Conor O’Brien est de retour ce vendredi 10 mai avec That Golden Time, le nouvel album de Villagers. On a eu la chance de le retrouver lors de son dernier passage en France. On a parlé de la création et de l’histoire de ce sixième album studio intime et lumineux.
La Face B : La première question que je pose toujours est : comment ça va aujourd’hui ?
Villagers: Ha ! Ça va bien merci ! (En français – ndr)
LFB : Je pense qu’il est important de poser cette question.
Villagers : Oui, merci.
LFB : Je me demandais quelle a été l’étincelle qui t’as poussé à créer That Golden Time ?
Villagers : Oh waw, c’est intéressant ! Quelle a été l’étincelle ? C’est probablement l’une des chansons… Voyons voir…
Les chansons ont tellement d’origines différentes qu’il est difficile de les cerner… Il y avait le titre That Golden Time qui était principalement, je pense, un poème. Ce n’était que des mots pendant longtemps, et je n’arrivais pas à leur trouver une place dans la musique. Je suppose que dans le processus d’essayer de trouver un chez soi pour les mots, c’était un peu le début de cette chanson en particulier, et peut-être l’un des premiers morceaux de l’album. Cela aurait pu être ça.
Mais en ce qui concerne les thèmes de l’album, je pense que c’est juste l’étincelle qui existe dans ce monde fou et insensé dans lequel nous nous trouvons.
LFB : Oui, je pense qu’il est juste de dire que c’est vraiment un album intérieur…
Villagers : Oui, c’est vrai. Je pense que c’est assez… Je suis naturellement introverti, je pense que je suis comme ça. Je me suis vraiment penché sur le sujet cette fois-ci. J’ai vraiment commencé… parce que je pense que la plupart du temps, de nos jours, c’est très… je ne sais pas, la réflexion sur soi n’est pas ce que j’associerais à l’ère d’internet. Je pense qu’il y a un vrai manque de réflexion personnelle. Je pense que la musique et l’art sont un bon endroit pour exprimer tout ça.
LFB : Je pense qu’à notre époque, et ce n’est pas nécessairement dans l’album, mais maintenant les gens se regardent toujours dans un miroir, mais pas vraiment eux-mêmes. Et je pense que c’est ce que tu fais avec l’album. Pour moi, c’est ton album le plus personnel, depuis la chanson Courage. Je pense que cette chanson est comme un point où l’on commence à creuser en soi pour moi.
Villagers : Cool ! Oui, non, c’est vraiment une sorte de… J’ai vraiment enlevé le filtre. Oui, c’est assez vulnérable j’imagine.
LFB : L’album précédent était plus axé sur les sentiments et celui-ci est plus axé sur des histoires…
Villagers : C’est beaucoup d’idées sur l’identité et de choses qui sont un peu manipulées à l’ère d’internet, je suppose. Je les attrape, je les retiens et je les ramène dans les chansons, je les sauve des mâchoires de ce paysage infernal dans lequel nous sommes tous les jours avec nos téléphones.
LFB : L’album s’appelle This Golden Time, mais la première chanson s’intitule Truly Alone… Cela semble refléter la façon dont tu as créé cet album…
Villagers : Oui, j’ai toujours été obsédé par l’idée de fermer la porte et de travailler seul. J’adore ça. J’aime me perdre dans mon travail et être à mon bureau, je trouve que c’est un bon moyen de ralentir et de se concentrer. C’est juste mon type de personnalité aussi. Mais j’ai remarqué que beaucoup de gens ne sont pas très doués pour être seuls, c’est un véritable art. Je trouve que ta relation avec toi-même est vraiment importante et je pense qu’elle est assez compromise la plupart du temps.
LFB : C’est marrant parce que pour beaucoup de gens, Villagers est un groupe, mais en fait, c’est toi et toi seul…
Villagers : Oui, mais quand tu vois le groupe en live, c’est vraiment comme quand on répète… Je donne beaucoup de liberté aux gars pour qu’ils ressentent bien les chansons. J’aime l’idée que c’est moi, mais quand on monte sur scène, on a l’impression de voir de grands musiciens. C’est un peu comme ça que j’aime le voir.
LFB : Tu es comme un metteur en scène.
Villagers : Oui, comme un réalisateur…
LFB : … sans être un dictateur (rires)
Tu as enregistré cet album tout seul. À quel moment as-tu réalisé qu’il était temps d’ouvrir la musique à d’autres personnes ? Tu sais, pour produire… parce que tu as des invités sur l’album…
Villagers : Ce n’était que vers la fin de l’album. Jusqu’aux deux ou trois derniers mois, toutes les cordes, tous les violons et tous ces trucs qui n’étaient que des claviers vraiment au début… et puis c’est devenu clair qu’il était temps de mettre les vrais trucs sur l’album. Je dirais que c’est seulement au cours du dernier quart du processus de création de l’album.
LFB : Quand j’écoute l’album, je sens que le piano et la guitare sont les piliers de l’album. C’est comme l’ossature de l’album et je trouve que tout vient de ce côté musicalement. Et tu as ajoutes la post-production pour créer le son de That Golden Time.
Villagers : Oui, je suis d’accord. Je pense qu’il y a plus de noyau dans cet album qu’il n’y en avait. L’album précédent était presque comme un truc théâtral. Il y avait beaucoup de perspectives différentes, alors que celui-ci a un noyau central.
LFB : Et le fait d’être seul, de regarder au fond de soi, ne te rend pas fou ? Es-tu prêt à laisser That Golden Time vivre sans toi ?
Villagers : Oui. Ce à quoi je commence à peine à m’habituer ! Oui, c’est très excitant. La deuxième chanson est sortie hier.
LFB : C’est l’un de mes morceaux préférés de l’album.
Villagers : Ah, c’est cool ! Je l’aime beaucoup. Mais c’est tellement excitant. C’est pour ça que je fais ça. C’est tellement excitant qu’elle soit sortie dans le monde. C’est vraiment passionnant.
LFB : Tu l’as dit tout à l’heure, c’est comme s’il y avait quelque chose de très vulnérable et d’humain dans cet album et j’ai l’impression que tu es revenu à un type d’écriture folk et country. C’est un genre qui raconte des histoires et qui ne parle pas de sentiments.
Villagers : C’est plus une sorte de narration ?
C’est drôle parce que je ne pense pas vraiment à moi. Je ne m’assois pas et ne me dis pas que je vais faire ceci ou cela. Je travaille, je travaille et je travaille, puis ça sort, mais j’ai vraiment eu une énergie différente avec cet album. Avec le dernier album, je pensais vraiment à une explosion, à un groupe complet, à une symphonie… Je voulais juste une explosion d’énergie. Mais celui-ci était plus basé sur… Je suppose qu’il s’agissait plus de suivre une idée jusqu’à sa conclusion naturelle dans un carnet. Je travaille vraiment sur les mots jusqu’à ce qu’ils ne puissent plus être changés. Et je deviens assez obsessionnel à ce sujet. C’est donc comme-ça pour celui-ci.
LFB : On peut voir ça comme un voyage, chaque album est une réaction à ce que l’on vit en ce moment. Je pense que l’album précédent était comme une explosion parce que nous avions le Covid et d’autres choses comme ça. Maintenant, c’est l’inverse, tu vois tellement de gens que tu as besoin de rentrer en toi-même (rires).
Villagers : Je pense que c’est peut-être le cas.
LFB : Je pense qu’il y a une exception dans l’album, c’est Keepsake. J’ai été très impressionné par cette chanson parce qu’elle est comme un poème, à la fois poétique et hypnotique. C’est comme si tu nous laissais entrer dans ton esprit et tourner en rond. Je pense que c’est vraiment le point de rupture de l’album. Elle est très différente des autres chansons.
Villagers : J’ai su très tôt qu’elle devait être au centre de l’album. Il fallait donc que ce soit une pause dans les paroles ou quelque chose comme ça. Et oui, les paroles parlent de résilience. Comme cette idée de dire qu’on n’a pas peur, mais qu’on ne peut plus se retenir. Trouver la force à l’intérieur de soi, ce qui, je suppose, vient de la lecture des Stoïciens et de choses comme Marc Aurèle, puis de choses plus récentes comme Schopenhauer et Nietzsche et toutes ces sortes de textes anciens, puis des effets du 19ème siècle qui parlaient tous de ne pas s’attacher aux vagues de la société, de s’assurer que l’on a gardé son indépendance, et de savoir que l’on a toute la force à l’intérieur de soi pour surmonter n’importe quoi, ne pas penser que quelqu’un peut vous réparer, juste savoir que vous n’êtes pas réparable, que vous êtes une créature forte et puissante (rires).
Et je pense que Keepsake a eu certaines des paroles qui en sont issues. Mais ce n’est que très court, évidemment. Oui, c’est un peu court, mais j’avais envie d’un univers sonique dans lequel je resterais blotti. Mais c’est très différent. (rires).
LFB : C’est intéressant parce que dans l’album, je pense que la composition et la musique répondent en grande partie aux paroles. Et c’est le cas dans cette chanson, parce que tu répètes les mêmes paroles encore et encore.
Villagers : C’est comme un mantra.
Oui, je suis content que tu aimes. C’est drôle. Je pense que l’album peut diviser les gens parce qu’il sonne très différemment.
LFB : Oui, c’est vraiment cool. C’est ce que nous aimons dans la musique. Ce que j’aime dans ta musique avec Villagers, c’est que ce n’est pas facile, mais il faut donner sa chance à la musique. Comme l’amour, ce n’est pas obligatoire.
Villagers : Si tu lui donnes du temps…
LFB : Oui, encore une fois, c’est une réponse à notre époque, où tout passe vite.
À une époque où tout passe vite, je pense que ta musique a grandi avec le temps et que les gens ont grandi avec elle. Je t’écoute depuis ton premier album et quand je regarde les chansons, je vois le chemin parcouru. Je vois le cheminement de la musique et de moi-même. C’est pour ça que j’attends toujours tes nouveaux albums. (Rires)
Villagers : Ah, cool ! C’est vraiment cool à entendre.
LFB : Tu parles de résilience, je pense qu’il y a eu un autre tourment sur cet album, mais aussi beaucoup de résilience et un rejet des émotions binaires dans ta musique. Et le besoin de continuer à creuser et à trouver de nouvelles voies et une nouvelle perspective sur soi-même.
Villagers : Oui, je pense qu’assez souvent ces jours-ci, beaucoup de gens se font entendre sur Internet et d’autres choses, et souvent les gens qui s’autoproclament penseurs progressistes ou qui sont contre la pensée binaire… Je pense qu’ils sont généralement les penseurs les plus binaires à l’heure actuelle.
Mais je pense qu’il y a un nouveau mouvement que l’internet a apporté dans ce genre de pensée religieuse laïque, et je pense que c’est ennuyeux et dangereux.
LFB : Et ce n’est pas parce que tu pries à haute voix que tu es dans la vérité, ou sincère.
Villagers : Oui, je pense qu’il y a une pression sur les gens pour qu’ils aient des réponses. Donc ils adoptent des positions extrêmes de tous les côtés.
La musique, c’est là où j’essaie d’aller et oui, de trouver la solution dans le cloud, dans la zone grise au milieu, c’est là où tout le monde vit.
LFB : C’est toujours émouvant. On peut chanter quelque chose et, deux semaines plus tard penser différemment.
Villagers : Oui. Tu vas arrêter de grandir si tu ressens le besoin de t’étiqueter tout le temps.
J’ai donc pris la décision personnelle de prendre du recul (rires) il y a quelques années, de lire plus de livres, de toucher de l’herbe et, tu sais…
LFB : Je lis beaucoup de livres et j’ai décidé cette année de regarder plus de films, mais des films que j’ai vus il y a des années, et de les revoir et de redécouvrir certaines choses. Et c’est drôle parce que dans une interview précédente, tu nous avais dit : « Je n’accepterai jamais la version actuelle de moi-même. Je fais de l’art, donc je suis toujours en train d’apprendre » et je pense que c’est vraiment vrai dans cette conversation, c’est toujours vrai.
Villagers : C’était moi ? (rires) Je me sens très intelligent.
LFB : Et c’est vrai, tu sais ?
Villagers : Je ne suis pas du tout d’accord (rires).
LFB : Il y a des recherches scientifiques qui disent qu’après 27 ans on arrête d’apprendre et de découvrir et heureusement, ce n’est pas vrai.
Villagers : Oui, tout à fait. Je pense qu’il y a encore beaucoup de choses intéressantes à faire.
J’ai l’impression de ne m’être réveillé que ces dernières années, ce qui est amusant. Et j’ai arrêté de boire cette année, ce qui a tout changé.
LFB : J’ai arrêté de boire il y a trois ans.
Villagers : Bravo !
C’est plutôt bien. Je me sens bien. Je n’ai jamais pensé que j’aimerais ça. Mais j’aime vraiment les matins, j’aime me souvenir des choses. J’ai l’impression que je suis en train de me réveiller avec ça aussi. Parce qu’en tournées je ne faisais qu’anesthésier les choses. Je n’en suis qu’à trois mois !
Donc juste après covid ?
LFB : Je me suis arrêté entre les covid et j’ai repris très fort juste après (rires). Et juste après la fin du Covid je me suis arrêté. Je suis en quelque sorte heureux sans alcool dans ma vie. C’est drôle parce qu’on change de point de vue sur les gens sur la vie, sur beaucoup de choses sans alcool.
Villagers : Oui, on se rend compte de ce qu’on obtenait de certaines personnes. C’est drôle.
LFB : Et les matins sont plus faciles. Comment as-tu abordé cet album d’un point de vue musical ? Parce que je pense qu’il y a quelque chose de très chaleureux au cœur de l’album. Et on peut sentir le côté humain derrière le côté technique.
Villagers : Comment l’ai-je abordé musicalement ? Eh bien, j’ai un home studio depuis que j’ai 12 ans. J’enregistrais sur des cassettes Tascam et… à chaque fois que j’enregistre, je me base sur ce que j’ai appris au cours des 25 dernières années, 28 ans en fait. Je pense que certaines des chansons, comme First Responder, ont été un tournant où j’ai senti que j’avais vraiment capturé quelque chose que j’essayais de capturer depuis longtemps, c’est-à-dire une chanson dynamique. Mais une chanson dynamique qui ne change pas trop souvent, comme si elle coulait toujours comme une rivière, qui grandissait graduellement. Mais qui parvient toujours à être dynamique. Tu vois ce que je veux dire ? Je voulais faire ces deux choses. Et je pense qu’avec First Responder, j’ai en quelque sorte capturé cela avec le son du Roland. Oh non, c’était un Wurlitzer en fait. Et puis, avec la guitare acoustique, etc… J’ai réalisé que j’avais besoin de faire un album avec une vraie guitare acoustique jouée par un être humain.
LFB : Oui, c’est ce que j’aime parce que je pense que la fragilité est partout. Et les surprises aussi, parce qu’il y a des choses inattendues dans l’album, comme dans Behind That Curtain, tu sais, la fin de la chanson… et le début quand tu laisses la vie entrer dans la chanson, c’est comme si tu étais dans une fête ou quelque chose comme ça et que la musique entrait dans ta tête. J’aime beaucoup No Drama aussi. Il y a une sorte de chaos. Chaque chanson a une identité.
Villagers : Oui, j’avais l’impression de créer un petit opéra ou quelque chose comme ça. Comme une pièce de théâtre. Parce qu’il y a aussi quelques… quelques petites références shakespeariennes entre autres, et il y a juste quelques éléments théâtraux que j’aimais bien.
LFB : C’est drôle, parce que quand je lis les titres des chansons, comme Truly Alone, No Drama… il y a quelque chose comme une façon d’être bien avec soi-même, je pense.
Villagers : Oui, je pense que j’y réfléchis beaucoup, parce je pense qu’on nous a appris à croire que nous ne sommes pas assez. Il y a beaucoup de voix malveillantes sur Internet qui essaient de nous vendre des choses et de nous dire que nous ne sommes pas assez bien. On a besoin de ce truc en plus pour se changer et faire ceci, et je pense que c’est devenu très extrême à ce stade. Et je n’arrêtais pas d’y penser.
Donc beaucoup de mots ont commencé à parler du fait que tu es… l’art est littéralement la nature qui parle comme la nature, tu es la nature. Comme tu es. Il n’y a rien d’autre que cela. C’est en fait assez incroyable d’être comme ça. Tu n’es rien d’autre que toi-même, ton corps physique et tu es ce que tu veux penser de l’âme ou autre, tu n’as pas besoin de… ouais, bref…
LFB : C’est intéressant parce que c’est comme un sous-titre de l’album. Tu es bien avec toi-même et tu es bien dans ta peau. Il n’y a rien d’autre à dire.
Villagers : Oui (rires !) Et faire de la bonne musique sur ce sujet !
LFB : Penses-tu qu’il faille du temps pour arriver à cette conclusion ?
Villagers : Oui ! C’est parce qu’on est plus vieux !
LFB : Oui, parce que nous sommes plutôt vieux et sages (rires). Comment comptes-tu présenter cet album sur scène ? Comment choisis-tu les chansons ? Tu as beaucoup d’albums. Tu as des tubes qui te suivent à travers le temps. Comment crées-tu ta setlist pour les tournées ?
Villagers : Je suis encore en train d’y réfléchir parce que nous ne faisons nos premières répétitions que la semaine prochaine. Hier soir, j’ai pris des notes et nous allons certainement répéter l’intégralité du nouvel album. Nous allons répéter l’ensemble et voir si tout s’intègre dans le set. Mais au-delà de ça, je pense que je vais essayer de me plonger dans toutes les chansons que nous n’avons pas beaucoup jouées au fil des années. Je pensais à quelques morceaux comme The Meaning of the Ritual, qui était sur le premier album, et peut-être des morceaux et des choses que nous n’avons pas vraiment approchés parce que je n’ai pas ressenti de connexion avec eux pendant un moment, ou je ne l’ai pas fait. Je n’arrivais rien à en tirer, je suppose.
Je vais essayer de prendre l’énergie de ce nouvel album et de continuer avec ces vieilles chansons pour voir si elles changent un peu.
LFB : J’ai vraiment hâte de te voir à La Maroquinerie.
Villagers : Oh cool ! J’en suis ravi ! Oui, nous aurons un groupe de 5 musiciens, dont moi-même. J’aurai donc un clarinettiste, un claviériste et un bassiste.
LFB : J’ai encore deux questions. Je suis un peu bizarre mais… cette année, nous allons célébrer votre 15ème anniversaire avec Domino Records. Qu’est-ce que cette relation a été pour toi dans ta musique et dans ta vie ?
Villagers : Quelle est ma relation avec Domino ? Qu’est-ce que Domino m’a apporté ? Je pense que beaucoup de musiciens vivent une expérience que je n’ai pas vécue, à savoir qu’ils apportent leur musique à un label et qu’il y a ensuite une sorte de réunion de comité pour savoir comment la changer ou ce qu’il faut supprimer, et je n’ai jamais vécu ça.
Ils me laissent pleinement travailler sur mes chansons. Et puis je leur livre un album et ils l’aiment à chaque fois et ils ne changent rien. Peut-être qu’il y a eu une fois, je pense que oui, Lawrence, il a réussi à me faire prendre le… il y a une chanson sur l’album The Art of Pretending to Swim. Il y a une chanson à la fin de l’album qui s’appelle Ada. A l’origine, elle durait 14 ou 15 minutes et il m’a convaincu d’utiliser la version de cinq minutes parce qu’il pensait que cela signifiait qu’ils allaient devoir faire un double vinyle et c’était le seul changement, la seule fois où j’ai vraiment été changé d’un point de vue créatif, par le label. Ils me soutiennent beaucoup. Ce sont des fans de musique.
Et donc, pour moi, c’est juste d’avoir cette infrastructure parce que j’ai l’impression que mes sons, aussi introvertis que je sois en tant qu’être humain, quand il s’agit de ma musique, j’y crois vraiment. Donc je pense vraiment que mes chansons méritent l’infrastructure que Domino me donne, je ne voudrais jamais être complètement seul à essayer de mettre ma musique sur Bandcamp et tout ça personnellement. C’est génial, mais je veux personnellement que plus de gens la diffusent. C’est donc un bon soutien.
LFB : Nous devons donc les remercier pour la musique de Villagers parce que…
Villagers : Oui, ils la sortent !
LFB : Et la dernière question : as-tu des préférences culturelles ? La musique, les livres…
Villagers: J’ai revu tous les vieux films de Sergio Leone avec les partitions d’Ennio Morricone, comme Il était une fois en Amérique. C’est incroyable !
Et je suis en train de lire… J’en suis à mon deuxième livre de Claire Keegan. Je ne sais pas si tu connais Claire Keegan. C’est une auteure irlandaise. C’est vraiment bien.
J’ai terminé le premier libre il y a environ un mois et je viens d’en commencer un autre. Dès que j’ai terminé le premier, qui s’appelle Small Things Like These, et je suis allé sur Internet et Cillian Murphyvient d’en faire un film ! Donc maintenant, je vais le regarder. Mais c’est un livre brillant.
Et la musique, il y a tellement de musique que je ne connais pas ! Il y a un groupe à Dublin qui s’appelle Search Results, ils ont tous 22/23 ans et ils sont géniaux. Ils sont vraiment bons. Une sorte de postpunk psychédélique.
LFB : Merci beaucoup.
Villagers : Merci à toi.
Crédit Photos : Inès Ziouane
ENGLISH VERSION
La Face B: The first question I always ask is, how are you today?
Conor O’Brien: Ha! Ça va bien merci !
LFB: I think it is an important thing to ask.
Villagers: Yes, thank you.
LFB: I was wondering what was the spark that led you to create That Golden Time?
Villagers: Oh waw, that’s interesting! What was the spark? I mean it was probably one of the songs…Let me see…
I mean, the songs have so many different origins that it’s hard to pinpoint… There was the title track That Golden Time was mainly, I guess, a poem. That was just words for a long time, and I couldn’t find a musical home for it. So I guess in the process of trying to find words a home, that was kind of the beginnings of that particular song, and maybe one of the earlier tunes on the record, you know. So that could could have been it.
But in terms of the themes of the album, I guess it’s just the spark is just existing in this crazy insane world we find ourselves in.
LFB: Yeah I think it is fait to say it is really an inner album, you know?
Villagers: Yeah, I think it is. I think it’s quite… I mean, I’m kind of quite naturally an introvert I guess myself anyway. So I really leaned into it this time. You know, I really started… because I think a lot of the time these days it’s very… I don’t know, self reflection isn’t what I would associate with the internet age, you know. I think there’s a real lack of self reflection, I guess. I think music and art is a good place to put all that you know.
LFB: I think in these times, not necessary on the album, but now people always look at themselves in a mirror but not really to themselves. And I think you do that with the album. For me it’s like your most personal album, since the song Courage. I think this song is like a point when you start to dig into yourself for me.
Villagers: Cool! Yeah, no, it’s definitely kind of… I definitely took the filter off quite a lot. Yeah. It’s quite vulnerable I guess.
LFB: The previous album was more about feelings and with this one it’s more stories…
Villagers: It is a lot of… I guess ideas of identity and things that are sort of being manipulated a bit in the internet age, I guess. I guess some sort of… I grab them holding them and taking them back into the into the songs you know, saving them from the jaws of you know, this hellish landscape we seem to be in everyday in our phones.
LFB: The album is called This Golden Time but the first song is called Truly Alone… it seems to reflect the way you created this album…
Villagers: Yeah, I’ve always been very obsessed with closing the door and just working on my own. I really love it. I love getting lost in the work and being at my desk and I find it a good way to slow down and focus
I guess that’s just my personality type as well. But I think a lot of people love… I’ve noticed actually that a lot of people aren’t very good at being alone, you know, like, there’s a real art to it. I think it’s important and I think your relationship with yourself is really important and quite compromised a lot of the time as well, so.
LFB: It’s funny because for a lot of people Villagers is a band, but really it’s you only you, you know.
Villagers: Yeah, but when you see it live it’s really about like as in when we rehearse… I really I give the guys a lot of freedom to feel the songs right. So I like the idea that it’s me but then when we go on stage you’re kind of watching really great musicians, you know. That’s kind of the way I like to think about it anyway.
LFB: You’re like a director.
Villagers: Yeah, like a director…
LFB:… and not a dictator (laughs)
You’ve recorded this album all by yourself. A what point did you realise that the time had come to open the music to other people? You know, to produce… because you have some guests on the album…
Villagers: It was only towards the very end really.
Up until the last maybe two or three months, all of the strings and all of the violins and all that stuff that was all just keyboards and things… and then it just became clear that it was ready to put the real stuff on you know.
So I’d say only in the final quarter of album making process.
LFB: You can feel, like, when I listen to the album, I can hear that the bond of the album are the piano and the guitar. It’s like the back bones of the album and everything from this side, musically I think. And you add post production to create the sound That Golden Time for me.
Villagers: Yeah, I agree. I think there’s more of a core to this album than there was. The previous album was… like it was almost like a theatrical thing you know? So there was a lot of different perspectives, whereas this one has gotten like a central core to it I think.
LFB: And is being all alone, you know, looking very deep into yourself, not driving you crazy? Are you ready to let That Golden Time live without you?
Villagers: Yes. Which I’m only getting used to! Yeah, it’s kind of it’s very exciting. I mean, the second song came out yesterday.
LFB: It’s one of my favourite one from the album.
Villagers: Ah cool man! Now, I really enjoy that one. But it’s just so thrilling. This is what I do it for. It’s so exciting to have in the world. It’s really exciting.
LFB: You said that earlier when I read it, it’s like there is something very vulnerable and human about this album and I get the impression that you’ve gone back to like, a folk and country type of writing you know. Like, which has stories and not about feelings you know?
Villagers: Like more of narrative sort of?
It’s funny for me because I don’t really think about me. I don’t sit down and say I’m going to do this or whatever. I just work and work and work and then it comes out but I definitely had a different energy with this one. I wasn’t thinking… With the last record, I was really thinking about an explosion, full band, symphony… You know, I just wanted a blast of energy kind of thing. But um, this one was more based on… I guess it was more about following an idea to its natural conclusion in a notebook. You know, really, really working on the words until they just can’t be changed. And I’m getting quite obsessive about that. So that’s this one.
LFB: You can see like a journey, you know, like every album is a reaction to what you’re living in the now. I think the previous album is like an explosion because we had covid and things like that. Now it’s the reverse, you know, you see so many people that you need to go into yourself you know (laughs).
Villagers: I think it might be Yeah.
LFB: I think there is one exception in the album and that’s Keepsake. I was really impressed with this song because it’s like a poem and it’s both poetic and hypnotic. Like as if you let us enter into your mind and go round and round. I feel is really like a breaking point on the album. It’s very different from the other songs.
Villagers: I knew from a very early stage that it needed to be right at the centre of the album. So it needed to be like a break from all the words or something you know.
And yeah, the words are just kind of about resilience really. Like this idea of you say you’re not afraid, but it can’t hold back anymore.
Finding strength from kind of within and stuff, which I guess comes from reading the Stoics and things like Marcus Aurelius and then the latest stuff like Schopenhauer and Nietzsche and all these kind of ancient texts and then 19th century effects that were all just about, like not attaching yourself to the waves of society, making sure that you’ve maintained and independence, and knowing that you have all of the strength inside of you to overcome anything you know, not not thinking that anyone can fix you just knowing that you aren’t fixable, you are strong, powerful creature (laughs)
And I think Keepsake had some of the words came out of that. But it’s only a very short, obviously. Yeah, a few words, but it just felt like I wanted a sonic universe to stay couched in. But it’s very different. Yeah.
LFB: It’s interesting because in the album I think a lot of the composition and music respond to the lyrics. And it is the case in this song because you’re repeating again and again and again.
Villagers: It’s like a mantra.
Yeah, I’m glad you like that. It’s a funny one, I think. I think it can divide people as it sounds quite drastically different.
LFB: Yes, it’s really cool. It’s what we like about music you know. What I love about your music with Villagers is like it’s not easy, but you should give the chance to the music. Like love, you know it’s not compulsory.
Villagers: If you give it time, which is…
LFB: Yeah, once again like a response of our
era, where everything passes fast, I think your music has grown in time and people have grown with the music. I’ve listened to you since your first album and when I look back to the songs I see the journey. I see the journey of the music and of myself. That’s why I keep reaching for your new album. (Laughs)
Villagers: Ah cool! That’s really cool to hear. Nice one.
LFB: You talk about resilience I think there was another torment on this album and also a lot of resilience and i think a rejection of binary emotions in your music. And the need to keep digging and finding new ways and a new perspective into yourself.
Villagers: Yeah, I think those things are… quite often these days, a lot of people are very vocal on the internet and stuff quite often the people who are self proclaimed progressive thinkers or they’re against binary thinking… I think they’re usually the most binary thinkers at the moment.
But I think there’s a new movement that the internet has brought into this kind of secular religious thinking, you know, and I just think it’s boring and dangerous.
LFB: And it’s not because you’re praying out loud that you are in the truth, you know or sincere.
Villagers: Yeah, I mean, I think there’s pressure on people to have answers. So they go to the extreme positions on all sides, you know.
Music is where I try and go into and yes, just figure it all out in the cloud in the cloudy grey area in the middle, you know, which is where everyone lives, you know.
LFB: It’s always moving. You can sing something and like two weeks later think differently.
Villagers: Yeah. You’re gonna stop growing if you feel the need to label yourself all the time.
So I sort of made a personal decision to just step back (laughs) a few years ago and just read more books again and go touch grass and you know…
LFB: You know, I read a lot of books and I made the decision for this year to go watch more movies you know, but old movies I’ve seen years ago and yeah, rewatch and rediscover some things. And it’s funny because in a previous interview, you told us “I will never accept the current version of myself. I make art so I am always learning” and I think it’s really true in this conversation, it’s still true.
Villagers: That was me? (laughs)
I feel very smart then.
LFB: And it’s true, you know?
Villagers: I totally disagree (laughs)
LFB: You have some scientific research saying after 27, you stop learning and you stop discovering and thankfully it’s not true.
Villagers: Yeah, totally. I think there’s a lot more interesting stuff to happen in there.
I sort of feel like I’ve only woken up a little bit in the last few years really, which is fun. And I stopped drinking this year so that changed everything.
LFB: I stopped drinking three years ago.
Villagers: Well done!
It’s pretty good. I feel good. I never thought I would enjoy it. But I really, I enjoy mornings and enjoy being, remembering things. I feel like I’m just waking up with that as well. Because touring was really just numbing things quite a lot, you know. I’m only three months in!
Villagers: So just after COVID?
LFB: I stopped between COVID and I restarted very hard just after. And like just after the real end of COVID. I’m kind of happy without alcohol in my life. It’s funny because you change your perspective about people, about life, about a lot of things without alcohol.
Villagers: Yeah you realise what you were getting out of certain people. It’s a funny one.
LFB: And mornings are easier.
How did you approach this album musically? Because I think there was like, something very warm in the core of the album. And you can feel the human sides behind the technical side.
Villagers: How did I approach it musically? Well, I guess it’s, I mean, I’ve had a home studio since I was 12. I was recording on Tascam tape recordings and… so every time I record I’m kind of building on what I’ve learned for the last 25 years or whatever, you know, 28 years really.
So this was just more like, continuing that and kind of… I think a couple of the tunes like there’s a song First Responder, which was like a turning point where I felt like I really captured something that I’d been really trying to capture for a long time, which was, like, a dynamic song.
But a dynamic song that didn’t change too often, like it still flows along like a river like it just grows gradually. But it still manages to be dynamic. Do you know what I mean? I wanted to do those two things. And I think with First Responder I kind of captured that on with the Roland kind of sound. Oh no it was a Wurlitzer actually. And then with the acoustic guitar and so on… And then I realised I sort of needed to mainly do an album of a real acoustic and just played by human being.
LFB: Yeah, this is what I love because I think fragility is everywhere, you know? And surprises too, because there’s some unexpected things in the album like in Behind That Curtain, you know, the end of the song… and the beginning when you let life enter the song so like it’s like you’re in a party or something and the music goes inside your head. I really love No Drama too. There’s a sort of chaos. Every song has an identity.
Villagers: Yeah, it feels almost like… I felt like I was creating a little opera or something. It felt like a theatre piece. You know? Because there are also a few… a couple of little Shakespearean references and things and there’s just a few theatrical things which I quite liked, you know.
LFB: It’s funny, because when I read the titles of the songs, like Truly Alone, No Drama… there’s something like a way to being okay with yourself, I think.
Villagers: Yeah, I think I’m thinking about it a lot, because I know there’s a wave of… I think we’ve been taught to believe that we’re not enough, you know. Like, there’s a lot of malevolent voices on the internet or whatever that are trying to sell things to us and tell us that we’re not good enough. And we’re sort of, we need this extra thing to change ourselves and to do this, and I think it’s really gone quite extreme at this stage. And I just, I couldn’t stop thinking about it.
So a lot of the words started being about the fact that you are, you know, like art is literally nature’s talking like nature, you are nature. Like you are. There’s nothing beyond that. It’s actually quite incredible how you are. You are nothing else but yourself, your physical body and you’re whatever you want to think of the soul or whatever, you do not need… yeah, anyway…
LFB: It’s interesting because it’s like a subtitle to the album. You’re okay with yourself and you’re okay being yourself. So there’s nothing more to say.
Villagers: Yeah (laughs!) Just make some nice music about it!
LFB: Do you think it takes time to get to this conclusion?
Villagers: I do yeah! It’s because we’re older!
LFB: Yeah, because we’re a pretty old and wise (laughs)
How do you plan to bring the this album on stage? How do you chose the songs because now you have a lot of albums. You have some like, hits, you know, that follow you through time. How do you create your setlist for touring?
Villagers: I mean, I’m still figuring that out because we’re we’re only doing our first rehearsals next week. So last night, I was taking some notes and we’re definitely gonna rehearse the full new album. We’re gonna rehearse the whole thing and see if it all sticks in the in the show. But beyond that, I think I’m gonna try and dive into all the songs which we haven’t played as much over the years, you know. So I was thinking of a couple of tunes like The Meaning of the Ritual, which was from the first album and maybe pieces and things that we haven’t really gotten near because I didn’t feel a connection to it for a while, or I didn’t. I couldn’t get anything else out of them maybe I suppose.
I’m going to try and take the energy of this new album, and sort of continue with into those old songs and see if they’ll change a bit.
LFB: I’m really looking forward to seeing you at La Maroquinerie.
Villagers: Oh cool!! I’m glad! Yeah, we’re gonna have a 5 piece band, including myself. So I’ll have a clarinet player and a keyboard, and bass player.
LFB: I have two more questions. I am like, maybe a little bit weird but… this year we’ll be celebrating your 15th anniversary with Domino Records. What has this relationship been for you in your music and in your life?
Villagers: What is my relationship with Domino? What did Domino brought me? Just… i’d never experienced… I think a lot of musicians experience something which I have not which which is they bring their music to label and then there’s like a committee meeting about how to change it or what needs to go and I’ve never experienced that.
I just… they leave me alone to work on my stuff. And then I deliver them an album and they like it every time and they don’t change anything. Maybe there was once I think yeah, Lawrence, he successfully got me to take the… there’s a song on The Art of Pretending to Swim that album. There’s a song at the end called Ada. And originally that was 14 minutes long, 15 minutes long and he convinced me to just use this five minute version because he just I think it meant they’d have to make a double vinyl and just because there was so that was the only change that was the only time I’d ever really been creatively changed, you know, by the label so. They’re just very supportive. They’re music fans, you know.
And so, for me, it’s just having that infrastructure because I feel like my sounds as introverted as I am as a human, when it comes to my music, I actually really believe in it. So I really think my songs deserve the infrastructure that Domino gives me, you know, I would never want to be fully on my own trying to put my music out on Bandcamp and stuff personally. I mean, that’s great, but I personally want more people getting it out there. And so it’s just meant good support, you know.
LFB: So we have to thank them new for Villagers’ music because…
Villagers: Yeah, they’re getting it out there!
LFB: And the final question do you have any cultural favourites? Music, books…
Villagers: Yeah. I mean, I’ve been revisiting all the old Sergio Leone films like with the Ennio Morricone’s scores, like Once Upon a Time in America. Amazing!
And I’m reading… I’m on my second book by Claire Keegan. I don’t know if you know Claire Keegan? She’s an Irish author. Really good.
I finished the first one by her about a month ago and I’ve just started a new one. As soon as I finished the first one that’s called Small Things Like These and then I went on the internet and so like Cillian Murphy has just done a film of it! So now I’m gonna watch it. Yeah, I’m gonna hopefully see that film. But it’s a brilliant book.
And music, so much music I don’t know! There’s a band in Dublin called Search Results, and they’re all like 22/23 and they’re brilliant. They’re really good. Very kind of psychedelic postpunk.
LFB: Thanks a lot.
Villagers: Yeah. Nice one. Appreciate it.