoûtait avec le vibrant Multicolor (dont on vous parlait ici), premier extrait de son album SOLAIRE, annoncé pour le 6 février prochain.
Cette semaine, elle dévoile une nouvelle pièce de ce projet à venir, intitulé La fille pas cool. Le morceau et son clip prennent la forme d’un auto-portrait, dans lequel l’artiste se définit d’abord par tout ce qu’elle n’est pas : « Pas la fille qui ose », « Pas la fille qui pose », « Pas la fille qui fait rire », « Pas de grande chose à dire ». À l’image, des photos de l’enfant puis de la jeune fille qu’elle était s’animent pour exprimer tout ce qu’elle aurait aimé être, sans jamais y parvenir – selon ses propres critères : une fille cool.
Le grain de l’image associé à la douceur planante du refrain nous plongent dans l’intimité de l’artiste, qui arbore pourtant un grand sourire à travers les époques. À mesure que le temps passe et que la chanson avance, Yael Naim semble faire la paix avec elle-même et voir ses failles avec plus de tendresse. « J’aime la force tranquille / Me permettre d’être fragile ». Finalement, la vulnérabilité et le doute ont toujours été ses forces, il lui fallait juste le temps de s’en rendre compte.
Portée par sa lumière intérieure, l’artiste signe une ode touchante à l’acceptation de soi. Elle co-réalise ce clip avec Bruno Corsini et laisse présager un album lumineux et chamarré qui devrait nous faire l’effet d’un printemps avant l’heure.
Laura Cox – The Broken
Un riff entêtant, un rythme endiablé et une voix rock enveloppante, c’est bel et bien un nouveau titre de Laura Cox qui vient de sortir ! La musicienne a récemment sorti son quatrième album, Trouble Coming, dans lequel elle partage ses ressentis sur des thèmes parfois très personnels comme la dépression et l’anxiété. Des thèmes donc qui sortent Laura Cox de son registre habituel, et qui viennent apporter encore plus d’authenticité à ses morceaux !
Pour la production, elle s’est entourée du groupe No Money Kids, bien connus pour leur pépites rock-électro et leur génie dans la gestion des rythmes. Laura Cox innove donc pour ce nouveau album, apportant une vraie modernité dans les productions et compositions.
The Broken, notre titre du jour, aidera à libérer vos tensions ! On a envie de laisser sortir notre rage, nos émotions et notre frustration ! Le clip vous donnera déjà un aperçu du talent de la musicienne à la guitare dont l’excellent jeu n’est plus à démontrer. Seule chez elle, Laura Cox se lance dans une destruction de son appart, libérant sa colère : The dream, the pain, they’re all the same / Your boss, your boyfriend, they’re all to blame ! Puis de contaminer les clients d’un bar à coup de riffs de guitare incisifs ! Petit clin d’œil à Gabbie, du groupe MADAM, qui s’est improvisée barmaid pour le clip 😉
Un clip et un titre rafraîchissants, qu’on a envie de fredonner toute la journée, The Broken est à vous !
Hausmane – At the door (Live session @Studios Ferber)
La générosité et le talent, signés Hausmane ! L’artiste franco-libanais nous glisse un nouveau cadeau sous le sapin avec cette nouvelle live session aux Studios Ferber pour At the door, avec ses excellents musiciens et guests parmi lesquels La Chica, Coline Rio ou encore Claire days.
Un morceau inédit, sensible et introspectif, capturé par Zoe Cavaro & Mickael Fidjili devant une poignée de chanceux dont on a eu la chance de faire partie. Loin de nous l’idée de verser dans l’entre-soi, mais plutôt celle – puisque nous sommes un peu lus – de vous partager notre enthousiasme, de témoigner de l’immense talent d’Hausmane et d’encourager celles et ceux qui ne le font pas encore à le suivre.
Hausmane est un peu un alchimiste. Avec ses notes et ses mots, il réussit à faire naître instantanément des émotions, amplifiées et sublimées par les musiciens dont il a fait le choix de s’entourer. Hausmane, c’est la douceur, la sensibilité, l’exigence et l’amour du beau.
Espérons que At the door annonce un nouveau projet pour les prochains mois !
Cameron Winter – Love Takes Miles
Il y a bientôt un an, on vous parlait de l’album Heavy Metal de Cameron Winter. Un premier disque solo sorti en toute discrétion, qui a eu un écho majeur et inattendu à travers le monde. En septembre, Getting Killed, nouvel album du groupe Geese dont il est le frontman, a lui aussi fait grand bruit, encensé comme la relève d’un Rock indé, expérimental et audacieux.
Rien ne semble arrêter le jeune artiste qui, faute de nous faire le plaisir d’une nouvelle sortie, offre un deuxième clip bien mérité à son titre Love Takes Miles. Une pratique peu commune, qui s’inscrit dans l’imprévisibilité et la liberté auxquelles l’artiste nous a habitués. Dans celui-ci, dirigé par Celia Rowlson-Hall, on suit l’itinéraire d’un travailleur, incarné par l’acteur Lucas Hedges – aperçu dans Manchester by the Sea ou encore Lady Bird. Las de passer ses journées à assurer le trafic routier, il se laisse entraîner par le pouvoir de la musique et s’enfuit. Sa liberté retrouvée, il est inarrêtable. Si « l’amour prend des kilomètres », il les parcourt sans difficulté.
Bien que les textes de Winter soient toujours sujets à interprétation, il semble qu’il soit ici question d’amour-propre. Seul sur une montagne de gravats, le personnage laisse libre cours à l’amour qui le traverse dans une chorégraphie brute et puissante.
Une chanson qui touche juste, écoute après écoute, incarnée par un acteur talentueux – on n’avait pas ça sur notre liste de Noël, mais on ne va pas s’en priver !
Kriill – other I
Other I est le nouveau single de Kriill, extrait de la réédition de leur deuxième album Listen to the Whale (a little more), parue à l’automne 2025. Le morceau s’ouvre de manière saisissante, sur une batterie et un a cappella au souffle presque tribal, qui installent d’emblée une atmosphère rituelle et hypnotique. Other I parle du regard porté à travers l’autre, de l’échange d’identités et de perceptions, comme si voir le monde nécessitait un « autre œil ». La musique donne corps à cette idée de conformisme : une marche collective presque mécanique, celle d’une société qui suit les tendances, subit les pressions et évolue dans un monde de paraître. Une réflexion lucide sur notre époque, où désir, dépendance et surexposition permanente s’entremêlent — le vers “a taste of everybody” en étant l’une des formulations les plus justes et percutantes.
Musicalement, Other I se construit en crescendo, gagnant peu à peu en rythmes et en harmonies riches. Les voix s’empilent avec élégance, portées par une tension rock contenue, qui n’est pas sans rappeler le magnétisme sombre de Do I Wanna Know? des Arctic Monkeys. À la fois vintage et moderne, le Other I avance comme une transe contrôlée, aussi entêtante que ravageuse, dans laquelle Kriill affirme son goût pour les contrastes et les trajectoires émotionnelles.
Le clip d’animation, réalisé par la multi-talentueuse Alina Popescu (Melancolia de Caravan Palace), prolonge cette sensation de rituel. L’héroïne, qui n’est pas sans rappeler une Pocahontas contemporaine, du moins au début, avec ses longs cheveux et son aura sauvage, incarne une figure libre et non conformiste confrontée à une entité angélique toute-puissante, l’Œil. Dans cet univers religieux et psychédélique, chaque offrande renforce la domination de cette créature, allégorie d’un big brother numérique ou d’une intelligence artificielle se nourrissant de nos données et de nos images. Un clip parfois violent, mais surtout puissant, élégant et symbolique, où l’animation sublime le propos profondément actuel de la chanson.
Pampa Folks – Highs and Lows
Le groupe parisien Pampa Folks, crée par le musicien Thomas Lavernhe, s’est fait un nom sur la scène hexagonale grâce à une pop aux accents californiens et une écriture qui mêle légèreté et profondeur. En cette fin d’année, le groupe revient avec le clip de son titreHighs and Lows, extrait de l’album It Starts With The End Of The World.
Parmi les titres phares, Highs and Lows se distingue par ses contrastes sonores et son énergie à la fois intime et expansive, capturant l’essence d’un voyage émotionnel oscillant entre euphorie et introspection. Tourné dans des décors qui font écho aux thèmes du morceau — hauts et bas, contrastes et paysages intérieurs — le clip illustre avec sensibilité les dynamiques humaines explorées par le groupe, qui propose une palette musicale riche en mélodies ensoleillées, guitares rêveuses et ambiances à la fois nostalgiques et lumineuses.
NASTYJOE – Hole in the picture
Quand l’humeur et le moral sont tous les deux désaccordés mais pas en désaccord entre eux, un shoot de post-punk est toujours le bienvenu. On a décidé de passer une partie du week-end avec les bordelais de Nastyjoe. Alors que leur premier album intitulé The House est annoncé pour le 16 janvier prochain chez A Tant Rêver du Roi / M2L Music, les garçons s’activent depuis quelques mois en tournée dans toute la France avec un passage prévu par la capitale – plus particulièrement à la Maroquinerie – le 6 février.
Ce qui ne les empêche absolument pas de nous proposer quelques extraits du futur objet. Après Strange place, Worried for you et Wire, cette semaine la bande nous proposait de découvrir Hole in the picture. Jusqu’ici les clips étaient scénographiés, on revient à une formule recentrée sur le groupe dans un simple cadre de jeu.
Une rose bleue qui brûle, le titre hole in the picture en lettres gothiques de la même couleur que la fleur carbonisée avec des images furtives du groupe négatif et on enchaine sur un plan unique sur le groupe. Hole in the picture sonne comme une métaphore autour de la recherche de soi, de la destruction de la façade. Les premières phrases du couplet « You call me nice – I am nice with myself (…) I am sick of being kind » révèlent une colère intérieure qui se traduit aussi visuellement par la présence de la mer agitée lors de ce qui s’apparente au refrain. Le groupe joue avec une esthétique qui rappelle celle de certains clips de la fin des années 1990 dans son choix des couleurs jusqu’aux images presque saccadées des camescopes d’époque. Le fait de d’afficher l’entité Nastyjoe dans son ensemble c’est aussi faire front grâce à la force du collectif.
Musicalement, il en sort un morceau aussi nerveux que mélodique, cette boucle de guitare qui revient pour mieux séduire nos oreilles et un texte qui ne peut que nous convaincre de rester nous-mêmes, cabossés mais toujours debout. On s’est révélés complètement accros aux sensations bien positives à l’issue de l’écoute du morceau. Ne vous en faites pas les gars, on arrive !
Trainfantome – Here The Mermaids Play
Ah les sirènes… Dans l’imaginaire elles sont aussi dangereuses que séduisantes. Il suffit de se tourner vers la mythologie grecque pour se rappeler de la consigne quant aux mélopées des douces créatures donnée au voyageur Ulysse.
Le quatuor grungegaze – on adore utiliser toujours plus d’étiquettes pour vous caractériser les projets – annonce son grand retour au printemps prochain avec un nouvel album chez Flippin’ Freaks, Howlin Banana et Influenza records. Pour nous faire patienter, le groupe s’associe à Kellii Scott (batteur de Failure) et nous balance un single bien puissant : Here The Mermaids Play. Pour les images, le groupe s’est acoquiné avec le collectif mexicain Plotwist pour une déambulation nocturne dans Mexico city !
Si quelques années auparavant l’iconique Cindy Lauper nous chantait Girls just want to have fun, Trainfantome nous ramène à cette idée de l’insouciance au féminin dans une approche nettement moins pop.
Sur ce morceau, Trainfantome mêle des influences grunge sauce Soundgarden à une shoegaze à la manière de My Bloody Valentine. On adore cette guitare hurlante et alterne les effets d’écho et de réverbération pour nous rester dans la tête. Le morceau alterne entre une intensité et des moments planants. Si on fusionne les univers du clip et du morceau, on s’inscrit dans une ambiance qui croise la rêverie, le lâcher prise et la réalité brute des émotions.
Softcult – Queen Of Nothing
Nous sommes les reines de rien, celles qui avancent en portant plus qu’on ne leur a jamais promis. Toujours quelque chose pour quelqu’un, toujours un rôle à tenir, un sourire à offrir, même quand la fatigue devient une seconde peau. Nous avons appris à encaisser en silence, à croire que cette usure venait de nous.
C’est exactement ce que dégage Queen of Nothing, le nouveau titre de Softcult : un rock ténébreux et somptueux, paru sur le dernier EP du même nom. Une musique dense, traversée par une tension sourde, où la colère ne crie pas mais s’installe, élégante et implacable. Elle dit l’épuisement de devoir plaire, la violence feutrée d’un monde qui exige sans jamais rendre.
Nous vivons dans un système qui ne nous offre rien gratuitement, surtout pas l’autonomie. Donner un peu, c’est souvent risquer de tout perdre. Alors nous apprenons à retenir, à nous redresser, à occuper l’espace sans demander la permission.
Être les reines de rien, ce n’est plus une défaite. C’est refuser qu’on nous réduise. C’est transformer ce rien en territoire, et y trouver, enfin, une forme de puissance.
Sébastien Tellier (feat. Slayyyter & Nile Rodgers) – Thrill Of the Night
Nous glissons dans la nuit, suspendus à un souffle que rien ne retient. Les ombres s’allongent, nos corps se délitent, et le monde devient liquide sous nos yeux. Dans cette danse, un vertige doux, un feu fragile qui brûle juste assez pour nous garder éveillés, sans jamais nous consumer vraiment.
Laissons-nous emporter par ce frisson, un mélange d’euphorie et de mélancolie qui flotte entre nos mouvements. La nuit devient un monde sans raison, mais où l’on trouve pourtant des réponses, un espace où tout peut éclore et disparaître en même temps.
La promesse de ce qui vient se fera sentir, un éclat invisible qui nous appelle. Le futur album du musicien français se profile comme une constellation encore inachevée, mystérieuse, que nous guettons avec ferveur. Et tout cela prend forme dans le souffle et la vibration de Thrill Of The Night, porté par Sébastien Tellier, l’éclat de Slayyyter et l’élégance électrique de Nile Rodgers.