Bons baisers du Québec #5 : Vers l’infini et l’au delà avec Double Date With Death

Chez La Face B, la musique se vit sans genre ni frontière. Malheureusement, le monde est différent de nous. On a donc décidé de casser tout ça pour mettre en avant des artistes québécois qu’on adore. Entre jeunes pousses et artistes confirmés, Bons baisers du Québec, c’est le rendez-vous voyage chez nos cousins du Canada. Aujourd’hui, on se laisse entrainer vers l’au delà avec le post punk rageur de Double Date With Death.

crédit : Elzo Durt

Une forêt. Noire,dense et presque terrifiante. Les explorateurs s’engouffre à la recherche d’une relique, d’un château fantasmagorique qui leur apportera sans doute gloire et richesse. Alors qu’ils s’enfoncent de plus en plus vers l’inconnu et les arbres qui semblent inexorablement se rapprocher d’eux, les voilà face à ce chateau-casque, celui qui leur ouvrira les portes d’un univers onirique et parallèle : L’Au Delà. Une règle édicte qu’il ne faut jamais juger une œuvre à sa couverture. Nous n’avons jamais suivi cette règle car finalement, une couverture, une pochette en dit parfois beaucoup sur une oeuvre. Celle du nouvel album de Double Date With Death est une porte ouverte à notre imagination. Réalisée par le belge Elzo Durt, elle pousse au fantasme et intrigue autant qu’elle attire. Ça tombe bien, la beauté graphique qui nous attire vers L’Au Delà est à l’image des huit titres qui composent le second album des montréalais. Un voyage dans le rock, guitare en avant mais pas que.

Il y a quatre ans, Double Date With Death terminait son premier album Headspace avec Magicien, titre aux accents pop bien sentis et unique (si on ne se trompe pas) titre en français de l’album. Morceau rêveur, il semble avec L’Au Delà que le magicien se soit réveillé. Le morceau semble être un pont parfait entre le premier et le second album. La chanson est un pont évident, comme un arc en ciel magique qui nous emmènerait d’un monde chimérique à un autre. Les amplis explosent toujours, le groupe garde cette fougue qui fait que tout semble prêt à exploser à tout moment, porté par une énergie aussi dévastatrice que réjouissante, mais met désormais cette folie rythmique au service d’un chant totalement en français. Ici les rêves et le réel se mélangent, les souvenirs de la vie partent à la rencontre des sorcières, des fées et des forêts pour un résultat aussi fascinant qu’efficace. L’album démarre donc en trombe avec Forêt et Copier Coller, deux titres remplis de fureur et d’une rage qui doit beaucoup au post-punk, si la guitare ressort c’est pourtant vers le piano que nos oreilles s’attirent pour la première tandis que c’est la basse complètement dingue de la seconde qui nous rend fou. Ces deux premiers morceaux jouent aussi comme des miroirs. Si l’énergie est identique, le premier est plus lettré tandis que l’autre se la joue presque instrumentale, avec deux mots qui se répètent dans les cris du chanteur. Trou Noir est une envolée anglo-saxonne bien sentie, mais la encore c’est les paroles qui nous attirent. Le titre est un conte suréaliste à lui seul, nous racontant l’histoire d’un trou noir et d’une transformation, d’une vie qui prend fin mais qui recommence ailleurs. Des histoires, Double Date With Death en a beaucoup à raconter et Fluorescent continue le chemin, prenant une bifurcation vers la pop et ses choeurs qu’on aime si facilement reprendre. Le titre est plus léger, plus lumineux mais va chercher sa profondeur dans les paroles qui appellent à la fuite autant qu’à s’accepter soi même, à briller face au monde.

On retrouve notre Magicien dans La Princesse de L’Au Delà, shoot d’adrénaline énervé qui nous fait réaliser une chose intéressante : comme Trou Noir, c’est dans les titres les plus courts (les deux font moins de deux minutes) que le groupe parle le plus, transformant en saynètes musicales ce que d’autres utiliseraient comme des transitions. Une vraie prise de risque qui maintient l’auditeur en éveil et qui le pousse à porter attention à tout ce qui compose la chanson, les ambiances autant que les paroles.
Nous atteignons enfin L’Au-Delà dans une courte traversée électronique. Nous voilà de l’autre côté du miroir face à Kodak, petit douceur mélancolique qui fut le premier single de l’album, le titre nous transportent, dans un monde une nouvelle fois différent. Chaque chanson se pare ainsi d’une couleur spécifique, comme un kaléidoscope qu’on retourne encore et encore pour trouver les facettes différentes d’un groupe surprenant. Le Jeu Funiculaire vient finir cet album en feu d’artifice, explosion lo-fi énergisante qui nous emportant sans aucun soucis dans de jolis pogos en concert.


L’Au Delà est donc une traversée rock, qui joue avec les sensations et les sentiments, qui offre à la fois cohérence et diversité pour un album qui ne se refuse rien, s’offrant des teintes surréalistes, psychédéliques et rêveuses dans des paroles à la fois cryptiques et poétiques qui donnent tout leur sel à ces huit titres. 2020 commence donc en fanfare avec ce second album de Double Date With Death.