Une envie de musique folk, de se laisser bercer par le son de la guitare et d’une voix envoûtante ? Richard Allen nous ouvre les portes de son nouvel album, Just Songs, un recueil de morceaux enchanteurs, nourrit par le collectif et la sensibilité du musicien.
Deux ans après l’album Locust Tree Lane, Richard Allen, ce musicien né en Angleterre dans le Warwickshire et vivant à Amiens depuis son enfance, nous propose Just Songs. Alors que se cache-t-il derrière ce titre, à la fois énigmatique, et affichant une certaine humilité et simplicité dans la proposition ?
Just Songs s’apparente à un recueil de morceaux, un écrin cotonneux tapi de diverses créations composées sur plusieurs années. En effet certains morceaux ont été écrits il y a plus de 10 ans puis oubliés, d’autres, plus récents, sont nés dans différents contextes de la vie de l’artiste. Ce nouvel album c’est une manière de les partager en leur offrant un espace commun.
Il y a quelque chose de très doux dans ce projet, annoncé dès le premier titre de l’album, Black & Blue. Ce morceau met en lumière les influences folk de l’artiste. Une musique qui, baignée par l’évocation de sentiments, que ce soit dans le rythme lent des morceaux ou dans les paroles, résonne avec ce beat reconnaissable des années 70. Une certaine rêverie que l’on peut retrouver dans le style folk de Bert Jansch ou de Nick Drake.
La musique folk c’est aussi l’art de créer avec peu ; une voix, une guitare, et nous n’avons plus qu’à nous laisser porter par la mélodie. Pourtant Just Songs c’est aussi pour Richard Allen une manière d’ouvrir des portes, d’essayer des choses. Ayant l’habitude d’être accompagné de sa guitare sèche, cet artiste s’essaie cette fois-ci au banjo dans les morceaux Panting Bones et Waiting on Emma, ou encore au piano avec A Broken Star.
Au cœur de ce morceau composé après cette période étrange du Covid, l’accent est mis sur les émotions. Il nous partage avec A Broken Star une forme de solitude, Your mind is an empty home where memories lay alone, tout en parvenant à transformer ce sentiment douloureux, une fatalité, en quelque chose de léger et de doux. On retrouve également une sorte de « fin évanescente » comme dans Black & Blue. A Broken Star se dénoue par un bourdonnement d’insectes mystérieux, ou plutôt par un scintillement d’étoiles qui se dissipent dans le ciel. Le titre finit sur une seule note, discrète, la connexion avec un univers lointain est coupée.
Le clip du single a été réalisé avec son ami Bertrand Hazard. En effet si Just Songs permet à l’artiste de rechercher de nouvelles sonorités, il s’agit aussi et avant tout, d’un projet entre amis. Plusieurs musiciens déjà présents sur le projet Locust Tree Lane ont également travaillé sur ce dernier album, et apporté leur propre couleur. On peut citer Raphael Dumont, Mathieu Penot, Louis Morati, Bertrand Hazard, et notamment Kenny Ruby.
Beaucoup de morceaux ont été réalisés en collaboration avec Kenny Ruby, multi instrumentaliste français dont il est proche depuis quelques années. L’album est né du plaisir de faire de la musique, ensemble. Il a d’ailleurs été enregistré dans le studio de Kenny, sa maison de famille située dans un village méconnu nommé Dromesnil.
Aux textes poétiques, parfois mélancoliques ou métaphoriques, s’ajoute une référence à la nature. Celle-ci a une place importante pour Richard Allen. Il nous partageait dans une précédente interview ce besoin d’être à l’extérieur, simplement, et au quotidien. Une inspiration constante que l’on retrouve notamment dans certains titres de l’album, comme Seeds Grow.
L’évocation de la nature est une métaphore de ce que nous vivons, de sentiments intimes et amoureux par exemple. Thoughts come and seeds grow, is it enough to keep us afloat? Le début du morceau s’esquisse pareil à une balade, puis se délie sur des notes toutes en légèreté.
Que l’on soit anglophone ou non, nous n’avons d’ailleurs peut être pas besoin de tout comprendre. Il y a, dans la musique de Richard Allen, cette facilité à évoquer différentes images. Les sonorités ont le parfum de l’été, un air de vacances et de retrouvailles, le goût des matins qui commencent à midi et des douces soirées en plein air.
Richard Allen nous offre notamment de quoi rêver avec Take Off Your Name ou Sundays, et laisser notre esprit se perdre dans le paysage, bercer par le léger mouvement du train. Avec Sundays Richard Allen prend le temps ; d’abord simplement accompagné de sa guitare, la voix puis le piano colorent la mélodie par moments, et laissent place à l’imaginaire.
There’s An Island conclue cet album avec un sentiment d’apaisement. Là où les paroles traduisent des conflits amoureux, de violence et de guerre, la métaphore d’une île lointaine et parfaite s’apparente à une solution, une échappatoire poétique.
Bien qu’il ne s’agisse pas de la dernière piste de l’album, le morceau Things représente assez bien l’idée générale de l’album, ou du moins son essence. Sur un rythme qui s’accélère, des notes aiguës et le son de la flûte, on perçoit une sorte d’émulation joyeuse et volubile. La pochette de l’album, dessinée par Bertrand Hazard, en est une belle illustration. Une multitude de choses plus ou moins abstraites et colorées parviennent à trouver une place dans ce tableau, dans l’univers musical de l’artiste, pour former un tout.
Alors serait-il une tare de ne pas terminer ses phrases ? Richard Allen est parvenu à finir ses morceaux, tout en laissant les choses germer d’elles-mêmes. Just Songs c’est un champ du cœur et une porte ouverte sur un jardin ; un jardin que le musicien a laissé fleurir avec le temps, arrosé de plusieurs influences, de rencontres et d’envies.