C’était ma première fois au vieilles charrues et j’avais toujours entendu beaucoup de bien de ce festival. Le côté associatif et breton, évidemment, m’intriguait. La programmation, éclectique et chaleureuse, y était aussi pour beaucoup. Alors, sans bottes de pluie mais avec un k-way dans mon sac, j’ai débarqué à Carhaix pour 4 jours de teufs et de surprises. Entre gadoue et soleil, pluie diluvienne et chaleur écrasante, retour sur mes coups de cœur de cette 31e édition !
Pour débuter cet article, peut-être aussi, remettre les choses au clair.
J’aimerai dire un grand BRAVO aux 7500 bénévoles qui ont abattu un travail de dingue, celles et ceux en coulisses qui ont œuvré pour que le festival soit à la hauteur de nos attentes (une fluidité à tous les niveaux), saluer le travail du service presse et leur gentillesse et remercier enfin l’équipe de la sureté !
Mais après les remerciements vient le temps des déconvenues. Bien entendu, rien à reprocher au festival. Juste un certain public à blâmer. Un public masculin, qui lorsque la nuit tombe, se permet des apostrophes non désirées. Je regrette leurs regards bovins et leurs yeux vitreux. Dimanche, ma patience avait disparu, remplacée par une colère tenace.
Être une femme, dans cette société, dans les lieux publics et privés, demeure, à jamais, une menace.
J’ai tenté de me concentrer sur ma présence ici, sur le positif et comment restituer, le plus fidèlement possible mes impressions sur les concerts. Et pour être honnête, ça n’a pas été facile.
Tramhaus
Crédits photos : Guillaume Kerjean
Tout commence le jeudi 13 juillet sur la scène Gwernig. La plus petite scène, certes, mais non des moindres. Car sous ce chapiteau drapé de bleu et jaune, je vais découvrir, pour les jours à venir, de nombreux artistes. Dès 16h25, Tramhaus prend alors place sous cet accueillant chapiteau. Pas de découverte ici mais encore un énième concert savouré de ce quintet brûlant.
Un premier EP, Rotterdam, sorti en 2022 (chroniqué ici), des singles et beaucoup de dates. En live, c’est toujours renversant, épuisant et prenant. De Marwan à Seduction, sans oublier Minus Twenty qui laisse Julia à la basse hurler et hurler, Tramhaus nous offre cinquante minutes immersives et subversives. De l’émotion, de la complicité et de la tendresse, voilà ce qui prédomine et se joue sur cette scène. Notre seul regret : qu’ils aient ouvert les hostilités et qu’ainsi, des milliers de festivaliers et festivalières les aient ratés.
Après le concert, je me suis entretenue avec eux et l’interview sera disponible à la rentrée !
Jeanne Added (photos et chronique de Céline Non)
Le concert de Jeanne Added fût irradiant, son énergie, cette façon de mettre en avant tous ces musiciens, jusqu’au changement de tenue, un court set de festival s’est transformé en véritable show. Et c’était magnifique. Elle nous emporte dans sa musique en mettant en avant son dernier album sans oublié les hits de ses précédents albums (Mutate, Both Side, Back to Summer, etc.)
Brama
C’est une fois de plus sur la scène Gwernig que les choses se jouent. Et ce jour-là, je découvre Brama. Le trio est originaire d’Auvergne et délivre un rock psyché des plus étonnants : guitare, batterie et … vielle à roue. Oui. Ici, le chant se fait en occitan. Ici, la transe est universelle. Je découvre donc leur premier EP La Glane, sorti en septembre 2022 et je suis littéralement transportée. Si je soupçonne la majorité du public d’être devant Blur, ça ne m’empêche pas d’être heureuse d’être là. Parmi celles et ceux qui ont choisi l’intimité, l’exploration et le sacré.
Johnnie Carwash
Impossible de rater un concert des Johnnie ! Et si sur le site je suis régulièrement exaspérée par l’attitude du public, le concert du trio lyonnais me réconcilie avec la vie (oupsie). Que de bienveillance, que de bonne humeur. Johnnie Carwash joue sous un soleil bienfaiteur, qui réchauffe les peaux mouillées. Derrière eux, un écran géant qui projette en direct live grâce à Margaux Jaudinaud à la console (musicienne dans Vera Daisies et Ottis Cœur mais aussi illustratrice qui se cache derrière la réalisation de leurs clips et merch’), des extraits de leurs clips et autres créas exclusives.
Les Johnnie entonnent leurs tubes un à un, laissant le public chanter, pogoter et s’étaler dans la boue encore fraîche. Deux nouveaux morceaux complètent le set pour le plus grand plaisir de tous et toutes. Et quand retentit Nothin’ alors j’ai un sourire grand comme l’univers qui se dessine. Parce que c’est un morceau que j’ai écouté et écouté, que j’ai même chroniqué et qu’il me touche tout particulièrement.
Pomme
Crédits photos : Guillaume Kerjean
Je cours et vite, j’arrive à temps pour voir encore un peu Pomme. C’est certes la fin du set mais quel plaisir, quelle douceur. Entourée de ses musiciens et musiciennes, sur une scène recouverte de champignons géants, à l’image de son album consolation, la jeune femme est à son aise. Elle apostrophe le public, lui demandant tantôt de se prendre en photo avec un jetable qu’elle fait tourner, tantôt de faire des doigts d’honneur sur very bad.
Pomme renverse les gens, appose des sourires sur les visages, jeunes ou moins jeunes. La foule est immense, la foule est intense. Et tandis que la fin se rapproche, qu’il est temps de dire au revoir, elle se saisit d’un drapeau breton, dont elle s’entoure, et se dirige vers son auditoire, une dernière fois. Carton plein.
IDLES
Voilà. L’instant que j’attendais avec une vive impatience. L’instant où j’allais revoir IDLES. Deux fois dans le mois me direz-vous, quelle chance. C’est sous la pluie battante mais munie de mon k-way rose irisé que je patiente, une heure durant. Je me retrouve dans ce rôle de groupie, qui a peur de rater, qui a peur d’être mal placée. Alors je patiente, auprès d’un couple d’une quarantaine d’années qui ne connaît pas du tout le groupe anglais.
Finalement, la pluie s’arrête tandis qu’IDLES s’empare de la scène. Et une fois de plus, ils jouent comme s’ils jouaient pour la dernière fois. Les titres se suivent, sans faux pas, dans une parfaite maîtrise et tension. Joe Talbot, comme d’habitude ne tient pas en place et arpente la scène, bandeau vissé sur le crâne. Ses mots me touchent et contiennent la violence de mes pensées.
Dès les premiers morceaux, Mark Bowen, guitariste vêtu ce jour-ci d’une robe longue jaune descend dans la fosse, sous l’œil intrigué des vigiles. Le concert est lancé. A ma droite, trois jeunes. Ils ont une vingtaine d’années et connaissent toutes les paroles par cœur. Je me demande si c’est leur première fois ou la dixième. Je me demande de quoi seront teintés leurs rêves ce soir-là. Les miens seront vifs et forts. Et tandis que Joe dit regretter cette immense avancée de scène qui nous écarte, je repense à la proximité que nous avions, quelques semaines auparavant au Pointu Festival. Tant pis, IDLES ne lâche rien, proposant un set différent mais constitué des incontournables Colossus, Samaritans, Never Fight A Man With A Perm ou encore Car Crash.
On retiendra ses « Salut’, ses « Bisou » et le public qui répète, son déhanché sur A Hymn et I’m Scum, Mother et ses « Fucker », The Beachland Ballroom et ses « Damage ». On retiendra la fougue, l’insolence, le politique et l’inégalé.
Stuffed Foxes
Crédits photos : Guillaume Kerjean
C’est le dernier jour du festival pour moi. Nous sommes dimanche 16 juillet et ça commence à piquer de fatigue mais impossible de rater mes chouchous, les tourangeaux Stuffed Foxes.
Honnêtement, j’ai arrêté de compter les kilomètres parcourus pour les voir, les dates, les lieux. Mais je n’oublie jamais les sensations, l’immense fierté de les avoir interviewé et depuis plus d’un an, de ne jamais les avoir quitté. Stuffed Foxes, c’est un groupe qui s’écoute, qui s’écrit et se crie, qui se vit et se lit. C’est les expérimentions, les explosions sonores, l’ivresse et le fracas. C’est ça, toujours ça, rien que ça. Jusqu’à s’oublier. Alors un regret, comme pour Tramhaus, celui de leur avoir confié le rôle des premiers. Les musiciens méritent une foule de passionné.e.s, une danse exutoire et des pogos bourbeux. Nul doute que les personnes présentes, privilégiées et choyées, aient assisté à un set débridé avec notamment de nouveaux morceaux comme Gamelle ou Merry Xmas mais aussi le sublime Modern Mother and Gods ou Sabotage.
Gwendoline
Crédits photos : Guillaume Kerjean
Gwendoline aussi je les aime. On a en commun notre passion pour le Ricard, les mots désaccordés et un mal-être prononcé. Une grosse fanbase semble aussi s’être déplacée pour voir les deux Rennais accompagnés de leurs deux musiciens. Car s’il est question de dépression, d’une société qui part en vrille ou encore des relations amoureuses désabusées, Gwendoline réunit les esprits joyeux et festifs. Et si tout le monde attend évidemment audit rtt et son rendez-vous au PMU, ils nous régalent aussi de Chevalier Ricard, 1 new 2 pc et surtout Conspire (ouais depuis mon dernier live report j’ai appris le nom du morceau). Ces minutes qui s’installent, pour mon plus grand plaisir et instaurent une certaine solennité. Ces phrases, égrenées, « car ce monde est génial », que tout le monde reprend, en boucle. La fin du set arrive vite et le public en redemande, encore et encore. Les Gwendoline, nous remercie une dernière fois, sincèrement et presque étonnés de voir tous ces gens heureux, pour eux.
Moderat
Crédits photos : Elodie Le Gall
Finalement survient Moderat, telle une sublime conclusion de ces quatre jours de fêtes. J’avais eu l’occasion de voir le trio en live il y a quelques mois à Paris suite à la sortie de MORE D4TA que j’avais chroniqué. C’était dans une grande salle et je me rappelle m’être dit que ce serait si chouette de les voir dans un contexte festivalier. Voilà chose faite. C’était juste et beau et j’étais entourée de personnes éprises et enthousiastes. Mon cœur s’est décroché dès que les premières notes de FAST LAND ont retenti. La foule, immense, a explosé de joie pour A New Error et finalement, Bad Kingdom a fédéré tout le monde. Les uns et les autres chantaient, si fort, si bien le refrain : « This is not what you wanted / Not what you had in mind ». Une communion bienvenue qui restera longtemps en tête.
Crédits photos : Céline Non, Guillaume Kerjean et Elodie Le Gall