La musique ça s’écoute, mais parfois ça se regarde aussi. Chaque semaine, La Face B vous sélectionne les clips qui ont fait vibrer ses yeux et ses oreilles. Tout de suite, on vous invite à découvrir la première partie de la sélection 254 des clips de la semaine.

YARD – Trevor
YARD c’est trois Irlandais qui créent un pont entre l’électro et le noise punk et ils le font bigrement bien ! Dans la lignée de groupes comme Fat Dog, YARD dessine sa propre version du bruit qui danse.
Sur scène, ils produisent de telles sensations par le son que les meilleures boissons énergisantes ne leur arrivent pas à la cheville. Leurs prestations jouent sur l’invisible par l’immersif, créant ainsi une boîte noire, un cercle fermé où cependant réside la même incroyable vibe en chacun·e de nous.
Trevor est le premier extrait du nouvel EP de YARD qu’on attend pour le mois de mai. Réalisé par Claire Schorman, le clip de Trevor est une entité très visuelle qui laisse l’imagination opérer. Tout démarre d’un point noir central qui s’étire et se transforme à volo.
Notre cerveau interprète : une horloge, une pupille, une goutte d’encre qui s’étend par capillarité puis une enceinte qui danse comme YARD fait se mouvoir nos corps.
Le son est ultra texturé. Trevor façonne une atmosphère dense à l’énergie brute. Ce morceau est un cocktail acide et enveloppant dont on se goinfrerait bien pour l’éternité.
Vivement mai pour les ultimes gourmandises !
Tropical F*ck Storm – Bloodsport
L’Australie nous offre des talents dont il est bien difficile de se passer. Entre Amyl & The Sniffers, King Gizzard and The Lizard Wizard, Hiatus Kaiyote ou encore Psychedelic Porn Crumpets, le groupe Tropical F*ck Storm sort lui aussi du lot et propose une vision bien singulière du rock et du punk en y ajoutant des touches de soleil.
Tropical F*ck Storm se compose des talentueux·ses Gareth Liddiard (chant/guitare), Fiona Kitschin (chant/basse), Erica Dunn (chant/guitare/claviers) et Lauren Hammel (batterie/machines). Iels reviennent avec un septième album, Fairyland Codex, qui sortira chez Fire Records pour nous enflammer aux portes de l’été.
Bloodsport en est le premier extrait. Ce qu’on va retenir de ce clip c’est son côté très ludique et artistique. Des collages s’empilent, la vidéo s’invite et des dessins enfantins s’éparpillent ça et là. Le clip de Bloodsport est à l’image de l’univers de Tropical F*ck Storm : coloré, désinvolte, cosmique et empreint des âmes des esthètes qui composent le groupe.
Bloodsport représente un hymne à la résistance. C’est comme si on montait sur un ring pour se prendre de plein fouet la réalité de notre monde actuel. Pas pour sombrer dans la morosité ambiante mais plutôt pour faire corps avec l’humanité dans ses plus jolies facettes. Lutter pour tout ça. Encore et encore.
Pour cela, Tropical F*ck Storm balance un morceau édulcoré, teinté d’un funk acidulé et régressif et qui combine tous les visages de la culture : la politique, la justice sociale, l’art, la musique. Comme beaucoup, iels donnent un sens à la culture dont le caractère crucial et sacré n’est plus à prouver.
Leo Blomov – As praias do Norte
C’est déjà l’été grâce à Leo Blomov. As praias do Norte (Les plages du Nord), premier extrait du prochain album Blomovinho annoncé le 23 mai, est une invitation au voyage, une incitation à la procrastination et une ode à l’insouciance.
« Ce titre qui chante les grands espaces, la liberté, la nature et le lâcher-prise est un hommage à la musique populaire brésilienne comme le reste de l’album » confie Leo Blomov.
En portugais du Brésil, Leo Blomov nous plonge dans une douce torpeur grâce à un morceau planant, au groove ralenti et aux sonorités vintage qui fleurent bon les années 70.
Le clip conçu par Alix Menoret et Yannick Le Vaillant nous transporte sur ces plages du nord, sur notre plage du nord. Le soleil qui caresse la peau, la fraicheur de l’eau, le vent dans les cheveux, les vacanciers heureux. L’effet super 8 et film amateur opèrent instantanément et nous ramènent à nos propres souvenirs de vacances, vécus ou rêvés.
Vivement l’été.
Frédéric Lo (feat Peter Doherty) – You look fresher now
Frédéric Lo, pour celles et ceux qui ne le connaissent pas, c’est le réalisateur musical et co-auteur derrière le Crèvecoeur de Daniel Darc. C’est également lui derrière quelques beaux disques d’Alain Chamfort, d’Alex Beaupain, ou encore de Stéphane Eicher. On en dit pas plus, mais la liste est longue. Toujours est-il que le principal intéressé a sorti son quatrième album solo ce 21 mars dernier : L’outrebleu. Où il est beaucoup question de deuil. Voix marquée, souvenirs de présences disparues comme sur You look fresher now, écrite en hommage à Marc-Antoine Moreau – directeur artistique chez Universal et ami de longue date de Frédéric Lo.
On y trouve quelque chose d’une errance à travers la ville dans son clip réalisé par Gautier&Leduc. Le chanteur, silhouette élégante et isolée se tient debout au milieu de la foule qui circule. Plus loin on l’aperçoit qui répète des gestes sans doute quotidiens face au miroir. Quotidiens, mais dont l’image semble irradiée par la perte sans jamais que celle-ci soit montrée. C’est tout le paradoxe du deuil : la tristesse vient de ce qui n’est plus là.
Tout du long, on écoute la voix de Frédéric Lo, son texte aux allures d’éloge funèbre, puis celle de Peter Doherty, invité sur le titre pour en assurer les choeurs. On s’abandonne à cette musique, qui a toutefois, comme il le confiait à Magic tout récemment, tiré de la pop anglaise sa capacité à « être triste et enjouée en même temps ». Alors on plonge. C’est cathartique.
Tuerie – Lundi
Après avoir tout fracassé avec Blue Gospel, puis retourné la scène avec Papillon Monarque, le rappeur boulonnais Tuerie semble bien décidé à poursuivre sur cette lancée. Près de deux ans après son dernier projet, il revient en force avec Les Amants Terribles. Pour marquer le coup, il dévoile Lundi, premier single de l’album, accompagné de son clip.
Une lumière tamisée, un générique vintage, et un Tuerie qui prend les commandes d’un talk-show imaginaire. Le ton est posé, mêlant humour et autodérision : son prochain projet parlera d’amour. Mais une inconnue persiste, quel sera son terrain de jeu musical ? Connu pour sa soif d’expérimentations, celui qui fut autrefois Tuerie Balboa pourrait bien, une fois encore, brouiller les pistes et surprendre son public.
Quelques jours après son teaser, Tuerie passe à l’action avec Lundi. Un morceau qui fait écho à son projet et s’inscrit dans une direction claire. Entouré des Chemise Boy (groupe fictif, NDLR), il s’aventure dans un R&B finement ciselé, mettant en avant une voix plus aérienne et chantante. Avec du recul, ce choix sonne comme une évidence : parler d’amour à travers un style qu’il chérit et qu’il manie avec brio. Côté paroles, il ne prend pas de gants.
Il replonge dans des souvenirs brûlants, décrivant avec une sincérité crue ses instants les plus charnels. Mais derrière cette franchise, il conserve ce talent unique pour mêler poésie et autodérision, un équilibre qui fait sourire autant qu’il résonne.
Avec Les Amants Terribles, Tuerie fait un retour en force et pose les premières pierres d’un premier album très attendu. Il met en avant une facette plus chantée de son art, semant le doute sur la direction musicale qu’il choisira. Mais une chose est sûre : le 18 avril, il faudra être au rendez-vous pour découvrir la pépite qu’il nous prépare.
Japanese Breakfast – Picture Window
Une simple fenêtre, en la contemplant, reflète votre image tout en esquissant, de l’autre côté de la vitre, un espace plus vaste et essentiel. Elle devient un symbole, une ouverture vers un ailleurs, une projection de soi vers un monde extérieur insaisissable.
Les récits de doutes et de rejets amoureux abondent dans la musique. Nous en avons entendu des dizaines, des centaines. Pourtant, lorsqu’un tel message est porté par Japanese Breakfast, il résonne avec une force particulière. Pourquoi ? Une approche aussi intime que cinématographique, une sensibilité qui évite le pathos, et une production qui magnifie chaque mot, chaque silence.
Sorti cette semaine, le dernier album du groupe, For Melancholy Brunettes (& Sad Women), s’impose dès la première écoute comme une œuvre sincère et brillamment orchestrée. Et parmi les trésors qu’il recèle, Picture Window se distingue par son ambiance douce-amère, à la fois poignante et enivrante.
Sous ses harmonies, ce titre capture une relation marquée par l’angoisse et le doute, dépeignant l’écart entre deux êtres : l’un, hanté par la crainte du temps qui passe et de la perte imminente, l’autre, avançant sans se retourner. C’est un récit sur l’éphémère, sur l’incapacité à retenir ce qui nous échappe.
Parfois, une chanson agit comme une brise légère, effleurant le cœur avant de disparaître. D’autres fois, elle s’attache à nous, nous accompagne longtemps après la dernière note. Picture Window fait partie de ces morceaux qui nous laissent face à nous-mêmes, observant nos propres reflets.
Smerz – You got time and I got money
Après Thousands lies, Smerz nous livre un deuxième titre pour l’annonce de la sortie de leur deuxième album Big city life sur le label danois Escho (Astrid Sonne, Peter Peter…). Ce sera pour le 23 mai. You got time and I got money est une ballade languissante et langoureuse qui fait la part belle à l’indolence et l’insouciance. La voix de Catharina Stoltenberg joue à l’équilibriste, avançant comme une funambule sur des lignes musicales aux reflets désormais pop. Celle d’Henriette Motzfeldtde en second plan, lui apporte assise et stabilité. Les arrangements moins électro s’appuient largement sur des instruments organiques. Ligne de basse nonchalante, batterie pour accentuer le tempo lancinant de la chanson et des cordes pour une romance que l’on sent pleinement assumée. Le laisser-aller est devenu aujourd’hui une valeur cotée.
Orchestré par Benjamin Barron et Bror August Vestbø (et épaulés par les deux musiciennes de Smerz), la vidéo qui illustre You got time and I got money a l’apparence d’un album souvenir évoquant des moments agréablement futiles passés dans l’Ouest américain, entre Los Angeles et Las Vegas.
Los Fanfarons feat. Le Grand Mal – Hikikomori
Un mois après la mémorable soirée raclette d’Azul Fellawen, Los Fanfarons revient pour faire vibrer nos tympans avec une nouvelle chanson Hikikomori écrite en compagnie de Julia Lopez aka Le Grand Mal. Hikikomori est le nom que l’on met sur un phénomène de retrait volontaire de la vie sociale, solitude volontaire. Apparu au Japon en réaction aux pressions sociétales prégnantes, il touche désormais au travers d’une chanson nos DJ-Setters augmentés préférés, les Los Fanfarons. Boucles électroniques hypnotiques, refrain addictif, tout se met en place pour relater nos enfermements numériques qui rendent perméables les frontières entre réel et virtuel.
Mais pas d’apitoiements ou de leçons données, Hikikomori version Los Fanfarons se vit comme un sain exutoire des frustrations que la société fait naître. Au dynamisme de Cléa Vincent et de Romain Sanderre (Jérôme Violent) répond la vitalité exubérante et contagieuse de l’artiste marseillaise Le Grand Mal. Un triple effet feelgood qui nous donne envie de nous extraire de nos tanières digitales pour aller danser et se réjouir du printemps tant attendu. Les cerisiers sont en fleurs, sortons les admirer !
Pour ceux qui souhaite toutefois encore un peu s’enfermer, vous pourrez sortir retrouver Los Fanfarons au Pop-Up du Label le jeudi 3 avril, accompagné par Roberto Cicogna, Lola Sauvageot et Gaël Etienne, dans le cadre du Luna In Pesci.
Roman Ausen – After Midnight
Presqu’un an s’est écoulé depuis la sortie de son EP Night Tracks, soit un an depuis notre énorme crush pour Roman Ausen. Il dévoile cette semaine un nouveau single, After Midnight, et c’est une belle surprise : il pousse la basse et les sonorités discos à fond, délaissant légèrement les influences rock pour un son plus groovy et chaleureux. Le morceau transpire la moiteur de la nuit, porté par des synthés eighties, un solo de saxo envoûtant qui nous projette tout droit au Studio 54, et la voix de Roman Ausen qui, une fois encore, évoque à s’y méprendre celle de Matthew Bellamy (Muse).
La nuit, d’ailleurs, est un fil rouge du projet de Roman Ausen, et comme son titre le laisse deviner, After Midnight ne fait pas exception. Et puisqu’on ne change pas une DA qui gagne, le clip prolonge l’esthétique léchée de Night Tracks. Velours pourpre, lumière tamisée et atmosphère lynchéenne, tout est orchestré pour cultiver cette ambiance à la fois super classe et mystérieuse. Derrière la caméra, Roman renouvelle sa collaboration avec Ben Cabirol, dont la signature visuelle – plans rapprochés et colorimétrie veloutée – apporte à l’ensemble une patine sixties hyper hypnotique.
Un nouvel extrait aussi abouti que captivant : vivement la suite !
Riva Sinistra – Plus jamais le Soleil
Enfin, ils reviennent cinq mois après la sortie de leur dernier single Trouble ! À l’aube de leur show à la Mécanique Ondulatoire ce lundi 24 mars, Riva Sinistra redéploie ses ailes en ce début de printemps.
Plus Jamais Le Soleil narre l’épopée d’une personne aux péripéties tumultueuses qui chavirent vers la tristesse. On retrouve ce ce vagabond agité qui se cache derrière ce masque « soleil » dans les quartiers parisiens à travers le clip aux images filtrées rétros. Bien qu’ayant une attitude amusante, il nous cache sa face sombre pour, semble-t-il, retrouver l’équilibre dans sa vie mais aussi sur les marches du parvis de la Bibliothèque François Mitterand.
Décalé sur la forme, Plus Jamais le Soleil n’est pas un titre chanté en français excepté sur le refrain. Riva Sinastra s’approche un peu de la langue de Molière. Mais ici, le groupe revigore son style à faire pâlir la créativité peu productive d’Alex Turner et Miles Kane. On apprécie ce rythme soutenu de la batterie qui apporte une touche rock’n’roll et nerveuse à leur œuvre.
Préparez vos pas de danse pour demain soir alors !
EKKSTACY – For ever
Le très jeune artiste canadien nous embarque sur une ballade acoustique touchante. On le savait triste dans l’âme depuis ses débuts, il y impose désormais plus de retenue à ses émotions. Son nouveau titre for forever pourrait être un classique de Lord Huron figurant dans la série 13 Reasons To Why. Le clip fait tourner en boucle deux vagabonds (ou fugitifs) perdus dans leur âme. On retrouve ce morceau sur son dernier album NEGATIVE si vous souhaitez noyer davantage votre chagrin.