Rencontre avec Crack Cloud

Dans le monde effervescent de la musique indépendante, Crack Cloud s’impose comme un groupe audacieux et innovant, captivant l’attention des mélomanes avec leur son unique et leur approche artistique authentique. En tournée pour promouvoir Red Mile leur dernier album, ils ont fait une halte à Paris, une ville qui a toujours occupé une place spéciale dans leur cœur. Dans cette interview, nous avons eu l’opportunité de discuter avec Bryce Cloghesy, Aleem Khan et Will Choy, qui nous ont parlé de leur parcours musical, de l’évolution de leur son, et des émotions qu’ils cherchent à transmettre à travers leur art. Entre réflexions sur leur processus créatif, les défis de l’industrie musicale et leur passion pour la musique, cet échange nous offre un aperçu précieux de l’âme de Crack Cloud. Rejoignez-nous pour plonger dans leur univers et découvrir ce qui anime ce groupe talentueux.

La Face B : Bonjour Bryce, Aleem et Will ! Comment vous sentez-vous aujourd’hui? Prêt pour le concert ?

Bryce Cloghesy : Nous allons bien ! Cela fait quelques années que nous n’avons pas joué à Paris, et nous sommes vraiment impatients de ce soir. L’atmosphère ici est toujours vibrante et les gens sont fantastiques. C’est un vrai plaisir pour nous de partager notre musique.

Aleem Khan : Absolument ! Historiquement, Paris a toujours été spécial pour nous, et nous sommes très reconnaissants du soutien que nous avons reçu pour le disque. C’est excitant d’être ici et de jouer notre album pour la première fois dans cette ville incroyable.

Bryce : En particulier, partager une partie de notre nouvel album avec tout le monde ce soir !

La Face B : C’est vrai, vous avez lancé la tournée avec le nouvel album il n’y a pas longtemps.

Bryce : Oui, ce soir c’est notre quatrième concert, et il y a définitivement une énergie fraîche dans l’air. Cela fait vraiment du bien.

La Face B : Votre dernier album présente une gamme diversifiée de sons. Comment décririez-vous l’évolution de votre précédent album à celui-ci ?

Aleem : C’est un voyage créatif différent. Chaque artiste traverse des cycles de créativité, et parfois on en a juste marre de répéter la même formule. En tant qu’êtres humains, nous passons tous par ces phases dans divers aspects de la vie. Nous voulons nous défier et explorer de nouvelles avenues créatives. C’est comme cela que cet album est né.

La Face B : Pour moi, votre musique semble spontanée et brute. Quel est votre processus créatif ?

Bryce : En regardant nos albums précédents, il y a un fil conducteur de créativité qui les relie. Il y a un certain conceptualisme et une passion pour la musique qui traversent tout cela—un équilibre entre le bruit, la dureté et la douceur. Cette fois, nous étions désireux d’expérimenter et d’improviser, laissant la musique se dérouler organiquement sans plan strict. Le nouvel album sonne différemment, mais c’est simplement un reflet de notre situation actuelle dans nos vies. Le processus créatif est comme de la magie ; nous nous rassemblons, créons quelque chose, et cela se matérialise. Maintenant que nous jouons en live, les chansons ont encore évolué, et cette évolution est excitante pour nous. L’esprit de Crack Cloud est toujours présent, même si le son change.

La Face B : Je sens que votre public se connecte profondément avec votre musique, touchant à la guérison et aux émotions brutes. Est-ce quelque chose dont vous êtes conscient en jouant ou en créant ?

Aleem : Les émotions sont toujours en flux, changeant d’un instant à l’autre. Il ne s’agit pas seulement d’infuser des émotions dans notre musique ; c’est aussi une réflexion sur l’expérience humaine dans son ensemble. Nous partageons tous cette expérience. Enregistrer chez la famille de Bryce à Joshua Tree, entourés du paysage désolé, nous a offert une clarté après des années de tournée dans des environnements urbains. Cet environnement minimaliste nous a permis de voir nos émotions plus clairement.

Bryce : Nous trouver dans cet environnement spacieux et isolé était en effet une forme de guérison pour nous. Créer de l’art est un processus d’aller-retour ; nous faisons quelque chose, cela se transforme, puis cela nous renvoie quelque chose. C’est une interaction dynamique. C’est merveilleux de voir le public résonner avec ces émotions. Au fond, il s’agit de liberté d’expression—nous visons à être aussi honnêtes et bruts que possible.

La Face B : Et comment votre logo se connecte-t-il à cette idée ? J’ai découvert que le point d’exclamation est lié à une campagne des années 2000 pour des publicités d’enfants préoccupés.

Bryce : Oui ! En grandissant, nous voyions ces annonces avertissant les enfants de divers dangers, et elles se terminaient toujours par ce point d’exclamation. C’est fascinant de voir comment ce symbole a fini par représenter notre groupe. Je ne suis pas sûr de qui a eu l’idée—peut-être Zack ?

Will Choy : C’était dans le domaine public, et le message résonnait avec nous. C’est comme si ces annonces visaient à prévenir certains comportements mais introduisaient involontairement les enfants à ces mêmes choses.
Bryce : Il y a définitivement une part d’identité canadienne là-dedans, notamment de Calgary. Le point d’exclamation symbolise une déclaration forte dans la langue, ce qui, je pense, s’aligne magnifiquement avec notre musique.

La Face B : Cela résonne parfaitement avec votre son. Il y a une essence chaotique mais harmonieuse dans votre musique, et je me demande si cela reflète votre énergie créative en composant. Est-ce chaotique ou paisible ?

Bryce : Cela dépend vraiment du moment. Chaque jour apporte une énergie différente.

Will : Les chansons peuvent émerger de nombreuses façons—parfois à travers des expériences partagées, d’autres fois par des collaborations. C’est une question de vulnérabilité et d’ouverture dans nos interactions. Je dirais qu’il y a définitivement un élément de chaos organisé.

Aleem, Bryce, et Will : Chaos organisé !
Bryce : La croissance commence souvent par le chaos, et au fur et à mesure que nous évoluons, nous recherchons l’harmonie et la stabilité dans nos vies. Comme beaucoup, nous essayons de créer un équilibre durable tout en naviguant sur ce chemin imprévisible de la musique. C’est un voyage continu.

La Face B : Quel artiste ou album récent vous a influencé, notamment dans le contexte de ce nouvel album ou de votre tournée ?

Will : Je peux parler d’une piste de l’album—“Death of a Ladysman” de Leonard Cohen a été une inspiration significative pour “Little Billy.”

Aleem : Pour moi, c’est “Ghost in the Machine” de The Police. C’est un classique.

La Face B : C’est un album fantastique !

Bryce : L’été dernier, lors de la tournée, “The Good Son” de Nick Cave and the Bad Seeds m’a profondément touché. Cela a marqué un passage des débuts du post-punk à de belles ballades et des arrangements orchestraux, ce qui résonne vraiment avec moi.

La Face B : Aimez-vous ce que vous faites, et pensez-vous que votre moi plus jeune serait fier ? Que diriez-vous à votre enfant intérieur au sujet de vos réalisations ?

Aleem : Mon moi de 12 ans serait incrédule. C’est un privilège incroyable, mais je ne recommanderais pas ce chemin à tout le monde.
La Face B : Pourquoi pas ?

Aleem : C’est un conte d’avertissement. L’industrie musicale est l’une des plus difficiles, remplie de défis. Si vous êtes déterminé à vous exprimer malgré les conflits potentiels concernant l’art et la musique, alors allez-y.

Will : J’ai commencé à tourner à 18 ans, et ces premières années ont façonné qui je suis aujourd’hui. C’est un roller-coaster—il y a des hauts et des bas. C’est gratifiant mais nécessite beaucoup de force mentale. Vous tissez des liens incroyables avec vos camarades de groupe, mais apprendre à coexister peut être un défi. Nous aspirons souvent à la stabilité, mais quand nous sommes chez nous, nous aspirons à nouveau à la route. C’est doux-amer.

Bryce : Comme diraient les Blues Brothers, “Nous avons une mission de Dieu.” À 12 ans, je me souviens d’avoir été captivé par une box set de Led Zeppelin. Vingt ans plus tard, nous voici à Paris, et c’est incroyable. Comme Aleem l’a mentionné, ce n’est pas pour tout le monde, mais si vous en êtes passionné et que vous sentez que vous ne pouvez rien faire d’autre, c’est cela qui définit un vrai artiste. Personnellement, je me sens destiné à faire cela. C’est un chemin difficile mais gratifiant, rempli d’émotions et de connexions puissantes. Allez-y avec prudence, cependant.

La Face B : Que pensez-vous de la scène musicale actuelle ? Est-ce un espace dans lequel vous vous sentez à l’aise, ou préférez-vous rester au sein de votre groupe ?

Bryce : Quelle scène évoquez-vous ? Globale, ou…?
La Face B : Oui, globalement.

Aleem : La musique est un amour universel, et c’est incroyable comment les gens peuvent créer et partager des émotions sans même se connaître. Il y a quelque chose de cathartique dans la créativité collective, et il semble qu’il y a un vrai désir d’authenticité dans la scène musicale d’aujourd’hui. Beaucoup de nouveaux artistes, surtout des femmes, portent des voix qui étaient souvent mises de côté dans le passé.

Will : Je pense que cette volonté de partage et de collaboration est essentielle.

Bryce : Je suis d’accord avec cela. Quand nous commençons à avoir une conversation sur l’art, il devient un langage universel. Ce qui nous relie, c’est une compréhension de l’humanité—l’essence même de notre créativité.

Will : Ces nouvelles générations sont passionnées par la musique et c’est inspirant.

Aleem : À l’avenir, j’aimerais voir des artistes se rassembler et travailler ensemble, ce qui peut nous aider à évoluer et à transcender les étiquettes que nous nous imposons. La musique est trop précieuse pour être divisée.

La Face B : Comment soutenez-vous les artistes, surtout ceux qui sont en dehors des grands labels ?

Bryce : Nous avons tous eu cette conversation. Il y a tellement d’artistes indépendants qui font un travail incroyable et, à l’époque des médias sociaux, il est facile d’ignorer les petites choses. Mais je crois fermement à soutenir directement les artistes.

Will : Je fais des playlists sur Spotify et plonge dans la musique locale. C’est fascinant de voir combien de talents existent.

Aleem : J’achète encore des vinyles, surtout ceux des labels indépendants. Il est crucial de continuer à soutenir les plus petits labels.

La Face B : Avez-vous un dernier mot pour vos fans ?

Bryce : Nous vous aimons, et nous espérons que vous trouverez quelque chose dans notre musique qui vous touche. Merci de faire partie de ce voyage avec nous !

Crédit photos : Céline Non

English Version

La Face B : Hi guys! So, how are you feeling today, and how are you feeling about the gig?

Bryce Cloghesy : We’re feeling great! It’s been a few years since we last played in Paris, and we’re really looking forward to tonight. The atmosphere here is always vibrant, and the people are fantastic. It’s a true pleasure for us to share our music.

Aleem Khan : Absolutely! Historically, Paris has always been special for us, and we’re very thankful for the support we’ve received for the record. It’s exciting to be here and perform our album for the first time in this amazing city.

Bryce : Especially sharing some of our new album with everyone tonight!

La Face B : Right, you kicked off the tour with the new album not too long ago.

Bryce : Yes, tonight is our fourth show, and there’s definitely a fresh energy in the air. It feels really good.

La Face B : Your latest album showcases a diverse range of sounds. How would you describe the evolution from your previous album to this one?

Aleem : It’s a creatively different journey. Every artist experiences cycles of creativity, and sometimes you just get tired of repeating the same formula. As people, we all go through these phases in various aspects of life. We want to challenge ourselves and explore new creative avenues. That’s how this album came to be.

La Face B : To me, your music feels spontaneous and raw. What’s your creative process like?

Bryce : Looking back at our earlier albums, there’s a consistent thread of creativity that connects them. There’s a certain conceptualism and passion for music that runs through it all—balancing noise, harshness, and softness. This time, we were eager to experiment and improvise, allowing the music to unfold organically without a strict plan. The new album does sound different, but that’s simply a reflection of where we are in our lives. The creative process is like magic; we come together, create something, and then it materializes. Now that we’re performing live, the songs have transformed again, and that evolution is exciting for us. The spirit of Crack Cloud is always present, even as the sound changes.

La Face B : I sense that your audience connects deeply with your music, touching on healing and raw emotions. Is this something you’re aware of when performing or creating?

Aleem : Emotions are always in flux, shifting from moment to moment. It’s not just about infusing emotions into our music; it’s about reflecting the human experience as a whole. We all share that experience. Recording at Bryce’s family home in Joshua Tree, surrounded by the desolate landscape, offered us clarity after years of touring in urban environments. That minimalist setting allowed us to see our emotions more clearly.

Bryce : Finding ourselves in that spacious, isolated environment was indeed a form of healing for us. Creating art is this back-and-forth process; we make something, it transforms, and then it reflects back on us. It’s a dynamic interaction. It’s wonderful to see the audience resonate with those emotions. At the core, it’s about freedom of expression—we aim to be as honest and raw as possible.

La Face B : And how does your logo connect with this idea? I found out that the exclamation mark relates to a campaign from the 2000s for concerned children’s advertisers.

Bryce : Yes! Growing up, we’d see those ads warning kids about various dangers, and they always ended with that exclamation mark. It’s fascinating how that symbol found its way to represent our band. I’m not sure whose idea it was—maybe Zack?

Will Choy : It was in the public domain, and the message resonated with us. It’s like those ads aimed to prevent certain behaviors but inadvertently introduced kids to those very things.

Bryce : There’s definitely some Canadian identity in that, particularly from Calgary. The exclamation mark symbolizes a strong statement in language, which I think aligns beautifully with our music.

La Face B : It resonates perfectly with your sound. There’s a chaotic yet harmonious essence to your music, and I wonder if that reflects your creative energy when composing. Is it chaotic or peaceful?

Bryce : It really depends on the moment. Each day brings a different energy.

Will : Songs can emerge in many ways—sometimes through shared experiences, and other times from collaborations. It’s about being vulnerable and open in our interactions. I’d say there’s definitely an element of organized chaos.

Aleem, Bryce, and Will : Organized chaos!

Bryce : Growth often starts from chaos, and as we evolve, we seek harmony and stability in our lives. Like many, we’re trying to create a sustainable balance while navigating this unpredictable path of music. It’s a continuous journey.

La Face B : What recent artist or album has influenced you, particularly in the context of this new album or your tour?

Will : I can speak to one track on the album—“Death of a Ladysman” by Leonard Cohen was a significant inspiration for “Little Billy.”

Aleem : For me, it’s “Ghost in the Machine” by The Police. It’s a classic.

La Face B : That’s a fantastic album!

Bryce : Last summer, while touring, “The Good Son” by Nick Cave and the Bad Seeds struck a chord with me. It marked a shift from early post-punk to beautiful ballads and orchestral arrangements, which really resonates with me.

La Face B : Are you enjoying what you do, and do you think your younger self would be proud? What would you say to your inner child about your accomplishments?

Aleem : My 12-year-old self would be in disbelief. This is an incredible privilege, but I wouldn’t recommend this path to everyone.

La Face B : Why not?

Aleem : It’s a cautionary tale. The music industry is one of the toughest out there, rife with challenges. If you’re determined to put yourself out there despite potential conflicts over art and music, then go for it.

Will : I started touring at 18, and those early years shaped who I am today. It’s a rollercoaster—there are ups and downs. It’s rewarding but requires a lot of mental strength. You build incredible bonds with your bandmates, but learning to coexist can be challenging. We often crave stability, but when we’re home, we yearn for the road again. It’s bittersweet.

Bryce : As the Blues Brothers would say, “We’re on a mission from God.” At 12, I remember being captivated by a Led Zeppelin box set. Fast forward 20 years, and here we are in Paris, and it feels incredible. Like Aleem mentioned, it’s not for everyone, but if you’re passionate about it and feel you can’t do anything else, that’s what defines a true artist. Personally, I feel destined to do this. It’s a challenging but rewarding journey filled with powerful emotions and connections. Proceed with caution, though.

La Face B : How do you feel about the current music scene? Is it a space you feel comfortable in, or do you prefer to stay within your band?

Bryce : Which scene are you referring to? Global, or…?

La Face B : Yes, globally.

Aleem : Music is a universal love, and it’s amazing how people can create and share it. Coming from Calgary’s local music scene, we played in some rough bars, but that environment has changed. It’s different for the younger generation now.

Will : It’s a tricky question because every scene varies. Personally, I don’t engage much at home, but I appreciate seeing others continue the legacy. It’s always evolving—some moments are great and supportive, others less so. But that’s life, I suppose.

Bryce : Musically, I feel there are more creative individuals now than ever before. People have greater access to making music, but from a community and industry perspective, things aren’t great. Streaming has fundamentally changed how we value artists. There’s a lot of talent out there, especially in Europe, where there’s more support for artists compared to the U.S. I’ve noticed several century-old radio stations in Canada closing this summer due to lack of funding, which is concerning. It’s becoming increasingly difficult for talented young artists to find stability and support.

Aleem : To add to Bryce’s point, the best singers and musicians are often stuck in their bedrooms, unknown because they lack representation. Music should transcend the industry’s constraints—it’s about the freedom to express oneself.

Will : Zach recently mentioned that scenes, especially in punk culture, are driven by youth. By the time you figure out how to contribute, you might be too old to be part of it. While scenes can seem shallow, their transient nature is beautiful and necessary for evolution.

La Face B : Do you still buy CDs? When you discover a new artist, do you purchase their music?

Bryce : I’d be more inclined to buy vinyl because I have a record player and appreciate the sentimental value, but I don’t collect as much as I used to. Ironically, I was more of a vinyl enthusiast at 20, despite having little money. Now, my priorities have shifted—I’m spending money on diapers! Once you become a creator, it’s easy to overlook the little things. But I do believe in supporting artists directly.

Will : I’ve been making playlists on Spotify and diving into local music. It’s fascinating to see how many talented people are out there.

Aleem : I still buy vinyl, especially from independent labels. It’s crucial to keep supporting smaller labels.

La Face B : Any last words for your fans?

Bryce : We love you, and we hope you find something in our music that resonates with you. Thank you for being part of this journey with us!