Sônge : « Il y a pas mal de rêverie dans mes morceaux, ou des choses que j’ai retenu de mes rêves »

Quelques heures avant son concert à l’Aéronef de Lille, Sônge nous a accueillis dans sa loge chauffée par le beau soleil du Nord, afin de répondre à quelques questions. On a donc tenté de retransmettre dans ces lignes la douceur de vivre que dégage l’artiste par son sourire enjôleur et son dynamisme.

La Face B : Sônge, bienvenue à Lille en cette belle journée ! Le climat ne doit pas tellement te changer de ta Bretagne natale ! On va commencer avec une question très importante pour connaître ton univers. D’où vient ton intérêt pour la musique ?

Sônge : Je fais de la musique depuis que je suis petite. Au collège je prenais des cours de percussions, on apprenait les rythmiques d’Afrique de l’Ouest. Dès ce moment-là, ça m’a passionné de ouf ! Je pense que c’est aussi parce que mes parents écoutaient beaucoup de musique, donc ça s’est fait petit à petit.

Après c’est marrant parce que je me souviens que quand je faisais de la musique et du chant, j’aimais bien avoir le micro ! C’est un peu bizarre comme révélation mais je me suis rendue compte qu’en étant sur scène et en ayant le micro, je peux m’exprimer. Si ça prend du temps, ça prend du temps, mais personne ne va me couper et je peux aller au bout de mon idée. C’est assez fort grâce à l’amplification et personne ne peut parler plus fort que moi. C’est un peu mégalo comme révélation. (rires)

On dit pas mal que les gens extravertis n’ont pas besoin d’avoir la scène car la scène c’est leur vie. Alors que les introvertis ont besoin de la scène pour pouvoir s’exprimer et avoir leur moment.

LFB : Il semble compliqué de donner un genre à ta musique. Certains parlent de soul électronique, d’autres de r’n’b futuriste… Mais comment définirais-tu ta musique toi-même ?

Sônge : Je ne sais pas trop franchement ! En ce moment je fais pas mal de morceaux acoustiques avec un pote qui s’appelle Antonin Fresson. On a été au conservatoire de jazz ensemble et là on reprend des morceaux que j’ai produit en acoustique et aussi avec Myd.

Donc c’est sûr qu’il y a de la soul électronique et du r’n’b futuriste quelque part, mais il y a aussi pas mal d’inspirations psychédéliques, très très imagées avec des couleurs assez fortes et des rêveries.

LFB : Tu laisses donc surtout place à l’imagination du public ?

Sônge : Oui voilà ! C’est toujours compliqué de mettre un style sur mes morceaux. Les anglais utilisent le terme alt-r’n’b, ce qui correspond aussi.

Quand je fais des DJ-sets je passe plutôt des musiques afro, brésiliennes (bailey funk), un peu de trance d’Afrique du Sud, pas mal de musiques des Caraïbes donc c’est assez vaste au final.

LFB : Mais d’où te vient cette incroyable culture musicale ?

Sônge : J’ai fait pas mal de voyages. Je suis allée au Brésil et en Afrique du Sud, depuis je m’intéresse à la musique de ces pays. Pareil pour Cuba par exemple, à chaque fois je m’imprègne un peu des musiques, ou je reste en lien avec le pays en suivant leurs actualités musicales.

LFB : Tu es musicienne, productrice et chanteuse. Pourquoi ce choix d’occuper tous ces rôles ? Pourquoi ne pas déléguer certaines choses ?

Sônge : C’est important pour moi d’avoir le contrôle sur tout ce qu’il se passe, mais petit à petit je me rends compte que c’est trop bien de travailler avec d’autres personnes. Ces personnes-là ne vont pas forcément te « broyer ». Ils sont très gentils et ça se passe très très bien.

Il y a des morceaux que je peux faire toute seule comme Carol of the Bells qui est la cover d’un vieux son ukrainien. Pour celui-ci je fais la prod toute seule, juste au mix. Pour l’album j’ai travaillé avec Myd, je commence la prod et lui agit comme le réalisateur en donnant un coup de baguette magique qui donne un step de folie au morceau. Par moments je me dis « ma prod est ouf ! », puis je l’envoie chez Myd et je me dis « ouhla en effet elle était perfectible ».

LFB : Donc tu t’entoures de plus en plus mais tout en restant décisionnaire sur ta musique.

Sônge : Oui voilà, ça se passe bien avec eux et je m’entoure de personnes ouvertes aux échanges.

LFB : Tu choisis toujours ton équipe ? Tu démarches tes collègues ou certains te font des propositions ?

Sônge : Ça dépend, c’est moi qui aie contacté Myd par exemple. Et j’ai bien fait !

LFB : Ton premier album Flavourite CALA est sorti en mars de cette année. Comment as-tu vécu le lancement de celui-ci ? La promotion ? Les concerts qui ont suivi ?

Sônge : J’ai trop kiffé ! J’ai eu l’impression que c’était un peu mon anniversaire ! Surtout le lancement, on a fait une expo à Paris pour laquelle j’ai fait appel à une amie, Olivia Durand, qui est une super illustratrice. Je lui ai dit quelles couleurs j’avais en tête en réalisant chaque morceau et à partir de ces 2/3 couleurs, elle a créé des tableaux avec ces couleurs précises pour chaque morceau. La release party était donc une expo dans une galerie et les 10 morceaux de l’album était représentés par ces tableaux, c’était magique !

Les critiques ont été top, tous les retours ont été positifs donc j’étais franchement heureuse que ma musique puisse toucher les gens, qu’ils aient envie d’écouter et de réécouter pour capter chaque nuance, chaque détail.

LFB : Que cherches-tu à partager avec ton public ? Tes propres émotions ? Des souvenirs ? Un voyage ?

Sônge : Il y a pas mal de rêverie dans mes morceaux, ou des choses que j’ai retenu de mes rêves. Il y a aussi des souvenirs, des visions, des inspirations de mythes. Par exemple Soukounian, ça parle d’un esprit maléfique guadeloupéen.

Le Soukounian se met dans le corps d’êtres humains, dans des chiens ou des oiseaux et te surveille de près, dans ta maison. Si tu ne le perces pas à jour, il te laisse tranquille mais si tu le découvres il te fait vivre un enfer. Mais pour démasquer le Soukounian il faut se mettre debout et passer sa tête à l’envers entre ses jambes. Mais s’il te voit le faire, il sait que tu sais et c’est foutu pour toi !

J’étais en fac de musicologie et on a étudié le romantisme. On a vu le romantisme tardif, donc Wagner et sa tétralogie, et il y reprend un mythe nordique dans lequel il est question d’un trésor gardé par les filles du Rhin et quelqu’un le dérobe et le forge en un anneau. Tout le monde se déchire pour cet anneau et lui reprend cette histoire pour en faire un opéra qui dure 3 ou 4 jours et ça m’a inspiré mon morceau Crépuscule des Dieux car dans cet opéra, le dernier jour s’appelle le Crépuscule des Dieux.

La magie m’intéresse beaucoup aussi, j’aimais bien la sorcellerie quand j’étais petite.

LFB : Trouves-tu un objectif à ta musique ? Un objectif personnel, comme universel ?

Sônge : Non, je ne fais pas de musique pour véhiculer un message précis. Je fais ma musique pour moi et les gens décident de me suivre dans mes délires ou non. Je n’ai pas de but universel, genre convertir les méchants en gentils, etc. Je peux faire des morceaux qui veulent dire telle ou telle chose mais je ne serai pas à l’aise d’en parler clairement.  Je ne suis pas là pour prôner des choses comme on me le demande souvent, je fais des sons si intimes qu’ils sont tout sauf universels au final.

LFB : Finalement, tu seras au festival du MaMA à Paris, le 17 octobre. Qu’est-ce que ça représente pour toi de jouer là-bas ?

https://www.youtube.com/watch?v=Fykqfc4xSVY

Sônge : Je vois le MaMA passer depuis un moment et je suis super contente d’y jouer car c’est un super festival. Cette année la programmation est dingue ! Je suis très très très contente et je vivais dans ce quartier à Paris donc c’est un petit retour aux sources.

LFB : Il y a des artistes que tu aimerais y voir ?

Sônge : Oui ! J’ai très envie de voir Enchantée Julia, mais on y joue le même jour donc on va comparer nos plannings pour se croiser !

Sônge est à retrouver en concert à Quimper le 26 septembre, le 28 septembre à Bretigny-sur-Orge, le 03 octobre à Nantes, le 17 octobre au MaMa Festival et le 18 octobre à Nogent.