Il nous aura fallu un temps pour nous remettre de nos émotions mais on vous propose de revenir sur le MaMa 2023 en 10 concerts marquants.
Pierre
Les Clopes
Crédits photos : Cédric Oberlin
Un petit ovni français. Les Clopes est un projet barré d’alias et de personnages un peu chelous, qui n’ont que pour seul maître mot la dépression. Qui dit dépression dit cold wave, mais pas une cold wave à la The Cure. C’est drôle de tristesse. les paroles sont déclamées, en français bien sûr, dans un esthétisme noir et blanc. Tout tourne autour de cette dissonance qu’on affectionne particulièrement chez Les Clopes. Ils ont déjà sorti quatre albums (Les Clopes, Deu, Troa et .. Qatr), et tous sont de cette même veine, étrangement enivrante.
Depuis leur hymne Je fume des clopes dans un blockhaus noir parce que je suis déprimé, le trio (Patrick Guillaume, Guillaume Patrick et Daniel Brumeux), pierre angulaire du projet, s’est étoffé en alias tout aussi loufoques, créant une joyeuse bande sept musicien.nes présent.es sur scène au mAmA. Et il en faut du monde pour apporter autant de dépression nicotinée à un fosse aussi enjouée de voir le groupe sur scène. On ne sait pas qui a gagné dans cette bataille, mais, entre tristesse et joie, pleurs et rires, on peut dire que le mAmA a apprécié.
Dalle Béton
On vous parlait de ce trio en amont du mAmA comme l’un de nos chouchous de la prog du festival. Le trio est de cette vague punk cold wave, où minimalisme côtoie brutalité, où la guitare n’est pas forcément de tous les instants, mais viens pousser un duo synthé/basse colonne vertébrale du projet. Mais se borner à décrire la style musical de Dalle Béton serait passer à côté de l’essentiel du groupe. Ancrés dans une gauche venue des campagnes, les rennais se foutent allègrement de tout, et avec un humour acerbe. Les parisien.nes en prennent forcément pour leur grade, mais aussi les consommateurices de vin nat’, les créateurices de tiers lieux et on en passe. La politique n’est pas en reste, avec le très détestable Manuel Valls ou un véritable hymne sobrement Intitulé 49.3. Un groupe rafraîchissant, quand on partage leurs idées, au vu du paysage musical qu’on qualifiera, non sans ironie, de neutre.
Bref, la question était de savoir comment allait se comporter le trio dans le festival le plus parisien qui soit. Autant dire qu’ils ont été fidèles à eux-même. Sachez que le groupe a pour habitude de couler une dalle de béton à chacun de leur live. Ce fût encore le cas au mAmA, grâce à l’aide d’un professionnel de l’exercice. Entre deux insultes au gouvernement (l’abjecte Darmanin en premier lieu), et quelques sorties bravaches sur les parisien.nes et professionnel.les présent.es dans la salle, le trio s’est démené pour un concert qui s’est avéré excellent. Dommage, la fosse n’était pas vraiment au rendez-vous, mais dans de meilleures conditions, la Dalle n’en sera que plus belle.
The Big Idea
Crédits photos : Cédric Oberlin
Le groupe de La Rochelle The Big Idea était venu au mAmA pour prouver leur valeur. Les six musiciens ramènent dans leurs valises avec eux un projet original et ambitieux, The Fabulous Expedition of Le Grand Vésigue. Un album enregistré presque entièrement sur un bateau, pendant une traversée de l’océan Atlantique. On vous recommande d’ailleurs le docu, qui rend état de ce projet un peu fou. La bande de six n’en est pas à son coup d’essai, ils avaient déjà sorti trois albums, dont un double en 2021 intitulé La passion du Crime 3. Encore une autre grosse idée du cru, où l’on suit l’Inspecteur Lawrence au travers d’une de ses enquêtes dans un Londres des années 80.
Bref, les rochelais ne sont pas à court d’idées pour naviguer dans leur art, la musique. Surtout que, concernant la musique, la bande vogue dans divers univers à guitares, rendant leur identité multiple et éclectique.
C’est d’ailleurs ce qui ressort de leur live au mAmA. The Big Idea ne fait pas dans la dentelle, et dans le peu de temps qui leur été imparti, ils réussissent à nous faire voyager, entre refrains pop, embardées distordues et chœurs enivrants. On sent le groupe en train d’éclore, d’arriver à maturation, et on ne peut qu’attendre quelle prochaine folle idée ils nous réservent.
Marine
Th Da Freak
Thoineau sortait de manière totalement imprévue il y a quelques mois son nouvel album, Indie Rock. Ce 11 octobre, accompagné de son frère, Siz (qui vient également de sortir un disque : Blind) il vient nous le jouer, ainsi que son précédent, que j’avais adoré : Coyote. Si de toute évidence, on retiendra qu’il ne faut jamais faire confiance aux Fender (petits soucis techniques oui), on est surtout marqués par la douceur qui se dégage du groupe. Et lorsque retentit My Queen (Ola), évidemment mon morceau préféré, alors je suis conquise. Thoineau et les effets sur sa voix, cet instant où tout s’agite et surtout, surtout le sourire franc entre les deux frères.
De l’indie folk comme on l’aime, un passage dans les années 90 et une sacré dose de bonne humeur.
marcel
En préambule, peut-être, souligner qu’ils jouaient juste après Th Da Freak et que l’alcool coulait à flots ce soir-là. Alors, lorsque j’ai repris mes notes le lendemain, pour voir ce qui m’avait marqué, quelle surprise de lire trois mots. Trois mots, certes, ce n’est pas beaucoup mais c’est encore plus amusant quand, décidément, ils ne veulent rien dire. Je vous les livre : « Alfoende la lie ». Ça pourrait être une formule magique. Pour contrer les chagrins amoureux et dévoiler les fous rires provoqués par les amis qui essaient de dévisser – sans raison – une lampe du Backstage. Toute ressemblance avec des faits et des personnages existants ou ayant existé serait purement fortuite et ne pourrait être que le fruit d’une pure coïncidence.
Alors, finalement, si je devais résumer, je dirais que c’était un concert fou, comme les belges savent si bien le faire. Et si de toute évidence je n’ai pas pris de notes c’est que j’étais bien trop occupée à danser !
Tramhaus
Lorsque Tramhaus se présente face à nous, il fait environ 45 degrés. Pour le reste, si je suis habituée à les voir régulièrement, je ne m’en lasse jamais. J’ai d’ailleurs écrit en capitale dans mon téléphone : « LE FEU ».
Le quintet originaire de Rotterdam, clôture la soirée au Backstage en beauté. Les tubes, tous les tubes, de Make It Happen a Seduction, Destruction en passant par Minus Twenty. La fosse, vit au gré des morceaux. C’est punk, c’est dense et au milieu, toujours Lukas qui sautille et hurle.
Et si certains découvrent ce soir pour la première fois Tramhaus, nul doute qu’ils y reviendront. Comme nous.
Nous Étions Une Armée
Crédits photos : Cédric Oberlin
Après une interview que vous retrouverez bientôt ici, j’ai le plaisir de re re re voir les chouchous de Nous Étions Une Armée.
Le duo qui faisait il y a encore peu de temps la première partie de Feu Chatterton est aujourd’hui à l’affiche du MaMA. Au sein de la chaufferie et sous une immense boule à facette, les deux amis et musiciens jouent les morceaux qui m’émeuvent depuis toujours. Rendez-vous, Déjà-Vu ou encore Se Perdre. Le rock rencontre la poésie, la rage et l’émotion. La pop s’esquisse avec de nouveaux morceaux tandis que les plus anciens filent toujours des frissons. Car ils sont bien là. Quand la voix de Léo, sur le fil, nous raconte des histoires. Quand Rémi se lance dans un solo de guitare et s’empare de nos sentiments.
Si leur set est malheureusement victime de divers soucis techniques, cela n’enlève en rien le talent de Nous Étions Une Armée. À suivre de près…
Charles
Demain Rapides
Cette année au MaMa, j’ai décidé de faire fi de la découverte et de cette envie toujours épuisante de voir beaucoup de choses pour ne rien retenir. J’avais donc mon petit programme, et pour être tout à fait honnête, j’avais surtout la grande envie d’aller voir mes potes jouer sur scène. Parce que j’avais envie d’aller les soutenir tout d’abord, mais aussi parce que j’étais assez curieux de voir les réactions des gens autour de moi, notamment pour Demain Rapides.
Si je devais choisir un mot pour décrire la musique de Damien, je pense que le plus simple serait radical. On a tendance à trop galvauder l’idée de la pop et l’envie de divertir le monde avec la musique. Demain Rapides c’est pourtant ça dans toute la classe que cela implique : tenir un public et le divertir tout en le détournant de ses attentes et en foutant clairement ses tripes sur scène.
Demain Rapides, sur scène, c’est un duo à vif, un héros à l’épée tendu vers le ciel à l’avant et un stratège du son derrière lui qui vient contenir et condenser l’énergie folle et la petite dose de folie qui nous explose à la tronche.
Un set ambitieux qui donne envie de danser et foutre le bordel mais qui switche avec intelligence en son milieu pour nous offrir un instant slam a cappella. Un moment inédit qui permettra aussi de prouver que Demain Rapides n’a pas fini de nous surprendre et de défier nos certitudes.
Non ces garçons là ne sont pas là pour déconner sur scène, plutôt pour nous filer une énorme claque. Tout ça pisse les sentiments, la joie, la colère, la mélancolie … On ne saurait pas quoi dire d’autres que merci et à la prochaine.
Brique Argent
Ils sont deux sur scènes, proposent une musique radicale et sont repartis des INOUïS du Printemps de Bourges avec un prix … Non je ne parle pas de Demain Rapides mais de Brique Argent. La filiation est évident, les deux jouaient côte à côté ce soir là au MaMa et les seconds, comme les premiers au dessus m’ont fait un énorme effet sur scène.
C’est assez rare que je me plonge dans un live au point d’oublier de respirer par moment, de sentir que mon cœur manque un battement et qu’il finit par se demander dans quoi je l’ai embarqué.
Brique Argent en live, c’est une descente en apnée de 45 minutes, un moment qui mélange musique, danse et théâtralité. On est face à un projet clivant, mais porté avec tellement de force et de grâce qu’il ne peut qu’emporter l’adhésion (qu’elle soit positive et négative). De mon côté, le curseur claque à 1000% du côté de la défense absolue et presque aveugle d’un projet comme on en voit que trop peu en France (là encore, grosse filiation avec Demain Rapides, quelle année mes enfants pour la musique)
Si on parle de musique, pour Brique Argent, il ne faudra absolument pas oublier le travail de mise en scène et notamment la qualité du jeu de lumière qui participe énormément à notre expérience, renforçant la puissant et la portée métaphorique des morceaux notamment quand on pense à Toucher Le Fond ou Un Peu De Charme.
Habité, bluffant, parfois même terrifiant, Brique Argent brûle la scène et donne corps à ses morceaux de manière assez folle. Peu de blabla, beaucoup de talent, l’aventure Brique Argent a pris son envol cette année et on est sur que 2024 lui appartiendra. On a hâte.
Michelle & Les Garçons
Est ce que je peux vraiment dire que j’ai vu Michelle & Les Garçons ? Pas sûr. Lorsque je suis arrivé dans la chaufferie de la machine du Moulin Rouge, il y avait tellement de monde que je me suis retrouvé planqué tout au fond de la salle.
Mais ce que je peux dire, c’est que j’ai écouté Michelle & Les Garçons et que forcément, c’était un plaisir absolu. Si la salle était clairement trop petite pour les angevins, on peut dire que le choix était malgré tout assez malin, puisque ces trois là ont fait monter la température comme jamais pour une fin de MaMa en apothéose.
Bizarre, vous avez dit Bizarre ? Non, une vraie évidence parce que Michelle & Les Garçons sur scène c’est toujours un grand moment de musique, de communion, de sensualité, de douceur avec ce qu’il faut de propos politique et nécessaire pour rendre le tout à la fois explosif et nécessaire. Le genre de concert dont on ressort secoué et un peu différent. Le genre de concert qui fait du bien au corps et au cœur et qui colle sur le visage un sourire sur lequel glisse les goutes de sueur qui tombent de nos cheveux.
Bref, c’était Michelle & Les Garçons et c’était fou, comme toujours.