Depuis dix ans maintenant, Marvel a démocratisé l’idée d’univers étendu au cinéma. Par cela, on entend des films reliés les uns aux autres par un univers commun et qui se répondent. En musique, il y a bien sûr des collectifs, des formations et des albums solos, mais on n’avait jamais vraiment eu d’univers étendu. C’est désormais chose faite avec Originul, le premier album de Cadillac qui prolonge donc l’univers si spécifique de Stupeflip. Mais dis-moi papa, Cadillac, il est vide aussi ?
Et bien pas du tout. C’est ce qu’on pouvait craindre lorsqu’on a appris la sortie de Originul. Cadillac, l’un des trois membres fondateurs du Stupeflip Crou, qui s’était fait relativement discret sur Stup Virus, dernier opus en date de Stupeflip (jusqu’au prochain parce que comme vous le savez tous, le Stupeflip Crou ne mourra jamais) débarque donc avec son premier album solo, son projet tout à lui. On pouvait craindre une bouffonnerie, un album décevant dans un univers avec lequel on vit depuis maintenant plus de 15 ans, mais il n’en est rien. Cadillac nous ouvre ainsi grand la porte de son univers et Originul est un album cohérent et jamais redondant. À la manière d’un peintre surréaliste, Cadillac développe un univers absurde et étrange fait de calembours, de non-sens et de jeux de mots aussi débiles que bien sentis. C’est la grande réussite de cet Originul : nous faire rire avec lui et pas de lui.
Personnage excessif et parfois caricatural qui n’apparaissait que par touches dans l’univers de Stupeflip, Cadillac s’offre ici 21 titres tous dévoués à développer un personnage qu’on ne connaissait pas forcément aussi bien qu’on ne le pensait. Comme chez Stupeflip, l’album est composé d’un bloc, fait de titres et de transitions. Certains titres ressortent forcément du lot. On se prend ainsi dans la tronche Game Over, on gueule avec un bonheur non feint le refrain de Débile qui nous donne une furieuse envie de participer à un concert du bonhomme juste pour hurler ça avec lui. On plie face à l’efficacité frontale de SPDC, Zoo ou Coca-Cola et on se marre tout en étant impressionné par les jeux d’écriture que représentent A.K.A et L’humour Fou tout comme on se sent assez mal à l’aise à l’écoute des titres glauques et proche de l’horreur que sont Limace ou C Guignol. On aime aussi beaucoup les instants bien plus pop et chantés, que sont Ego Slave ou Rétroviseur, prouvant à ceux qui pouvaient en douter que Cadillac n’est pas qu’un type qui hurle.
Au final, c’est bien un sentiment d’unité qui ressort de l’album, d’une histoire qui se diffuse tout au long et qui ne choisit pas entre les genres ni entre la façon de raconter les histoires. Entre punk, rap, ambiance cinématographique, Originul impressionne dans sa manière de nous rendre accessible un univers aussi étrange et personnel. Cadillac ce n’est donc pas caca, mais c’est définitivement beaucoup d’amour.