L’oreille fine de Kokoroko

Bienvenue dans les coulisses de Tuff Times Never Last. Quelques semaines après la sortie de leur second album, Sheila et Onome du groupe Kokoroko nous racontent leur histoire, et ce qui nourrit leur musique.

ENGLISH VERSION BELOW

Tuff Times Never Last est sorti cet été. Nous avons rencontré Sheila Maurice-Grey et Onome Edgeworth, membres du groupe Kokoroko. C’est avec beaucoup d’écoute, de bienveillance et de gentillesse, qu’ils nous ont parlé de ce précieux projet. Ils ont eu des mots doux et justes ; cet album est à leur image, solaire. On a ressenti une réelle complicité entre ces deux protagonistes. On les remercie vraiment pour cet échange qui a égayé notre journée, tout en vous invitant à découvrir Tuff Times Never Last !

La Face B : Comment vous sentez-vous quelques mois après la sortie de votre album ?

Onome : Très bien. On est vraiment fiers de cet album. C’est très agréable d’avoir quelque chose qui nous enthousiasme dans le monde. On ne peut pas contrôler la musique une fois qu’elle est sortie. C’est génial quand tu peux en quelque sorte, lui faire confiance. Quand les gens l’écoutent, ça donne une bonne image de nous, et on a l’impression qu’ils la comprennent bien. C’est une super sensation.

La Face B : Vous étiez plus stressés avant ou bien après la sortie ?

Sheila : Je pense que ça sera toujours comme ça, on sera toujours un peu plus nerveux avant la sortie d’un album. Parce qu’il y a beaucoup de tension avant. Il faut réfléchir à la pochette, à la communication, à l’image du projet. Il faut publier, en faire la promotion. Et puis, quand ça sort, on se dit « oh mince, c’est tout ? ». Tout redevient calme pendant un petit moment. Mais oui, c’est agréable. C’était génial.

La Face B : C’est super. La pochette de l’album est très colorée et réconfortante. Est-ce que vous pensez qu’elle reflète bien le projet, la thématique ?

Onome : Quand on a vu la pochette, c’est comme si elle nous en disait beaucoup sur l’album. Et je trouve que c’est bien quand on collabore avec d’autres personnes, qu’on fait des remixes ou des visuels, ils dessinent en quelque sorte une image de notre art. Parfois, on ne voit pas certaines choses nous-mêmes. Alors on voit la réaction que cela suscite. C’est comme si on en apprenait sur notre propre créativité. Donc on a vraiment adoré. C’était un travail parfait pour nous. L’artiste s’appelle Luci Pina et elle a fait un travail phénoménal.

La Face B : C’était la première fois que vous travailliez avec elle ?

Sheila : Non, la première fois qu’on a travaillé avec elle c’était pour l’EP Get The Message. C’était un processus intéressant, parce que c’était la première fois qu’on travaillait avec elle. Il y a beaucoup de choses qui se passent. On travaille aussi avec une autre équipe. Mais j’avais l’impression que nous n’avions exploité que 50 % du potentiel de Luci. Donc cette fois-ci, pour l’album, on s’est dit qu’on voulait vraiment qu’elle brille.

Je trouve toujours que lorsque l’on travaille avec des artistes ou des créateurs en général, mais je dirais surtout des artistes, il faut savoir lâcher prise et les laisser faire leur travail. Une fois qu’on a lâché prise, elle nous a littéralement présenté tout un PDF de dessins. Ils étaient tous.. « waouh, c’est vraiment trop bien ». Voilà pour la campagne. Je crois que quelqu’un nous a dit que c’était une communication vraiment forte. Et c’est assez logique, car elle les a tous dessinés comme une collection.

La Face B : C’est donc votre deuxième album après Could We Be More. Est-ce que vous pensez que votre approche du jazz et de l’afrobeat est un peu différente dans celui-ci ?

Onome : Oui, à 100 %. Je pense que nous sommes plus à l’aise dans notre peau, plus courageux et moins complexés. Parfois, quand on est trop complexé, on essaie de jouer la sécurité ou d’être plus conforme. Je qualifierais en aucun cas ce projet d’un album afrobeat ou highlife. Il n’est pas plus afrobeat qu’il n’est hip-hop, soul ou jazz.

La Face B : C’est un mélange de tout.

Onome : Oui, c’est vraiment juste la musique qu’on aime. Je pense que si on remonte dans le temps, c’est peut-être plus proche de certains anciens albums de brit funk. Ils ont les mêmes influences que nous. Cette ville est imprégnée de reggae, de jazz, de musique africaine avec son highlife, son afrobeat moderne. Donc, oui, on était juste libres. On s’est amusés et on ne s’est pas trop souciés du résultat ou de l’œuvre finale, de ce qu’elle serait. Et quand on a eu un tas de chansons, on a sélectionné celles qui s’accordaient bien ensemble pour vraiment raconter une histoire.

La Face B : Est-ce qu’il y a des musiciens en particulier qui vous ont inspirés pour cet album ?

Sheila : Je pense que beaucoup de musiciens nous ont inspirés. Je pense que c’était encore plus vrai pour le premier album. Il a vraiment déclenché quelque chose. Je pense que nous sommes tous assez ouverts musicalement. On a tous des goûts musicaux très différents. Mais d’une certaine manière, nos différents goûts se rejoignent. Donc, quand on regarde la musique que nous écoutions, j’avais une playlist. Onome avait une playlist. Et si vous demandez aux autres, il y a beaucoup de croisements dans certaines des chansons que nous écoutons. Beaucoup d’Ebo Taylor.

Onome : Des morceaux de Pat Thomas, de The Jones Girls, Patrice Rushen.

Sheila : C’est un éventail musical très large. Quand on l’écoute, ou quand on en parle, ça semble être des influences aléatoires, éclectiques. Mais quand on les entend dans leur contexte, elles prennent en quelque sorte tout leur sens dans notre musique.

La Face B : Je trouve que c’est super intéressant, parce que vous êtes un groupe de sept musiciens. Et je me demandais comment c’était de créer de la musique à sept ? C’est beaucoup. Est-ce que vous travaillez tout le temps ensemble ? Est-ce que c’est plutôt une force ou un défi, ou les deux ?

Onome : Les deux. Tout dépend de la qualité du repas que vous avez pris avant de travailler.

Sheila : *Rires

Onome : Si tu manges bien, tout va bien. Ce n’est pas un problème. Sept personnes affamées, c’est trop. Je plaisante, mais je suis assez sérieux. Si tu es heureux, que tu te sens bien et que l’environnement est agréable, le plus souvent, c’est une force. Et de bonnes choses se produisent. On trouve le moyen de créer quelque chose. Quand on est fatigués ou affamés, tout le monde est sensible et c’est beaucoup plus difficile. Alors on essaie juste de rendre les choses amusantes et agréables. Avec cet album, on s’est beaucoup amusés et on est arrivés au bon endroit. On a eu deux jours où c’était …

La Face B : Le bazar ?

Onome : C’était une gentille guerre. *Rires. Mais le reste du processus a été merveilleux. Et ces deux jours-là.. je pense que ce qui en est sorti été encore mieux. Même les conflits sont parfois utiles.

La Face B : Parce que depuis le début de la création, vous faites tout ensemble ?

Sheila : Oui, on a tout fait ensemble. Mais la composition du groupe a beaucoup changé. Depuis trois ou quatre ans, on a cette même composition. Ce qui est sympa. Et j’ai l’impression que chacun va à l’intérieur de soi, se fond dans son personnage. Ce n’est pas comme si tout le monde se glissait dans son rôle. Mais chacun trouve sa place, si tu vois ce que je veux dire.

La Face B : Oui ! 

Sheila : Bien sûr, avec le temps, les choses vont changer et prendre une autre tournure. Mais je sens que.. au plus profond de mon cœur, je sens qu’il existe une belle synergie qui se crée entre nous. C’est vraiment agréable.

La Face B : C’est génial, et le fait d’être ensemble et de célébrer, c’est aussi le cœur du projet ? Ce que vous dites dans votre musique, par exemple quand je pense à la chanson Together We Are

Onome : Je pense que le cœur du projet, c’est que lorsque l’on crée tous ensemble et que nous sommes tous ouverts d’esprit, pour faire cela avec d’autres personnes, il faut avoir un certain niveau d’ouverture. Il faut avoir un certain niveau de sensibilité et de douceur, de bienveillance, que l’on n’aurait pas nécessairement seul, ou juste à deux dans une pièce. Il faut vraiment faire attention, car tout le monde est différent. Certaines personnes acceptent la critique, à d’autres tu ne peux pas leur faire de retours, car ça gâcherait tout. Mais il faut être tellement présent que cela signifie qu’il faut mettre beaucoup de cœur dans la musique, car elle est toujours avec nous dans la pièce.

Ainsi, même la chanson Together We Are ne parle pas nécessairement de nous, mais lorsqu’on écrit ces morceaux, ou que quelqu’un dit « j’ai cette idée, à propos de ça », et que tout le monde la joue, ça crée un sentiment particulier. Je ne pense pas qu’aucun d’entre nous puisse créer ce sentiment seul. C’est vraiment un sentiment d’appartenance à une communauté, à un groupe ou à un collectif avec du cœur, et de l’ouverture d’esprit dans la pièce. Oui, il n’y a pas assez d’argent pour que ce soit juste du travail. Il faut donc qu’il y ait du cœur.

La Face B : Vous êtes un groupe basé à Londres, et si on prend l’exemple de votre clip Da Du Dah, on peut voir des enfants jouer dans les rues de Londres. Le clip est très esthétique, quelque chose entre la nostalgie et la joie. Je me demandais ce que représente Londres dans cet album ? C’est une ville qui vous inspire ?

Sheila : Je pense que c’est le reflet des bons côtés de notre enfance, et de ce que nous aimons à Londres, ce qui fait qu’on se sente à la maison. Donc oui, je crois que c’est probablement la meilleure façon de décrire Londres. Je pense notamment aux enfants, surtout dans cette aire de jeux.

Cet environnement, pour certains d’entre nous en tout cas, représente en quelque sorte beaucoup de souvenirs de notre enfance, surtout en été, l’été à Londres. Je suis sûre que c’est la même chose à Paris, c’est juste une douce et agréable énergie. Donc je pense que les endroits clés, je dirais Paris, Londres, New York, il y a comme une énergie simultanée, c’est comme si tout le monde avait le droit de jouer dehors. On part à l’aventure avec ses amis. Alors oui, peut-être que je trouve ça un peu nostalgique, de se souvenir de ça et d’essayer de le revivre d’une certaine manière.

La Face B : Vous ne trouvez pas que ça a changé ? Est-ce qu’il y a toujours la même énergie en été ?

Onome : Parfois, je pense que ça a changé. Et puis, quand tu sors, même près de notre studio, le jour où le soleil se montre, tu vois de l’amour partout. Tout le monde est dehors. Je vais dans mon quartier, ou comme les ados, je reste juste debout sur mon chemin.

Ça a l’air différent maintenant, mais c’est toujours la même chose qui se passe. Oui, c’est une chose magnifique, ce sentiment, cette énergie. Ça te manque. Et puis parfois, dans ta vie, ça disparaît pendant quelques années, puis ça revient. Tu ne sais jamais quand ça va revenir et te retrouver.

La Face B : Je suis d’accord. Je comprends. J’aime aussi l’été à Paris.

Onome : C’est incroyable.

La Face B : Je voulais aussi parler des featurings sur cet album, vous avez fait trois collaborations avec LULU, Azekel et Demae. Comment c’était de travailler avec eux ?

Sheila : C’était très amusant. C’était plusieurs types de collaborations, et de différentes manières. J’aimerais aussi ajouter que, je suppose que ce n’était pas une collaboration directe, mais nous avons aussi invité Chelsea. Chelsea Carmichael au saxophone.

C’était une expérience agréable d’écrire une chanson à partir d’une idée. Et puis on se dit « on devrait peut-être avoir une nouvelle suggestion, Azekel ? ». On était tous les trois dans la pièce, et c’était intéressant d’entendre les deux parler de leurs grands-pères (*avec Onome). Ils sont amis depuis très longtemps. Et puis découvrir toutes ces informations … Je pense que c’est la collaboration qui m’a probablement le plus amusée, lorsque je me souviens de la façon dont ça s’est passé.

Puis Demae est arrivée à la dernière minute, nous étions sur le point de mixer. C’était comme la date limite. La personne que nous voulions inviter, avait décidé de ne pas le faire. Nous avons demandé à Demae, et elle a répondu « oui, je suis partante ! ». Elle nous l’a envoyé en un jour ou deux, et c’était tellement enjoué. Et puis LULU était également géniale. Elle est très jeune et a une voix magnifique.

La Face B : Est-ce que vous avez une chanson préférée sur l’album ? Peut-être que ce n’est pas la même pour vous deux. Je ne sais pas.

Onome : Pour l’instant, ça change tout le temps, mais je pense que pour moi c’est Sweetie. Et j’aime aussi beaucoup Over.

Sheila : Je dirais que pour moi c’est Over pour le moment. Nous venons de faire un concert à la Brixton Academy, et Chelsea a joué avec nous. C’était la première fois que nous jouions ce morceau en live, avec Chelsea à la flûte et au saxophone. C’était tellement beau. Dès qu’elle a commencé à jouer de la flûte, une ou deux notes, tout le monde l’a applaudie, ce que j’ai trouvé très beau. C’était un bel honneur pour elle.

La Face B : Je trouve que les chansons Over et My Father in Heaven sont toutes les deux un peu plus douces. Et My Father in Heaven.. J’aime beaucoup ce morceau. Mais je pense que c’est aussi l’un des plus différents de l’album. Il est peut-être plus soul et introspectif. Vous voyez ça comme ça aussi ?

Onome : Oui, je pense que pour moi, c’est définitivement le cas. Quand on l’a jouée pour la première fois, elle était peut-être trop introspective. Je trouvais que cette chanson ne collait pas avec l’album. Parce qu’elle est assez triste. Elle était belle. Mais pour moi, elle nous éloignait presque trop du voyage de l’album. Je ne comprenais pas.

Puis Sheila et Yohan sont arrivés un jour. Ils ont passé environ cinq heures sur cette chanson, à ajouter des harmonies et à la modifier. Je crois qu’on se disait que pour qu’elle fonctionne, on pouvait la raccourcir et la développer. Ils l’ont envoyée le lendemain. Je l’adore. Tout le monde était d’accord. La chanson était géniale, mais pour moi, enfin pour certains d’entre nous, je ne pense pas que nous aurions pu lui trouver une place. Puis quand ils ont fait ce travail supplémentaire, on s’est dit « ah, d’accord, maintenant ça s’intègre bien dans l’histoire. »

La Face B : Je l’aime beaucoup, aussi parce que dans celle-ci, les paroles et la voix sont au premier plan.

Onome : Au premier plan, oui. Je suis tellement heureux, je pense que tout le monde est heureux d’avoir réalisé cet album. On essaie de trouver un moyen pour qu’il fonctionne aussi bien en concert, avec la même énergie, car il est vraiment spécial et unique pour nous.

La Face B : Que ce soit dans la mélodie ou dans les paroles, je pense aussi que vous partagez une attitude très positive et résiliente, un message d’espoir. Bien sûr j’avais en tête ce contexte politique et mondial complexe et plutôt sombre, je voulais savoir quelle était votre vision de l’avenir dans ce contexte ?

Sheila : Notre vision de l’avenir, c’est que les moments difficiles ne durent jamais (Tuff Times Never Last).*Rires. Mais honnêtement, le titre vient d’un mème, mais je pense qu’il reflète beaucoup de vérités dans le sens où il y a un véritable espoir de trouver une solution. J’ai l’impression que l’histoire ne cesse de se répéter de différentes manières, ce qui est dommage. Mais oui, l’espoir est toujours là, les choses changeront toujours.

J’ai l’impression que c’est quelque chose dont nous parlons beaucoup, comme le rôle de la musique à cette époque. Je pense que c’était notre intention avec cet album, qui est en quelque sorte d’apporter une énergie positive. Évidemment, il y a des moments comme, avec My Father in Heaven, où c’est plus introspectif, dans le contexte de notre album. Mais le projet dans son ensemble vise à apporter une bonne énergie et des ondes positives. On traverse une période vraiment sombre, et j’ai l’impression que nous en avons vraiment, vraiment besoin.

Onome) Tu veux ajouter quelque chose ?

Onome : Eh bien, j’allais dire que j’ai suivi un cours magnifique l’autre jour, un cours de yoga en fait. Je ne fais pas beaucoup de yoga, mais ma sœur suit une formation pour devenir professeur de yoga. Elle nous fait tous suivre des cours avec elle. Pour moi, ce n’est qu’une question de mouvement. Mais le professeur de yoga disait que si l’on examine les raisons pour lesquelles nous sommes là où nous en sommes, c’est parce que les gens n’écoutent pas. Et avant tout, nous ne nous écoutons pas les uns les autres en tant qu’êtres humains.

Je veux dire, rester immobile pendant une heure, la tête en bas, les jambes en l’air, et réfléchir, cela revient vraiment à écouter. Comme tout, à un moment donné, c’est juste un manque de désir ou de volonté d’écouter ou d’entendre. Quelle que soit l’ampleur des problèmes, au fond, est-ce que nous écoutons ? Est-ce qu’on fait preuve de compassion ?

Je pense que le pouvoir de la musique pour amener les gens à écouter.. Quand on fait un concert, nous avions 3 000 personnes qui nous écoutaient l’autre jour. C’est un pouvoir tellement grand. C’est une chose tellement précieuse dont il faut avoir conscience et être prudent avec. Comment tu veux utiliser cette position ? Et ça ne veut pas dire qu’on doit forcément être… Je ne sais pas si tu es prêt, si tu es une militant ou si tu as vraiment une intention réelle pour ta musique et le rôle qu’elle doit jouer. Tu dois y réfléchir très sérieusement et ne pas prendre ça pour acquis. Donc on apprend et on grandit de plus en plus, je pense.

La Face B : Et cela vous apporte également de la joie de le faire.

Sheila : À 100 %.

La Face B : Je pense qu’aujourd’hui, c’est très important et on en a besoin, mais c’est aussi un message intemporel que vous partagez. Est-ce que vous êtes d’accord ? Je veux dire, nous avions besoin de l’entendre il y a des années et nous en aurons également besoin dans quelques années. Est-ce que ça pourrait être un album intemporel ?

Onome : Oui. Je pense que quand on écoute un album de Bob Marley ou de Fela, ils parlaient déjà beaucoup de notre époque. On peut alors copier-coller ça et la même chanson fonctionnera aujourd’hui de la même manière qu’à l’époque. Ce qui est triste, en réalité. On aurait espéré que beaucoup de choses changent. Et c’est pareil avec la musique d’Alice Coltrane, qui est tout aussi puissante à mes yeux. Elle est en grande partie instrumentale, mais elle me touche autant que la musique qui s’accompagne de paroles. Il est toujours essentiel d’avoir cette paix, quelle qu’elle soit, une musique qui vous aide dans ce voyage, à apprendre, à écouter, à ouvrir votre cœur. C’est une partie essentielle de l’existence humaine.

La Face B : Oui, je suis d’accord. Merci pour ces mots. Et vous allez bientôt vous produire sur scène à Paris, n’est-ce pas ?

Onome : « Cirque d’Hiver », c’est ça ? *Rires

La Face B : Vous êtes impatients ?

Sheila : Oui, tout à fait. C’est super de revenir. On venait souvent en France, et à Paris en particulier. Mais ces dernières années, on est de moins en moins venus. Donc je suis toujours très enthousiaste quand on vient jouer à Paris.

La Face B : Est-ce que vous pensez que c’est différent de jouer à Londres ou à Paris, par exemple ?

Sheila : Je pense que c’est différent, mais qu’il y a aussi des similitudes. J’ai l’impression que le public parisien est similaire à celui de Londres. Parfois, il est un peu plus timide et réservé. La dernière fois que nous avons joué à Paris, j’ai vraiment adoré ce concert. C’était plus calme que ce à quoi on est habitués. Cependant, je voyais bien que tout le monde écoutait. Je n’oublierai jamais ça. J’ai trouvé très beau que les gens nous accordent cet espace et leur attention de cette manière.

Onome : Je pense que dans les grandes villes, surtout dans un endroit comme Paris, on a toujours l’impression qu’il y a tant de choses à faire. Il y a des endroits où aller, et les gens ont une énergie débordante. C’est quelque chose de concret et substantiel. Quand les gens vous consacrent leur temps et leur énergie, vous sentez que c’est aussi quelque chose d’important pour eux. C’est la même chose ici. C’est un honneur pour nous que les gens viennent, s’engagent.

Pendant un concert, on doit gagner leur attention et vraiment mériter le temps qu’ils nous accordent. C’est un endroit super pour jouer, parce que c’est un défi. Ce n’est pas facile, mais les gens restent après le spectacle, ils vous parlent et vous donnent leur avis sincère.

La Face B : C’est cool. J’ai envie de venir vous écouter sur scène ! Vous voulez ajouter quelque chose ?

Sheila : Nous avons de nouveaux morceaux qui vont sortir. En fait, non, on a pas encore de date, mais on a commencé à écrire d’autres morceaux.

La Face B : Génial. Ce sera avec la même énergie, ou une surprise ?

Onome : Ça y ressemble. Pour l’instant, j’ai l’impression que c’est la même histoire, mais plus loin. Soit plus profondément dans une direction, soit plus profondément dans une autre. Mais je ne sais pas, les choses changent vite. Cet album a tellement changé au cours de la dernière semaine. On doit faire confiance au processus. La musique nous mènera là où elle veut nous mener.

La Face B : Après la sortie de l’album, vous avez connu une période un peu plus calme, mais vous êtes déjà en train d’imaginer de nouvelles choses ?

Sheila : Il n’y a pas vraiment de moment de calme. À moins que nous décidions que c’est un temps de pause, mais il n’y a pas de moment de calme.

Onome : Je pense qu’il faut apprendre à saisir l’attention des gens, à tirer parti du moment où ils sont à l’écoute. C’est comme quand on est en pleine conversation, on veut en tirer le meilleur. J’ai l’impression que les gens nous ont vraiment accordé beaucoup de temps et d’énergie récemment, et nous voulons leur rendre la pareille et continuer sur cette lancée, poursuivre cette interaction.

ENGLISH VERSION

Tuff Times Never Last was released this summer. We met Sheila Maurice-Grey and Onome Edgeworth, members of the band Kokoroko. They spoke to us about this precious project with great attentiveness, kindness and warmth. Their words were gentle and accurate; this album reflects their sunny personalities. We felt a real complicity between these two protagonists. We really thank them for this exchange which brightened our day, while inviting you to discover Tuff Times Never Last!

La Face B : How do you feel a few months after the release of your album?

Onome : Very good. We’re really proud of the album. So it feels very good to have something that we’re excited by in the world. The music you can have no control on it when it goes out. So it’s nice when you kind of trust it. When people listen to it, it’s a good picture of us that we feel like they’re getting. It’s a nice feeling.

La Face B : You were more stressed before the release than some weeks after?

Sheila : I think it’s always going to be the case that you feel a bit more, you know, nervous about the music being released. Because there’s so much tension before. So you have to think about the artwork. You have to post it. You have to advertise it. And then when you release it, it’s like « oh snap, is that it? ». It goes a bit quiet for a little while. But yeah, it feels good. It was great.

La Face B : So nice. About the art piece of the album, it’s very colourful and heartwarming. Do you feel it’s a good image of this album? Of the thematic.

Onome : For us, when we saw the artwork, it told us a lot about the album. And I think it’s nice when you collaborate with other people, you get remixes done or artwork, they kind of draw a picture of your art. Sometimes you don’t see some things yourself. And you see the reaction to it. It’s like « oh, I’m learning about my own creativity ». So we really love it. It was a perfect job for us. Luci Pina is the artist and she did a phenomenal job.

La Face B : Was it the first time you worked with her?

Sheila : No, the first time we worked with her was for the EP Get The Message. It was an interesting process because that was our first time working with her. There’s a lot going on. We’re working with another team as well. I feel like we got maybe 50% of Luci. So this time with the album, we were like, you know what? We really want her to shine.

I always find working with artists or just working with creators in general, but I would say artists, you have to kind of let go and let them do the work. But once we let go, she literally presented us a whole PDF of drawings. All of them were like « wow, it’s just so good ». So that’s the campaign. I think someone told us it’s a really strong campaign. And it kind of makes sense because she drew all of them as a collection.

La Face B : So it’s your second album after Could We Be More. Do you think your approach of jazz and also related to afrobeat is a bit different in this one?

Onome : Yeah, 100%. I think we are more comfortable in our skin, brave and just less self-conscious. Sometimes when you’re too self-conscious, you try to be safe or try to live up to tradition. I wouldn’t call this album in any way like an afrobeat or highlife album. It’s not more afrobeat than it is hip-hop or soul or jazz.

La Face B : It’s a mix of everything.

Onome : Yeah, it’s genuinely just the music we love. I think, if you go back maybe it’s closer to some of the old britfunk albums. They have all the same influences as us. This city is full of reggae, it’s full of jazz, it’s full of african music with its highlife, modern afrobeat. So, yeah, we were just free. We had fun with it and we didn’t worry too much about the outcome or the final piece, what it would be. And when we had a bunch of songs, we selected the ones that fitted together in a way that really told the story.

La Face B : Do you have musicians in particular who inspired you for this album?

Sheila : I think there were lot of musicians that inspired us. I think from the first album could be even more. It really unlocked something. We all have very different tastes in music. But somehow our different tastes are kind of coming together, in a way. So I feel like when you look at some of the music that we were listening, I had a playlist. Onome had a playlist. And if you ask the others as well, there’s a lot of crossovers in some of the songs that we listened to. A lot of Ebo Taylor.

Onome : A lot of Pat Thomas, a lot of The Jones Girls, Patrice Rushen.

Sheila : Just like a massive range of music. When you listen to it, or if we speak about it, it just sounds like random influences. But when you hear them in context, they kind of make sense in the music that we make.

La Face B : I think this is a very interesting thing, because you are a group of seven musicians. And I was wondering how is it to create music when you are seven? It’s quite a lot. Are you all the time working together? And is it a strength or a challenge, or both?

Onome : It’s both. It all depends of how good the meal you had before you worked.

Sheila : *Laughs

Onome : If you eat good food, it’s all fine. It’s not a problem. Seven hungry people is too much. I am joking, but I am kind of serious. If you are happy and you feel good, and the environment is nice, more often than not, is a strength. And good stuff comes up. We find a way to create something. When we are tired or hungry, everyone is sensitive and it’s a lot harder. So we just try to make it fun and enjoyable. With this one it was a lot of fun and we landed in a good place. We had two days where it was..

La Face B : A mess?

Onome : It was a very gentle war. *Laughs. But the rest of the process was wonderful. And those two days, actually, I think what came out of it was even better. Even the conflict is useful sometimes.

La Face B : Because since the beginning of the creation, you are doing everything together?

Sheila : Yeah, we’ve been doing everything together. But also the line-up has changed a lot. For the past three or four years, we’ve had this line-up. Which has been nice with the seven of us. I feel like everyone is kind of going into themselves, and fulling into their characters. It’s not like everyone falls into their role. But everyone falls into their place, if that makes sense.

La Face B : Yes!  

Sheila : And obviously as time goes, it’s always going to change, and look different. But I feel like we.. from the bottom of my heart, I feel like there’s a nice synergy that’s going on. Which is really nice.

La Face B : So cool, and also the fact of being together and celebrating, it’s also the heart of the project? What you say in your music, for example when I think about the song Together We Are.

Onome : I think like the heart is that, when we all are creating and we’re all open-hearted, that like, to do that with other people, you have to have a certain level of openness. You have to have a certain level of sensitivity and gentleness that you wouldn’t necessarily have on your own, or just with two people in a room. You really have to take care, because everyone’s so different. Some people can take criticism, some people you can’t give them feedback, because it would ruin the whole thing. But you have to be so present that it means there has to be a lot of heart in the music, because it’s always in the room with us.

So, even the song Together We Are is not necessarily about us, but when we write those music, or someone says « I’ve got this idea, and it’s about this », and everyone plays it, it does have a special feeling. And I don’t think any of us individually can create that feeling alone. It’s really a sense of, a feeling of community or group or collective with heart and openness in the room. Yeah, there’s not enough money for it to just be work. So there has to be heart in it.

La Face B : You are a group based in London, and for example, in your music video, Da Du Dah, we can see children playing in the streets of London. The music video is very aesthetic, and it’s between nostalgia and joy. And what represents London, in this album, is it an inspiring city for you?

Sheila : I feel like it’s a reflection of the good parts of our childhood, and the things that we about London, the things that makes it full at home for us. So obviously, I feel like that’s probably the best way to put it. I feel like especially having the kids, in that playground.

That environment, for a few of us anyway, kind of represents a lot our childhood’s memories, especially in the summer, summer in London. I’m sure it’s the same in Paris, it’s just a lovely energy. So I feel like the key places I would say like Paris, London, New York, there’s like a simultaneous energy, which is like everyone is allowed to play out. You go on an adventure with your friends. And yeah, so I feel like it’s kind of nostalgic in that way, remembering that and trying to relive that in a way.

La Face B : Don’t you think it changed this time? Is there still the same energy in summer?

Onome : Sometimes I think it has. And then like, you go outside, even like with our studio, the day the sun comes out, you just see romance everywhere. Everyone is out. I am going to my aera, or as the teenagers I just standing out in my path.

It looks different now, but the same thing is always happening. Yeah, it’s a beautiful thing, that feeling, that energy. You miss it. And then sometimes in your life, it goes for a few years and then it comes back again. You never know when it’s going to come back and find you.

La Face B : I agree. I understand. I also like summer in Paris.

Onome : It’s amazing.

La Face B : Also, I wanted to talk about the featurings on this album, you made three collaborations with LULU, Azekel and Demae. How was it to work with them?

Sheila : It was a lot of fun. There were all differents types of collaborations in different ways. And I would also like to add, I guess it wasn’t a direct feature, but we also have featured Chelsea as well. Chelsea Carmichael on saxophone.

It was a nice experience when we wrote a song with one idea. And then we were like « oh, should we have a new suggested, Azekel? ». It was the three of us in the room, and it was interesting to hear the two of them talking about their grandfathers. They’ve been friends for such a long time. And then finding out all of this information … So I think that that was the one I thought probably, like in memory of how it was made, probably the most fun I had.

Then Demae was a last minute one, we were about to mix it. It was like the deadline. The person that we wanted to do it, they decided they didn’t want to do it. And we asked Demae and she was like « yeah, up for it ». She sends it within like a day or two, and it was so playful. And then LULU as well was another great one. She is super young, and has a beautiful voice.  

La Face B : Do you have like a favorite track on the record? Maybe not the same for both of you. I don’t know.

Onome : At the moment, it keeps changing, but I think Sweetie for me. And I really love Over as well.

Sheila : I would say mine is Over at the moment. We just did a show at Brixton Academy, and we had Chelsea playing with us. And that was the first time we played that live, with Chelsea on flute and on saxophone. It was so beautiful. As soon as she started playing on the flute, like one or two notes, everyone was like cheering for her, which I just thought was very beautiful. It was a nice honor for her.

La Face B : I think the songs Over and also My Father in Heaven are both a bit sweeter. And My Father in Heaven.. I really like this song. But I think it’s also one of the most different of the album. Maybe it’s more soul and introspective. Do you also see it like this?

Onome : Yeah, I think for me definitively. When we first played, it was maybe too introspective. I was thinking this song doesn’t fit the album. Because it’s quite sad. It was beautiful. But for me, it took us out of the journey of the album almost too much. And I didn’t get it.

Then Sheila and Yohan, they came in one day. They spent like five hours on that song, just adding harmonies and changing. And I think we were saying to make it work, maybe it was longer than it is now. Like we can shorten it and develop it. And they sent it the next day. I love it. All the guys were like « yeah, this is great, it’s so beautiful ». The song was great, but it just, for me, well for a few of us, I don’t think we could find a space for it. Then when they’ve done that extra work, it’s like, ah, okay, now it fits as part of the story.

La Face B : I really like it, also because maybe in this one, the lyrics and the voice are in the main stage.

Onome : At the front, yeah. I’m so happy, like, I think everyone, we’re all so happy we made the album. We’re trying to find a way to make sure it works on shows as well, with the same energy, because it’s really special and unique for us.

La Face B : Also, I think whether in the melody or lyrics, you are sharing a very positive attitude and about resilience, sharing a message of hope. Of course I was thinking about this complicating and kind of dark political and global context, and I wanted to know what is your vision of the future in this context?

Sheila : The vision of the future is that Tuff Times Never Last. *Laughs. But honestly, the title came from a meme, but I think it speaks to many truths in that sense of, like, there’s a genuine hope that we figure this thing out. Like, I feel like history keeps on repeating itself in different ways, which is a shame. But yeah, the hope is, always that, you know, things will always change.

I feel like it’s something that we always talk about, like, the role of our music in this time. I think that was our intention with this album, which is to kind of bring positive energy. Obviously, you have moments like, with My Father in Heaven, where it’s more introspective, in the context of our whole album. But the whole album in itself is to bring good energy and positive vibes as well. Like, essentially, we’re in really dark times, and I feel like we really, really need it.

(to Onome) Do you want to add one thing?

Onome : Well, I was going to say, I went to a beautiful class the other day, and it was actually a yoga class. I don’t do a lot of yoga, but my sister’s training to be a yoga teacher. She’s getting us all to do classes with her. And for me, it’s just movement. But the yoga teacher was talking about, like, if you look at why we’re in the position we’re in, people aren’t listening. And, like, first and foremost, we’re not listening to each other as human beings.

I mean, being still for an hour, on my head, upside down with my leg in the air, thinking about, actually, it really does come down to listening. Like, everything, at some point, it’s just a lack of desire or will to listen or hear. However big or small the problems are, like, at the heart of it, are we listening? Are we being compassionate?

I think the power of music in getting people to listen.. You do a show, we had 3,000 people just listening to us the other day. It’s such a big power. It’s such a precious thing that you really have to be deliberate and careful with. How do you want to use this position you’re in? It doesn’t mean we have to be, I don’t know if you’re not ready to, whether you’re an activist or whether you have a really real intention for your music and the role it has to play. You have to be very deliberate about it and not take it for granted. So we’re learning about it and growing into it more and more, I think.

La Face B : And it also brings you joy to make it.

Sheila : 100%.

La Face B : I am thinking, today it’s very important and we need it, but it’s also a timeless message. Do you agree? I mean, we needed it years ago and we will also need it in some years, to hear it. Can it be a timeless album?

Onome : Yeah. I think when you listen to a Bob Marley album or a Fela album, they were talking so much about that time. You can then, copy and paste that and the same song will operate in the same way now as it did then. Which is sad, really. You would have hoped a lot of stuff would move. And the same with Alice Coltrane‘s music, for me, that’s equally powerful. And so much of that is, like, instrumental. But for me, it moves me in the same way as music that speaks with lyrics. It’s still essential to have that peaceful, whatever it is, music that helps you journey, that helps you learn, that helps you listen, that helps you open your heart. It’s an essential part of the human existence.

La Face B : Yeah, I agree. Thank you for your words. And you will soon perform on stage in Paris?

Onome : « Cirque d’Hiver », am I right? *Laughs

La Face B : Are you excited about it?

Sheila : Yeah, definitely. It’s nice to be back again. We always used to come to, France and then Paris in particular. And I feel like over the past few years, it’s been less and less. So I’m always excited when we get to play in Paris in particular.

La Face B : Do you think it’s different to perform in London or in Paris, for example?

Sheila : I guess they are different, but there are similarities as well. I feel like the Parisian way is similar to London. Sometimes you get a bit more shy and more reserved. I feel like the last time we played in Paris, I really loved that gig. It was more quieter than we’re used to. However, I could tell that everyone was listening. So I won’t forget that. I think was very beautiful for people to give us that space and their attention in that way.

Onome : I think in cities, especially a place like Paris, it always feels like there’s so much to do. There’s places to go, and people have an energy for life. It’s something of substance and something substantial. For people to give you their time and your energy, you can feel that it’s a big thing for them as well. It’s the same here. It’s an honour for us that people are engaging.

In a show, we have to earn their attention and really deserve the time that they’ve given us. It’s a fun place to play, because it’s a challenge. Not easy, but people hang around after the show, and they talk to you, and they give you honest feedback. It’s great.

La Face B : That’s cool. I want to come and to listen to you on stage! Would you like to add something?

Sheila : We have new music coming out. Actually, no, we don’t have a date, but we’ve started writing more music.

La Face B : Great. It will be with the same energy, or a surprise?

Onome : At the moment it feels like the same story, but further down the road. Either deeper in one direction or deeper in another direction. But I don’t know, things change quickly. This album changed so much in the final week. So, we have to trust the process. The music will take us where it wants to take us.

La Face B : After the release of the album, it was a bit your quiet time, but you are already making new stuff and music?

Sheila : There’s no quiet time. Not unless we decide it’s a quiet time, but there’s no quiet time.

Onome : I think learning when you have people’s ears, if we can capitalize on that when people are listening. It’s like when you’re in a conversation, you want to make the most out of the conversation. And I feel like people have really given us a lot of time and energy recently that we want to give back to it and keep that going, keep that interaction going.

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