Tomasi : un album à soi

Tomasi aime autant les autres qu’il les aide. Il l’a toujours dit, il l’a toujours fait. Un vrai garçon de parole(s). Mais ce coup-ci, il pense à sa gueule et il prend la lumière. Après avoir travaillé – que ça soit avec ou pour – aux côtés de Claude, Ojos, Fils Cara, TRENTE, Ian Caulfied, Johnny Jane ou encore Yoa, Tomasi sort du format EP et prend enfin son envol avec un premier album chez Clairvoyant Records / PIAS : Celui qui fait tout pour les autres. Un journal intime en 4 séquences inspiré des sitcoms américaines des nineties où Tomasi intervient en personnage enfin principal.

C’est dans une ambiance de comedy club que Tomasi ouvre le bal. Sitcom (on ne peut pas plaire à personne) un piano-voix intimiste à souhaits, une production discrète l’accompagne où s’activent pads et composition électronique. Véritable première confession d’une tranche de vie en 3 minutes où Tomasi active son flow de rappeur pour mieux drop the mic sèchement.

Tomasi a toujours aimé les sons pop-rock. Il n’y a qu’à tendre l’oreille sur l’introduction de Fais-moi plaisir, et pète moi la gueule. Dans un morceau plus dynamique où il est question d’acceptation de soi, d’entrée fracassante dans la vie d’adulte, Tomasi renoue avec l’énergie qu’on lui connait tant dans la vie qu’en concert.

Le titre éponyme sonne comme un interlude où Tomasi questionne sa nature altruiste. C’est à ces petits êtres qu’on demande de plus souvent penser à eux mais ils n’y pourront rien, ils s’effaceront pour mieux se sentir exister. Cette petite musique on la connait très bien. Tomasi a fini par lui donner une sonorité légère quasi aérienne au refrain où sa franchise au cœur prime toujours.

Loverboy entre dans la place. Tomasi esquisse les contours de la rupture avec Est-ce qu’on va droit dans le mur ? Pour mieux en parler à deux voix, il invite celle qu’il a tant aimé : Yoa. Le virage pop est assumé. Entre amertume et résignation, la production minimaliste est efficace. Les beats sont comme de véritables battements de cœur lents dans une structure qui joue sur une boucle, comme un ressassement dont on espère que Tomasi parviendra à se sortir.  

Maintenant que le plus dur est passé… Mythique c’est l’adjectif qu’il a choisi pour qualifier son couple. Une certaine idéalisation de sa relation en miroir avec son aspiration à enfin devenir quelqu’un, à devenir Tomasi ? Mythique joue sur une rythmique alternée où domine une belle basse. Cette fois-ci Tomasi s’entoure des copains (Aristide Casano, Nicolas Garrier Giraudeau, Léo Adrover et Dimitri Popovic) pour en faire un chœur et panser le sien. La force du collectif, ça le connait.

Le temps des regrets ? Désolé mon cœur, Pt 2.s’offre une version plus intime au piano et des cordes qui accentuent la gravité de la situation. Léger autotune comme la voix déformée sur un énième message vocal laissé sur le répondeur de l’intéressée. Les copains toujours là pour le soutenir et puis la distorsion. Le réseau est peut-être de moins en moins bon. Ou serait-ce autre chose ?

Vient la séquence Flashback. Et pour l’ouvrir ça se passe avec Olympia. Tomasi réutilise un peu le pronom « nous ». Il y signe un refrain aux rimes improbables – non pour une fois on n’illustre pas, à vous d’aller écouter et promis, ça vous donnera le smile ! -. C’est avec Elodie Charmensat d’Ojos qu’il s’offre un nouveau duo. Vraiment Chien de la casse ? A eux deux, on a du mal à y croire. Un morceau où l’on sent une vraie complicité entre les deux amis au-delà de la simple collaboration musicale. Avec sa voix, Elodie adoucit le flow jusqu’ici très frontal de Tomasi.

S’il prétend qu’il ne sait que tricher, Tomasi ne nous a jamais vraiment berné sur sa personne. Et on retrouve sur Je ne sais que tricher les influences rock des années 2000 ici avec son refrain hyper entrainant.

En 40 secondes bien senties, Tomasi fait un interlude avec sa voix intérieure : Mensonges.

Douce amère, c’est Rassure moi qui sonne autant comme une injonction que comme une question. Des doutes, des peurs et la recherche de réconfort peuplent la chanson où Tomasi adoucit sa voix. Celui qui parle franchement, se met à nu et révèle une facette plus vulnérable. On y trouve une inspiration rap mélodique façon Disiz.

Un synthé bien badant introduit Il n’y a que toi (qui t’intéresse), les nappes synthétiques s’enchainent comme des vagues qui roulent, les beats urbains ponctuent le propos. Echo direct à l’univers général de l’album, on sent bien que Tomasi a déjà – vraisemblablement plus d’une fois – été l’oreille et l’épaule réconfortante mais ça ne lui a jamais été rendu.

Dans ce deuxième interlude plus long, Pause est encore un grand moment de sincérité. Deux univers musicaux cohabitent ; une sorte de bande originale mélancolique de film français et une teinte beaucoup plus urbaine. Au milieu du morceau, on assiste à une insertion propre au monde du cinéma. Et dans cet élan de vérité, Tomasi laisse un message vocal bien personnel. Il est lui-même.

Clin d’œil aux Cure et leur single culte Boys don’t cry, Tomasi renverse le classique dans Conte de fée (boys do cry). Il y rappelle qu’être un garçon c’est aussi avoir des espoirs comme des angoisses, c’est être un humain. On trouve en Conte de fée, un morceau d’une grande profondeur. Sans doute, celui qui nous touche le plus.

Tomasi a toujours eu une parole sincère. Il est resté fidèle à lui-même. Il était là pour tous mais surtout pour elle. Elle n’est plus à ses côtés, il s’est fait un devoir : s’affirmer. Un cœur peut s’épuiser mais il battra encore. Avec Celui qui fait tout pour les autres Tomasi a décidé d’affronter ses démons un par un. L’appellation morceau prend tout son sens ;  il donne un bout de lui à chaque fois. Et mis bout à bout, c’est lui. Entre rap mélodique et pop-rock, Tomasi s’inscrit dans son temps, le sien, celui né de son besoin de se recentrer sur lui après avoir tout donné aux autres. On tourne la page avec lui et on va de l’avant, le garçon devient homme. Comme l’écrivait Patrice Chéreau : « L’avenir c’est du désir, pas de la peur. » Le 2 avril 2026, Tomasi est à retrouver en concert à la Boule Noire, on y sera pour sûr.

A (re)lire :
> Notre interview BFF de Tomasi et TRENTE
> Notre chronique de son dernier EP Adulescent Fluorescent

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