Des fois la musique, en plus d’être une bande originale de notre vie de tous les jours, nous projette dans un autre univers, un monde fantastique qui en appelle à notre imaginaire et nous plonge dans un état second. C’est le cas de PYGMALION le premier EP de M E AT.
Taillé dans la matière brut, nourri de post punk et de musique industrielle, l’opus nous plonge dans les sinuosités sombres d’un rêve profond, à la fois corrosif et lancinant, étrange et définitivement fascinant… Nous avons voulu en savoir plus sur ce groupe né sur Fish Island dans l’est de Londres et sur la composition de PYGMALION et avons posé quelques questions à Zilcho Hamblin, chanteur/guitariste du groupe…
ENGLISH VERSION BELOW
La Face B : Salut ! Comment ça va ?
M E A T : Très bien merci
LFB : Pour celleux qui ne vous connaitraient pas, peux-tu nous dire qui/qu’est-ce que M E A T?
M : M E A T est un groupe de rock expérimental composé de 5 membres : Zilcho Hamblin, Howlin Hands, Conso White, Oski et Louis Andrews.
LFB : Pourquoi le nom M E A T ?
M : ON EST TOUS DE LA VIANDE
LFB : Votre musique sonne post punk / industrielle avec une profonde noirceur introspective. Que diriez-vous sont vos influences majeures ?
M : Je pense que nos influences changent, on se montre à chacun de la musique constamment. Mais je pense Swans, Shellac, Sonny Rollins, Rabih abou-Khalil, Current 93 , Sun City Girls, Fugazi, Grinderman, Nuha Ruby Ra, Drug Store Romeos, Soft Machine, Univers Zero, The Romance of Baba Loco, Circus Mort. Tina, Rowland S Howard, Eartheater, Slint… La liste peut continuer. Fondamentalement, nous sommes inspirés par tout ce qui est doux à nos oreilles !
LFB : Comment le groupe s’est-il formé ?
M : Moi, Hands et Conso avons commencé à jouer de la musique ensemble vers l’âge de 14 ans, donc on pourrait dire que c’est en gestation depuis lors, mais MEAT n’a vraiment commencé à prendre forme qu’avec l’ajout d’Oski et plus tard de Louis. Avec ces membres nous avons pu porter nos improvisations live dans un nouvel endroit. Juste plus de possibilité sonore.
LFB : L’expérimentation et l’improvisation sont des éléments importants dans le processus d’écriture de MEAT. Comment un morceau de MEAT prend-il vie ?
M : Ils commencent presque tous par de l’improvisation. Que ce soit en live ou en salle de répétition, puis lentement, au fil du temps, ils prennent la forme de chansons plus structurées, soit ça, soit ils disparaissent. Pour peut-être ne plus jamais être revu, ou peut-être pour un jour élever leurs têtes bestiales de la boue.
C’est important de pouvoir lâcher les choses quand on a besoin. Certaines de ces choses semblent indomptables et si elles le sont, elles doivent le rester. Cela garde l’imprévu lorsque nous les jouons en live, et garde les live différents du matériel enregistré ce que nous apprécions tous.
LFB : L’EP s’appelle PYGMALION, le nom d’un roi qui a créé une statue de femme et en est tombé amoureux. Que signifie ce titre pour vous?
M : Bonne question, nous avons longtemps réfléchi à comment appeler cet EP. J’ai découvert l’histoire de Pygmalion pendant le confinement, en lisant les Métamorphoses d’Ovide. J’en ai gardé le sentiment d’un travail d’amour, le processus du travail qui prend la forme d’un être physique. Quelque chose qui, en raison des confinements sans fin, est devenu de plus en plus difficile à réaliser. En fin de compte, un peu comme Pygmalion, nous priions pour la sortie de l’EP, et maintenant qu’il est finalement là, je pense que mère Vénus a entendu nos prières.
LFB : Vos morceaux sont sombres et profondément poétiques. On a l’impression de plonger dans un territoire de rêve et d’introspection. Somnium commence avec des guitares à réverb’ et un paysage sonore nuageux et se transforme en riffs serrés et en mots parlés. Il y a comme une dualité. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce morceau ?
M : Somnium est certainement une méditation. La chanson a mis du temps à se transformer en ce que vous entendez sur le disque. Ça a commencé à partir de quelque chose que nous utilisions pour ouvrir nos concerts live, appelé Silhouette, dans laquelle le groupe jouait une progression répétitive et j’improvisais des paroles. Au fil des mois à ouvrir nos concerts comme ça, j’ai réalisé que la plupart de ce que je disais était pertinent aux rêves que j’avais fait et cette méthode me permettait d’entrer dans une sorte d’état de rêve sur scène. C’est comme ça que Somnium est né. J’ai commencé à rassembler certains de ces mots pour la chanson, et ensemble nous nous sommes efforcés de créer un morceau qui commence comme si vous sombriez dans un rêve et progresse dans l’immense sentiment de puissance que l’on peut ressentir en rêvant.
LFB : Lullaby pourrait être la bande originale d’un épisode de True Detective. Il y a une sensation mystique. De quoi parle la chanson ?
M : La chanson est une sorte de reflet de l’enfance, des temps plus simples (la couverture du single montre une image de moi en train de baver sur une balle en plastique). Je suppose que la chanson a une sorte de sensation mythique. Enfant, la plupart des choses semblaient assez magiques, rien n’était entouré des complications d’une trop grande compréhension, donc je voulais y retourner. La chanson est pleine de souvenirs pour moi, elle a une place très spéciale dans mon esprit.
LFB : Y a-t-il un morceau en particulier qui vous tient à cœur dont vous aimeriez nous parler?
M : L’Outro de l’album est également très particulière pour moi. On a l’impression que quelqu’un vous salue alors qu’il.elle part pour un voyage épique, d’où il.elle ne reviendra peut-être jamais. Le violon est joué par l’iridescente Nell Nicholas de Platypus Complex. Elle est entrée en studio et a tout de suite compris ce dont le morceau avait besoin. Après quelques séries d’improvisation, nous avons sorti ce que vous entendez sur le disque. Le jeu de violon de Nell est si fluide que cela semblait être le moyen idéal pour terminer l’EP.
LFB : L’ensemble de l’EP a une sensation cinématographique. Quel genre de films / bandes sonores aimez-vous / vous inspire ?
M : Ennio Morricone, Piero Piccioni, Angelo Badalamenti. La plupart d’entre nous aimions les westerns quand on était enfants, donc l’influence d’Ennio me reste, et je trouve que la façon dont Angelo écrit pour David Lynch est fascinante. Nous avons souvent regardé ensemble des films assez psychédéliques comme La Planète Sauvage ou Waking Life et je pense que ce genre de films a certainement influencé les structures de notre musique, nous aidant à voir le son comme des mouvements linéaires.
LFB : En parlant de cinéma, votre dernière vidéo, Circles, a été filmée d’un seul coup sur cassette VHS noir et blanc … Pouvez-vous nous en parler?
M : La vidéo était vraiment amusante à tourner. Tout a été tourné dans l’entrepôt dans lequel, à un moment donné au fil des ans, tout le groupe a vécu. Et nous avons eu beaucoup de chance d’avoir autant de gens ayant sauté sur l’occasion pour nous aider à le faire devenir réalité. Nous voulions faire quelque chose de simple qui suivait les thèmes de la musique, une sorte de construction lente menant à un crescendo, et nous avons pensé « quoi de mieux que de faire en sorte que tout soit en un plan long? ». Le décor a été entièrement construit par nous et nous avons utilisé des accessoires minimaux comme indices subtils du lyrisme de la chanson.
Mais vraiment, je pense que la vidéo parlera d’elle-même. Nous étions tous très content du résultat final.
LFB : Comment les temps actuels vous affectent-ils, vous et votre musique?
M : Cela a bien sûr rendu beaucoup plus difficile de se réunir autant pour jouer, et la musique live nous manque à tous, que ce soit jouer live ou voir des groupes. Mais il semble que cela nous a donné une certaine perspective ou un nouveau respect pour des choses qui auparavant semblaient si banales. Comme aller à un concert. Ce qui ne fait que nous donne encore plus envie de retourner au travail et de jouer à nouveau en live.
LFB : Merci !
ENGLISH VERSION
Sometimes music, in addition to being a soundtrack of our everyday life, projects us in another universe, a fantastic world which calls upon our imagination and plunges us in a second state. It is the case of PYGMALION, M E AT’s the first EP. Carved in the raw material, fed with post punk and industrial music, the opus plunges us into the dark sinuosities of a deep dream, both corrosive and haunting, strange and definitely fascinating… We wanted to know more about this band born on Fish Island in East London and about the composition of PYGMALION. We asked some questions to Zilcho Hamblin, the band’s singer/guitarist.
La Face B: Hi! How are you?
M E A T: Very well thank you
LFB: For those who don’t know you, could you tell us who/what is M E A T?
M: M E A T is a Five Piece, Experimental rock band formed of Zilcho Hamblin, Howlin Hands, Conso White, Oski and Louis Andrews.
LFB : How did the band come together?
M: Myself, Hands and Conso started playing music together around the age of 14, so i suppose you could say it’s been growing since then, but M E A T only really started to take form with the addition of Oski and later Louis, with the addition of these members, we were able to take our live improvisations to a new place. Just more sonic possibility.
LFB: Why the name M E A T?
M: WE ARE ALL M E A T.
LFB: Your music sounds post-punk / industrial with a deep introspective darkness. What would you say are your main influences?
M: I feel our influences are ever changing, we are constantly showing each other music. But I mean Swans, Shellac, Sonny Rollins, Rabih abou-Khalil, Current 93, Sun City Girls, Fugazi, Grinderman, Nuha Ruby Ra, Drug Store Romeos, Soft Machine, Univers Zero, The Romance of Baba Loco, Circus Mort. Tina, Rowland S Howard, Eartheater, Slint The list goes on. Basically we are inspired by whatever feels sweet to our ears!
LFB: Experimentation and improvisation are important elements of M E A T’s writing process. How does a M E A T track come alive?
M: They almost always start as improvisations. Be it live or in the rehearsal room, then slowly over time they take form as more structured songs, either that or they drop off. Maybe never to be seen again, or maybe one day to rear their beastly heads from the mire.
It’s important to be able to let things go when you need to. Some of these things feel untamable and if they are that way, they should stay that way, It keeps unpredictability when we endeavour to play them live, as well as keeping the live show different from the recorded material which we all enjoy.
LFB: The EP is named PYGMALION, the name of a king who created a statue of a woman and fell in love with it. What does this title mean to you?
M: Good Question, we laboured over what to call this EP for a long time, I mean I discovered the story of Pygmalion during lockdown, while reading Ovid’s Metamorphoses. I took away the feeling of a labour of love, the process of your work becoming a physical being, something which due to endless lockdowns became harder and harder to achieve. In the end not dis-like Pygmalion we were praying for the EP to be released, and now it finally is, so I guess mother Venus heard our prayers.
LFB: Your songs are dark and deeply poetic. There’s an impression of diving in very profound territory of dream and introspection. Somnium starts with reverb guitars and a cloudy soundscape and turns into tight riffs and spoken words. There’s a duality to it. Can you tell us a bit about it?
M: Somnium is certainly a meditation, the song took a long time to morph into what you hear on the record. It actually started from something we used to use to open our live shows, called Silhouette. In which the band would play a repetitive progression and I would improvise lyrics. Over months of us starting this way I realised most of what i was saying was relevant to dreams that i had been having, and this method of opening shows was allowing me to enter a sort of dream state on stage. This is how Somnium was born. I began Collecting some of these words for the song, and together we endeavored to create a track which starts as if you are falling into a dream and progresses into the immense sense of power one can feel while in one.
LFB: Lullaby could be the soundtrack of a True Detective episode. There’s a mystic feel to the song. What is the song about?
M: The song is a kind of reflection into childhood, to simpler times (it actually features an image of me drooling over a plastic ball on the cover) I suppose the song does have a kind of mythical feel to it. As a child most things felt pretty magical, nothing was crusted with the complication of too much understanding, so I wanted to go back there. The song is full of memories for me, it has a very special place in my soul.
LFB: Is there a particular track that is close to your heart that you would like to talk to us about?
M: The Outro of the album also feels very special to me, it feels like someone is waving to you as they head off on some epic journey, possibly never to be seen again. The violin is played by the iridescent Nell Nicholas of Platypus Complex, she came into the studio and immediately understood what the track needed. After a few runs of improvising with it we came out with what you hear on the record. nells violin playing is so smooth it feels like the perfect way to resolve the EP.
LFB: The whole EP has a cinematic feel to it. What kind of films/soundtracks are you into / inspired by?
M: Ennio Morricone, Piero Piccioni, Angelo Badalamenti. Most of us enjoyed westerns as children so Ennio certainly sticks with me, and I think the way Angelo writes for David Lynch is fascinating. We have often watched quite psychedelic films together like “La Planete Sauvage” or “Waking Life” and I think these kinds of films certainly informed the structures of our music, helping us to see sound as linear movements.
LFB: Talking about cinema, your latest video, Circles, was filmed in one shot on black and white VHS Tape… Can you tell us about it?
M: The Video was really fun to shoot, it was all shot in the warehouse that at some point over the years the whole band has lived in. and we were very lucky to have so many people jump on the opportunity to help us make it a reality. We wanted to do something simple which followed the themes of the music, a sort of slow build leading to a crescendo, and thought what better way than to have it all be one long shot. The set was all built by us and we used minimal props as subtle hints towards the lyricism of the song.
But really I think let’s let the video speak for itself. We were all very happy with the end result.
LFB: How do the current times affect you and your music?
M: It of course made it a lot harder to get together as much to play, and we are all missing live music, both playing live and seeing bands. But it seems it’s given us some perspective or new found respect for things that before seemed so commonplace, like going out to a show which only makes us keener to get back to work and playing live again.
LFB: Thanks!