Format Court #22 : Toh Imago, You Man, Park Hye Jin

Chez La Face B, on adore les EPs. On a donc décidé de leur accorder un rendez-vous rien qu’à eux dans lequel on vous présentera une sélection d’EPs sortis récemment. Ce nouvel épisode prend la direction des musiques électroniques puisqu’on vous parle des dernières sorties de Toh Imago, You Man &…

Toh Imago – Opalis FM

Il y a des artistes qui nous touchent plus que d’autres. Par leur démarche, mais aussi par leur origine. Pour l’auteur de ces lignes, enfant du Nord Pas de Calais lui aussi, la musique de Toh Imago trace un chemin parallèle à une existence pas si différente au final : la mine partout comme un souvenir bien vivant d’une époque inconnue, la côté d’opale comme lieu de villégiature presque obligatoire et même un célèbre, et petit, parc d’attractions traversé de part en part par un monorail. Oui forcément, à bien des égards, ces parcours sont communs et nous poussent à attirer une attention particulière à ce garçon au cœur charbon.

À peine un an après avoir pris pour ancrage l’histoire de son grand père pour en faire une expérience musicale dans Nord Noir, Toh Imago revient donc avec Opalis FM. Cinq titres qu’ils placent donc cette fois-ci dans ses propres souvenirs, nostalgie d’une enfance qu’il redécouvre à travers une cassette envoyée par ses parents pendant le confinement.

Comme à son habitude, le garçon créé des nappes de souvenirs, des morceaux évanescents et hypnotiques qu’ils trempent dans l’encre de ses souvenirs. Loin de céder à la sinistrose ambiante, exception faite de Crépuscule Dune, morceau qui joue le rôle de transition comme le bruit des vagues invisibles qui se fracassent sur les rochers la nuit, les morceaux qui composent Opalis FM sont à la fois plus lumineux et dansant. Baie D’Authie retranscrit ainsi la douce excitation de vacances qui démarre avec cette voix enfantine (qui n’est autre que celle de Toh Imago) nous invitant à prendre part au voyage , tandis que Opalis FM joue sur les changements de sons brutaux, comme une station radio que l’on change sur la route et qui nous fait basculer d’un morceau à l’autre.
Bagatelle Monorail et ses bruits tropicaux inspiré de l’ambiance du parc nous amène sur une piste de danse ou le temps n’a plus court, pour finir de manière explosive la folie ambiante qui se dégage de la puissante Hotel Regina.

Les souvenirs sont un terrai de jeu sans fin et Toh Imago l’a bien compris, Opalis FM est le prolongement d’un style qui s’affirme et s’affine, entre un ancrage dans le réel bien présent et un besoin de jouer avec les sensations et les humeurs pour offrir un ensemble réussit et cohérent. Une jolie réussite à la fois radicale et engageante.

You Man – Altered States

Hasard du calendrier, on reste accroché au Nord Pas de Calais pour ce second EP. Direction la calaifornia avec le retour tant attendu de You Man.

Si le duo garde toujours une vraie fraicheur et une spontanéité bienvenue dans un univers où tout est de plus en plus calculé, cela ne les empêche pas d’avoir une vraie ambition dans la musique qu’ils nous proposent. Ainsi un an après Tutti Va Bene, EP sombre et italien qui développé une musique toujours dansante mais bien plus brutale et violente dans ses attentions, Tepat et Giac ouvrent une nouvelle porte de leur esprit commun et nous présente Altered States, cette fois ci chez Eskimo Recordings.

Altered States, c’est les niveaux de conscience, ceux du rêve mais aussi de la réalité. You Man s’amuse de ses idées et proposent des morceaux qui nous poussent à la transe, jouant sur la longueur et des boucles qui se répètent. Alors on ferme les yeux et on se laisse envahir par cette musique qui vient frapper notre plexus, on laisse ses BPMs devenir les notre et on s’échappe, laissant notre corps sur place pour que notre esprit puisse profiter pleinement de la musique qu’ils nous offrent et des sensations qu’elle procure.

Ainsi, au fur et à mesure que l’EP progresse, on grimpe et l’on s’élève grâce à une collection de morceaux imparables, avec une grosse préférence pour l’excellente The Veil, jusqu’à atteindre l’illumination sur Mind Ballad.

Altered States est un EP qui fait du bien, un EP qui fait danser, un EP qui fait rêver et qui nous entraine vers des territoires qui seront toujours différents selon qui l’écoute. Car le grand talent de You Man, ce qui nous pousse à une véritable admiration, c’est qu’avec leur candeur, sans forcément y réfléchir, ces garçons touchent toujours nos esprits. Et ça c’est beau.

Park Hye Jin – How Can I

18 mois après la sortie de son très remarqué premier EP IF U WANT IT, Park Hye Jin nous délivre un second opus qui scelle définitivement son talent dans le curseur des artistes électroniques à suivre et à écouter de toute urgence.

En ces temps de distanciation sociale, il est difficile de s’imaginer danser devant un set de l’artiste et se laisser aller au son des ondes, pour autant c’est un projet qui s’écoute et nous entraine dans les situations les plus basiques, il suffit de voir le clip du premier morceau Like this, où l’artiste s’éclate seule sur le morceau dans les chambres d’hôtels qui parsemaient sa tournée, preuve irréfutable que la house porte parfaitement son nom, la teuf c’est aussi chez soi et dans n’importe quel apparat.

Dans cet EP on entend beaucoup plus l’artiste puisqu’elle pose sa voix sur quatre des morceaux de l’EP et encore plus sur le morceau éponyme du projet How Can I qui sonne comme une complainte pleine de nonchalance.

La douceur présente sur les trois premiers morceaux se heurte à au rythme soutenu et à l’ambiance bien sombre du morceau NO qui porte si bien son nom, l’artiste y répète sans cesse un « shut the fuck up », comment faire plus belle négation ? Peut être le meilleur moyen de se faire comprendre étant donné qu’un simple Non ne suffit hélas pas à calmer les ardeurs de certains.

Et que dire du morceau de clôture Beautiful qui est une montée progressive vers les hautes strates avec des notes aigües qui viennent contrebalancer le vrombissement des percussions qui nous entraînent dans une transe que seule la fin du morceau saura faire cesser.
Le morceau est aérien et plus qu’une fin c’est une porte qui s’ouvre sur le futur musical de l’artiste, autant dire que nous avons hate de voir ce que la sud coréenne pourra nous proposer, mais une chose est sûre, c’est que ce sera fait pour danser !